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Mais, quoique le parti le plus sûr soit de décider pour la négative, et de s'en tenir avec constance à tout ce que les Français ont avancé sagement, en se déclarant contre les abus de la poésie et de la musique italienne, j'ose néanmoins soumettre ici mon opinion, qui penche plutôt en faveur de quelques légers sacrifices, qui sont devenus, ou qui ont été toujours un mal nécessaire.

§ 759. En osant émettre ainsi mon opinion, je déclare qu'elle doit être interprétée avec certaines restrictions, qui n'autorisent pas sur les théâtres italiens le triomphe d'un goût barbare, de ces sentences et de ces comparaisons ouvertement contraires aux situations dramatiques de ces monstruosités qui sautent aux yeux les plus vulgaires; enfin, de ces expressions impudentes qui blessent les mœurs et le bon sens.

On ne peut pas être spectateur indifférent et sans frémir, dans les théâtres des opéra bouffons, où l'on donne le nom de drames à certaines pièces informes et mal cousues; et où, sous le seul prétexte de ce mot bouffon, on se permet souvent de lâches plaisanteries, des équivoques dangereuses et grossières, des images lubriques, qui provoquent le triomphe du vice et font rougir la vertu.

La permission de corrompre les mœurs serait- elle donc une de ces prétendues licences poétiques, et de ces sacrifices réputés nécessaires pour associer agréablement le drame à la musique? Le sacrifice de la beauté intérieure, et de l'objet principal du drame qui est celui de corriger le vice et non pas de l'afficher en public, entre-t-il donc dans le calcul de toutes les choses qu'on peut y tolérer pour rehausser la beauté de la musique (1)?

(1) Il est à desirer qu'on lise et qu'on mette en pratique ce que Platon (liv. 7 des Lois) dit à ce propos. « Mettons au nombre des lois... celle

§ 760. L'opéra buffa destiné à amuser le peuple qui, après l'exercice de ses devoirs et une longue suite d'occupations domestiques et sociales, exige un certain délasseiment dans les théâtres, n'a d'autre but que d'imiter et de mettre en action le ridicule des hommes, et l'exposer à la risée du public. C'est ainsi qu'en mêlant l'utile à l'agréable, et que, tout en riant, il corrige les mœurs. Mais pour imiter le ridicule des autres, il ne faut pas que le poëte avilisse la dignité de la poésie, ni qu'il commence par se rendre impertinent et ridicule lui-même. Chercher la source du ridicule dans les sujets qui blessent, même légérement, la délicatesse des mœurs, c'est insulter au caractère des gens honnêtes. L'ignorance où l'on est d'un nombre infini de vrais sujets comiques répandus dans les ouvrages des poëtes anciens et des modernes, et l'incapacité de pouvoir en produire d'autres de la source inépuisable des mœurs du siècle où nous vivons, obligent les rimailleurs bornés à chercher des petits traits saillans dans les dictons d'une populace débauchée, ou dans le répertoire de leur propre cœur indignement corrompu.

$761. Il est à desirer que cette conduite immodérée indigne des nations civilisées, et qui malheureusement n'est pas rare en Italie, soit bannie de nos théâtres; et que, pour l'honneur de la belle littérature, les vrais poëtes, pourvus à la fois des qualités du cœur et de celles de l'esprit, se montrent désormais pour faire voir, par leur exemple, que l'on peut composer de beaux drames pour une musique analogue au goût du siècle, sans être

» qui astreint le poëte à ne point s'écarter dans ses vers de ce qu'on tient » dans l'Etat, de légitime, juste, beau et honnête ; et qui défend de montrer » ses ouvrages à aucun particulier, qu'auparavant ils n'aient été approuvés » des gardiens des lois, et des censeurs établis pour les examiner. »

obligé d'altérer les règles du bon goût, ni la pureté des

mœurs.

S 762. De ces notions générales déjà données, je passe maintenant à l'exposition de quelques règles particulières que je crois utiles, et même nécessaires, pour les drames destinés à la musique : elles ne sont que le résultat et l'application de tous les principes, de toutes les règles et observations préparés dans tout ce que nous avons écrit jusqu'à présent.

Les drames, divisés ordinairement en deux ou trois actes, et les actes partagés en plusieurs scènes, ne sont qu'un composé de récitatifs et d'airs.

RÈGLES SUR LES RÉCITATIFS ET LES AIRS.

