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se perdait dans l'identité du droit public et civil! Quia ipsarum legum verbis accommodatæ erant et ideo immutabiles, proinde atque leges observabantur. Ces actiones legis s'instituaient de cinq façons: sacramento, per judicis postulationem, per conditionem, per manus injectionem, per pignoris captionem. La cessio in jure était aussi une actio legis. Voilà, certes, des formules à la fois sacramentelles et symboliques tout à fait convenables à l'imagination sévère et précise des Romains.

Dans les Pandectes, au contraire, la théorie des obligations a un développement dialectique et philosophique. La doctrine est venue s'enter sur les singularités de l'histoire, et nous a légué un mélange de détails indigènes, de principes généraux, toujours vrais, de subtilités infinies qui nous embarrassent encore. Pothier, dans son excellent Traité des obligations, a porté la méthode, mais non pas la réforme, dans cet héritage historique. Les rédacteurs du Code civil ont découpé les développements de Pothier, et n'ont pas toujours traité la matière avec l'indépendance philosophique qui seule pouvait l'éclaircir. Ainsi ils ont respecté tout ce galimatias abstrus des obligations divisibles et indivisibles, et ils ont laissé sous leur main la loi dégénérer en une doctrine prolixe et scolastique.

L'époque où ils travaillaient explique ces inconvénients. La réforme radicale de notre droit public avait enveloppé dans la proscription commune l'ancien droit civil, écrit et coutumier. Mirabeau, dans le discours déjà cité, avait le premier sonné le tocsin contre la loi romaine. « Peut-être «< est-il temps, s'était écrié ce novateur intrépide, qu'après « avoir été subjugués par les lois romaines, nous les soumet«<tions elles-mêmes à l'autorité de notre raison, et qu'après « en avoir été esclaves, nous en soyons juges..... Peut-être « est-il temps que les Français ne soient pas plus les écoliers « de Rome ancienne que de Rome moderne; qu'ils aient des <«<lois civiles faites pour eux, comme ils ont des lois politi

«ques qui leur sont propres ; que tout se ressente dans leur « législation des principes de la sagesse, non des préjugés de <«<l'habitude; enfin qu'ils donnent eux-mêmes l'exemple, et «< ne reçoivent la loi que de la raison et de la nature. » La Convention poussa plus loin encore le mépris des anciennes doctrines, qui commencèrent à reparaître après la chute de Robespierre. Depuis elles regagnèrent peu à peu l'autorité qu'elles avaient perdue, et, parmi les rédacteurs du Code civil, je ne vois plus que le premier consul qui ait gardé vis-à-vis d'elles la netteté et la hauteur de sa raison. Tout le reste était dévoué à la restauration presque complète des antiques errements, et, sauf le principe fécond de l'égalité devant la loi, qui depuis quarante ans nous sert de règle, et tend à remonter de l'ordre civil à l'ordre politique, la codification française au commencement du dix-neuvième siècle n'a guère été qu'une rénovation claire et méthodique de l'ancienne jurisprudence. Toutefois l'unité et la simplicité de nos codes ont suffi pour nous permettre ces progrès qui nous out fait devancer les autres peuples. dans la pratique de la vie civile, et rendent facile aujourd'hui une réforme plus profonde et plus philosophique.

Si la Révolution de 1789 a provoqué la création de nos codes, la Révolution de 1830 en amènera nécessairement la révision complète. Mieux placés que nos pères pour apprécier les doctrines historiques, nous en saurons l'origine, le développement, la filiation; nous connaîtrons les siècles et les événements au milieu desquels elles se sont altérées et corrompues, jusqu'à quel point désormais elles sont surannées ou fécondes. Nous demeurerons étrangers à cette superstition qui voudrait faire de l'antiquité la loi des vivants; et nous ne sacrifierons pas aux préjugés opiniâtres de l'érudition les devoirs de la philosophie (1).

(1) Depuis l'époque où j'écrivais ces lignes, et surtout depuis 1848, le Code civil n'a pas rencontré de réformateurs compétents, mais des enne

CHAPITRE VI.

DES BASES PHILOSOPHIQUES DE LA LÉGISLATION PÉNALE.

Comment et pourquoi le monde existe-t-il? Comment et pourquoi sommes-nous dans ce monde ? Ce n'est pas assez de cette double difficulté; car, si nous regardons l'univers, l'histoire et nous-mêmes, qu'y voyons-nous? Du mal; de telle façon qu'après nous être demandé pourquoi le monde et pourquoi l'homme, nous sommes inévitablement amenés à compliquer cette question par ce problème si triste. Pourquoi y a-t-il du mal?

