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REVUE

RECUEILS PERIODIQUES

BIOLOGIE (1)

A propos de la thérapeutique antirabique, d'application encore toute récente, le D' Roux écrivait en 1896: « La découverte de la prophylaxie de la rage a soulevé partout un véritable enthousiasme. Elle a plus fait pour la popularité de Pasteur que tous ses travaux antérieurs. En retour d'un semblable bienfait, le grand public voulut manifester sa reconnaissance d'une façon digne de lui et de celui qui en était l'objet : une souscription fut ouverte qui permit la fondation de l'Institut Pasteur (2). »

Pasteur guérissait de la rage; c'en était assez pour justifier l'admiration et la reconnaissance du « grand public ». Peu importait, dès lors, que l'agent pathogène de la terrible maladie reståt longtemps encore, et même toujours, inconnu. En fait, Pasteur est mort sans le découvrir. On raconte bien qu'il crut un jour l'avoir révélé, mais il ne s'en ouvrit qu'à quelques intimes, car il ne put jamais l'identifier avec certitude. Il se peut d'ailleurs que cette identification lui parût à lui-même un détail assez insignifiant, après le succès inespéré de ses inoculations immunisantes. Un fait, rappelé par E. Duclaux, nous permet du moins de le supposer : « Un micrographe habile et convaincu étant venu un jour lui dire, avec toute espèce de précautions de langage, que tel microbe qu'il avait pris pour un coccus était en réalité un tout petit bacille, fut tout étonné de l'entendre

(1) ÉTUDES, livraison du 5 novembre 1913, p. 377: A propos du microbe de la rage, L. Boule.

(2) Dr Roux, L'œuvre médicale de Pasteur, AGENDA DU CHIMISTE, 1896, p. 543.

répondre « Si vous saviez combien cela m'est égal (1)! » L'homme qui s'intéressait si peu à la morphologie microbienne ne devait apporter qu'une ardeur très modérée à la recherche, dans le virus rabique, de la forme parasitaire qui devait être, à l'exclusion de tous les autres éléments figurés, regardée comme la cause immédiate de l'infection.

Cette forme parasitaire, on vient, paraît-il, de la découvrir. Il est probable que « le grand public » ne manifestera pas, à cette occasion, le même enthousiasme que pour la découverte de la thérapeutique antirabique. Nous avons déjà, à ce sujet, entendu la réédition, sous une autre forme, du mot de Pasteur: « Si vous saviez combien cela m'est égal ! » N'en sait-on pas assez sur une maladie quand on possède contre elle un remède efficace et rapide ?... Le microbe de la rage doit donc s'attendre à être reçu avec assez d'indifférence; seuls les savants feront fête à ce nouveau venu, et nous aimons à croire, du reste, que c'est là tout ce que désire M. le D' Hideyo Noguchi, le jeune et déjà illustre bactériologiste japonais, qui a eu la bonne fortune d'observer le premier, dans ses cultures rabiques, l'agent infectieux si longtemps cherché (2).

Les termes de virus, de virulence, d'infection, et quelques autres, viendront souvent sous notre plume. Ce sont des termes déjà connus, mais non pas nécessairement compris de tous ceux qui les lisent. Il importe d'autant plus cependant de s'en faire une idée précise, que leur signification, au cours du siècle dernier, a fatalement subi le contre-coup de l'évolution même des doctrines médicales sur ces matières. Que les non-initiés se rassurent; nous pensons pouvoir les amener, sans leur demander de trop grands efforts, à comprendre l'essentiel de ces questions spéciales, en leur exposant, divisé en trois étapes, l'historique de nos connaissances sur la maladie de la rage: l'étape des théories sur la virulence, l'étape des observations histo-pathologiques, l'étape de la découverte du microorganisme rabique.

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L'étape des théories sur la virulence. Pasteur, et avant lui, le Dr Duboué, en provoquant les symptômes rabiques par

(1) E. Duclaux, Pasteur, histoire d'un esprit, 1896, p. 316.

