Sayfadaki görseller
PDF
ePub

Le peuple, propriétaire et dispensateur de la souveraineté, peut changer son gouvernement, et par conséquent destituer, dans cette grande occasion, ceux auxquels il l'avait confié... L'Europe l'a reconnu en reconnaissant notre indépendance, ses suites et notre nouveau gouvernement. La maison qui règne en Angleterre n'a pas eu d'autres droits pour exclure les Stuarts, que le principe que je rappelle ici.

Les catastrophes qui frappent les rois sont communes à leurs familles, ainsi qu'étaient leur puissance et leur bonheur. L'incapacité qui abandonne leurs têtes à la fougue des révolutions, s'étend sur leurs proches, et ne permet pas de leur rendre le timon échappé à des mains débiles : il fallut qu'après les avoir repris, la Grande-Bretagne chassât les enfans de Charles Ier.

Le retour d'une dynastie détrônée, abattue par le malheur moins encore que par ses fautes, ne saurait convenir à une nation qui s'estime. Il ne peut y avoir de transaction sur une querelle aussi violemment décidée (1).

Si la révolution nous a fatigués, n'aurions-nous d'autres moyens, lorsqu'elle est arrivée à son terme, que de nous replacer sous un joug brisé depuis

douze années?

(1) M. Siméon est aujourd'hui ministre de l'intérieur.

Si la révolution a été sanglante, n'en sont-il pas 'coupables ceux qui attisèrent parmi nous les fureurs de la démagogie et de l'anarchie; qui, s'applaudissant à mesure qu'ils nous voyaient nous déchirer, espéraient nous ressaisir comme une proie affaiblie par ses propres morsures? Ne sont-ils pas coupables ceux qui, portant de contrées en contrées leurs ressentimens et leur vengeance, excitèrent cette coalition qui a coûté tant de pleurs et de sang à l'humanité gémissante? Ils vendaient aux puissances dont ils s'étaient fait les cliens, une partie de cet héritage dans lequel ils les conjuraient de les rétablir; et maintenant ne redoublent-ils pas d'efforts auprès de ce gouvernement, leur antique ennemi autant que le nôtre, et qui, trahissant leur cause tout en nous combattant, ne les repla cerait sur le trône, s'il en avait le pouvoir, que comme ces impuissans nababs de l'Inde dont il a fait ses vassaux?

Lorsque les institutions s'affaiblissent, et que la famille dégénérée ne peut plus soutenir le poids des affaires publiques, une autre famille s'élève. C'est ainsi que l'empire français a vu les descendans de Mérovée remplacés par ceux de Charlemagne, et ces derniers par ceux de Hugues Capet. C'est ainsi que les mêmes causes et des évènemens à peu près semblables, car rien n'est nouveau sous le soleil, nous amènent une quatrième dynastie. La troisième

n'avait pas eu d'autres titres ni de plus grands droits. Nous possédons un homme auquel s'applique ce que Montesquieu a dit de Charlemagne (1): « Ja«mais Prince ne sut mieux braver les dangers; ja« mais prince ne les sut mieux éviter. Il se joua de « tous les périls, et particulièrement de ceux qu'é<< prouvent presque toujours les grands conquérans, je veux dire les conspirations.

[ocr errors]

Quand Pépin, dit encore Montesquieu, fut « couronné, ce ne fut qu'une cérémonie de plus et « un fantôme de moins. Il n'acquit rien par-là que « des ornemens; il n'y eut rien de changé dans la «nation (2). »

Quand les successeurs de Charlemagne perdirent la suprême puissance, Hugues Capet tenait les deux clefs du royaume : on lui déféra une couronne qu'il était seul en état de défendre (3).

Nous sommes dans les mêmes circonstances. Qu'on ne se trompe pas en regardant comme une révolution, ce qui n'est qu'une conséquence de la révolution; nous la terminerons; rien ne sera changé dans la nation. Nous passerons d'un gouvernement au même gouvernement, si ce n'est qu'avec un titre plus conforme à notre grandeur, plus analogue

(1) Liv. XXXI, chap. XIX. (2) Chap. XIV du même liv. (3) Chap. XXXII,

à celui dont les autres peuples ont décoré leurs chefs, il acquerra la force de la perpétuité et la sécurité de l'avenir, autant qu'il est au pouvoir des hommes de s'en rendre maîtres par de sages précautions (1).

(1) Il serait ridicule et même imprudent d'aller rechercher les diverses opinions émises dans nos querelles politiques. Que de gens, d'abord séduits par les principes d'une philanthropie théorique, se hâtèrent d'abjurer leurs erreurs! Lorsqu'au 20 mars l'heure de la fidélité eut sonné, ces personnes prouvèrent que leur conversion avait été sincère. M. Siméon, en acceptant la vice-présidence des représentans aux cent jours, fit voir qu'il n'avait pas cessé d'être attaché aux idées démagogiques. Il m'a donné le droit de le citer comme un modèle d'oscillation. Bien des gens ont regardé comme un contre-sens sa nomination au ministère de l'intérieur : moi, j'y ai vu l'effet de deux sentimens différens sans doute, mais qui s'attachent au bien de la France, Le Roi, dont la bonté est infinie, a fait taire son ressentiment particulier, afin que l'Etat ne fût pas privé des lumières d'un homme qui, à la vérité, ne sut pas respecter les Bourbons malheureux, mais qui passe pour habile dans la triture des affaires; et M. Siméon a surmonté, pour le bien de la patrie, l'éloignement qu'il devait avoir à servir une famille qu'il regardait, en 1804, comme décrépite, indigne du trône, etc.

On ne ferme point l'abîme des révolutions avec des mains révolutionnaires.

No XXI.

Article du Mercure de France sur le Voyage en Espagne de M. de Laborde; par M. de Châteaubriand.

La publication de cet admirable morceau d'éloquence a été le signal de toutes les persécutions que M. de Châteaubriand eut à souffrir sous le régime impérial: on n'en est pas surpris quand on lit cet article, et que l'on se reporte au temps de Napoléon.

ap

IL y a des genres de littérature qui semblent partenir à certaines époques de la société : ainsi la poésie convient plus particulièrement à l'enfance des peuples, et l'histoire à leur vieillesse. La simplicité des mœurs pastorales ou la grandeur des mœurs héroïques veulent être chantées sur la lyre d'Homère; la raison et la corruption des nations civilisées demandent le pinceau de Thucydide. Cependant, la muse a souvent retracé les crimes des hommes; mais il y a quelque chose de si beau dans le langage du poëte, que les crimes mêmes en paraissent embellis : l'historien seul peut les peindre sans en affaiblir l'horreur. Lorsque, dans le silence de l'abjection, l'on n'entend plus retentir que la chaîne de l'esclave et la voix du dé

[ocr errors]
« ÖncekiDevam »