Qu'il y ait du mal sur la terre, c'est le cri de l'homme et le témoignage de l'histoire. Interrogez toutes les religions, elles vous diront qu'il y a du bien et du mal, et chacune se vantera d'en expliquer l'origine mieux que toute autre. Les Indous adorent le verbe créateur Brahma; au-dessous de lui luttent Vichnou chargé de sustenter le monde et de le conserver, et Siva chargé de le détruire: Chez les Persans, Ahriman le mauvais génie combat Ormuzd, qui représente le bien, et tous deux sont subordonnés à une unité supérieure. L'Égypte met aux prises Typhon avec Osiris. Le paganisme soulève les Titans contre Jupiter, et nous livre cette autre allégorie de Vulcain précipité sur la terre. La religion chrétienne a aussi sa cosmogonie, et c'est la plus récente acceptée par la foi de l'humanité. Or, suivant la Genèse, Dieu créa le ciel et la terre, et plaça l'homme dans un paradis. La créature y fut tentée par le prince des ténèbres, par le mauvais principe. Il existait donc antérieurement à l'homme : comment est-il déchu? il ne doit sa chute qu'à lui-même; il était bon auparavant; ange de lumière, au pied du trône de Dieu, dans son

mis systématiques qui voudraient le détruire pièce à pièce, parce qu'il a le tort, à leurs yeux, de résumer les principes conservateurs de l'ordre (Note de la 3e édition.)

social.

ordre et sa hiérarchie, dans son obéissance et dans son amour, il vivait d'une vie harmonieuse et commune dont la céleste unité le faisait participer. Comment donc est-il tombé? Mystère!

Remontons plus haut encore. Comment cette unité primitive en est-elle venue à se développer par des existences pures, mais inférieures à elle-même ? Mystère!

Les cosmogonies posent les questions sans les résoudre ; mais elles ont cet avantage sur la philosophie, qu'elles enchantent l'imagination, entraînent la foi et le sentiment. La cosmogonie chrétienne ne crée ni n'explique le bien et le mal, mais elle en reconnaît l'empire; elle s'apitoie sur la nature et les douleurs de l'homme; elle le console et le captive par cela même qu'elle chante et confesse ses tourments; et dans la poésie sombre et déchirante de la Genèse, de l'enfer et du paradis perdu, on dirait une amie qui pleure avec celui qui pleure.

La philosophie a fait aussi son effort. Dieu peut-il créer le mal par sa volonté, de son propre mouvement? a-t-elle demandé. Non. Cependant il y a du mal;. il doit avoir une cause. Si cette cause ne peut être la même que celle du bien, elle sera donc indépendante, coexistante avec elle, coéternelle, également puissante. Voilà le manichéisme. Il puisa sa force dans l'existence incontestable du mal, et dans la répugnance invincible qu'éprouve notre nature à l'attribuer à la source du bien. Mais, d'un autre côté, la philosophie de Manès contrariait les conditions mêmes de l'esprit de l'homme. Poser en effet deux principes coéternels, c'est poser une dualité qui ne peut exister, selon les lois de notre pensée, qu'après une unité antérieure à laquelle nous remontons nécessairement. Entre deux principes qui coexistent, bien que l'un représente le mal et l'autre le bien, il y a cependant un fond commun, une identité, l'être même. S'ils coexistent, ils existent donc; s'ils existent, ils se donnent rendez-vous dans une unité; le monde n'a pas commencé par deux; il est sorti d'un seul

principe: aussi le manichéisme a fait une secte, et non pas une religion.

Au dix-septième siècle, Bayle et Leibnitz agitèrent le problème. Leibnitz, dans ses essais de Théodicée, tenta d'expliquer rationnellement la cosmogonie chrétienne, et d'enfermer la raison et la foi dans la sphère de l'harmonie préétablie. Bayle, dont le scepticisme se complaisait à ébranler toutes les croyances, et qui poussa toujours le pyrrhonisme jusqu'au point où il se sépare du bon sens, se donna le plaisir d'exposer avec une logique moqueuse tous les arguments du manichéisme; toutefois il ne put disconvenir que, si le spectacle du mal lui prête d'abord quelque crédit, le manichéisme finit par tomber devant les lois de notre intelligence.

Kant jeta plus de lumière sur la question par la profondeur si sincère et si franche de sa psychologie. En faisant la critique de la raison, il lui posa trois questions: questions psychologique, cosmologique, théologique. Il la convainquit d'impuissance sur ces trois points; il démontra que, dans la recherche de l'origine et de la valeur de ses idées, la raison ne saurait leur trouver une réalité objective, indépendante d'elle-même; que, lorsqu'elle prend l'idée propre qu'elle s'en fait, pour leur nature même, elle commet un énorme paralogisme, et que, par conséquent, elle ne saurait arriver à une psychologie véritablement rationnelle. Dans la sphère cosmologique, Kant pose quatre thèses et quatre antithèses sur l'origine du monde; il montre que la raison donne à la fois sur ces quatre points l'affirmative et la négative, et partant pas la vérité. Pour ce qui concerne la théologie, Kant poursuit son accusation contre la raison; il bat en ruines l'argument de Descartes, celui de Leibnitz, et la preuve tirée du spectacle du monde sur l'existence de Dieu; si bien que vous sortez de cet impitoyable examen, dépouillé de la connaissance rationnelle de l'âme, du monde et de Dieu. Pour échapper à une si terrible angoisse, Kant se réfugie dans la conscience même de l'homme, dans le sentiment pratique de la réalité et de la

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