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CHAPITRE X.

UN ÉVÊQUE AU IX® SIÈCLE. - HINCMAR.

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Naissance et éducation d'Hincmar.- Ses rapports avec Louisle-Débonnaire. Affaire des clercs nommés par Ebbon. Ecrit contre les ravisseurs des biens ecclésiastiques. 1L1thaire et Teuteberge. Affaire de Rothade; Hincmar tient tête au pape. Affaire d'Hilduin ; Hincmar tient tête au roi. Affaire de Vulfade; Hincmar tient tête au pape et Il couronne Charles-le-Chauve roi de Lorraine.

au roi.

Lettre hardie d'Hincmar à Adrien II.

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Résistance du roi et d'Hincmar au pape dans l'affaire de l'évêque de Laon. Lettre de Charles-le-Chauve à Adrien écrite par HincCurieux post-scriptum.- Embarras d'Hincmar entre Hincmar cou

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mar.

Charles-le-Chauve et Louis-le-Germanique. ronne Louis-le-Bègue sous condition. Il écrit énergiquement à Louis III au sujet des droits de l'épiscopat. Compose le Traité des Offices du palais pour Carloman. Sa mort.—Hincmar jugé comme écrivain.—Sa politique sacrée. - Rapprochement avec Bossuet ; différences. Quelques citations. · Le rôle de l'épiscopat au 1x° siècle et dans les siècles postérieurs.

Agobard nous a déjà montré ce qu'était un évêque politique au 1x° siècle. Mais le rôle d'Agobard n'est pas un rôle épiscopal complet; car, malgré ses instincts d'indépendance, malgré la fierté naturelle de son ca

ractère, jeté par les circonstances du côté de la papauté, l'évêque de Lyon n'a pu s'opposer à la fois au pouvoir papal et au pouvoir royal, ce qui fut au ıx° siècle la véritable attitude de l'épiscopat et d'Hincmar, son plus grand représentant. Hincmar s'éleva à la hauteur de ce rôle par sa renommée, par son immense influence sur toutes les affaires du temps auxquelles il fut mêlé pendant sa longue vie qui, commencée avec le siècle, l'embrassa presque tout entier et traversa quatre générations de rois. Pendant cette longue existence, Hincmar lutte, négocie sans cesse, et quelquefois intrigue; il se trouve alternativement aux prises avec tous les grands pouvoirs de la société d'alors, avec la féodalité dont les violences menacent l'Église; avec la royauté qui se débat à la fois contre les prétentions de la féodalité naissante, contre l'ascendant des évêques et contre les prétentions de la papauté; enfin avec la papauté ellemême. Dans toutes ses luttes, dans toutes ses négociations, Hincmar va de l'un de ces pouvoirs à l'autre, les bravant et les ménageant tour à tour; caractère altier et souple, austère (1) et ambitieux, impétueux et rusé, dans lequel il y a de l'évêque de Meaux et un peu de l'évêque d'Autun.

Hincmar naquit dans les premières années du 1x siècle, d'une famille noble. Sa jeunesse se passa dans l'abbaye de Saint-Denis, déjà célèbre, et dont il seconda la réforme. Le sort le mit de bonne heure en contact avec

(1) Toute sa vie il s'abstint de la chair des quadrupèdes. Il paraît qu'on se privait alors, par principe d'austérité, de la chair des quadrupedes, comme plus tard de celle des quadrupèdes et des oiseaux.

la royauté, qu'il devait souvent servir et quelquefois combattre. Il fut admis dans la familiarité de Louis-le-Débonnaire. L'abbé de Saint-Denis, Hilduin, ayant trempé dans la grande révolte épiscopale que suivirent la déchéance et la pénitence publique du faible empereur, et, par suite du rôle qu'il avait joué dans cette révolution, ayant été exilé en Saxe, Hincmar y accompagna son abbé; mais bientôt il revint, se rapprocha de la cour et, s'interposant entre son ancien supérieur ecclésiastique et le roi, parvint à les réconcilier. Puis, une seconde révolution s'étant accomplie dans le même sens que la première, et Hilduin y ayant encore pris part, Hincmar, qu'il avait cherché vainement à entraîner, le réconcilia de nouveau avec le roi. Ainsi, dès le commencement de sa carrière, il s'interpose entre la royauté et l'Église.

