Sayfadaki görseller
PDF
ePub
[blocks in formation]

§ 692. On voit par le peu d'exemples que j'ai donnés de l'Ode saffica, que cette espèce de rhythme peut être employée pour des sujets d'amour, pour des louanges, et pour des descriptions pathétiques : partout la texture matérielle de cette ode garde une conduite qui, charme l'oreille.

Nous en trouvons plusieurs exemples dans Horace qui semble donner à ce rhythme une espèce de prédilection, comme on peut le voir dans les odes 2, 10, 121 20, 22, 25, 30, etc.

[merged small][merged small][ocr errors][merged small]

$ 693. Dans les traités de versification française, on ne fait pas mention de l'Ode saphique. On conclut de

là que la poésie française est aussi pauvre que sa langue, puisqu'elle ne peut pas donner ces sortes de pièces, que les Italiens ont pu imiter des Grecs, et qui font le charme` de la poésie.

:

[ocr errors]

Mais cette conclusion est fausse, car elle suppose que la langue et la versification françaises ne peuvent fournir à la poésie ces formes grecques et cette supposition est fondée sur ce qu'on n'en trouve pas des exemples. Ainsi, faute de connaissances logiques, on veut conclure à non esse ad non posse.

§ 694. Je vais faire voir que la versification française peut fournir l'exemple de l'ode saphique ; et je ne peux le prouver mieux qu'en démontrant qu'elle l'a donné en effet. J'ai dans ce moment sous mes yeux une ode de Sapho, que l'abbé Barthelemy a transcrite, dans le Voyage du jeune Anacharsis, (tom. 11, cap. 3) pour une idée exacte de l'espèce de rhythme que Sapho avait inventé. L'abbé de Lille en est le traducteur :

[merged small][ocr errors][merged small][merged small][ocr errors][merged small]

Ces vers, comme on le voit, sont endécasyllabes, tels que dans l'ode italienne citée au S 688. Le petit vers a fin de chaque strophe, est settenario. On pourrait

cependant le former de cinq syllabes, pour imiter avec plus d'exactitude le rhythme de Sapho.

Mais j'en trouve des exemples parfaits dans les poésies de Clément Marot: en voici un que je vais citer :

ODE à la déesse Santé, pour le roi François I, malade en 1539.

« Douce santé de langueur ennemie,

>> De jeux, de rys,

de tout plaisir amie,
» Gentil resveil de la force endormie
» Douce santé :

» Soit à ton los mon cantique chanté;
» Car par toi est l'aise doux enfanté,
>> Par toy la vie en corps aggravanté
» Est restaurée.

>>> Tu es des vieux et jeunes adorée ;
» Richesse n'est tant que toi désirée:
» De rien, fors toi, la personne empirée
»Ne se souvient.

» Et aussi-tots que ta présence vient,
» Pasleur s'en fuit, couleur vive revient :
» Même la mort fuyr du lieu convient
» Où tu arrives.

» Les vieilles gens tu rens fortes et vives:
» Les jeunes gens tu fais récréatives,
» A chasse, à vol, à tournois ententives
>> Et esbats maints.

» O doux repos, nonrrice des humains,
» Bien doit chascun t'invoquer, jointes mains,
» Veu que sans toy les ennuis inhumains

» Nous précipitent.

[blocks in formation]

>> Tu recevras cent mille bien venues

» Des princes hauts, et des tourbes menuës,
>> Qui sont du bras de François soutenues,
>> Roi couronné,

» Las! au besoing tu l'as abandonné,
>> Et s'est mon coeur maintesfois estonné,
» Comment d'un corps de grâces tant orné
»Tu t'es bougée !

» Où peux-tu estre ailleurs si bien logée ?
» Revien secours de nature affligée :
» Si te sera toute France obligée
» Mout grandement.

» Puis d'un tel Roy, après l'amendement,
>> Tu recevras les grâces méritoires,
» Et autre part à l'honneur mesmement,

» De ses futurs triumphes et victoires ». (1)

[ocr errors]
[ocr errors]

§. 695. Je trouve dans les poésies de Racine des exemples qui s'approchent, en quelque sorte, de l'ode saphique. La combinaison des vers en chaque strophe me paraît très-agréable, et bien analogue aux sujets des odes. Tel est, entre d'autres, l'exemple que je vais transcrire, et qui est une traduction de l'hymne de l'Eglise, Cæli Deus sanctissime, etc. :

<< Grand Dieu qui fais briller sur la voûte étoilée

» Ton trône glorieux,

» Et d'une blancheur vive à la pourpre mêlée

>> Peins le centre des cieux :

(1) J'ai voulu transcrire en entier cette ode de Marot, et j'ai voulu y observer la même orthographe de ces tems pour en donner une idée aux Italiens qui me feront l'honneur de lire cet ouvrage. On y voit en général le goût de Marot, et de la poésie et de la versification française du seizième siècle. Ce goût quant à la versification en général, et quant aux inversions, est le même que celui d'Italie. Les vers sont endecasillabi héroïques : l'accent tombe souvent sur la quatrième et la huitième, comme en italien. Le petit vers à la fin de chaque strophe est de cinq syllabes; mais la rime y est distribuée d'une manière singulière, qui ne devrait pas être agréable à l'oreille des Italiens: en effet, il n'y a pas de goût dans là méthode de faire frapper l'oreille quatre fois de suite par la même désinence.

» Par toi roule à nos yeux, sur un char de lumière;
» Le clair flambean des jours;

» De tant d'astres par toi la lune en sa carrière
» Voit le différent cours.

1.

» Règne, ô Père éternel! Fils, sagesse incréée,'
» Esprit saint, Dieu de paix,

>> Qui fais changer des tems l'inconstante durée,
>> Et ne changes jamais, etc. »

C'est la même combinaison que Racine imita de cette excellente ode de Malherbe, adressée à M. du Perier, désolé de la mort de sa fille :

<< Ta douleur, Duperier, sera donc éternelle? etc. »

C'est là où l'on admire les charmans vers suivans:

» Mais elle (ta fille) était du monde, où les plus belles choses
» Ont le pire destin:

» Et rose elle a vécu ce que vivent les roses

» L'espace d'un matin.

> La mort a des rigueurs à nulle autre pareilles:
» On a beau la prier;

» La cruelle qu'elle est se bouche les oreilles,
»Et nous laisse crier.

Le pauvre en sá cabane, où le chaume le couvre,

>> Est sujet à ses lois :

» Et la garde qui veille aux barrières du Louvre
» N'en défend pas nos rois. >>

Entre les différentes formes que les Français donnent aux strophes pour les odes, j'aime beaucoup la suivante, qui imite un peu le goût de l'ode saphique. C'est l'ode i du liv. 11 des poésies lyriques de Rousseau, qui sait s'élever très-souvent comme Pindare:

« Ah! si ce Dieu sublime échauffant mon génie, >> Résuscitait pour moi de l'antique harmonie

>> Les magiques accords;

Si je pouvais du ciel franchir les vastes routes
Ou percer par mes chants les infernales voûtes
» De l'empire des morts;

« Je n'irais point des Dieux profanant la retraite
» Dérober aux destins, téméraire interprête,

« ÖncekiDevam »