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française, parce que, 1°. une grande partie de ces consonnes finales placées dans l'écriture ne se prononcent pas, ou si elles se prononcent, forment une agréable liaison. Et l'on sait qu'en fait de langue, on ne doit pas tenir compte de l'écriture, mais des sons qui frappent l'oreille. Que s'il y a des consonnes qui quelquefois se prononcent sans liaison, on n'y pourra jamais soupçonner la moindre rudesse: ces consonnes sont ordinairement les lettres l, m, n, r, qui par leur liquidité ( lettere liquide) rendent un son doux. Les Italiens mêmes, qui manquent de ces sortes de mots terminés par une consonne, retranchent les dernières voyelles pour les obtenir artificiellement, et pour les employer, plus qu'ailleurs, dans la poésie ils prononcent, fatal, uom, alcun, amor, au lieu de prononcer fatale, uomo, alcuno, amore. Ils se rapprochent par là du génie de la langue française, pour donner à la leur plus de grâce et de douceur, et en même tems plus de variété au discours ($950): 2o. la langue française n'est pas toujours accentuée à la fin de chaque mot; elle a son accent sur la pénultième syllabe de douze mille mots féminins, qui forment le plus grand charme de la prononciation. Ces mots féminins coupent à eux seuls la monotonie qu'on voudrait lui attribuer, et qu'on ne saurait appercevoir, si l'on était de bonne foi. Mais, quant à l'accent, j'ai fait voir au § 914, que la langue italienne l'emporte sur la française, par les mots sdruccioli, qui ont l'accent sur l'anté-pénultième; par ces mots qui d'ailleurs affaiblissent le langage (§ 45 à la not.), l'italienne a un moyen de plus pour varier l'élocution: 30°. les inversions qui, par un certain arrangement des mots, peuvent donner de l'harmonie et de la douceur au discours, ne sont pas défendues dans la langue française. Tous les grammairiens, en en défendant l'abus, en permettent un emploi raisonnable et modéré dans les vers, et même dans la prose, ce

qui a été constamment pratiqué par tous les auteurs français anciens et modernes.

Les transpositions, dit le grand Vocabulaire français, quand elles sont naturelles (§ 989), et qu'elles n'embarrassent pas le sens de la phrase, donnent de la grâce et de la noblesse à la poésie. Il cite pour modèle d'inversions les vers suivans:

« Quoi! voit-on, revêtu de l'étole sacrée,

» Le prêtre de l'autel s'arrêter à l'entrée ? »

<<< Craignez de votre orgueil de vous rendre la dupe ».
« Que toujours la fierté, l'honneur, la bienséance,
» De cette folle ardeur s'oppose à la naissance. »

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D'après ces exemples et plusieurs autres même en prose, que nous nous réservons de citer au § 989 à la not. et une infinité d'autres qu'on rencontre dans les ouvrages des meilleurs écrivains français, pourrait-on dire que la langue française n'a pas d'inversions?

Mais les Français ont cédé aux Latins, et à quelques écrivains italiens, d'ailleurs fort rares, le droit des inversions outrées. Acheter la douceur et l'harmonie dans les inversions, au prix de devenir obscur et inintelligible, et d'altérer le cours naturel des idées, c'est déclarer ouverte ment, ou que la langue n'en fournit pas naturellement et par elle-même, ou que, si elle en fournit, on n'a pas assez d'esprit, ni envie de travailler pour en faire valoir les ressorts. Les vers, de quelque style qu'ils soient, sont d'autant plus doux, faciles, coulans et heureux, qu'ils n'ont pas besoin de ces violentes inversions; comme on peut le voir dans une infinité de beaux morceaux italiens. (Voy. le chap. suiv.)

Rien ne pouvait empêcher les Français de suivre le goût des Italiens et des Latins au sujet de ces inversions outrées. En rejetant cette faible ressource, ils ont fait voir au monde entier, et ont prouvé par des faits, que leur langue, capable de briller par le seul éclat de ses

beautés naturelles, n'en avait aucun besoin. N'est-ce pas une honte pour la philosophie, de vouloir caractériser comme un défaut ce qui devrait faire le plus grand éloge de la langue française ?

ARTICLE IV.

DES MOTS SDRUCCIOLI, ET DES DIMINUTIFS, AUGMENTATIFS ET SUPERLATIFS QUI SONT PROPRES A LA LANGUE ITALIENNE.

S 954. On appelle sdruccioli, ou dactyles tous les mots dont la langue italienne abonde, qui ont l'accent tonique à l'anté-pénultième, et quelquefois avant l'antépénultième syllabe; comme dans les mots dócile, plácido, àmano, precipitano, etc. La langue française manque tout-à-fait de ces sortes de mots.

