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sera pas lu inutilement par tous les littérateurs qui, dans l'examen des deux langues, italienne et française, peuvent connaître, par une application facile, les bonnes ou les mauvaises qualités de la langue de leur pays; et qui, dans l'histoire de la révolution des Beaux-Arts des deux nations les plus po→ licées du monde, voient, comme dans un miroir, la naissance, les mouvemens et les progrès des beauxarts qui languissent ou fleurisse nt, ou qui pourraient prospérer dans le sein de leur patrie. Car enfin le gé nie des arts (si l'on en excepte les climats considérés dans leurs degrés extrêmes de chaleur et de froid) est un germe que la nature impartiale a répandu sur tout l'univers; et ce n'est que dans les causes politiques et morales qu'il faut chercher les motifs de son développement.

Quelle que soit l'influence de mon Ouvrage sur les langues et les beaux-arts de toutes les nations, je ne dissimule pas la difficulté de mon entreprise; nonseulement parce que, malgré l'ardeur de mon zèle, je n'y apporte que de faibles connaissances, mais aussi

par la raison que les vérités et les découvertes que

je me propose de mettre en évidence, se trouvent en pleine opposition avec les préjugés dominans, affermis par une très-longue suite d'années. J'ose entreprendre la défense d'une langue que, par un étrange égarement, on était convenu de mépriser, en affirmant qu'elle était barbare, et qu'en même tems on a généralement aimée et admirée, par le sentiment intime qu'elle méritait bien de l'être. On a cru que cette langue était rebelle à la musique, parce

qu'on n'y chantait que de la mauvaise musique; et on a cru avoir raison, pendant qu'on se moquait d'un homme qui, en voyant un mauvais tableau, en voulait aux couleurs, qu'il croyait rebelles à la peinture. Les littérateurs qui nous suivront auront peut-être de la peine à croire qu'il ait pu exister l'étrange opinion que la langue française est dépourvue de cet accent tonique que la nature même n'a pu refuser aux jargons les plus barbares, et que l'harmonie de ses vers n'a d'autre principe que la rime et un nombré déterminé de syllabes: ils seront étonnés d'entendre un jour qu'on a pu soupçonner en France que les vrais principes de la versification dont je m'occupe dans cet Ouvrage, tendent à déprécier la beauté des vers de Boileau et de Racine! Tels sont les préjugés que je me propose d'attaquer de front en faveur d'une langue qui, par ses beautés naturelles, mérite bien d'être associée à la langue italienne que j'ai choisie dans cet Ouvrage pour modèle de beauté et de perfection.

Dans cette entreprise, j'étais bien éloigné de croire que la comparaison établie entre ces deux langues sœurs et voisines pourrait exciter des rivalités odieuses. Je fais voir en effet, dans l'une et dans l'autre, la même origine, presque les mêmes propriétés, le même accent, la même versification, et les mêmes moyens qu'on emploie, ou qu'on doit em-. ployer pour l'harmonie et la mélodie des vers et de la musique. Mais puisque ces deux langues si ressemblantes ne sont pas identiquement les mêmes, et que chacune d'elles offre des propriétés, soit essen

tielles, soit accidentelles, qui font que l'une ne soit pas absolument l'autre; il m'arrive à chaque pas d'appercevoir dans la langue française des avantages sensibles sur l'italienne, par ces propriétés mêmes qui les distinguent, et que je me suis engagé d'analyser en détail.

Ces avantages que je me fais un devoir de relever, choqueront plus que jamais les idées reçues sans aucun examen: on criera au paradoxe; et quelle que soit l'indulgence avec laquelle on voudrait accueillir les idées que je propose, on pourra tout au plus approuver mon zèle, ou quelque petit trait d'esprit capable de donner une apparence de vérité à des théories chimériques. Tel doit être le sort de certaines vérités nouvellement découvertes. Qui voudrait croire en effet que la langue française, réputée inférieure à l'italienne parle petit nombre d'élisions, dont la fréquence rend cette dernière douce et coulante, offre réellement un nombre d'élisions bien plus considérable que celui dont la langue italienne est susceptible? Comment l'homme vieilli dans toutes ces fausses routines, pourrait-il ajouter foi à des observations, d'où il résulte que la langue française, par la distribution rhythmique de son accent, est la plus musicale de toutes les langues du monde? Ces observations (et plusieurs autres exposées dans tout le cours de cet ouvrage) qui font l'éloge de la langue française, et qui, dans cette même langue universellement admirée, découvrent les raisons pour laquelle on l'admire, attaquent le domaine des préjugés qui

opposent aux idées nouvelles un droit de prescription: elles alarment en même tems la vanité des partisans de la langue italienne: ces derniers, par les vérités que je mets en évidence, voient d'un œil jaloux, non pas une langue qui veut s'associer à l'italienne, mais une rivale ambitieuse qui veut partout lui disputer le pas, en étalant de nouveaux titres de préférence : ils se font un droit de me reprocher que, sous le prétexte de défendre et de venger la langue française, j'ai fait tous mes efforts pour avilir la langue de mon pays.

pro

Quelqu'injustes que soient ces reproches qui partent ordinairement de quelques esprits médiocres et chagrins, j'aurais voulu les éviter, si un tel cédé ne m'eût exposé à justifier la conduite de ces hommes qui, engagés à la recherche des vérités relatives à l'objet qu'ils ont entrepris de traiter, se permettent d'en cacher plusieurs qui sont en opposition avec des intérêts étrangers. Admirateur de la langue italienne, et toujours fidèle aux principes qui m'attachent à l'intérêt et à la gloire de mon pays natal, et en même tems amateur de la langue française, je ne suis partisan que de la vérité, que je préfère à toute autre considération basse ou frivole. En relevant les avantages que la langue française tire de ses principes constitutifs, je ne prétends pas avilir la langue italienne qui, considérée en elle - même, offre des propriétés d'un genre particulier, qui la font admirer dans tous les styles, dans chaque espèce d'élocution: et je suis si loin de porter atteinte aux belles propriétés de cette

J

langue, que je peux me vanter, tout au contraire, d'avoir été le premier peut-être qui, par un résultat des principes exposés dans mon Ouvrage, l'ait délivrée de certaines conditions fort humiliantes auxquelles plusieurs Savans italiens avaient voulu la condamner (1).

Mes protestations que je crois raisonnables, et que je ne me lasserai pas de répéter, ne font qu'endurcir le cœur de ces deux classes de personnes qui redoublent contre moi la haine et la persécution: la recherche de la vérité que je leur propose pour ma justification, est le motif le plus puissant qui les irrite: les idées nouvelles, capables de porter la lumière dans la belle littérature, sont fausses à leurs yeux, par la seule raison qu'elles s'opposent à leurs idées routinières : ils trouvent mauvais que la raison et les faits qui intéressent la littérature soient préfé. rés à leurs sentimens.

C'est en vain que, pour appaiser leur colère, je leur répète que, même en accordant que l'impuissance de mes efforts ait trompé mon zèle, et que mon Ouvrage contienne des idées exagérées peutêtre, on devrait me permettre de hasarder ces mêmes idées, si elles peuvent conduire à la découverte de quelque vérité importante. En vain je les prie de publier leurs critiques et leurs observations : à les entendre, mon Ouvrage ne mérite pas la peine de leur censure.

Une pareille réponse m'ôte la douce consolation

(1) Voy. dans ce second vol. le § 997, pag. 425 et la note. Voy. SS 1007, 1c08, 1009.

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