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templation et la vision de Dieu face à face, et, par ce moyen, le repos de l'intelligence et de la volonté dans l'intelligence et la volonté divines, dans l'unification et l'identification avec Dieu; 2o que, dans cet état, les bonnes œuvres, même prescrites par les Vêdas, sont inutiles, nuisibles même, quand on n'y est pas définitivement établi, parce qu'elles empêchent d'y arriver; 3o que les œuvres, soit bonnes, soit mauvaises, ainsi que les affections' vertueuses ou vicieuses ne sauraient affecter l'âme constituée en cet état, ni l'en faire déchoir, quelque criminelles qu'on les supposè : ce qui revient à dire que, dans cet état, l'homme perd tout sentiment, toute activité, toute volonté propres ; qu'il est impeccable," parfaitement unifié avec Dieu : c'est,' comme on dirait aujourd'hui, la théorie de l'illuminisme, du quiétisme, de l'inamissibilité de la justice, de l'indifférence des œuvres pour la sainteté et le salut 2.

Le mot affection signifie, comme en latin afficio, toute impression produite dans un être et qui y apporte un changement. En parlant de l'âme, il désigne toutes les pensées, les sentiments, les désirs, les volitions, etc.

• L'illuminisme est un système d'après lequel l'homme peut et doit prétendre, dès cette vie, à des visions surnaturelles, à être éclairé immédiatement par Dieu, à le voir face à face par une méditation intense ou la contemplation; alors seulement il a la vraio science, la sagesse, le repos de son esprit par l'union de son intelligence avec la sagesse divine, parce que Dieu seul est la lumière des âmes.

Le quiétisme est à la volonté de l'homme ce que l'illuminisme est à son intelligence. C'est un système d'après lequel l'homme peut et doit prétendre, dès cette vie, à une union si intime de sa volonté, de son activité et de son amour avec Dieu, qu'il n'ait plus rien à vouloir, à faire et à aimer en cette vie; mais seulement à se reposer en son union avec Dieu, qui veut, pense, aime et agit pour lui en toutes choses.

·De lå le nom d'illuminés (on devrait dire illuministes), et celui de quiëtistes, donnés aux partisans de ces deux systèmes. On comprend aisément que de l'un à l'autre le pas est glissant et la transition facile: aussi les trouve-t-on constamment réunis dans les théories outrées de mysticisme, soit dans l'Inde, soit dans les autres contrées et dans les époques qui ont suivi celle dont nous parlons.

Lorsque ces mystiques, non contents de Punion parfaite de leur âme à Dieu par l'intelligence et la raison, par l'amour, l'activité et la volonté, pré

L'âme de l'homme était autrefois l'ame universelle (Dieu): quand elle " s'en ressouvient et qu'elle y médite, « elle redevient Dieu.......... Quand le cœur « est pur, il est vérité et lumière, il con« naît l'âme universelle, il se transforme « en Elle, il devient Elle-même et il n'en sera jamais séparé..... Le cœur ainsi absorbé dans l'Être parfait, en médi«tant sur son existence infinie et abso« lue, possède alors un bonheur ineffa<«<ble; il sait que cet Être est dans lui.....* << et lui dans cet Être. et que cet Être

« et lui ne font qu'un.................. <En effet, la nature du cœur est d'être « transformé dans la chose qu'il désire : <«< ainsi l'âme devient Dieu ou le monde," « selon qu'elle tourne ses pensées vers << Dieu ou vers le monde. Lorsque le «< cœur a renoncé aux désirs et aux ac« tions, par là même il va à son principe," « qui est l'âme universelle; il est pur et << il n'a aucune volonté que celle de l'Étre << véritable; il est dans la quiétude : dans « le cas contraire, il se souille.... il a des volontés, il est dans l'agitation, il « a des peines, il souffre.

‹ Le cœur impur est donc celui qui a' « des volontés; le cœur pur est celui qui› « n'en a conservé aucune..... Ce qui fait « renoncer à toute volonté, c'est de mé

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L'inamissibilité de la justice ou l'impeccabilité,* l'inutilité et l'indifférence des œuvres, soit bonnes, soit mauvaises, pour la sanctification de l'âme et son salut éternel, sont des conséquences nécessaires de l'illuminisme et du quiétisme. En effet, si c'est Dieu qui pense, agit et fait tout en moi et par moi; si mon âme est identifiée avec lui à tout jamais, qu'aije besoin de penser et d'agir encore? Cela n'est même plus possible: unifié que je suis avec Dieu, je suis Dieu moi-même, je suis impeccable, infaillible; aucune obligation, aucun devoir, aucun péché ne sauraient m'atteindre, ni préjudicier à la sainteté de mon âme. Toutes les pensées, toutes les œuvres sont pour moi comme si elles n'étaient pas; car moi-même je ne sais pas, absorbé, anéanti que je suis dans le sein de Dieu; et bien que je paraisse encore penser, agir, exister, il n'en est rien: c'est Dieu qui existe, pense et agit en moi. Je vis en lui; et lui en moi je suis Dieu.

