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CHAPITRE XVIII

EXPÉDITION DU DUC DE GUISE EN ITALIE
(JANVIER-SEPTEMBRE 1557).

Entrée des Français en Italie.

-

Plan de campagne.

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Siège de Civi-
Commen-

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tella. Dissensions entre le duc de Guise et les Carafa. cements de rupture entre le Cardinal et les ministres de Henri II. Marche du duc d'Albe et délivrance de Civitella; retraite de Guise derrière le Tronto. Succès de Marc'Antonio Colonna. - Défaite de SaintQuentin (10 août). Henri II rappelle Guise en France. Détresse du Pontife. Divisions entre ses neveux. Coup de main du duc d'Aibe sur Rome. - Fureur du Cardinal. Nécessité de traiter avec le viceroi. Intervention du duc de Florence et des Vénitiens en faveur de la paix. Premières ouvertures. Entrevue de Cavi entre le Cardinal Signature de deux conventions de paix, l'une officielle, l'autre secrète. Duplicité du Cardinal. Il se rapproche, ainsi que son oncle, des Espagnols. Départ du duc de Guise (19 septembre 1557).

et le vice-roi.

L'armée française avait commencé à passer les Alpes dans les derniers jours de décembre 1556, sans que Henri II se crût obligé d'annoncer officiellement au roi d'Espagne la rupture de la trêve de Vaucelles. La cour de France élevait en effet cette prétention singulière que l'expédition du duc de Guise, ayant pour objet la défense du Saint-Siège, n'était pas un acte d'hostilité directe contre Philippe II. Le roi faisait publier partout qu'il voulait seulement mettre le pape et Rome à l'abri des entreprises du duc d'Albe 1. En apparence, il ne s'agissait donc

1. « Il Re di Francia sollecitato non meno dai ministri del Papa che da molti dei suoi proprii spedi il Duca di Guisa con l'esercito in Italia, non con altro titolo ed apparenza che per soccorrere il Papa e difender lo Stato Ecclesiastico dall' arme ed insolenza del Duca d'Alva. » (Cf. Pietro Nores, p. 161.) Voici maintenant en quels termes s'exprime le roi luimême dans une lettre du 28 novembre à M. de Selve, son ambassadeur, le duc de Guise étant déjà en route pour l'Italie : « Et quant à la guerre, je n'ay point les armes en main par aucune ambition, ny convoitise que

pas de recommencer une guerre générale. Cependant un coup de main malheureux tenté pour enlever Douai, la prise et le sac de Lens en Artois (6 janvier 1557) étaient peu faits pour confirmer ces déclarations pacifiques. Les Espagnols, de leur côté, tout en affectant d'observer scrupuleusement la trêve, ne témoignaient pas non plus d'un respect bien profond pour les obligations qu'elle imposait aux deux partis. On venait de découvrir à Metz une conspiration ourdie dans la ville même par certains moines franciscains pour livrer la place aux soldats du duc de Savoie et du gouverneur de Luxembourg. Un ingénieur du nom de Jacob Hectias 1, récemment arrêté, avait été trouvé muni du plan de plusieurs forteresses de la Picardie et de l'Artois, qu'il était venu lever à l'instigation des ministres de Philippe II. Ainsi, de part et d'autre, on se préparait à la lutte, on violait clandestinement la trêve, on cherchait à se rejeter la responsabilité de la rupture. Henri se lassa le premier de cet assaut de duplicité. Le 31 janvier (1557), il déclara la guerre.

Le duc de Guise était en Italie depuis les premiers jours de la nouvelle année 2. Son armée se composait de 12 000 fantassins : 7000 Français sous le commandement du duc de Nemours, et 5000 Suisses ou Gascons dirigés par René d'Elbeuf, de la maison de Lorraine. Un autre de ses frères, Claude d'Aumale, avait sous ses ordres la cavalerie, qui comptait 400 hommes d'armes et 800 chevau-légers. Les maitres de camp étaient Gaspard de Tavannes, Maurice de Sipierre et Boniface de La Motte 3. Une foule de jeunes nobles avaient voulu prendre part à l'expédition en qualité de volontaires. Ces campagnes d'Italie étaient toujours populaires en France, comme au temps de Charles VIII et de Louis XII. Notre brave et aventureuse noblesse s'y portait

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j'aye de gagner, ny empiéter sur Royaumes, Estats et Seigneuries. (Cf. Ribier, t. II, p. 670.) Et ailleurs, dans une lettre à M. de La Vigne, ambassadeur auprès de la Porte, le roi dit encore: « Là-dessus ledit SaintPère m'auroit fait faire instance de l'aider et secourir contre ses ennemis, comme j'estois et suis tenu de faire par la ligue d'entre nous, sans que pour cela néantmoins l'on me puisse alléguer ny inférer qu'en ce faisant je sois sorty hors des termes de la trêve. » (Cf. Ribier, t. II, p. 661.)

