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ouvriers mineurs, et sans aucun doute équivalente pour les autres. L'ouvrier a donc participé aux bénéfices de l'industrie alors que ceux-ci demeuraient très modestes; jamais un sociologue n'a osé proposer un partage de bénéfices quand le capital était si peu rémunéré.

La participation aux bénéfices a toujours existé ; au cours de l'année 1873, l'industrie charbonnière enregistrait en Belgique des bénéfices considérables en deux ans, le salaire des mineurs augmenta de près de 60 %. De 1895 à 1900, période de prospérité croissante pour les charbonnages belges, les salaires augmentent de 50 %Et cela en dehors de tout système préconçu, par le simple jeu de la concurrence entre les employeurs.

Mais l'augmentation des salaires, sur quoi fut-elle prise? Est-ce sur les bénéfices tels qu'ils existaient au début de la période étudiée, c'est-à-dire en 1901 ? Si nous remontons plus haut dans l'histoire économique, la question présente un intérêt plus évident encore. Au milieu du XIXe siècle, les salaires réels des ouvriers étaient, en Belgique comme ailleurs, inférieurs de moitié à ceux que nous avons connus 50 ans plus tard. Les salaires de 1,50 franc étaient normaux autrefois, et n'étaient pas compensés par le bas prix des denrées. Les bas prix du bon vieux temps sont une fable qui ne résiste pas à la critique. L'économiste socialiste Hector Denis s'est efforcé d'établir un index number traduisant les variations du coût de la vie ; il découvrit que ce coût était aussi élevé en 1850 qu'en 1900.

L'augmentation des salaires et du bien-être des classes ouvrières s'est donc poursuivie sans interruption. Mais, demandons-nous encore une fois, qui profitait autrefois de ce qui manquait à l'ouvrier? Était-ce le capital, étaitce l'âpreté des employeurs qui causaient la misère du peuple? Question que nous croyons résoudre souvent par l'affirmative.

Nos statistiques montrent qu'il n'en était rien, du moins

au cours des dures années qui vont de 1901 à 1905. Des recherches portant sur des périodes plus éloignées, sur les années de misère de 1848 et de 1886 tendent à la même conclusion. Les salaires très bas n'ont jamais existé que par des temps de crise ; la comparaison des chefs d'entreprise regorgeant de richesse, et de leurs ouvriers mourant de faim est un cliché qui vaut ceux dont on illustre les fables de la mythologie. Ajoutons que de tout temps les grandes entreprises, les entreprises capitalistes ont mieux payé leur personnel que les petites. L'usine a toujours été plus hospitalière que l'atelier et les gros bénéfices industriels ont toujours amené des salaires élevés. L'Amérique est à la fois le pays où les usines sont le plus prospères, et les ouvriers le plus à l'aise.

Alors ? D'où provient cette amélioration du sort de l'ouvrier? Du progrès de la civilisation matérielle, tout simplement, du perfectionnement de l'outillage. Les générations qui nous ont précédés ont épargné; au lieu de consommer leurs ressources pour leur agrément personnel, elles en ont consacré une partie à des entreprises, elles nous ont construit des routes, des chemins de fer, des ports, des usines. Nous leur devons notre bien-être ; si nous mangeons aujourd'hui du pain blanc à discrétion, c'est que nos pères n'ont pas gaspillé leur pain noir. Nous ne dirons pas heureux les peuples dont les législateurs auront favorisé l'épargne; ce serait oublier la subordination des intérêts matériels aux intérêts moraux. Nous dirons simplement que ces peuples seront prospères et leurs classes laborieuses dans l'aisance. Avant d'abattre un système économique qui a rendu de tels services, il faut plus que des impleses poirs d'amélioration, il faut des bases absolument inattaquables, et des solutions qui ont pour elles l'expérience. Le moins que l'on puisse dire, c'est que ces garanties manquent aux réformateurs qui s'agitent aujourd'hui.

Certes, rien sur terre n'est parfait, et rien n'est im

muable; l'homme au contraire ne doit pas se reposer dans ses recherches, et tendre toujours vers mieux. Mais son inquiétude naturelle doit s'allier àu ne prudence scrupuleuse. Avant d'abattre la vieille maison, il faut être sûr de pouvoir réaliser le plan qui a séduit. Et si l'on connaissait mieux le passé, on serait moins pressé de le maudire.