Nommé archevêque de Reims, en 845, c'est-à-dire promu à la première dignité épiscopale de la Gaule franque, Hincmar soutint contre le moine Gotescalk des luttes théologiques dont j'ai parlé ailleurs, et sur lesquelles je n'ai plus à revenir. Au reste elles comptent peu dans la vie d'Hincmar, grand politique et assez mauvais théologien.

A peine placé sur le siége de Reims, Hincmar donna tous ses soins à enrichir, à orner et à défendre son église. L'église de Reims avait vu plusieurs de ses possessions tomber entre les mains de divers seigneurs qui se les étaient appropriées soit par la violence, soit par les concessions que leur importunité avait arrachées à Charles-leChauve. Hincmar s'occupa d'abord de faire rentrer l'église de Reims dans sa propriété, et de faire écrire par Charles-le-Chauve des lettres par lesquelles le roi re

venait sur tout ce qu'il avait pu concéder en ce genre (1).

La première affaire dans laquelle on voit se dessiner le caractère d'Hincmar est celle des clercs nommés par son prédécesseur Ebbon.

Ebbon était cet archevêque de Reims dont j'ai parlé dans un précédent chapitre, et qui dirigea la conspiration des évêques contre Louis-le-Débonnaire. Ce fut Ebbon qui lut au roi la sentence de dégradation. Après la restauration du monarque, Ebbon avait été proscrit; il s'était enfui en Danemark sur un vaisseau de pirates, avait ensuite été rétabli sur son siége, puis de nouveau déposé et la question qui s'agitait maintenant était de savoir si les clercs qu'il avait nommés pendant son épiscopat passager étaient canoniquement élus. Hincmar ne les voulut pas reconnaître. Ces ecclésiastiques se plaignirent devant un concile. Hincmar soutint leur exclusion et se défendit lui-même, car son élection était contestée. Il parvint à faire triompher son droit dans le concile et à faire rejeter les prétentions de ses adversaires. L'affaire ne se termina pas là, et, portée devant le pape Nicolas Ier qui, au 1x siècle, afficha toutes les prétentions que Grégoire VII devait faire valoir deux cents ans plus tard, la décision du concile franc fut rejetée; Nicolas ne voulut point abandonner les clercs nommés par Ebbon, et il prononça cette remarquable parole : « Il ne faut pas que l'obéissance ait pu être coupable. >>

Après avoir soutenu vigoureusement ce premier choc contre une partie du clergé, derrière laquelle se cachaient l'empereur Lothaire et le pape, Hincmar éleva une voix ferme et sévère contre les violences féodales; il écrivit à

(1) Flodoard, 1. III, c. 4.

Charles-le-Chauve, De coercendis militum rapinis, sur la répression à apporter aux rapines des gens de guerre (1), une lettre dans laquelle se trouvaient des paroles comme celles-ci :

<< Il est impie d'exiger de ses sujets des dons et des services, et de ne pas veiller à ce qu'ils aient ce qu'on exige d'eux. >>

L'épiscopat, qui parlait si haut par la bouche d'Hincmar, prit un moyen plus énergique pour porter quelque remède aux dévastations perpétuelles, aux invasions de la propriété, produites par les dissensions alors existantes entre Charles-le-Chauve et son frère Louis-le-Germanique. Un concile de Metz envoya à Louis-le-Germanique trois archevêques, à la tête desquels était Hincmar, pour dire au prince que, s'il se repentait des désordres auxquels il avait donné lieu, il serait absous, mais seulement à cette condition. Louis reçut les trois envoyés avec une grande soumission, et leur demanda pardon de tout ce qui s'était passé. Hincmar répondit : « Je suis très-disposé à pardonner ce qui me concerne personnellement ; et, quant au mal que tu as fait à l'Église, je t'apporte les moyens de te réconcilier avec Dieu. »

Jusqu'ici, Hincmar a parlé, et nous l'entendrons plus tard parler encore un langage hautain, mais qui ne manque pas de noblesse. Malheureusement il n'en tint pas toujours un pareil, notamment dans une affaire célèbre et déplorable, dans l'affaire du divorce de l'empereur Lothaire II et de Teuteberge. Je n'entrerai pas dans les détails de cette triste histoire; je rappel

(1) Hincm. opera, t. II, p. 143.

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