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faits tels que je les vois. Ceux qui reconnaîtront la vérité du tableau, penseront comme moi sur les objets traités dans cet ouvrage; ceux qui ne verront pas les faits comme moi, sauront du moins d'où provient mon erreur.

Dans tout le courant du dernier siècle, l'irréligion était à la mode dans les hautes classes et parmi les écrivains, c'est-à-dire parmi tous ceux qui donnent le ton et dirigent l'opinion. La hardiesse et la nouveauté des idées donnaient du sel à tout, et un trait d'impiété était par cela seul un trait d'esprit. Les écrits des savans et les discussions des sophistes, tous dirigés vers le même but; les sarcasmes surtout, et le ridicule versé à pleines mains par l'homme le plus spirituel qui ait existé, devant le peuple le plus sensible à ce genre d'attaque; le courant de la mode et le désir des applaudissemens; l'amour-propre, qui avait un choix à faire entre l'admiration qu'inspiraient les esprits forts et le dédain qu'on prodiguait aux petits esprits; l'attrait, qui faisait préférer des plaisirs dégagés de tout scrupule à la gêne et à la sévérité des principes religieux; l'exemple des plus grands souverains du siècle : tout, enfin, avait concouru à détruire la foi dans

la plus grande partie des hommes des classes instruites, quand la révolution éclata. La contagion avait commencé à approcher des dernières classes, mais n'avait pas encore pénétré dans la masse. Les pas furent plus rapides jusqu'à la fin du siècle. L'impiété régnant, devenue maxime de gouvernement et seul moyen de fortune, le massacre et la fuite des prêtres, l'absence complète de l'instruction religieuse, de l'exercice du culte et de toute cérémonie chrétienne, enlevèrent au plus grand nombre, dans les dernières classes, cette foi qu'il est si difficile de rappeler ensuite, et y rendirent l'incrédulité aussi commune que dans les classes supérieures. Il doit résulter de cet état de choses, que la plupart des hommes dont la première éducation était finie avant le commencement de ce siècle, c'est-à-dire qui ont plus de trente-six ans aujourd'hui, ont perdu toute croyance religieuse.

Quant à ceux qui avaient douze ans lors du rétablissement des cultes, ils ont pu recevoir une éducation religieuse; mais les parens y mettaient peu de prix; les prêtres étaient rares dans les campagnes, l'éducation publique était loin d'être dirigée vers

ce but, malgré les efforts honorables de quelques personnes influentes; la plupart des professeurs eux-mêmes appartenaient à cette littérature philosophique qui avait autrefois fait parade de l'impiété. Sans se targuer désormais d'un mérite devenu si commun, ils étaient restés fidèles aux habitudes de toute leur vie ; et s'ils n'étaient plus ennemis, ils se montraient du moins fort indifférens. Aussi, avant la restauration, l'éducation publique, d'ailleurs toute militaire, n'a point rendu les jeunes gens plus religieux que ne l'étaient les hommes plus âgés. Le résultat était à peu près le même pour la plupart des jeunes gens élevés dans leurs familles, et il était difficile que l'indifférence des pères ne passât pas aux enfans. Depuis dix ans, l'éducation s'est beaucoup améliorée sous ce rapport; mais ce changement est trop récent pour qu'on en recueille si vite les fruits. Ainsi tout a concouru depuis un siècle pour détruire la croyance, et la conséquence de cet état de choses devrait être que l'irréligion est presque générale en France.

Ce résultat, que les raisonnemens fondés sur l'examen des faits nous présentent

comme très-probable, est-il en effet conforme à la vérité? Les personnes qui jugent sur l'apparence soutiendront le contraire. La France, dira-t-on, a beaucoup gagné sous ce rapport depuis le dernier siècle. Alors les attaques contre la religion étaient un moyen de succès; c'est le contraire aujourd'hui. Alors la piété et ceux qui la pratiquaient étaient livrés aux railleries et au superbe dédain des plus hautes classes de la société. Ce qui était alors de bon ton est aujourd'hui du plus mauvais ton; et de telles railleries indiqueraient à coup sûr l'homme le plus mal élevé, et trahiraient les habitude's de la plus mauvaise compagnie. Alors les plus grands auteurs faisaient, sous toutes les formes, une guerre continuelle à la religion. Dans ce siècle, nos plus grands auteurs ont écrit en faveur de la religion; et tout écrivain qui a quelque talent, et qui se respecte un peu, n'en parlera qu'avec les égards qui lui sont dus. Alors on trouvait dans les hautes classes, dont l'exemple a tant d'influence, des modèles de tous les genres de licence; aujourd'hui l'exemple de la piété et de toutes les vertus part des plus hautes classes, et l'on ne se borne pas à l'extérieur;

la religion non seulement est en honneur, mais est pratiquée; toutes les parties du gouvernement s'accordent pour entretenir ou ranimer le zèle, pour rendre aux évêques leurs siéges, pour adoucir le sort des curés, pour rebâtir les presbytères, réparer les églises, fonder des séminaires, et rendre au culte non seulement le nécessaire, mais même quelque splendeur. Partout on fait des sacrifices pour la religion, partout les églises sont pleines.

Ce tableau a beaucoup de vérité, et cependant le mal, pour être mieux couvert, n'en subsiste pas moins. Le poison, répandu autrefois avec tant de profusion, circule toujours parmi nous, et continue ses ravages. Voyons ce qui s'est passé.

Plusieurs causes ont concouru à dégoûter de l'impiété. Les honnêtes gens virent avec horreur leurs railleries irréligieuses sortir des bouches les plus abjectes, les plus impures, les plus coupables; leurs gaietés impies répétées par des cannibales qui portaient pour étendards des têtes coupées; les églises, devenues des écuries, et les rêves de leurs poëmes licencieux réalisés par des monstres ivres de crimes et de sang; enfin ces prêtres,

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