diter sur le Créateur, qui est la lumière pure et sans fin..... Qui sait que ce ⚫ monde vient du Créateur, subsiste dans ‹ le Créateur et y retourne ; qui sait cela et le médite, prend, dans cette médi<tation, le repos de son esprit, ses œuavres sont pures, ses volontés sont « droites..... Qui connaît Dieu, cet Étre universel; qui sait que son âme est l'âme universelle, devient lumière, est « délivré de tout mal, de toute activité, de toute agitation; il est dans le repos « et la quiétude; il est la science (à plus « forte raison il la possède), sans faire ⚫ de fatigantes lectures; il est heureux; il est immortel; il est Dieu : et (ainsi« a unifié avec Dieu) il produit les mon<des et les conserve; il nourrit ce qui ‹ respire;..... il est l'âme de toutes choses; il jouit de toutes les jouissances des êtres heureux; il sent par tous les organes des êtres sensibles; toutes les jouissances, tous les plaisirs lui sont faciles...., puisqu'il est Dieu, l'âme < universelle, tout ce qui est, et que « l'univers c'est lui.

Dans cet état, on ne désire rien, parce que tous les désirs sont accom• plis, qu'on est plein de l'Être qui est « tout, et que, dans la vérité, on possède tout..... Le désir de faire une œuvre ‹ pure, la crainte de faire une œuvre ◄ mauvaise, ne font point de peine au vrai savant; car il sait que l'œuvre pure et l'œuvre mauvaise sont, l'une et l'autre, Dieu même qui agit.... C'est « Dieu qui agit par nos sens; c'est Lui ‹ qui fait la volonté et le péché; qui ressent les plaisirs de la volupté et ‹ cause les désirs........... Qui connaît ainsi ‹ ce que c'est que l'œuvre pure et l'œuvre mauvaise, deviendra Dieu..... Les • bonnes œuvres ne lui servent pas, les ⚫ mauvaises ne lui font aucun tort: il ⚫ est exempt de tout le mal que peuvent « éprouver les êtres créés....... L'im• peccabilité, l'impassibilité, le salut « éternel, la déification lui sont égale◄ment assurés d'une manière absolue... Qui me connaît, dit Brahm, quelque « péché qu'il fasse, quelque crime qu'il commette, la lumière qui est en lui ne sera pas diminuée; il ne sera pas pécheur, parce que je suis l'âme universelle qui seule existe, pense, veut

et agit..... En connaissant le Créateur, en sachant que tout est Lui, le savant a devient Lui-même et cette science «dure toujours.

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« La vérité est qu'il n'y a, en réalité, << ni production, ni destruction, ni résurrection, ni contemplateur, ni sauvé, ni salut, ni justes, ni pécheurs, ni bien, ni mal........... L'univers n'est qu'une « apparence; il n'y a rien de réel que « l'âme universelle, Dieu, qui se manifeste diversement sous l'apparence du « monde. Qui sait cela est lui-même Dieu; « il est doué de toute espèce de pouvoirs « divins et surnaturels; il est digne de tout culte, il faut l'adorer.

Ainsi conclut l'Oupnékhat, savoir « qu'on est le Créateur, que tout est le Créateur; voilà le secret et la substance des Vêdas'. ›

L'abbé J.-B. BOURGEAT,
Professeur de philosophie.

'Oupn. Brahm. 65, 72, 75, 83, 44, 110, 131-134, 166, 88.— La plupart des textes de l'Oupnéh'hat, que nous venous de citer, se trouvent dans l'Analyse de l'Oupnéh'hat, par M. le comte de Lanjuinais, pair de France. V. Journal asiatique de la Société asiatique de Paris, t. 2, 3 (1823). Manava-DharmaSâstra, I. XII. Cette théorie mystique, qui embrasse toute la vie humaine est l'objet du célèbre épisode philosophique le Bhagaval-Gita, dont on peut voir en abrégé l'exposition brillante dans Cousin, Hist. de la phil., t. 1, p. 218.

