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sur son ouvrage pour l'observer de plus près, il voit peu à peu s'ouvrir et se diriger sur lui un œil jaunâtre; puis le corps s'anime, se meut, se dresse, se lève, poursuit son créateur, et le tue. Ne reconnaissez-vous pas ce monstre? Il s'appelle le scepticisme; il est sorti de l'accouplement des plus illustres systèmes, ces cadavres empaillés de la philosophie.

Sans doute, il est bon de connaître l'histoire des opinions et des gestes de l'homme, pourvu que le souvenir du passé ne soit pas tourné en empêchement de l'avenir. Autre chose est de faire du passé un objet d'études, autre chose est de faire de la connaissance du passé la science même de l'humanité.

Demander à la poussière des livres la conscience de soi-même, c'est se tromper gravement: sortez des illusions et des brouillards du Collegium logicum pour vous recueillir profondément en vous-même, et dire comme un juré la main sur le cœur : je crois à tel ou tel fait de la nature humaine. Or qui nous donne l'éveil? qui nous sonne le signal de la vie, de la lutte, et, par contre-coup, de l'énergique conscience de nous-mêmes? les passions. Voilà l'aimant divin qui nous envoie la secousse et le branle

d'une première et irrésistible électricité. C'en est fait dès que la corde pathétique a vibré dans l'âme du jeune homme, la vie s'est révélée à lui ; je ne sais quel instinct mystérieux et puissant le conduit sourdement au sentiment de ses forces et de lui-même; son cœur se gonfle et veut déborder, son front s'agrandit et semble devenir le siége de la puissance. Amour, science, gloire, postérité, il aspire à vous; et vous pourrez à peine, en vous réunissant, combler le vide de cette âme qui se dévore et s'alimente sans relâche. Qui donc a calomnié les passions? quels docteurs ent voulu les extirper, ou du moins les endormir? Ne sortons-nous pas d'une époque où quelques-uns avaient la manie de se faire vieux avant le temps? peu s'en faut qu'ils n'aient rougi d'avoir le front jeune, quelque chaleur dans la tête et dans le sang, préoccupés du soin de se retrancher, eux, leurs idées et leurs affections, dans ces beaux tempéramens qui vous laissent un homme entre l'erreur et la vérité, l'énergie et la lâcheté, la puissance et le néant. Secouons ce stérile pédantisme; loin d'étouffer nos passions, sachons les exalter en les purifiant; elles seules envoient aux grandes entreprises; pour agir, il faut aimer. Quoi? voilà la question. Choisissez

mais une fois l'élection faite, levez-vous et marchez.

Cependant, celui qui s'est engagé à la poursuite d'un but, non-seulement il l'aime, mais il l'a conçu; à l'élan du sentiment se mêle un acte d'intelligence et un acte de volonté.

Un mot d'abord de l'intelligence. La logique est-elle toute la science? le raisonnement est-il non-seulement l'instrument de nos connaissan. ces, mais en est-il la source?

Voici deux propositions: deux et deux font quatre: il n'y a pas d'effet sans cause. Comment nous sont données ces deux propositions incontestables? tâchez de répondre de bonne foi, sans aucun mysticisme imposé. Elles nous sont données antérieurement à tout raisonnement. Il faut admettre que dans notre intelligence il y a des élémens, des bases, des formes de conception qui existent nécessairement avant le raisonnement il y a l'intelligence. Elle peut recevoir l'éveil de la sensibilité, mais elle s'en distingue : elle est pour l'homme une base impérissable, une colonne éternelle où il doit chercher constamment son appui. Point capital d'où dépend toute philosophie; qui doit remplacer pour la France le sensualisme du dernier siècle

par un idéalisme nouveau, indépendant, qui explique, sans les calomnier et en vertu des lois de la nature humaine, Dieu et la religion.

Mais il est vrai que l'intelligence, solidement posée sur un substratum qui lui co-existe, reçoit les inépuisables provocations de la sensibilité et se développe surtout par le raisonnement et la logique. Voilà qui a pu donner le change et pousser à croire que l'intelligence était uniquement le raisonner: elle est auparavant le concevoir.

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Spinosa a dit, ce me semble, un mot bien profond sous certaines réserves dans cette phrase volontas et intellectus unum et idem sunt. Comment concevoir le jeu de la volonté sans y joindre les vues de l'intelligence et l'aiguillon des passions? car tous les faits de la nature humaine sont complexes, et dans tout acte l'homme à la fois désire ou repousse, pense et veut. On a donc eu tort dans ces derniers temps de séparer entièrement la liberté de l'intelligence, et sur ce point l'analyse psychologique a faussé la réalité : car la liberté, et voilà la difficulté, est un mélange de conception et de volition.

La liberté!... Quand, dans la conduite et dans

le cours de notre destinée, nous sentons s'élever et se fortifier en nous le sentiment énergique de notre liberté, nous avons fait un progrès véritable et nous commençons réellement d'être hommes.

En effet, ni le monde physique où nous vivons et sur lequel nous déployons notre faiblesse intelligente, ni les sens, ces instrumens ingénieux par lesquels nous entrons en rapport et en contact avec les choses et les hommes, ne peuvent nous donner le sentiment de nousmêmes. Sans doute, la nature physique et notre constitution sensible sont deux faits irrécusables qui nous enferment et nous influencent à toute heure; c'est par leur connaissance que nous débutons dans la vie; c'est par eux que nous vivons extérieurement: les méconnaître est impossible, les négliger peu raisonnable; leur observation exacte et profonde est aussi nécessaire à l'histoire qu'à la philosophie. Mais toujours la sensibilité physique ne constitue pas l'homme, bien qu'elle l'enveloppe; même au milieu de ses influences les plus impérieuses et les plus irritantes, il s'en distingue, et il se sent. à la fois souffrant et libre.

La liberté!.... Un jour l'homme prend un.

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