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Adparet domus intus, et atria longa patescunt;
Adparent Priami et veterum penetralia regum (1).

Oui, au milieu des révolutions, l'œil plonge plus avant dans l'intérieur, et, pour ainsi dire, dans la domesticité de l'histoire; et loin de voir dans les faits qui nous pressent rien qui doive décourager pour les destinées de la science, j'y découvre au contraire un indice de renaissance et de rénovation.

Une histoire particulière peut intéresser vivement, surtout celle de son pays. Toutefois il n'est plus donné aux annales d'aucun peuple de captiver exclusivement la curiosité de l'esprit ; il lui faut aujourd'hui les rapports et les comparaisons d'une histoire générale. Au milieu des nations qui à la fois tendent à se rapprocher dans une commune alliance, et retiennent encore leur propre originalité, l'esprit veut saisir en même temps ce que chaque peuple a d'intime, et ce qu'il y a de général dans le système historique du monde.

Or, pour comparer, il faut tout voir, tout comprendre et tout sentir, et s'il était une nation assise véritablement au centre de l'Europe; qui, par la Provence et la Méditerranée, touchât aux peuples du Midi, à l'Italie, à la Grèce, et fût à cinq journées de l'Afrique; qui, sur les bords du Rhin pût entrer en conférence avec le génie germanique; qui, à Calais, ne fût séparée que par sept lieues de mer de son illustre rivale, de l'Angleterre; qui, terre hospitalière de tout ce qui est illustre et malheureux, sût jouir avec délices des diversités les plus éclatantes dans les arts comme dans la pensée, distribuant la gloire à pleines mains, car elle n'a rien à craindre de cette prodigalité magnanime ne pourrait-on pas dire, sans apporter ici l'exagération d'un patriotisme vulgaire, que cette nation si bienveillante, si impartiale et si

(1) Æneid., lib. II.

grande, peut s'ingérer d'apprécier et de comparer les institutions des peuples?

La science de la législation n'est pas une espèce de terrain neutre où l'on puisse paraître sans se compromettre ; elle n'est pas non plus une chronique du moyen âge, une découpure de faits pittoresques que l'on puisse dérouler, sans mettre en jeu, soi, ses principes et sa personnalité. En effet, la législation n'est autre chose que la philosophie en action; c'est le code des théories, des opinions et des idées adoptées comme règle de conduite par la majorité de l'espèce humaine. Il suit naturellement que toute histoire des législations doit être précédée d'une philosophie du droit ; ainsi ont fait Vico, Domat et Montesquieu; ainsi l'exige la méthode marchons donc dans cette route avec fermeté; ce qui peut seul aujourd'hui donner quelque sens à des lignes écrites, c'est de s'y expliquer en homme, sans ambages méticuleuses.

Cette philosophie du droit sera divisée en cinq parties.

La première traitera de l'homme, la seconde de la société, la troisième de l'histoire, la quatrième des philosophes; la cinquième définira la science de la législation proprement dite.

Quand on s'adresse à l'homme, un fait complexe frappe d'abord, c'est son individualité, dont la face la plus saillante est la liberté. Des passions qui nous sollicitent de sortir de nous-mêmes, qui nous envoient à la guerre, à la chasse, au théâtre, nous àttirent aux plaisirs des sens, nous ravissent à la contemplation de Dieu, aux saintes jouissances de la religion, aux méditations plus sévères de la science, voilà qui tire l'homme hors de lui-même; et cependant il éprouve en même temps l'invincible besoin de revenir à luimème, de se retrouver lui, toujours lui, mécontent de sa personnalité, incapable de la dépouiller, et, pour se satisfaire dans cette contradiction qui le constitue, s'attaquant à la fois à la science, aux plaisirs, à ses semblables et à Dieu.

L'homme est un animal politique, scientifique et religieux. Il vit par ces trois instincts. Inévitablement social, toujours en contact avec ceux qui lui ressemblent, il constitue et applique le droit, dont l'idée est toujours une et toujours progressive. Possédé du besoin et doué de la puissance de connaître et de savoir, il observe ce qui est hors de lui et luimême, il y applique les lois de sa pensée, cherche l'unité et produit la science. Enfin, naturellement religieux, non-seulement il conçoit Dieu, mais il l'aime et veut le retrouver à la fois dans son cœur, dans les cieux et dans la société : voilà l'homme.

