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excepté dans l'église! Nous avons entendu le curé d'une ville importante, très-respectable, comme prêtre, se montrer même scandalisé de cette expression d'art chrétien, et déclarer qu'il no connaissait d'autre art que celui de faire des chrétiens! Ce n'était ici que l'expression un peu crue d'une idée trop générale. Citons un exemple borné, mais significatif, de cette déplorable absence du sentiment de l'art chrétien. On a moulé depuis plusieurs années quelques-unes des plus belles madones de nos belles églises gothiques, entre autres celle de Saint-Denis', qui a été transportée à Saint-Germain-des-Prés ; ces modèles exquis de la beauté chrétienne se trouvent chez la plupart des marchands où le clergé et les maisons religieuses, les frères des écoles chrétiennes, etc., se fournissent des images qui leur sont nécessaires; il semble que leur choix pourrait se fixer sur ces monumens de l'antique foi, que le zèle de quelques jeunes artistes a mis à leur portée. Eh bien! il n'en est rien; ils sont unanimes pour préférer cette horrible Vierge du dernier siècle, de Bouchardon, que l'on retrouve dans toutes les écoles, dans tous les couvens, dans tous les presbytères, cette Vierge au front étroit, à l'air insignifiant et commun, aux mains niaisement étendues, figure sans grâce et sans dignité, qu'on dirait inventée à dessein pour discréditer le plus admirable sujet que la religion offre à l'art. Que penser ensuite, pour ne pas étendre nos observations hors de Paris, de cette chapelle SaintMarcel, récemment érigée dans Notre-Dame, monstrueuse parodie de cette architecture gothique dont on avait le plus beau modèle dans l'église même, et où, par un raffinement exquis de barbarie, on a été peinturlurer en marbrures et dorer une espèce d'arcade qui semble avoir la prétention d'être ogivale? Est-il possible que de pareilles choses se passent en 1837, dans

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Puisque nous nommons cette statue célèbre, il nous est impossible de ne pas signaler le vandalisme qui fait reléguer, dans une obscure sacristie, ce chef-d'œuvre de la sculpture chrétienne, tandis que dans la même église, à la chapelle de la sainte Vierge, on vient d'intrôniser un pitoyable plâtre moderne, digne du reste du fronton classique qui l'encadre en contradiction avec tout le reste de l'église, digne encore des affreuses fresques en grisaille qui la flanquent des deux côtés.

Dans le transept septentrional.

la métropole de Paris et de la France? Et que sera-ce encore, s'il ne s'élève pas du sein du clergé une seule voix pour protester contre cet incroyable projet qu'on attribue au vandalisme municipal, qui tend à transformer en sacristie la chapelle propre de la Sainte-Vierge, située au chevet de la basilique, en violant ainsi l'éternelle règle de l'architectonique chrétienne, telle que toutes nos cathédrales nous la révèlent, en remplaçant par un lieu d'habillement et de comptabilité, ce sanctuaire suprême, ce dernier refuge de la prière, que la tendre piété de nos pères avait toujours réservé, au point culminant de l'église, au sommet de la croix, pour cette vierge-mère, dont Notre-Dame est un des plus beaux temples?

› Enfin, quand finira-t-on de voir s'élever, avec l'approbation du clergé ou par ses soins directs, des édifices comme NotreDame-de-Lorette, l'église du Gros-Caillou, la chapelle de la rue de Sèvres, où repose le corps de saint Vincent de Paule, indignes masures, dont les formes lourdes et étriquées à la fois ne sont conformes qu'au genre classique et païen, contemporain de la réforme; tandis que par la contradiction la plus bizarre, les protestans construisent dans Paris une assez jolie chapelle gothique sur le patron inventé et consacré par le catholicisme.» L'auteur, pour confirmer ses opinions, cite ensuite plusieurs églises gothiques qui s'élèvent en ce moment en Angleterre, en Ecosse, en Irlande, en Bavière; puis il passe à quelques objections que l'on pourrait faire contre ses idées.