Tout le monde sait que la plupart de ces erreurs ont été enseignées par Molinos et condamnées par le pape Innocent XI. Les protestants les ensei. gnaient aussi dans le principe, sans toutefois les rattacher à des théories aussi mystiques ni aussi méthaphysiques que celles de Molinos et des Brah

manes.

Luther a soutenu les propositions suivantes : L'homme n'est pas libre; le libre arbitre, c'est-àdire la liberté et la volonté de l'homme sont purement passives et nécessitées, soit au bien par la grâce divine, soit au mal par le mauvais penchant de notre nature déchue. Le libre arbitre n'est qu'une étiquette, un mot sans réalité, et on devrais l'appeler plutôt serf-arbitre. Dieu fait tout en nous : le péché aussi bien que la justice. L'homme est sauvé par la foi seule sans les œuvres; les bonnes rendre l'homme meilleur et plus juste, et les mauœuvres sont inutiles au salut; elles ne peuvent vaises ne peuvent le rendre méchant, ni faire qu'il soit damné : or, la foi qui sauve indépendamment des œuvres et même malgré elles, c'est la confiance ferme et intime de la grâce et de la bonté divines dans notre âme. Aucun péché, quelque énorme qu'il

soit, excepté l'incrédulité (c'est-à-dire le manque de confiance de l'unión de notre âme à Dieu par la grâce), ne peut damner un fidèle, ainsi devenu juste par la foi seule. Dieu a décrété de toute éternité le bien et le mal, et prédestiné tous les hommes, les uns aux salut, les autres à la damnation, indépendamment de leurs mérites.

acquise par la foi est inamissible, quelque péché que l'on commette, Dieu faisant, par sa grâce, que le fidèle ne puisse jamais en déchoir totalement ni pour toujours.

Telle est la doctrine de ces deux hommes que l'on appelle encore aujourd'hui, dans un certain monde, les fondateurs de la liberté humaine dans l'ère chrétienne et les sages adversaires du fanatisme reli

Calvin a enseigné les mêmes erreurs que Luther sur ces matières; il a été plus explicite que le réfor-gieux: telles sont les erreurs monstrueuses que le

mateur allemand sur plusieurs points; par exemple, quand il enseigne que tous les fidèles doivent avoir une certitude absolue de leur justice ou sainteté actuelle et de leur salut éternel: la justice ainsi

concile de Trente et toute l'Église catholique on't condamnées dans les protestants par une intolérance impardonnable aux yeux de certains philosophes et de quelques historiens.

Cours de la Sorbonne.

COURS D'HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE, DE M. L'ABBÉ JAGER,

RECUEILLI PAR M. L'ABBÉ MARCEL.

TROISIÈME LEÇON'.

La Papauté au 10° siècle.

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Retour à une question qui est la clef de voûte de l'histoire du moyen âge. Election des empereurs. Sens de ce titre. Promesse de l'empereur Lambert. Formule du serment des empereurs. - Valeur du titre impérial. Antiquité de la charge attachée au titre. — Usage de la recommandation. Collation de la couronne impériale. Pourquoi Charlemagne n'en dispose pas par testament. Pourquoi le pape est premier électeur du souverain qui aspire à la couronne impériale. Faits à l'appui de ce droit. prématie légitime de la papauté sur l'Empire. Succession et confusion d'empereurs. Invasion du Saint-Siége par les factions. Mauvais papes. - Trois époques. Papes de la première époque. Justification de l'Eglise.-Inaction forcée Triomphe de la simonie et décaHonorables exceptions. Pourquoi.

-

de la papauté. dence de la discipline.

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Messieurs, dans nos deux dernières | réunions, j'ai touché à plusieurs questions d'une haute importance, mais je ne les ai pas assez approfondies pour établir ma pensée, et les observations qu'on bien voulu m'adresser me déterminent aujourd'hui à revenir sur le même sujet et à le creuser davantage,

Voir la 11 leçon au, numéro précédent ci-dessus, P. 123.

avant de continuer l'histoire de la papauté au 10° siècle. Je vous demande 9 Messieurs, l'attention la plus soutenue, car dans cet entretien je dois en quelque sorte vous mettre à la main la clef de l'histoire du moyen âge; sans cette clef on ne peut voir que le dehors de l'édifice, il devient impossible de pénétrer dans l'intérieur.