On a donné depuis longtemps aux poëtes épiques le conseil de se jeter brusquement dans leur sujet, in medias res, par un récit qui pût s'emparer du lecteur ou de l'auditoire dans le temps où les vers se chantaient, afin de les plonger sur-le-champ au plus vif de l'action. L'avis est aussi bon à suivre pour l'historien des sociétés. Il ne s'engagera plus dans ces stériles discussions sur l'état sauvage, dont le dernier siècle n'a rien su tirer. D'ailleurs l'histoire civile ne peut s'occuper que de ce qui a véritablement paru, de ce qui a duré dans la mémoire des hommes. Il lui faut des monuments, des titres, des inscriptions, testaments irrécusables des hommes, des peuples et des choses historiques. Elle ne visitera pas, ou rarement du moins, la hutte des sauvages, les hordes chétives et brutales que la civilisation n'a pas encore touchées de son sceptre d'or, et qui ne nous offrent guère que de tristes anomalies, des exceptions hideuses, et des expériences tronquées de la nature humaine.

Dans le champ même de la société, j'écarterai d'abord la famille pour aller droit à l'État, qui est la plus grande image de la sociabilité humaine. Or, l'Etat repose sur trois idées fondamentales la loi, le pouvoir et la liberté.

:

Qu'est-ce que la loi? C'est l'expression du bien moral. Si le monde physique a des lois, le monde moral a les siennes, et l'idée de la loi est l'idée la plus haute que l'homme puisse

concevoir dans l'ordre rationnel. Cette harmonie progressive qui vivifie la nature, l'homme la cherche dans la société, de siècle en siècle, il la constitue, la change, et toujours il l'appelle loi.

Si la loi est la règle, elle appelle à elle les moyens et la force de l'exécuter, c'est-à-dire le pouvoir, dont le bras doit être long et vigoureux si la société ne veut pas périr.

Vient la liberté. Qu'est-ce que la liberté politique? Qu'on veuille bien peser ceci si la loi est l'expression du bien moral, si le pouvoir est la force nécessaire pour pratiquer ce bien, voilà, ce semble, deux idées tout à fait positives, qui convergent à un but positif. Quel sera donc le rôle de la liberté ? Dans son essence, elle est aussi positive que quoi que ce soit; elle est, nous le verrons, un des éléments de la nature humaine. Mais dans le jeu et dans le mécanisme des différentes constitutions politiques, la liberté ne paraîtelle pas souvent sous la forme de protestation pour résister, ou de novatrice pour enfanter le progrès? En effet, en face de la loi qui n'est pas toujours le bien, et du pouvoir qui se pervertit dans sa marche, la liberté résiste, elle devient une opposition. La loi, lors même qu'elle se développe longtemps avec sagesse, finit par appeler des réformes; la liberté prêche alors les innovations et demande le progrès. A ces deux titres, soit comme opposant, soit comme novatrice, la liberté est indestructible et nécessaire dans le mécanisme des sociétés.

Dans tout pays où la loi, le pouvoir et la liberté seront suffisamment constitués, il y aura prospérité sociale : voilà ce qui importe. Les éternelles dissertations sur la monarchie, l'aristocratie, la démocratie et la république, peuvent avoir leur importance, mais elles n'attaquent pas le fond même des choses, et c'est avoir peu de philosophie dans l'esprit, que de s'attacher avec une impatience passionnée et inexorable à la poursuite d'une forme politique. Le temps seul dispose, pour les institutions comme pour les êtres ani

més, de la caducité et de la jeunesse ; il les ensevelit ou les produit au jour avec un irrésistible à-propos.

Avant de passer à la famille, nous trouverons l'État soutenant un double rapport avec les autres sociétés, la paix ou la guerre; question fondamentale du droit des gens. Les peuples se visitent ou se touchent par le commerce ou par les armes; mais de quelque manière que cette conférence se passe, elle est salutaire à l'humanité.

Je n'ai pas voulu reproduire cette éternelle filiation de la famille et de l'Etat, tant répétée depuis Bodin jusqu'à M. de Bonald. Plus la civilisation se développe, plus s'efface l'analogie de l'État avec la famille, dont l'État est sorti sans doute, mais dont il se sépare chaque jour davantage.

Le mariage est le fondement de la famille; nous chercherons comment et en quoi il est indissoluble, et nous agiterons le problème du divorce. Viendra la propriété qui change plus facilement de maître que de nature, variable et perfectible dans ses formes, mais une et indestructible dans son principe, qui est l'individualité humaine.

De la propriété nous passerons à la succession, condition nécessaire de la famille, et nous en chercherons les lois philosophiques, tant comme naturelle que comme testamentaire.

Alors ce sera la place de la théorie des contrats que le droit romain a si profondément comprise et écrite.

Nous ne saurions quitter la société sans considérer un triste phénomène, le crime. Qu'est-ce que le bien, qu'est-ce que le mal? Quel est le principe constitutif de la pénalité? La législation doit-elle être rémunératoire en même temps que pénale? Nous toucherons tous ces points.

Je passe à l'histoire. Si la législation est la philosophie en action, si elle est le développement des idées sociales toujours en progrès, il faut que l'histoire nous fournisse la preuve des principes que nous aurons posés. Non que nous voulions ici l'explorer dans sa variété infinie, mais au moins

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