(2) Hideyo Noguchi, né à Wakamotou le 24 novembre 1876, est entré en 1904 à l'Institut Rockefeller pour les recherches médicales. C'est dans cet établissement scientifique, célèbre depuis quelques années par les expériences de Carrel sur la culture des tissus et des organes hors de l'organisme, que le Dr Hideyo Noguchi a entrepris ses recherches sur le microbe de la rage.

inoculation soit de salive, soit de substance nerveuse prélevée sur des sujets morts de rage, avaient démontré que la matière inoculée contenait des produits capables de déterminer, dans l'organisme soumis à l'expérience, des lésions identiques à celles de l'organisme d'où elle provenait. Et comme dans l'organisme tout est cellules ou produits de cellules, la matière inoculée renfermait donc, soit ces produits seuls, soit, avec eux, les cellules elles-mêmes qui les élaboraient. On était en 1881, et, à cette époque, la question de la virulence des tissus et des humeurs avait fait, sous l'influence prépondérante de Pasteur, d'assez notables progrès pour qu'une conclusion comme celle que nous venons de formuler ne rencontrât pas trop d'opposition dans les milieux biologiques et médicaux. Mais ces progrès ne dataient pas encore de très loin. On savait bien, depuis assez longtemps déjà, que les parties lésées de l'organisme, au cours de certaines maladies qualifiées d'infectieuses, devenaient capables de transmettre ces mêmes maladies, par pénétration dans un organisme sain; que le liquide, par exemple, qui se développe dans les pustules de la variole, ou même les croûtes résultant de la dessiccation de ces pustules, ont la propriété de contaminer les sujets indemnes et d'y déterminer les réactions varioliques. On savait aussi que c'était hors de l'organisme qu'il fallait chercher la cause immédiate de l'infection. Mais en quoi consistait, d'une façon précise, ce qu'on appelait l'agent de cette infection? On l'ignorait encore.

La voie avait été cependant ouverte aux conceptions modernes dès le milieu du XVIIIe siècle. En 1745, un physicien irlandais, l'abbé Needham, avait publié ses Nouvelles observations microscopiques, avec des observations sur la composition et la décomposition des corps organisés, dans lesquelles il affirmait la génération spontanée « d'animalcules » semblables à de petites aiguilles, au sein d'un mélange de jus de citron et de farine en fermentation. Un autre ecclésiastique, l'abbé Spallanzani, prouva qu'il n'en était rien, et que ces animalcules provenaient de germes préexistant dans l'air. Lorsque, à quelques années de là, l'idée vint à Bouillaud de comparer les phénomènes infectieux aux phénomènes fermentatifs, il semble que la théorie de l'origine microbienne de l'infection, aux dépens de germes préexistant hors de l'organisme, aurait dû, dès cette heure, s'imposer. Mais la théorie de la génération spontanée était encore trop en faveur pour que la science médicale songeât à tirer parti des expériences de Spallanzani.

Pendant longtemps encore, on devait vivre sur l'ancienne conception de la maladie infectieuse, caractérisée par un ensemble de processus morbides, ayant pour cause déterminante, dans un organisme d'ailleurs prédisposé à en subir l'influence, l'action d'émanations putrides, résultant, soit de la décomposition de substances organisées animales ou végétales, soit de l'entassement d'un grand nombre d'individus dans un local trop étroit. Lorsque les progrès de la microscopie permirent de déceler dans les lésions infectieuses l'existence de microorganismes suffisamment caractérisés, l'idée ne vint pas que ces parasites, développés dans les substances en putréfaction, ou dans l'air vicié des locaux encombrés, avaient pu s'introduire dans les sujets sains, à la faveur d'une excoriation des téguments, à travers les muqueuses, ou par quelque autre voie d'entrée, naturelle ou accidentellement ménagée, et y déterminer les phénomènes infectieux. Avec les idées de l'époque sur la génération spontanée, on regarda d'emblée ces microorganismes, non comme la cause, mais comme le résultat de l'infection, et ces idées exerçaient alors un tel empire, que Rayer et Davaine, après avoir observé, en 1850, dans le sang d'animaux morts du charbon, le premier microbe authentique, et Pollender, après avoir, cinq ans plus tard, reconnu à ce microbe les caractères d'un végétal, ne songèrent nullement, semble-t-il, à le rendre responsable des dégâts charbonneux. Ce ne fut que treize ans plus tard, lorsque, par ses expériences décisives, Pasteur eut ruiné la théorie de la génération spontanée, telle que la soutenaient ses contradicteurs, et démontré que les processus fermentatifs étaient dus à l'action de germes vivants introduits dans les milieux fermentescibles, que Davaine, reprenant l'étude de sa bactéridie charbonneuse, affirma et tenta de démontrer, contre de nombreux et illustres adversaires, que les processus infectieux devaient être, au point de vue de leur étiologie, conçus comme les processus de la fermentation, les uns et les autres étant déterminés par l'action d'êtres vivants microscopiques.

