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PASCAL

L'horreur du vide et la pression atmosphérique

Sous ce titre, dans les livraisons du 20 octobre 1907 et du 20 janvier 1908 (1), nous avons présenté une vue d'ensemble des polémiques soulevées par les articles de M. F. Mathieu, Pascal et l'expérience du Puy-deDôme, publiés dans la REVUE DE PARIS, en 1906 et 1907. Depuis lors, un événement important s'est produit qui nous apporte de nouveaux documents de grande valeur c'est la publication, dans la collection Les grands écrivains de France, des Euvres de Blaise Pascal publiées suivant l'ordre chronologique, avec documents complémentaires, introductions et notes par MM. Léon Brunschvicg et Pierre Boutroux. Les trois premiers volumes ont paru; ils vont jusqu'au Memorial du 23 novembre 1654: ils embrassent done la période de la vie de Pascal qui intéresse directement

:

le débat.

Aux œuvres de Blaise Pascal, les éditeurs ont joint, non seulement les écrits de son père et de ses sœurs, mais tous les documents qui ont paru nécessaires à l'éclaircissement de sa vie et de ses travaux.

Nous voudrions extraire de l'ensemble, sans rien

(1) Nous désignerons ces articles, dans nos références, par R 1907, et

R 1908.

omettre d'essentiel, ce qui touche à la controverse que nous venons de rappeler. La tâche sera facile : M. L. Brunschvicg lui-même nous fournit le cadre à remplir et toutes les références nécessaires, dans l'introduction qui ouvre le premier volume.

Elle se partage en cinq paragraphes dont le quatrième seul: Les études critiques (XX-XLVIII), intéresse notre sujet. Nous le suivrons, autant que possible, mot à mot nous citerons les textes auxquels M. L. Brunschvicg renvoie (1) et nous y joindrons des renseignements complémentaires empruntés aux introductions et aux notes disséminées dans les trois volumes. A ce travail de copiste, nous ajouterons quelques remarques, celles qui nous paraîtront utiles à l'interprétation des documents.

I

L'invention de l'expérience du Puy-de-Dôme

Après avoir rappelé d'ensemble les principaux secours qu'ont fournis aux éditeurs des Euvres de Blaise Pascal les travaux des érudits et des critiques, M. L. Brunschvicg aborde l'histoire des expériences du vide (2).

La question de la part de Descartes dans l'invention de l'expérience du Puy-de-Dôme, dit-il, avait été soulevée par les historiens du XVIIe siècle, mais sans qu'ils se soient défendus suffisamment contre la contagion de ces passions rétrospectives qui nous paraissent aujourd'hui si puériles... Au XIXe siècle, l'histoire de la science a été comprise d'une toute autre façon. >>

M. L. Brunschvicg cite, « comme un rappel au véri

(1) Moins les passages visés des articles de M. Mathieu, dont nous n'avons gardé que les références.

(2) OEuvres de B. Pascal, t. I, Introd., pp. XXII et suivantes.

table esprit philosophique, la page où Cournot apprécie le service que l'Ecole de Florence avait rendu à la science en expliquant le jeu des pompes et en inventant le baromètre (1).

«La science est l'œuvre des générations successives et des groupes associés, poursuit M. Brunschvicg. Il n'est pas d'œuvre, fût-ce les Principes mathématiques de la Philosophie naturelle ou la Méthode des fluxions, qu'un adversaire passionné ne pourra se croire autorisé à traiter de pot-pourri; c'est ainsi que l'on a cru avoir diminué le génie de Pascal lorsqu'on s'est enfin aperçu qu'il n'avait pas été le premier à revendiquer les droits de la raison et de l'expérience en matière de recherche scientifique, ou qu'il n'avait pas inventé le baromètre, ou qu'il n'avait pas été le seul en France à poursuivre les expériences du vide. Une ignorance, fort excusable, avait substitué le seul Pascal au groupe parisien ou même européen dont il était devenu pour la postérité le plus illustre représentant; inconsciemment on a été tenté de rejeter sur Pascal la faute de sa propre ignorance. Mais en fait la proles sine matre creata, qui est un miracle pour le vulgaire, est une monstruosité pour le philosophe. La conception philosophique ou, comme on a pris l'habitude de dire pour préciser davantage, la conception sociologique de l'histoire, ramène la production scientifique à ses conditions naturelles et humaines. Loin de diminuer l'oeuvre individuelle, elle la grandit de toute la perspective du passé, de tout le prolongement d'avenir qu'elle sait y rattacher. En tout cas, pour aborder un débat particulier qui a soulevé tant de passions et suscité tant d'erreurs (et il importait d'en prévenir le lecteur qui veut être renseigné dès maintenant sur l'esprit de notre édition), cette conception philosophique ou sociologique sera la seule qui permettra d'éviter l'étroitesse et la partialité, de comprendre à la fois l'impression de Pascal sur Descartes et l'impression de Descartes sur Pascal,... la seule enfin qui donne l'espérance d'échapper au bruit assourdissant de l'éloquence judiciaire » et d'atteindre dans le maniement des textes le désintéressement et la pénétration nécessaires à l'intelligence de la vérité historique.

» A cet égard, les deux articles publiés par M. Adam dans la

(1) Cournot, Considérations sur la marche des idées et des événements dans les temps modernes, 1872, t. I, p. 290.

