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tion, après avoir pris quelques rafraichissemens dans une auberge, je partis sur-le-champ pour Uzės, malgré les instances de quelques ecclésiastiques qui cherchaient à me persuader de passer au moins un jour dans cette ville où l'on voit les restes d'anciens édifices des bons temps de l'empire romain, qui réclament l'attention des voyageurs éclairés.

CHAPITRE IV.

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Arrivée à Uzès. Le sous-préfet Arnaud de Valabry. Communications. Ma résidence. Le conseiller d'Amoreux et sa famille.-Description de la ville.-Dissentimens religieux. Partage de mon temps. Vie heureuse et tranquille. Clergé d'Uzès. — Mon opinion sur le clergé français.—Le curé de Monteray.-Suites des papes Pie VI et Pie VII. — Bon ton.-Les parlemens et les libertés de l'Église gallicane. - Fanatisme des prêtres puristes.Progrès des alliés.--Sentiment général des populations. Gouvernement du roi.

Je fus avant le soir à Uzès; j'y arrivai au milieu d'une grande quantité de chariots et de troupes qui venaient d'Espagne : la nouvelle se répandit aussitôt dans cette petite ville, qu'il était arrivé un cardinal: c'était une chose extraordinaire dans un lieu pareil. Le curé et quelques autres ecclésiastiques vinrent à l'auberge me complimenter, et M. Lépine se rendit aussitôt chez le sous-prefet, pour lui remettie la lettre du ministre général de la police de Paris, qui lui annonçait les ordres du gouvernement, relativement à ma personne. Le sous-préfet, M. Arnaud de Valabry,

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vint aussitôt qu'il eut reçu la lettre, et, après m'avoir salué, il se tourna vers ces ecclésiastiques, et leur dit d'un air sérieux : « Messieurs, c'est au cardinal seul que j'ai à parler, je vous prie de vouloir bien vous retirer. » Ils s'en allèrent surpris et mortifiés. « Monsieur le cardinal, me dit alors le sous-préfet d'un ton plein d'honnêteté, l'officier de gendarmerie qui vous a amené ici vient de me remettre une lettre du ministre de la police, qui m'annonce que le gouvernement a désigné cette ville pour le lieu de votre séjour. Il me charge de veiller sur votre personne et votre conduite, et de lui rendre compte de toutes vos actions je vous prie donc d'user de beaucoup de prudence et de circonspection. » Je le remerciai de la communication qu'il venait de me faire; je le priai de m'indiquer quelles étaient celles de mes actions qui pourraient donner de l'ombrage au gouvernement, et je lui promis de faire en sorte de les éviter. Il me dit alors, toujours pourtant d'un ton respectueux, que je devais m'abstenir de remplir des fonctions sacrées dans les églises, ne pas me faire voir trop souvent en public avec les ecclésiastiques de la ville, et ne pas laisser entrer beaucoup de monde dans la chapelle particulière où je dirais la messe. Il ajouta qu'il y avait dans la ville un commissaire de police chargé de veiller attentivement sur toutes mes démarches, et qu'un tiers des habitans d'Uzès étaient des cal

vinistes, ennemis irréconciliables des catholiques, êt qu'ils avaient toujours les yeux sur lui et sur les autres magistrats catholiques, pour les accuser auprès du gouvernement de la moindre infraction à l'exécution de ses ordres souverains. Après quelques autres propos indifférens, il s'en alla.

Le jour suivant le maire, et quelques ecclésiastiques vinrent me rendre visite ainsi qu'un juge des tribunaux; le sous-préfét revint aussi. Il me dit qu'il s'était empressé de me trouver une maison convenable, l'appartement que j'avais pris dans l'auberge ne lui paraissant ni commode ni fait pour moi; il ajouta qu'il m'aurait offert bien volontiers un appartement dans sa maison, mais qu'il avait jugé plús convenable, pour me laisser plus de liberté, de demander celui qui était alors vacant dans la maison du conseiller d'Amoreux qui, en qualité de juge au tribunal d'appel, résidait à Nimes. Il me fit l'éloge de la famille d'Amoreux, et surtout de la piété et de la religion des dames; éloge qui me fut confirmé par les ecclésiastiques de la ville, et que je puis maintenant répéter hautement comme témoin oculaire. J'ai pu en juger par moi-même pendant le temps que j'ai passé dans cette adorable famille que je ne pourrai jamais louer autant qu'elle le mérite.

Après être resté trois jours à l'auberge, je passai dans la maison d'Amoreux; je fus logé au premier étage. A l'étage supérieur demeurait M. Fé

lix d'Amoreux, frère du maître de la maison, avec sa femme Élisabeth Lefèvre, ses trois enfans, et Mélanie d'Amoreux, leur sœur. Élisabeth Lefèvre, née à Saint-Domingue, où sa famille possédait quelques biens, avait été conduite en France dès son enfance, et élevée dans ce pays. Elle était encore jeune, et quoique sa santé fût très-affaiblie depuis plusieurs années, elle conservait néanmoins un air alerte et avenant. Mélanie d'Amoreux passait dans la ville pour une jeune sainte, et sa conduite méritait réellement cette réputation.

Uzès est une petite ville du bas Languedoc, dans le département du Gard, située sur une montagne à quelques lieues de Nimes et non loin des fameuses Cévennes. En y entrant, à mon arrivée, j'éprouvai un serrement de cœur, tant est grande l'obscurité qui règne dans ses rues étroites, tant est grossière l'irrégularité des maisons et des édifices. Cette ville aurait en Italie reçu. tout au plus le nom de bourg. Elle contenait alors plus de six mille habitans, dont un tiers suivait la secte de Calvin. Les calvinistes sont les plus riches de la ville, parce que, occupés du commerce, ils n'ont pas fait les pertes qu'ont dû éprouver les catholiques nobles qui possédaient avant la révolution des fiefs et d'autres droits seigneuriaux. Ces huguenots conservent encore leur ancienne animosité contre les catholiques, et plusieurs fois, dans le temps de la révolution, soutenus et protégés

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