Sully-Prudhomme, qui appartient à une génération que nous jugeons déjà peu favorisée par le sort, savait ce qu'il devait à ses devanciers, et leur en a donné le témoignage dans des vers aujourd'hui presqu'oubliés. Nous recommandons cette septième veille de «< Justice » aux apôtres impatients des solutions nouvelles. Qu'ils lisent ce sonnet; il n'est pas sans défaut, mais il résume bien le douloureux poème des générations qui cheminèrent vers l'éternité l'échine courbée sous le fardeau, et nous frayant des chemins. Qu'ils méditent ces vers du poète songeant aux hommes nés trop tôt à qui le sort fut traître :

...Et les premiers auteurs de la glèbe féconde,
N'auront pas vu courir sur la face du monde
Le sourire paisible et rassurant des blés...

FERNAND BAUDHUIN.

IVe SÉRIE. T. V.

9

VARIÉTÉS

I

SUR L'OEUVRE MATHÉMATIQUE
DE BLAISE PASCAL (*)

I

INTRODUCTION

Dans l'étude très développée sur Blaise Pascal, qui forme le troisième livre du Port-Royal de Sainte-Beuve, l'historien français propose ce sujet de recherches (1):

<<< Il est une question que je poserai, dit-il, et sur laquelle j'aimerais à entendre un mathématicien homme de goût, un de ceux dont l'esprit, comme le dit Pascal, est au-dessus de ces matières : Quel est le caractère du génie mathématique de Pascal, si l'on compare ce génie à celui de Fermat, par exemple, ou de Leibnitz, ou de d'Alembert? Quel rapport exact y a-t-il entre son talent mathématique et son talent littéraire ? Ainsi, m'assure-t-on, d'Alembert géomètre ne ressemble pas du tout à d'Alembert littérateur; il a d'autres qualités (et de très hautes comme géomètre), mais il n'a pas les mêmes dans les deux cas. En est-il de même de Pascal? ou bien ces deux génies en lui se tiennent-ils plus étroitement, comme on serait tenté de le soupçonner; et le Pascal géomètre garde-t-il en quelque manière, du cachet de l'écrivain? De ce côté aussi, sans

(*) Communication présentée à la première Section de la Société scientifique, dans la séance tenue à Liége, le 25 octobre 1923.

(1) Port-Royal, par C.A. Sainte-Beuve, 4o éd., t. III; Paris, Hachette, 1878, p. 317.

parler de l'invention qui demeure son titre principal, est-ce une perfection de méthode et de forme, une façon de procéder ingénieuse et forte, la netteté suprême ? A-t-il de l'étendue ? En même temps qu'il approfondit et enserre toute une question, n'estil pas enclin à la circonscrire, etc., etc.? Heureux ceux qui lisent assez couramment les deux langues de Pascal, pour saisir à première vue ces rapports intimes qui dominent tout l'homme ! »

Seul, que je sache, un chapitre du Blaise Pascal de Joseph Bertrand, intitulé « Pascal géomètre et physicien » (1), répond en partie, mais en partie seulement, à la question de Sainte-Beuve. Ce chapitre est, en effet, écrit par un géomètrs éminent, qui fut aussi littérateur et homme de goût, en un mot, par l'« homme heureux » que souhaitait rencontrer l'auteur de Port-Royal. Cet « homme heureux » a de plue un mérite bien rare de nos jours. S'il admire Pascal, et même beaucoup, il ne se laisse cependant pas aveugler par l'éclat d'une idole. Bertrand sait reconnaître, chez Pascal, les lacunes du mathématicien. Usant d'une distinction célèbre, qui est de Pascal lui-même (2), le Secrétaire perpétuel de l'Institut de France reconnaît, au fond, que si, en mathématiques, Pascal eut à un haut degré l'Esprit de Géométrie, il n'eut pas toujours au même degré, quoi qu'on en ait dit, l'Esprit de Finesse.

Ce n'est pas un génie créateur; mais il est clair, rigoureux, et surtout d'un talent merveilleux quand il met en pleine lumière certaines idées de ses devanciers passées inaperçues. En dehors du Calcul des probabilités, Pascal n'a presque rien inventé en mathématiques, se plaisait à dire notre regretté Secrétaire général, Paul Mansion, mais il a une plume si prestigieuse qu'il fait oublier tout ce que les autres ont écrit avant lui sur les sujets qu'il traite (3).

En l'adoucissant un peu, le jugement de Mansion finira par être celui de l'histoire. C'est déjà, à peu de chose près, celui de Bertrand; malheureusement, le plan que l'auteur

(1) Paris, Calmann-Lévy, 1891, pp. 283-337.

(2) Euvres de Blaise Pascal, par Léon Brunschvicg; t. XII. Paris, Hachette, 1921, pp. 9-14. Pensées, no 1.

(3) Les idées de Mansion relatives à Pascal ont été publiées dans un article posthume, intitulé Pascal, qui parut dans cette REVUE en avril 1920; t. LXXVII, pp. 333-350.

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