M. Burette semble s'irriter contre Vossius qui dit que la langue française n'a pas de dactyles; et il croit le démentir en produisant plusieurs mots français dans lesquels il les apperçoit de bonne foi: tels sont, par exemple, les mots quantité, fermeté, conséquent, etc. L'espagnol Eximeno, dans son Ouvrage sur la Musique, se moque.de cette prétention ridicule. M. Burette ignorait ce que c'est qu'un mot sdrucciolo dans les langues vivantes, et il devait l'ignorer, parce que non-seulement lui-même, mais aussi les plus grands auteurs français, n'ont pas voulu développer la nature des accens; ils ont confondu l'accent prosodique avec le grammatical; ils n'ont pas voulu analyser et approfondir la source de l'harmonie dans les langues vivantes; ce qui a retardé en France les progrès de la vraie versification et de la musique, comme je l'ai prouvé dans la première partie de cet Ouvrage.

§ 955. Il est certain que les mots sdruccioli donnent à la langue italienne beaucoup de grâce et de douceur,

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($48, tom. 1). Mais il est fort à craindre que l'abondance de cette douceur, semblable à cet excès de chaleur qui, selon le système de Brawn, produit dans le corps humain une faiblesse indirecte ne produise dans le corps de cette langue une telle faiblesse qui fasse mal au cœur : nous avons examiné et prouvé dans la première partie, au § 45, que les mots sdruccioli diminuent l'énergie des accens, qui sont l'ame des paroles.

§ 956. Par cette raison les premiers auteurs français qui, sur les débris de la langue latine, jetèrent les fondemens d'une nouvelle langue capable de se faire distinguer des autres par son système de laconisme ou abréviation des mots, par sa vivacité et par son énergie, eurent soin d'écarter tout ce qui pouvait l'affaiblir, et par conséquent ils rejetèrent tous les mots sdruccioli de la langue latine, mots qui d'ailleurs étaient contraires à la vivacité du cạractère national.

Mais en se proposant d'y respecter les accens, qui sont la partie la plus intéressante du langage, ils les ont gardés pour leur langue, sur les mêmes syllabes où ils se trouvaient en latin; et n'ont fait que retrancher la plus grande partie des syllabes qui se trouvaient après l'accent, et qu'ils ont cru inutiles et superflues à l'essence des mots'; du mot tábula, par exemple, ils ont fait table, en retranchant, pour ainsi dire, une syllabe et demie; des mots amábilis, amávimus, etc., ils firent aimable, aimâmes, etc. des mots pérdere, pudicella, ils ont fait perdre, pucelle, sans changer la place des accens.

Mais il arrivait souvent qu'en retranchant une ou deux syllabes des mots latins sdruccioli, la diction française qui en résultait, n'était plus exacte ni expressive; comme dans les mots latins fácile, bárbaro, dáctylo, etc.; il fallut alors y garder pour les nouveaux mots les deux syllabes qui se trouvaient après l'accent; mais, par la rigueur de

leur système inaltérable qui n'admettait point de sdruccioli, ils ont été obligés d'y changer la place de l'accent, en le faisant passer de la première à la seconde syllabe, et ont prononcé facile, barbáre, dactile (§§ 905, 906). Voilà quel a été le système des Français dans la formation de leur langue. Pour être conséquens avec eux-mêmes, ils leur convint de renoncer à cette portion de douceur qui pouvait être produite par l'emploi des mots sdruccioli.

S 957. Il faut revenir encore ici, et donner plus d'étendue à tout ce que j'ai dit en passant au § 46 de la première Partie, pour mettre en évidence toute l'étendue de leur admirable système pour former une langue douce, so nore, harmonieuse, énergique, et en même tems inalté rable. Non-seulement ils voulurent abolir dans leur nouvelle langue les mots sdruccioli, mais ils voulurent aussi affaiblir ou détruire les mots piani, c'est-à-dire ceux qui ont l'accent sur l'avant-dernière syllabe; tels que les mots latins qui ont une syllabe après leur accent, comme hómo, témplo, dócta, amábo, etc. Ce ne fut pas le caprice et le hasard, mais le goût dirigé par la philosophie qui présida à la formation de cette langue, et en posa les bases. (Voyez, quant à la musique, la seconde note au § 1138). Les Français ont vu que ces dernières syllabes n'étaient que des élémens parasites qui vivaient aux dépens de l'accent qui les précédait, et que, tout-à-fait inutiles et même nuisibles, ils pouvaient les abolir dans le nouveau langage, sans rendre ni désagréable, ni obscur le son des paroles; et par conséquent ils se décidèrent à ne laisser aucune syllabe après l'accent de chaque mot. Ils voulurent former, en général, une langue de mots tronchi, c'est-à-dire de mots qui ont l'accent sur la syllabe finale (§ 44 ).

J'ai dit que ces syllabes sont tout-à-fait inutiles. En effet les paroles n'ont d'autre objet que celui d'être signes, pour

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