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le 18 juin 1808 jusqu'au 6 juillet de l'année suivante 1809: c'est plutôt une apologie de mes différens actes quand j'étais secrétaire d'État, et une justification des diverses accusations portées contre moi et qui pouvaient être renouvelées plus tard. Le tout réuni forme en substance, quoiqu'en abrégé, l'histoire des événemens les plus importans arrivés dans le temps de mon ministère. Je vous dirai maintenant ce qui me détermina à publier ces feuilles, et comment je pus donner suite à ma détermination.

Dans les premiers mois de ma captivité, parmi les différentes pensées qui roulaient dans ma tête au milieu de la solitude et du silence de la prison, il y en avait une à laquelle je m'arrêtais souvent, et qui, plus que les autres, excitait mon amour-propre ; c'était de deviner et de prévoir ce que pouvaient dire les contemporains, ce que penserait la postérité sur cette chute de la cour de Rome, et sur ce renversement de la puissance temporelle des papes, événemens funestes dont je pouvais dire avec raison :

Quæque ipse miserrima vidi,

Et quorum pars magna fui.

Quoique j'aie la conscience de n'avoir pas donné

de juste motif, ni même de prétexte apparent, au gouvernement français pour en venir à cet acte de violence et à ce sacrilége, je dois pourtant avouer ma faiblesse d'âme ou la force de mon amour-propre : je craignais les reproches et le blâme de mes contemporains, et plus encore celui de la postérité.

Cependant je trouvais quelque consolation dans la réflexion suivante : Mes contemporains, me disais-je à moi-même, ont vu se soumettre au gouvernement monarchique, sans obstacle et sans soulèvement populaire, les sept provinces-unies qui formaient la république de Hollande, dont les habitans, dans le temps des anciens Romains, et même sous les princes qui les gouvernaient, jusqu'au seizième siècle, avaient toujours conservé un esprit de liberté et d'indépendance dans une constitution qui tendait naturellement au système républicain; ils ont vu la république de Venise, la plus vieille de celles qui existaient et avaient existé jusqu'à ce jour, disparaître en peu de jours et s'effacer du nombre des puissances européennes; ils ont vu également se dissoudre la confédération des princes allemands, appelée l'Empire germanique, qui, pendant tant de siècles, rendit la nation allemande la plus respectable et la plus redoutée de l'Europe; ils ont vu

enfin la puissante maison de Bourbon, qui, peu d'années auparavant, régnait dans le royaume florissant de France, dans l'Espagne, dans la plus grande partie des Indes occidentales et dans plusieurs îles et pays des Indes orientales, dans les royaumes des Deux-Siciles et dans le duché de Parme, confinée et resserrée dans l'île de Sicile, qu'elle possédait plutôt en apparence qu'en réalité. Mes contemporains donc, qui ont été témoins de révolutions si grandes, si éclatantes et si extraordinaires, ne peuvent s'étonner qu'un petit État, gouverné par un prince pacifique et faible (sans chercher ici si c'était la faute du gouvernement et de ses ministres), soit devenu vicțimę de cette même puissance conquérante, qui a opéré comme par miracle dans l'espace de quelques années les autres révolutions que je viens d'énumérer. Rassuré sur le jugement de mes contemporains, je ne l'étais pas sur celui de la postérité.

Je me transportais quelquefois en idée dans les siècles à venir, et je formais les conjectures suivantes; je prévoyais qu'elle serait alors assoupie, et peut-être même éteinte, cette animosité de certains ministres et des tribunaux d'un État étranger contre le Saint-Siége, qu'ils appelaient la cour de Rome (corte Romana); d'où venait cette incon

cevable défiance qui faisait redouter les actes et correspondances venant de Rome, plus que ce qui provient d'un pays ennemi ou d'un lieu soupçonné d'épidémie et de peste. Je prévoyais que l'on ne partagerait plus cette opinion répandue de nos jours, que pour sembler bel esprit et homme éclairé, pour se faire un mérite auprès des cours, et se donner la réputation d'un sujet zélé, il fallait entrer en lice contre la cour de Rome, se représenter avec l'imagination de Don Quichotte les congrégations et les tribunaux de Rome comme autant de châteaux-forts, et se faire autant de géans des cardinaux, des prélats et des curiali, afin d'avoir le plaisir de les attaquer et de les combattre; imitant, dans ces derniers temps, quand le pontife était opprimé et l'Église romaine dispersée et persécutée, l'âne de la fable, qui veut donner le dernier coup au lion mourant. Je prévoyais qu'il s'élèverait dans les différens pays de l'Europe des apologistes et des défenseurs pour les papes, le SaintSiége et le gouvernement ecclésiastique. C'est ce qui est arrivé à la compagnie de Jésus, non-seulement dans les États catholiques, mais même dans les pays hétérodoxes: elle a été purgée des inculpations et des calomnies dirigées contre elle, et s'est vue renaître dans l'empire russe et dans les Deux

Siciles. A présent même, elle se trouve accueillie avec des témoignages de joie et d'allégresse dans la monarchie même d'où était parti le terrible coup de foudre qui devait la détruire de fond en comble et la réduire en cendres. C'est dans de telles pensées que je voyais se déployer à mes yeux le vaste champ qui s'ouvrirait pour ces futurs apologistes des papes et du Saint-Siége apostolique; on peut dire de l'histoire des papes ce que Lucius Anneus Florus écrivait de celle du peuple romain: Ut qui res ejus legunt, non unius populi, sed generis humani fasta discant. En effet, comme chefs suprêmes et pasteurs de l'Église catholique,

les

papes, étendant leur juridiction divine sur l'univers entier, auront toujours la plus grande influence sur les affaires les plus importantes de toutes les nations; et comme princes temporels d'un État assez considérable de l'Italie, ils jouent toujours le rôle le plus brillant dans l'histoire de notre nation et dans celle de l'Empire germanique, qui fut liée pendant tant de siècles avec celle de l'Italie; c'est ce qui a fait dire à un poète qui n'est certainement pas l'ami des papes :

Rome dont le destin dans la paix, dans la guerre,
Est d'être en tous les temps maîtresse de la terre.

Maintenant, me disais-je souvent à moi-même,

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