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$ 902. Au reste, en proposant la ressemblance des deux langues comparées, je n'entends pas en prouver l'identité. La langue italienne et la française dont nous avons prouvé avec évidence l'analogie et le rapprochement, ont sans doute, chacune de leur côté, quelque chose à elles-mêmes, qui leur donne des caractères par lesquels l'une n'est pas l'autre. Nous voyons la même différence dans tous les dialectes d'Italie, dont l'un diffère sensiblement de l'autre par une infinité de mots, quoique tous soient de la même langue qui est l'italienne. Il suffit d'avoir démontré ces ressemblances et ces rapprochemens, d'où nous pourrons conclure, contre les paradoxes de J.-J. Rousseau, et nous confirmerons par des faits que, si l'une se prête aisément à la musique, l'autre doit nécessairement s'y prêter aussi.

ARTICLE IV.

DE L'ACCENT DES DEUX LANGUES ITALIENNE ET FRANÇAISE.

§ 903. On parle ici de l'accent grammatical ou tonique (tom. 1, part. 1, §3), de cet accent qui, tantôt grave, tantôt aigu (§8), répand l'harmonie dans la versification des langues modernes (§ 131 et suiv.), de cet accent qui, naturellement propre à toutes les langues (§32), est l'ame de la parole (56), de cet accent qu'on a pu avoir l'audace de refuser à la langue française, et que j'ai rendu évident dans chaque mot de cette langue ( § 28) (1), de cet accent enfin

(1) Il est fâcheux et même honteux d'être obligé de revenir à quelque nouvelle preuve de l'existence de l'accent tonique dans les mots français, après qu'on a prouvé que la privation de cet accent dans les langues est absolument

que

que des personnes moins opiniàtres ont trouvé faible et peu marqué dans cette même langue, et qui pourtant, par les raisons que j'ai indiquées (§ 33), devrait être physiquement plus fort, et plus marqué que celui de la langue italienne.

S904. (1) Que la langue française ait un accent plus énergique et plus marqué que l'italienne, ce n'est pas une question intéressante pour l'objet actuel; il suffit seulement que l'une et l'autre possèdent un accent de la même nature, pour établir de plus en plus entr'elles le rapprochement et la ressemblance proposée. Mais si l'on veut décider du plus ou moins de mélodie des langues, il paraît, à ce que dit J.-J. Rousseau, que le plus ou le moins d'accent en marque la différence : C'est l'accent des langues qui détermine la mélodie de chaque nation: c'est l'accent qui fait qu'on parle en chantant, et qu'on parle avec plus ou moins d'énergie selon que la langue en a plus ou moins. Celle dont l'accent est plus marqué doit donner une mélodie plus vive et plus passionnée; celle qui n'a que peu ou point d'accent, ne peut avoir qu'une mélodie languissante et froide, sans caractère et sans expression. Ce passage de Rousseau sera examiné dans le chapitre IV, § 1033, et 1035, jusqu'au § 1184, où l'on verra en deux appendices particuliers, de quel accent parle l'auteur cité qui s'écarte du vrai point de la question.

§ 905. Puisque tout ce qui appartient à cet accent a été abondamment traité dans la première, dans la seconde et la troisième partie de cet Ouvrage, cet article aurait impossible; et que la nature l'a donné même à la voix des animaux; et, j'ose le dire, elle n'a pas pu le leur refuser,

M. Angeloni, dans son ouvrage sur Guido d'Arezzo, est le seul Italien, à ce que je sache, qui, à la note de la page 155, en parlant de la langue française, veut faire mine de lui refuser l'accent tonique.

Ce que M. Angeloni dit, sans le prouver, dans la persuasi o n peut être qu

été superflu, si d'ailleurs je ne voulais pas en relever une particularité qui confirme la ressemblance entre ces deux langues; c'est que l'une et l'autre ont ordinairement l'accent tonique sur la même syllabe de chaque mot :

son autorité doit suffire, m'a été prouvé depuis peu par un savant francais. Voici, me disait-il, de charmans mots italiens, ténero, bárbaro, perfido, giúbilo: ce sont des mots sdruccioli ou dactyles, qui ont l'accent sur l'antépénultième. Vous ne trouverez pas un seul mot français qui en ait un semblable: donc, ajouta t-il, la langue française n'a pas d'accent. — Voilà une conclusion inconséquente, lui répondis-je, et bien moins heureuse que l'assertion gratuite de M. Angeloni. J'ai répété mille fois dans la première partie de cet Ouvrage, que la langue française n'a, en général, et ne peut avoir des mots sdruccioli. Cet avantage de dactyliser est réservé à l'italienne, et même à l'anglaise. Mais je vous ai démontré que les mots français sont ou trochées, ou ïambes, ou anapestes, ayant l'accent sur la dernière ou sur l'avant-dernière syllabe.