1. Tel est le nom donné par Pietro Nores (Archiv. Stor. Ital., t. XII, p. 160). Simon Renard l'appelle différemment : «< L'ingeniaire que les Françoys ont prins se nomme Jacques de Flotris, de Saint-Omer, qui par question et torture reiterée a confessé que mondict Sr le duc et le Sr de Glayon l'ont envoyé pour recongnoistre et déseingnir les fortifications des frontières. » (Cf. Pap. de Granvelle, t. IV, p. 657.)

2. « ..... Giunse in Italia nei primi giorni dell' anno nuovo.... » (Cf. Pietro Nores, p. 161.) On peut lire dans Ribier, tome II, page 669, le texte de la lettre par laquelle Henri II recommandait au pape le duc de Guise. 3. Cf. P. Nores, loc. cit.

avec enthousiasme 1, sans daigner compter combien peu revenaient d'ordinaire de ceux qu'on avait vus partir.

Guise parvint rapidement à Turin. L'occupation du Piémont par les troupes de Brissac diminuait sensiblement les difficultés ordinaires d'un passage des Alpes. L'heureux général n'eut à surmonter que les obstacles naturels, au lieu d'avoir à lutter encore, comme tant de ses devanciers ou de ses successeurs, contre une armée ennemie maîtresse des passages ou des débouchés. A Turin, il fit sa jonction avec Brissac. Une partie de ses troupes descendit le Pô sur des barques et ne rencontra quelque résistance qu'à Pontoscuro, où la garnison d'un petit fort bâti par les Espagnols essaya de se défendre 2. Avec le reste de son armée, le duc passa le fleuve à Casale et marcha droit sur Valenza, qui se rendit après quelques jours de siège. Là, les deux généraux français, qui jusqu'alors avaient opéré de concert, se séparèrent 3. Brissac rentra dans le Piémont, tandis que Guise, par le Placentin et le Parmesan, se dirigeait sur Reggio. Cette ville s'élève sur un petit affluent de droite du Pô, le Crostolo, à une quinzaine de kilomètres à l'est d'une autre petite rivière, l'Enza, qui séparait alors les terres du duc de Ferrare de l'Etat voisin, le duché de Parme. Le général français était attendu à Reggio par le cardinal Carafa, le duc Hercule de Ferrare et l'évêque de Lodève, ambassadeur de Henri II à Venise. Quand on sut qu'il avait passé l'Enza et pénétré sur le territoire de Ferrare (16 février), le duc Hercule s'avança au-devant de lui en pompeux appareil, à la tête de sa petite armée. Dès qu'il aperçut son beau-père, au milieu d'un brillant cortège de gentilshommes, Guise descendit de cheval, et lui remit au nom du Roi, avec toutes les marques extérieures de déférence et de respect, les insignes du généralat de la ligue. Le duc de Ferrare, de son côté, lui fit mille compliments, voulut qu'il passât la revue de ses troupes. Puis on entra à Reggio *.

1. « ....

Outre ce, un bon nombre de seigneurs et gentilshommes de la chambre, et autres de la jeunesse qui estoit accourue à ce voyage, tant pour l'espérance d'y voir et apprendre quelques choses, comme le François est naturellement curieux, que pour estre mon dit sieur de Guise merveilleusement aimé et suivi de toute la noblesse.» (Cf. Mém. de la Chastre, Coll. Petitot, série I, tome 32, p. 476.)

2. Cf. P. Nores, p. 161, 162.

3. Cf. Id., ibid.

4. Cf. Id. ibid: « Segui fra loro un cóngresso pomposo e maestevole..... il Duca di Guisa smontò da cavallo e con atti e con parole di riverenza consegnò a quello di Ferrara in nome del Re di Francia il bastone, lo scettro, solita insegna del generale. » (Voir dans Ribier, t. II, p. 672, la lettre de Henri II au duc de Ferrare, du 28 novembre 1556.)