Je vous ai parlé de l'empressement qu'ont montré les papes, après le déchirement de l'empire de Charlemagne, à chercher un homme à qui ils pussent conférer le titre d'empereur ; je vous ai dit que, après la mort de Charles-leGros, Gui, vainqueur de Bérenger et resté seul maître de cette partie de l'Italie qui appartenait aux Francs, avait d'abord obtenu ce titre; que, plus tard, Arnoul, fondateur du royaume d'Allemagne, avait également été investi par le pape du même honneur, et qu'ainsi il y avait alors deux empereurs ; que le pape Jean IX, voulant régler définitivement les affaires de l'Église et de l'État, n'avait reconnu qu'un seul empereur, Lambert, fils de Gui, et que, concile tenu à Rome, il avait enlevé à Arnoul le titre d'empereur sous le prétexte qu'il l'avait extorqué.

dans un

Pourquoi cet empressement du pape à chercher un empereur, et d'où vient

cette détermination, d'offrir la cou- tion au rétablissement de l'empire en ronne d'empereur à un petit souverain Occident; ils disent que Charlemagne et de la retirer des mains d'un autre? | l'a prêté au pape Léon III en recevant la Ce sont les questions sur lesquelles je couronne impériale. Mais les historiens dois appuyer. Ces événements seraient contemporains ne mentionnent pas ce incompréhensibles pour qui n'aurait fait, et il est trop incertain pour qu'on pas une idée juste, nette et précise de s'y appuie. Ce qui, du moins, paraît la position de l'empereur, relativement indubitable, c'est que ce serment a été à la papauté. Cette position est mal dé- prêté par ses successeurs: nous le décrite, incomplétement expliquée par couvrons dans un ancien sacramennos historiens français, et c'est pourquoi taire que la critique la plus sévère atje réclame avec tant d'instance votre tribue au 9° siècle, et qui en effet est attention. marqué au coin de cette époque. En voici la formule: « Moi, N., roi des Romains, futur empereur par la grâce de Dieu, promets et jure, devant Dieu et devant saint Pierre, d'être désormais protecteur et défenseur du souverain pontife et de la sainte Église romaine dans toutes ses nécessités et ses besoins, gardant et conservant ses possessions, ses honneurs et ses droits, autant que je le saurai et le pourrai avec le secours de Dieu, en pure et bonne foi. Qu'ainsi Dieu m'aide, et les saints Évangiles".

Le souverain qui recevait la couronne impériale se portait comme le protecteur né du Saint-Siége, comme le défenseur de ses droits temporels et spirituels. Cette charge tenait au titre, et y tenait à tel point que sans elle on ne le comprenait pas; empereur et patron du Saint-Siége, c'étaient, dans la langue du moyen âge, deux parfaits synonymes, deux termes identiques. Chaque roi, dans son royaume, était obligé de défendre l'Église contre les hérétiques et les schismatiques, car la loi chrétienne était devenue loi de l'État, et la sanction civile protégeait la foi catholique; mais la défense particulière du Saint-Siége était spécialement attribuée à l'empereur, et ce n'était qu'en vue de cette protection qu'on lui conférait ce titre distinctif. Cette idée, nous la trouvons implantée dans tous les esprits de cette époque, et, plus tard, nous la verrons consignée dans la législation par le serment imposé à l'empereur. Ainsi, lorsqu'en 898, dans le concile de Rome, sous Jean IX, on donne le titre impérial à Lambert, à l'exclusion d'Arnoul qui l'avait reçu du pape Formose, le nouvel empereur promet de défendre l'Église romaine, d'en rehausser l'éclat selon son pouvoir, et de conserver sous sa sauvegarde tous les priviléges que lui ont accordés les empereurs chrétiens. Nous parlerons tout à l'heure de ces priviléges. Cet engagement solennel de l'empereur équivaut à un serment, et c'est le premier que nous trouvons dans les monuments historiques.

Il y a des auteurs qui prétendent que ce serment est beaucoup plus ancien et qu'il faut en faire remonter l'introduc

Vous voyez, Messieurs, par les termes de ce serment, comme vous le verrez par les faits, que l'empereur, en recevant la couronne, s'engageait à défendre non-seulement le patrimoine de saint Pierre, mais l'action de la papauté partout où elle se produisait. Lorsque cette action était gênée, contrariée, arrêtée par quelque obstacle, l'empereur était là pour le lever; c'était son devoir, c'était son droit, et c'est à ce titre qu'il était revêtu de la dignité d'empereur, sorte de compensation des services qu'il avait rendus et de ceux qu'il s'engageait à rendre.