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Vous avez beau dire, reprit le savant français; vos raisonnemens ne pourront jamais faire sentir à mon oreille ce que je ne sens pas.- Eh bien, lui répondis-je, je m'engage à vous faire sentir ce que vous croyez ne point sentir. Le mot, par exemple, sentiment est, à votre avis, sans accent, car vous croyez (ce qui est impossible) que votre voix n'appuie sur aucune de ces trois syllabes. Je veux cependant prononcer ce mot en lui donnant un ac. cent à la manière anglaise, sén-timent. Cette manière de prononcer sied-elle bien à la langue française? Non. Et pourquoi ? Parce que vous avez placé un accent sur la syllabe sén. Mais si je prononçais senti-ment comme on prononce en français le mot centime, l'aurais-je prononcé selon le vrai goût français ? – Non, Monsieur. Pourquoi? C'est que vous avez mis un accent sur la syllabe tí. Je vais maintenant prononcer sentimént, en appuyant sur mént: ai-je prononcé comme en français ? Oui, sans doute. Vous m'accordez donc que la syllabe ment a un appui de la voix, un accent, ce même accent que je viens de lui donner ? - Point du tout je ne sens pas cet appui. Monsieur, vous n'êtes ni raisonnable, ni de bonne foi. Votre oreille a bien senti l'instant où j'ai privé d'accent cette syllabe; elle doit donc sentir, et elle sent en effet, malgré vous, le moment où je vais le remettre à sa place naturelle. Je ne dirai pas que vous avez l'oreille peu sensible; car l'appui de cet accent est si vibrant et si clair, qu'il ne faut pas une oreille très fine pour le saisir. Lorsque vous prononcez, par exemple, les mots agréable nouvelle, vous sentez, de même que tous les savans français (Voy. § 61 et ses notes, tom. 1), qu'on appuie trèspeu sur a du mot agréable, et que tout l'appui de la voix se porte sur la syllabe vé du mot nouvelle : vous sentez, au contraire, que dans les mots nouvelle agréable, on transporte l'appui de la syllabe vé sur a, qui en

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bocca, bouche, libro, livre, tavola, table, etc., ont Faccent sur la première syllabe; cappello, chapeau, cavallo, cheval, guerriero, guerrier, monarca, monarque, etc., ont l'accent sur la seconde syllabe; occupazione, occupa

avait été privé. Vous savez la raison de ce changement: or, cet appui que vous sentez est l'accent dont nous parlons vous ne devriez donc pas le méconnaître.

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C'est que l'acappelée par les