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Qu'on ne nous objecte pas le surcroît de dépenses : mauvaise raison, ou plutôt excuse mensongère, inventée par la routine et l'ignorance des architectes classiques. Il ne s'agit pas, dans l'état actuel, d'élever de ces vastes cathédrales, où presque chaque pierre est un monument de patience et de génie, œuvres gigantesques, que la foi et le désintéressement peuvent seuls enfanter: il s'agit tout simplement de réparer, de sauver, de guérir les blessures de celles qui existent, et puis de bâtir çà et là quelques églises de paroisse petites et simples. Or, des calculs désintéressés ont prouvé qu'il n'en coûterait pas plus (peut-être moins) pour adopter le système ogival ou cintré, sans abon

Rue d'Aguesscan-Saint-Honoré.

dance d'ornemens, que pour écraser le sol des masses opaques et percées de parallelogrammes que l'on construit de nos jours. Si nous sommes plus pauvres que les Anglais, nous sommes, ie pense, plus riches que les malheureux paysans d'Irlande. Cependant ces pauvres serfs, tout épuisés qu'ils sont par la famine, les rentes qu'il leur faut payer à leurs seigneurs absens du pays, et les dîmes que leur extorque le clergé anglican, ces ilotes, qui n'ont que bien rarement du pain à manger avec leurs pommes-de-terre, ces martyrs perpétuels, obligés, après avoir gorgé de leurs dépouilles un clergé étranger, de nourrir encore celui qui les console dans leur misère, et de faire une liste civile à O'Connell, ce roi de la parole, qui les conduit à la liberté; ces Irlandais bâtissent eux aussi des églises pour abriter leur foi, qui ose enfin se montrer au grand jour; et toutes ces églises sont gothiques. ' !

» Mais on nous objectera peut-être que le clergé n'est plus, comme autrefois, le maître absolu de tous les édifices religieux; que, par une inconséquence ridicule et illégale, mais passée en usage dans nos mœurs administratives, il n'a plus le droit exclusif d'accepter ou de rejeter les œuvres d'art qu'on y place, les travaux qu'on y fait; qu'il ne lui est pas libre de s'opposer aux déprédations qu'y commettent les architectes municipaux, ni d'empêcher le gouvernement de s'habituer à regarder les églises comme autant de galeries où il lui est loisible d'exposer à demeure les tableaux soit-disant religieux, que la protection d'un député ou le caprice d'un employé subalterne aura fait acheter. Cela n'est que trop vrai; mais il n'en est pas moins positif que le clergé fait exécuter une foule de travaux importans pour son propre compte ; c'est sur ceux-là que roulent nos observations précédentes. Il y a, en outre, beaucoup de petites communes, en France qui, pour devenir paroisses, et avoir un curé à elles, s'imposent de grands sacrifices pour construire à

• Pour être exact, il faut avouer que la chapelle métropolitaine de Marlborough-Street, à Dublin, est bâtie dans le genre classique, parce que, commencée il y a plusieurs années à une époque où le mauvais goût était encore puissant, même en Angleterre, elle a été achevée d'après le plan primitif.