Les arguments de Davaine n'avaient cependant pas calmé tous les scrupules scientifiques de ses adversaires. A Pasteur était réservé l'honneur de faire triompher définitivement ces vues nouvelles, comme il venait d'avoir l'honneur de faire triompher celles de Spallanzani. Il réussit, en effet, à cultiver la bactéridie dans l'urine neutre, et à obtenir, après un certain nombre d'ensemencements, par son procédé de dilutions successives, de la culture charbonneuse pure, dont l'inoculation était mortelle.

Cette culture étant débarrassée de tout autre organisme que la bactéridie, c'était donc à celle-ci qu'il fallait attribuer les symptômes infectieux. Pasteur compléta sa preuve en inoculant du liquide de culture, après l'avoir fait passer au travers d'un filtre de terre poreuse, qui arrêta les bactéridies. Les animaux survécurent à l'inoculation et ne présentèrent presque aucun des symptômes caractéristiques de la maladie. Il fallut en conclure que la bactéridie agissait nécessairement par elle-même, et directement, sur l'organisme, puisqu'en son absence il ne pouvait y avoir éclosion des processus morbides. On remarqua pourtant, dans le sang des animaux auxquels on avait inoculé le filtrat, une agglutination des hématies, aussi prononcée que dans les cas d'inoculation de culture non filtrée ou de sang charbonneux les bactéridies avaient donc élaboré des produits qui, répandus dans le milieu de culture et ayant traversé le filtre, déterminaient ce symptôme particulier de la maladie du charbon.

On était dès lors en possession du mécanisme complet d'un cas particulier d'infection. A ce cas, d'autres de même nature s'ajouteront sans tarder, et on pourra bientôt formuler une théorie, définitive dans ses grandes lignes, et applicable non seulement aux processus dont l'agent pathogène a pu être observé, mais à ceux-là aussi dont l'agent est inconnu, pourvu qu'ils présentent avec les autres une identité essentielle d'allures, comme, par exemple, les processus rabiques. A partir de ce moment, en effet, l'existence du microbe infectieux de la rage n'a fait aucun doute, et c'est en appliquant à cette maladie ses principes de thérapeutique des maladies microbiennes, que Pasteur a obtenu les résultats que l'on sait.

Il ne sera peut-être pas hors de propos de dire ici un mot de ces principes, après avoir indiqué quelle idée on doit se faire, à l'heure actuelle, d'une maladie microbienne.

On sait que tout être vivant supérieur est constitué par un ensemble de parties, de volume variable, vivantes elles-mêmes, et qu'on appelle des cellules. Au point de vue vital, ces cellules sont les constituants élémentaires des ètres organisés dont nous parlons. Or, si chacune de ces cellules est vraiment vivante, on peut la concevoir comme isolée de ses voisines et vivant d'une vie partiellement autonome. Ce n'est point le lieu de nous attarder à prouver que cette conception n'est pas une pure vue de l'esprit, mais qu'elle est, dans une certaine mesure, fondée sur la réalité biologique, et que si toutes les cellules, tant qu'elles font partie intégrante d'un organisme, sont gouvernées, dans

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