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Néanmoins je n'en désespère pas encore. Dites-moi, de grâce, pourquoi tous les Français et tous les étrangers se plaignent-ils des contre-sens qu'on remarque dans le chant des opéra de Paris? — C'est, me répondrez-vous (et vous ne pouvez répondre autrement), c'est que, par la faute des poètes et des musiciens, on y blesse partout la prosodie et le sens naturel des paroles.Mais, dites-moi quel est l'instrument qui blesse la prosodie et le sens naturel des paroles? — Vous me répondrez sans doute que c'est l'accent de la musique qui frappe souvent sur les syllabes des mots qui ne sont pas susceptibles d'accens, et qui se trouvent en contradiction avec ces mêmes mots. ·Cependant il arrive souvent aussi que l'accent de la musique frappe sur des syllabes qui ne blessent ni la prosodie, ni le sens des paroles; votre oreille sent-elle bien cela? - Oui, elle le sent à merveille. Eh bien, Monsieur, ce que votre oreille sent n'est que l'accent tonique que vous ne voulez pas reconnaître. En effet, quelle est, s'il vous plaît, la raison de cette différence? cent de la musique frappe sur les bonnes syllabes, ainsi musiciens. Mais quelles sont-elles, ces bonnes syllabes? Ce sont sans doute les syllabes longues, qui sympathisent avec l'appui de l'accent musical. Cette question étant réduite à ces termes, daignez m'expliquer ce que vous entendez par syllabe longue, susceptible d'appui, et si sensible à votre oreille? - L'abbé d'Olivet, dans son Traité de la Prosodie française, vous apprend que la syllabe longue consiste dans la durée du tems que les organes vocales emploient pour la prononcer cette durée du tems est le double de la syllabe brève. Ici vous confondez, Monsieur, la quantité des longues et des brèves des Latins, avec la quantité des accens graves et aigus. Je vais vous démontrer que ces sortes de syllabes longues sont très-souvent contraires à l'accent et à la prosodie de la musique, et sont la source des contresens qui blessent et morcellent la nature du langage; et qu'au contraire, les quantités prosodiquement brèves s'accordent très-souvent avec le sens du discours et avec l'accent de la musique. C'est ce que l'abbé d'Olivet, et avec lui tous les Français et tous les Italiens avouent, comme dans les mots cūlbuter, soūpirer, pūreté, châtier, chārité, troūver, cōntribuer, et une infinité d'autres dont la syllabe longue ne peut recevoir décemment l'accent frappé de la musique; et comme dans les mots avocat, chocolat, aimable, capăble, arret, sujet, faste, Jupiter, heureux, honneur, juge, refuge, etc., dont les syl

tion, ameranno, aimeront, regimento, régiment, etc., ont l'accent sur la troisième.

§ 906. On m'objectera sans doute que les mots sdruccioli des italiens fácile, dócile, dáttilo, ridicolo, bárbaro, etc.

labes bièves en quantité prosodique, sont les seules qui soient susceptibles de l'accent frappé de la musique. Cependant votre oreille sent, indépendamment des quantités longues et brèves, qu'il y a dans tous les mots français une syllabe qui s'accorde à ravir avec l'accent frappé de la musique, une syllabe saillante, appréciable et plus marquée que les autres du même mot, et qui est le vrai soutien de la voix. Or, cette syllabe que votre oreille sent, est, par sa propre définition, l'accent même que vous, et on ne sait par quelle fatalité, ne voulez pas entendre. Remarquez (et c'est une des plus fortes raisons dont votre esprit devrait se pénétrer), remarquez que cet accent que je donne à la langue française, pèse sur toutes les dernières syllabes des mots masculins, et sur toutes les avant-dernières syllabes des féminins, et que c'est précisément sur ces syllabes qu'on n'a jamais pu remarquer dans la musique, ni contretems, ni contre-sens. La vérité que je soutiens est donc parfaitement conforme aux faits, et il est impossible que, malgré tous les vieux préjugés, vous puissiez me la contester.

-

OBJECTIONS.

Première objection. Prétendre que les mots de la langue française ont un accent, c'est vouloir réaliser des qualités impossibles et contradictoires. En voici la preuve : L'accent est l'appui sensible de la voix sur une syllabe de chaque mot, et sa qualité essentielle est de rendre longue cette syllabe qui en est affectée (§§ 3, 4, tom. 1). Par la nature de la langue française, il devrait peser sur tous les é masculins finales des mots, comme dans bonté, vérité, amitié, etc. (§ 44, ibid.). Par conséquent, ces é devraient être longs. Mais il a été prouvé par tous les savans français, et il est généralement reconnu, que ces mêmes é masculins sont brefs: donc ils ne peuvent avoir aucun accent. Ce raisonnement est sans réplique.

Réponse. Ce raisonnement a le seul avantage d'être en forme logicale, et d'être fondé au moins sur quelque principe. Il mérite qu'on en fasse quelque cas, parce qu'il mène à éclaircir encore mieux et à distinguer des idées que les Français ont toujours voulu confondre; ce qui a fait que la question des accens a paru un mystère impénétrable aux yeux de quelques philosophes. En répondant, je ne ferai que répéter et réunir en un seul point tout ce que je me trouve avoir exposé dans le premier volume de cet Ouvrage.

Comme on n'a fait sur l'accent que des recherches superficielles, on a toujours confondu les longues et les brèves, qui dérivent naturellement de la quanité prosodique des Latins, avec celles qui dérivent de l'accent grammatical,

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