Cette dignité était alors en Occident la plus haute distinction, l'honneur le plus insigne qu'un roi pût obtenir; elle élevait les souverains qui l'avaient reçue au-dessus de tous les autres et leur assurait une immense influence dans la politique de l'Occident. Aussi Charlemagne datait-il les années de son règne de l'époque où il en avait été investi. Nous pouvons juger de son importance par l'empressement avec lequel

• Gosselin, p. 206, note.

Pouv. du Pape au moyen dge, p. 208...

on la recherchait. En 874, après l'em-'| pereur Louis II, mort sans enfants, Charles-le-Chauve accourt à Rome avec une extrême célérité, et, au rapport d'un historien contemporain, il corrompt le sénat à force d'argent, il fait de magnifiques présents à l'église de saint Pierre, au clergé et au peuple, afin de les gagner, car l'affaire étant purement temporelle, le pape ne pouvait agir sans le conseil du sénat et le consentement du peuple, et il parvient à obtenir des mains du pape Jean VIII cette couronne impériale tant désirée 1. Le titre impérial était un honneur non-seulement pour le souverain qui l'obtenait, mais encore pour le royaume à la couronne duquel il se rattachait; les peuples étaient fiers de marcher sous la conduite d'un empereur et les seigneurs réunissaient leurs efforts pour faire conférer à leur chef cette distinction. À la mort de Charles-le-Chauve, en 875, vous voyez les seigneurs allelemands la solliciter pour Carloman, roi de Bavière; à la mort d'Arnoul, pour son fils Louis. C'est que défendre le Saint-Siége, c'était défendre le foyer de la civilisation, le principe de la vie politique, le premier moteur du mouvement du monde moral, et ce poste d'honneur ne pouvait être confié qu'à des guerriers d'élite, à un capitaine éprouvé. Ce serait pour nous chose mesquine, et qui provoquerait le dédain de nos hommes d'État, d'être appelés à protéger la papauté. C'est bien à des hommes qui ne savent ni ce que c'est que la religion, ni s'ils en ont une, qui ne tiennent compte ni de la force de la vérité, ni de la puissance de l'unité, ni de l'inspiration des croyances, mais qui ne sont occupés qu'à empiler des écus et à dénombrer des baïonnettes qu'il faudrait montrer un centré d'action spirituelle à défendre; accroupis sur leurs grossiers intérêts et plongés dans l'épais brouillard des bas-fonds où ils se tiennent, ils ne peuvent contempler l'harmonie des hautes sphères d'où la lumière et la chaleur

* Fleury, t. II, p. 385. →→ Bossuet, Def. Deelar., lib. 11, 9. xxxix, §. IX, p. 165.

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viennent vivifier le monde, et s'ils por tent vers Rome leurs regards hébêtés, ils ne voient dans le souverain pontife de la catholicité qu'un vieillard défaillant assis sur un trône vermoulu; ce n'est pour eux qu'un souverain étranger. Le moyen âge portait la tête plus haute et voyait plus loin; il avait saisi cette grande et belle idée du monde politique et moral pivotant sur le centre qui était à Rome; tout gravitait sur ce point, et au moment du danger tous les efforts y convergeaient pour le défendre. Les Carlovingiens, les Othons, tous les empereurs de ces temps héroïques avaient avec leurs peuples cette vue large et profonde; elle exerçait une salutaire influence sur la société, et la paix qu'elle entretenait serait devenue féconde si les empereurs avaient su s'enfermer dans les limites de leurs devoirs et de leurs droits.

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Cette conception néanmoins n'était pas neuve: elle avait été celle de Constantin qui s'appelait l'évêque du dehors, le défenseur de la religion et de son chef; elle avait été celle de tous les vertueux empereurs d'Orient. Leur législation en fait foi. Théodose et Valentinien prescrivent aux évêques d'obéir au pape et de né rien entreprendre sans son approbation; de regardér comme une loi ce qu'ordonne l'autorité du siége apostolique. Les évêques, s'ils sont appelés à son tribunal, et s'ils refusent d'y comparaître, ils y doivent être contraints par les gouverneurs des provinces. Charlemagne s'empara de cette pensée, il la développa et l'appliqua avec toutes les ressources de son génie, et depuis son époque l'empereur était le protecteur du Saint-Siége.

Selon les idées et les usages de ces temps conformes, il faut le dire, aux idées qui prévalent actuellement et que nous avons eu tant de peine à retrouver, c'était au protégé de choisir son protecteur. Au moyen âge, on cherchait un protecteur de sa propriété ét de son droit: on prenait dans la main une touffe de gazon ou un rameau vert, et se présentant devant l'évêque, l'abbé du monastère, le seigneur ou le

Cod. Theod., Novell., lib. r, tit, 24.

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