REVUE PHILOSOPHIQUE SOUS ce titre : Pascal et Descartes. Les expériences du vide 1646-1651 (déc. 1887, pp. 612-624, et janv. 1888, pp. 65-90) sont irréprochables; comme MM. Milhaud et Strowski l'ont solidement établi, ils donnent en gros la solution de la controverse. M. Adam a eu le mérite de ne pas exagérer l'importance du malentendu qui avait un moment excité l'aigreur de Descartes, et dont nous ne savons même pas (on l'oublie trop souvent) dans quels termes Pascal a pu être informé. Très judicieusement, M. Adam en a fait comme un cas particulier de l'opposition entre la préoccupation systématique de Descartes et le positivisme expérimental de Pascal. Il a fort bien montré comment la métaphysique et la science se mêlaient alors dans les esprits; pour préciser, il a rappelé, suivant une indication. qui aurait dû être retenue, que dans l'interprétation de l'expérience de Torricelli «il y avait deux choses fort différentes, l'une de savoir si le haut du tube est vide absolument ou bien en apparence; l'autre quelle est la cause qui maintient le vif argent ainsi suspendu » (1887, p. 620).

Après avoir rappelé les documents de premier ordre apportés à l'histoire de la science par M. Adam, M. L. Brunschvicg signale « deux points assez significatifs de la controverse de la pesanteur de l'air » que la collation et la recherche des lettres manuscrites de Descartes, par MM. Adam et Paul Tannery, ont donné l'occasion d'éclaircir.

Dans la lettre de Descartes au P. Mersenne du 8 octobre 1638, l'explication de l'ascension de l'eau dans les pompes par « la pesanteur de l'eau qui contre-balance celle de l'air » ne figure pas dans le texte original: c'est une addition de Clerselier (1).

A la page 71 du même article, M. Adam, soucieux de ne négliger aucun élément d'information, écrivait l'hiver de 1647-1648, dans plusieurs lettres au P. Mersenne, Descartes s'informait de l'expérience qui n'était pas encore faite et pressait Pascal de la faire », et il renvoyait à Baillet dans une note ainsi conçue: Lettres du 13 décembre 1647, du 31 janvier, du 7 février et du 4 avril 1648. Elles n'ont pas été publiées, et sont peut-être à jamais perdues; mais Baillet en avait le manuscrit sous les yeux (t. II, p. 330 et p. 333 de la Vie de M. Descartes,

(1) R 1907, p. 388.

Paris, 1691) ». Depuis, gràce à M. Adam et à M. Tannery, les quatre lettres sont connues. Celle du 13 décembre 1647 porte en effet sur l'entrevue avec Pascal (1)... Mais les trois autres, dont les manuscrits sont à Nantes, à la Bibliothèque V. Cousin, à l'Institut, ne font pas la moindre allusion à l'expérience du Puyde-Dôme (Euvres de Descartes, t. V, p. 115, 117, 121). Nous aurions négligé cet incident, si dès le début de ses articles de la REVUE DE PARIS (1 avril 1906, p. 567), M. F. Mathieu n'avait avancé, comme une chose qui n'a pas besoin d'autre précision ni d'autre justification, que trois fois, dans le cours de l'année 1648, Descartes renouvela la question posée dans sa lettre du 13 décembre 1647 (2). » M. L. Brunschvieg ajoute en note:

er

«Si nous ne nous trompons, les articles de M. Adam se sont trouvés encore être l'occasion involontaire d'une fausse allégation contre Pascal. M. Adam avait cité la lettre de Chapelain à Christiaan Huygens où Pascal est représenté comme ayant le premier en France fait l'expérience du vide avec le mercure et ayant imaginé le premier sur ce problème le poids de l'air et sa colonne depuis l'atmosphère jusqu'en terre (48 août 1659). II ajoutait « Et Huygens qui avait connu Descartes, ne protestait pas. » M. Mathieu a compris, je crois, que Christiaan Huygens ne répondit pas; en tout cas, il écrit: «Huygens toujours poli, répond exactement, et point par point, aux deux lettres de son officieux correspondant; sur Pascal, les deux fois, il fait la sourde. oreille et ne dit mot» (REVUE DE PARIS, 1 mai 1906, p. 198). M. Abel Lefranc a relevé la réponse de Christiaan Huygens à la lettre de Chapelain; elle est du 11 septembre 1659, et elle contient l'expression d'une estime infinie pour Pascal (REVUE BLEUE, 25 août 1906, p. 232 (3). Cf. (Euvres de Christiaan Huygens, Haarlem, t. II, 1889, p. 489). »

M. L. Brunschvicg revient sur cette controverse

(1) « J'avais averti M. Pascal d'expérimenter si le vif argent montoit aussi haut lorsqu'on est au-dessus d'une montagne, que lorsqu'on est tout au bas; je ne sçay s'il l'aura fait. »

(2) Nous avons reproduit l'affirmation de M. Mathieu, R 4907, pp. 442-443. (3) « J'estime Pascal infiniment, et pour ceci (la machine arithmétique) et pour son savoir dans la géométrie, dont il m'a donné la preuve et qu'il m'a dédiée. » (Abel Lefranc, Défense de Pascal. Pascal est-il un faussaire? p. 48 du tiré à part). — L'«estime infinie » d'Huygens s'adresse à Pascal géomètre; il ne dit rien du physicien « ayant imaginé le premier sur ce problème le poids de l'air et sa colonne depuis l'atmosphère jusqu'en terre. >> R 1908, p. 233.

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