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Un conseil de guerre y fut aussitôt tenu. Le duc de Guise voulait faire campagne en Lombardie. Dans de précédentes conférences, Brissac et son lieutenant Louis de Birague s'étaient déjà déclarés partisans de ce projet. Le Piémont donnerait une bonne base d'opérations. On pourrait prendre Crémone. Outre que la place n'était pas très forte d'assiette, on savait sa garnison insuffisante. Crémone enlevée, on barrerait la route aux troupes levées en Allemagne et en Suisse par Philippe II, si bien que Milan se trouverait à découvert 1. Ce plan ne fut malheureusement pas adopté, bien qu'il fût sage et pratique. Vivement attaqué par le cardinal Carafa, il ne fut peut-être pas suffisamment défendu par le duc de Guise. Héritiers de la maison d'Anjou, les princes lorrains prétendaient tenir d'elle certains droits sur Naples 2. La conquête du royaume flattait ainsi l'ambition du duc François, en même temps qu'elle ouvrait une magnifique carrière à ses talents militaires. Il est donc fort probable qu'il consentit sans trop de difficulté à l'abandon du plan primitif, dont la vieille expérience de Brissac avait bien vite reconnu tous les avantages 3. Il fut alors question d'attaquer le duc de Parme pour le punir de sa récente défection. Mais Guise fit observer que, tout en s'étant réconcilié avec Philippe II, Ottavio Farnese ne s'était pas déclaré contre la France. Il était bien difficile d'envahir sans aucun prétexte les Etats d'un prince qui ne cessait de protester de son dévouement à la personne du roi de France ". Ce second projet écarté, on parla de pénétrer en Toscane et d'attaquer le duc de Florence 5. Mais alors on se heurta de nouveau contre l'opposition du cardinal Carafa. Tous ces plans, qui laissaient Rome à la merci du duc d'Albe, ne pouvaient satisfaire le neveu de Paul IV. Il s'efforça de démontrer que l'armée française devait accourir à la défense de l'Etat ecclésiastique, et qu'en attaquant le royaume de Naples on frappait le roi d'Espagne au coeur même de sa puis

3

1. Cf. l'exposé de ce plan de campagne dans P. Nores, p. 163.
2. Cf. Henri Martin, Hist. de France, tome VIII, p. 446.

3. Il paraît que les Espagnols craignaient tout particulièrement une
Il che alcun tempo dopo testificò il
campagne dans le Milanais : « .....
cardinal Madruccio stesso affermando, che siccome non d'altra risoluzione
maggiormente temeva, che di questa, cosi essersi maravigliato ed aver
rese grazie a Dio, quando udi le forze dei collegati allontonarsi e lasciar
libera la Lombardia e lo Stato di Milano. » (Cf. Pietro Nores, p. 164.)
4. Cf. Id. ibid. · Ottavio était chevalier de l'ordre de Saint-Michel.
5. Cf. Id., ibid.

6. «Ma troppo persisteva nella sua determinazione il cardinale Caraffa, cioè che s'andasse a dirittura ad investir il Regno, levando gli eserciti imperiali dalle fauci dello Stato Ecclesiastico... » (Cf. Id., ibid.)

sance en Italie. Il insista sur la facilité de l'entreprise et l'importance de ses résultats. Il parla de nouveau des intelligences que sa famille avait conservées dans le Napolitain, des soulèvements qui ne pourraient manquer d'éclater à l'approche des troupes françaises unies aux forces pontificales. Enfin, il déclara que la volonté du pape était que le duc de Guise accourût à Rome. Or, comme le roi avait donné à son général l'ordre exprès de se conformer aux instructions de Paul IV 1, toute hésitation devenait superflue. Il fut donc décidé que l'armée se rendrait à Rome.

Cette résolution était contraire aux vœux du duc de Ferrare. De tous les plans proposés et examinés, on adoptait celui-là précisément qui se trouvait en opposition avec ses intérêts. L'entreprise contre Milan lui ouvrait une voie d'agrandissements dans la vallée du Pô. Celle contre Parme lui permettait d'élargir ses frontières aux dépens d'un Etat voisin. Celle contre Florence affaiblissait un rival dangereux. Chacun de ces trois projets avait eu successivement son adhésion, avait été défendu par lui dans le conseil. Et néanmoins, grâce à l'intervention du cardinal Carafa, on se décidait à abandonner la haute Italie, à s'enfoncer dans le sud pour y tenter l'aventure d'une conquête de Naples. Qu'allait donc devenir, au milieu de tous ses voisins ouvertement ou secrètement hostiles, le petit Etat de Ferrare, si gravement compromis par son adhésion à la Ligue Le duc était un homme prudent et avisé. Encore qu'il fût bon parent et qu'il nourrît les meilleurs sentiments à l'égard de son gendre le duc de Guise et de son neveu le roi de France, Hercule d'Este était plein de tendresse pour sa principauté. Il la trouvait belle, il l'aimait beaucoup plus sans doute que sa femme, cette Renée de France, fille de Louis XII, qui rendait la vie si dure à son mari depuis qu'elle s'était convertie au protestantisme 3. Dès qu'il vit le péril auquel allait être exposé son Etat, le duc de Ferrare se dégoûta subitement de cette ligue dont le Saint-Siège prétendait recueillir tous les fruits pour lui seul. Il pesa les avantages et les inconvénients de son intervention dans la lutte, et, comme il vit que la balance

1. « Dava calore a queste ragioni l'espresso precetto del Re di Francia, che precisamente comandava a Guisa che ubbidisse al Papa, e le cose si regolassero secondo i suoi interessi e secondo la sua volontà. » (Cf. Id., ibid.)

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2. « Restava il suo stato alla discrezione degli Imperiali e del Duca di Parma che'l circondavano e conseguentemente in gravissimo pericolo.... (Cf. P. Nores, p. 165.)

3. Cf. Ribier, tome II, p. 599 et sq.

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