RÈGLE PREMIÈRE.

§ 763. Pour composer des récitatifs et des airs, il faut d'abord savoir distinguer et choisir la matière et la circonstance qui, sous le rapport musical, conviennent aux uns, plutôt qu'aux autres.

Pour peu qu'on ait du goût pour la versification et pour la musique en général, on sera à même de connaître, sans effort de raisonnemens, qu'il y a des matières qui sont plus propres au récitatif qu'à l'air, et que trèssouvent ce qui convient à l'un ne convient pas à l'autre. C'est pourquoi le poëte, toujours attentif à ce qui peut être plus ou moins commode au musicien, plus ou moins. favorable au chant, a soin de destiner au récitatif tout ce qu'il croit n'être pas propre à briller dans les airs.

Le poëte habile se propose d'abord de donner au musi

cien trois sortes de compositions, dont les dialogues ou les monologues sont susceptibles: le récitatif simple, le récitatif obligé, et l'air.

S764. Le récitatif simple s'emploie à tout ce que la scène aide tranquille ou de rapide : il s'applique au récit et à la narration dialoguée; c'est pourquoi on l'appelle en général, récitatif. Le poëte qui écrit pour le musicien doit regarder la partie du récitatif comme celle qui exige le style le plus concis, le plus léger, le plus rapide, qui s'accommode à une espèce de chant le plus approchant de l'accent naturel de la parole, et qui imite les inflexions de la voix du déclamateur.

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Il faut que l'oreille, impatiente d'arriver au chant des airs, ne se plaigne jamais qu'on l'arrête au passage; il faut deviner ses plaisirs et ses intentions: elle desire passer, par les récitatifs, à ces endroits délicieux où elle et l'ame se promettent de s'arrêter et de jouir.

Le récitatif ne doit servir qu'à lier la contexture du drame, à séparer et à faire valoir les airs. Quelqu'élégant, quelqu'énergique et savant qu'il puisse être, il ne doit durer qu'autant qu'il est nécessaire à son objet. C'est en ceci qu'on voit le tort de plusieurs poëtes italiens qui, par la longueur de leurs scènes, abusent du récitatif. Quelque beau qu'il soit, il ennuie, parce que ce n'est pas pour le récitatif qu'on va à l'opera. Les musiciens en effet, qui savent cela, retranchent ordinairement les récitatifs, même ceux des drames de l'abbé Métastase, quoique remplis de toutes les grâces imaginables, et quoique ce célèbre poëte ait eu soin de les abréger autant qu'il lui a été possible.

S 765. Le récitatif oblige, employé, pour la première fois, par Alexandre Scarlatti, vers la fin du XVIIe siècle,

ne diffère du simple qu'en ce qu'il a lieu dans les situations vives, qu'il exprime le choc des passions, les mouvemens interrompus de l'ame, l'égarement de la raison, lės irrésolutions de la pensée, et tout ce qui se passe de tumultueux et d'entrecoupé sur la scène. Le poëte, en composant un récitatif qui doit être obligé dans la musique, lui donne un caractère plus marqué, et une expression plus énergique qu'à celui du récitatif simple.

On l'appelle obligé, parce qu'étant entremêlé de ritournelles et de traits de symphonie, il oblige," pour ainsi dire, le récitant et l'orchestre l'un envers l'autre, ensorte qu'ils doivent être attentifs et s'entendre mutuellement.

En général un bon poëte sait substituer aux récitatifs froids, longs et monotones, des dialogues vifs, brefs et coupés.

§ 766. Le récitatif est immédiatement suivi de l'air. Examinons la différence entre les récitatifs et les airs.

1o. Le récitatif, proprement dit, est fait non pour être chanté, mais pour être déclamé musicalement; il offre la partie la plus faible de la musique, qui est la musique parlée. L'air est fait pour recevoir toute la pompe de l'harmonie et de la mélodie musicale; il présente la partie la plus essentielle du chant.

2o. La poésie du récitatif n'est pas lyrique, c'est-à-dire, qu'elle est libre et remplie de vers inégaux, tantôt longs, tantôt courts (§ 729); elle reçoit un genre de chant particulier. La poésie de l'air est précisément lyrique, c'està-dire assujétie à un rhythme uniforme et symétriquement distribué, ce qui la rend très-propre au véritable chant.

3o. Le contenu des récitatifs est ce qui appartient au fond de l'histoire, ou de l'invention, ensorte que par

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