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sonne, le clairon retentit, elle monte à cheval. Guerrière, elle tient sous le joug une multitude qui commence à frémir. Puis, elle change encore de costume : elle devient tribun; elle s'ap pelle la liberté; elle se fait peuple. Et il ne serait pas profondément utile d'étudier cette mobilité? il n'y aurait pas autre chose que la curiosité d'une érudition académique dans cette inspection du passé? Oh! ce qui vivifie cette étude, c'est qu'elle est l'affaire même du présent. Nous nous y retrouvons avec les idées et les soucis de notre siècle, nos élans de liberté, nos enthousiasmes. En vérité, cette cendre des morts est brûlante; et nous n'aurons garde en la remuant de laisser se glacer nos esprits et nos âmes. Les révolutions n'agitaient pas le siècle où Montesquieu écrivit l'histoire des lois avec une plume divine. Rien ne troubla sa contemplation. Dans son livre le passé se suffit à lui-même. Vous sortez de sa lecture avec une parfaite intelligence des institutions anciennes, mais sans souci du présent et de l'avenir disposition qu'aujourd'hui nous ne saurions partager. Sans doute, nous plaçons nos études avec un respect profond sous l'inspiration de Montesquieu; mais il nous est donné, dans notre siècle, de rallier la science

et la poésie de l'histoire à la cause et aux intérêts de cette liberté que veut la patrie, de cette liberté qu'elle fondera.

L'histoire ainsi considérée est le meilleur chemin à la législation dogmatique, c'est-à-dire à des réformes, à la conception philosophique du siècle même où l'on vit, de son esprit et de son but. Aujourd'hui, dans le mécanisme des sociétés modernes, le publicisté remplace le législateur; il n'y a plus de Moïse et de Lycurgue qui civilisent les nations; mais dans leur sein la science et le génie élaborent les principes et les idées qui plus tard deviendront des lois. De quel peuple Jérémie Bentham est-il le législateur? d'aucun. Mais il peut être, sur des points importans, le conseiller de tous. L'empereur Alexandre, les États-Unis d'Amérique, les cortès d'Espagne et de Portugal ont reçu ses avis. Novateur énergique, il a embrassé toutes les parties de la législation, les lois civiles, le droit pénal, la procédure, l'organisation judiciaire, la constitution politique des états. Pendant que De Maistre refusait toute raison aux constitutions écrites, Bentham au contraire s'élevant contre l'histoire, dont l'allure progressive lui échappe entièrement, tourne le dos au passé, où il n'a

vu que déceptions et misères, et veut renouveler les sociétés par une législation uniforme, la même pour tous, dont il croit pouvoir adapter les abstractions au génie différent de chaque peuple. Mais la liberté doit être partout indigène; elle ne s'importe pas: partout elle doit sortir du sol et s'enfanter elle-même.

La législation philosophique dont aujourd'hui Jérémie Bentham, malgré ses erreurs, est le plus puissant organe *, est véritablement ar tiste et poëte; elle façonne en préceptes et en lois les progrès de la race humaine; tantôt elle provoque les révolutions sociales, tantôt elle les résume; c'est, je ne crains pas de le dire, le plus noble exercice, le plus saint ministère des facultés humaines. Platon voit l'apogée de ses théories dans leur application sociale, et s'il est philosophe, c'est surtout pour se faire législateur de sa république. Aristote ramène constamment sa morale à la sociabilité et à la politique, Rousseau écrit le Contrat social, bien que, dit-il il ne soit ni prince ni législateur. Non; mais il est homme, et il exerce les droits de la souveraineté du peuple et du génie.

Voyez Introduction générale à l'Histoire du Droit, chap. 19.

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CHAPITRE II.

De la Législation dans ses rapports avec la religion, la philosophie et l'économie politique.

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Un jour nous apercevons, comme par éclair, l'absolue vérité et la beauté parfaite; nous ne les avons entrevues que pour les perdre; elles brillent, puis elles nous laissent dans une obscurité triste et un vide désespérant. Ce que je voyais si clairement hier, je ne le comprends plus aujourd'hui; l'inspiration s'est évanouie: d'où viennent donc ces ellipses de la pensée, ces éclipses de la lumière? Pourquoi ces idées éternelles défaillentelles dans moi? je les conçois et je ne puis les maîtriser. C'est que le beau, le bon et le vrai ne

dépendent pas de nous; ils nous affectent et nous éclairent; ils nous guérissent et nous consolent : mais leur origine et leur patrie n'est pas sur la terre, et ces idées célestes n'apparaissént ici-bas un moment que pour s'envoler dans les cieux.

Cette absence sur la terre de la raisón universelle est pour l'homme un tourment; il la cherche pour se compléter lui-même ; il veut se la représenter; de là les grands artistes en religion.

La république hébraïque nous montre la religion dans son enfance, car elle la confond encore, comme les autres théocraties orientales, avec la politique. Mais quel est le progrès? c'est leur déchirement. Quelques-uns s'agitent beaucoup aujourd'hui pour ramener la religion à l'identité avec la politique et à une contrefaçon du mosaïsme. Ils oublient donc que l'œuvre du christianisme a été de spiritualiser et de constituer la religion, en ne la faisant plus dépendre essentiellement de la politique, et en lui donnant la sanction positive d'une autre vie.

Si la religion et la politique étaient identiques, il suivrait que la théocratie serait la seule insti tution sociale légitime. Or quand le Christ dit,

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