leurs frais des églises, sans autres conseils que ceux des prêtres du voisinage, sans autre surveillance que la leur. Ce serait là une voie aussi naturelle qu'honorable de rentrer dans le vrai. D'un autre côté, il est malheureusement incontestable que le clergé n'a pas encore manifesté le moindre symptôme d'opposition au vandalisme des architectes officiels, au scandale des tableaux périodiquement octroyés aux églises. Il le pourrait, cependant, nous en sommes persuadés, en s'appuyant sur ses droits imprescrptibles, et sur des textes de lois dont l'interprétation est abusive. Il le pourrait bien mieux encore en invoquant le bon sens et le bon goût du public, qui ne manquerait pas de réagir aussi sur l'esprit de l'administration. Il y aurait unanimité chez les gens de goût, chez les véritables artistes, pour ve ́nir au secours d'une protestation semblable de la part du clergé : l'opinion est délicate et sûre en ces matières, comme on l'a vu récemment, lors des sages restrictions mises par M. l'archevêque de Paris à l'abus de la musique théâtrale dans les églises ; la victoire serait bientôt gagnée. Quant à nous, si nous avions l'honneur d'être évêque où curé, il n'y a pas de force humaine qui pût nous contraindre à consacrer des églises comme NotreDame-de-Lorette, à accepter des statues comme celles qu'on destine à la Madeleine, à subir des tableaux comme ceux que l'on voit dans toutes les paroisses de Paris, avec une pancarte qui annonce pompeusement qu'ils ont été donnés par la ville ou le gouvernement. En outre, si nous avions l'honneur d'être évêque ou curé, nous ne confierions jamais, pour notre propre compte, des travaux d'art religieux à un artiste quelconque, sans nous être assuré, non seulement de son talent, mais de sa foi et de sa science en matière de religion : nous ne lui demanderions pas combien de tableaux il a exposés au Salon, ni sous quel maître païen il a appris à manier les pinceaux; nous lui dirions: « Croyez-vous au symbole que vous allez représenter, au fait que vous allez reproduire ? ou, si vous n'y croyez pas, avez-vous du moins étudié la vaste tradition de l'art chrétien, la nature et les conditions essentielles de votre entreprise? Voulez-vous travailler, non pour un vil lucre, mais pour l'édification de vos frères et l'ornement de la maison de Dieu et des pauvres ? S'il en est ainsi, mettez-vous à l'œuvre; sinon, non. Nous dem an

dons pardon de la trivialité de la comparaison; mais, en verité, c'est le cas de renouveler la fameuse recette de la Cuisinière bourgeoise, et de dire : « Pour faire une œuvre religieuse, prenez de la religion, etc. »

» Qu'on nous permette une dernière considération. Dans les beaux travaux qui ont paru jusqu'à présent en France sur l'art du moyen-âge, et dont nous avons cité plus haut les auteurs, on remarque un vide que l'on peut dénoncer sans être injuste envers les hommes laborieux et intelligens qui ont ouvert la voie. Ce vide, c'est celui de l'idée fondamentale, du sens inti. me, de cette mens divinior qui animait tout l'art du moyen-âge, et plus spécialement son architecture. On a parfaitement décrit les monumens, réhabilité leur beauté, fixé leur date, distingué et classifié leurs genres et leurs divers caractères avec une perspicacité merveilleuse; mais on ne s'est pas encore occupé, que nous sachions, de déterminer le profond symbolisme, les lois régulières et harmoniques, la vie spirituelle et mystérieuse de tout ce que les siècles chrétiens nous ont laissé. C'est là cependant la clef de l'énigme; et la science sera radicalement incomplète, tant que nous ne l'aurons pas découvert. Or, nous croyons que le clergé est spécialement appelé à fournir cette clef, et c'est pourquoi nous regardons son intervention dans la renaissance de notre art chrétien et national, non-seulement comme prescrite par ses devoirs et ses intérêts, mais encore comme utile et indispensable aux progrès de cette renaissance et à sa véritable stabilité. En effet, par la nature spéciale de ses études, par la connaissance qu'il a, ou du moins qu'il doit avoir, de la théologie du moyen-âge, des auteurs ascétiques et mystiques, des vieux rituels, de toutes ces anciennes liturgies, si admirables, si fécondes et si oubliées, enfin, et surtout par la pratique et la méditation de la vie spirituelle, impliquée par tous les actes qui se célèbrent dans une église, le clergé seul est en mesure de puiser à ces sources abondantes les lumières définitives qui manquent à l'œuvre commune. Qu'il sache donc reprendre son rôle naturel, qu'il revendique ce noble patrimoine, qu'il vienne compléter et couronner la science renaissante par la révélation du dernier mot de cette science. Qu'il ne croie pas en faire assez, lorsqu'il n'étudiera que les dates, la classification,

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