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Augustin; et ni son père ni sa mère ne soupçonnaient ce qu'elle serait un jour. Mais déjà vous lui aviez préparé pour berceau une maison fidèle, l'une des mieux réglées de votre Église; et là, sous la conduite de votre Fils unique, elle grandissait peu à peu dans cette crainte de Dieu, qui est le commencement de la sagesse 1. »

Au milieu de ce doux éclat de vertu naissante, on vit cependant apparaître en sainte Monique, je ne dis pas une tache, mais une de ces ombres légères que Dieu permet quelquefois pour rendre ses saints plus vigilants et plus humbles. On avait chargé cette pieuse enfant, ainsi qu'on en use avec les jeunes filles qui commencent à grandir et que l'on veut peu à peu initier au gouvernement d'une maison, d'aller chaque jour au cellier faire la provision du vin. « Or, nous dit saint Augustin, il arrivait quelquefois qu'après avoir baissé le vase pour le remplir, et avant de le verser dans le flacon, elle l'approchait de ses lèvres, non par amour du vin, car il lui inspirait même une certaine répugnance, mais par cette espièglerie et cette gaieté de la jeunesse qui se plaît aux choses défendues, et que le poids de l'autorité apaise bientôt dans les jeunes cœurs. Mais comme en méprisant les petites fautes on tombe peu à peu dans les plus grandes, il advint qu'ajoutant chaque jour une goutte à une goutte, elle finit par boire une petite coupe presque pleine. Où était alors sa vieille gouvernante si sage? Qu'é

1 Confess., lib. IX, cap. vii.

taient devenues ses austères défenses? Et quel remède possible contre une maladie cachée avec tant de soin, si vous, Seigneur, ne veilliez sur nous! En l'absence de son père, de sa mère, vous, toujours présent, qui sauvez les âmes même par la main des méchants, que fites-vous, ô mon Dieu ? par quel traitement l'avez-vous guérie? Une servante descendait tous les jours avec Monique à la cave, et était par conséquent le témoin complaisant de sa faute. Ce fut d'elle que Dieu tira un jour un sarcasme froid et aigu, invisible acier dont la main de Dieu se servit pour trancher vif cette gangrène. Car se disputant un jour, comme souvent il arrive, avec sa jeune maîtresse, seule à seule, elle lui reprocha ce défaut, et, sans nul dessein de la corriger, mais de la piquer, elle l'appela, avec un mépris insultant: Buveuse de vin pur. Percée de ce trait, Monique rougit, et, reconnaissant la laideur de cette faute, elle se condamna sévèrement et s'en corrigea pour toujours 1. >> On dit même qu'elle prit à ce moment la résolution de ne boire jamais que de l'eau. Quoi qu'il en soit, cette faute, comme il arrive presque toujours dans la vie des saints, eut pour la pieuse jeune fille les plus heureux résultats. Elle mit une première larme de repentir dans ses yeux; elle lui inspira le goût de la mortification, la rendit humble et défiante d'elle-même, et, à son insu, la prépara de loin à entourer de la plus tendre et de la plus active surveillance le glorieux berceau qui devait un jour lui être confié.

1 Confess., lib. IX, cap. VIII.

Sur ces entrefaites, vers l'an 348 ou 349, Monique fut témoin d'un événement qui, en la remplissant d'une profonde joie, acheva de faire mûrir tous les fruits de sa belle jeunesse. Thagaste, comme nous avons dit, s'était laissé entraîner dans l'hérésie et le schisme de Donat; mais depuis vingt années, cette hérésie violente la remplissait de troubles. Au point où nous sommes arrivés de cette histoire, ces troubles étaient devenus si graves et si continuels dans toutes les villes d'Afrique, ils amenaient tant de pillages et même de meurtres, que les empereurs durent intervenir. Constant porta donc une loi qui prohibait la profession publique de cette hérésie. Grand nombre de villes revinrent alors à la foi catholique, et en particulier Thagaste, mais celle-ci d'un élan si vif, si unanime et si sincère, qu'il fut évident que la crainte des violences schismatiques l'avait seule empêchée de le faire plus tôt. Quelques années après, au dire de saint Alype, on eût cherché vainement en Afrique une ville plus heureuse et plus unie dans l'obéissance à l'Église romaine 1.

Sainte Monique pouvait avoir seize ans lorsque s'accomplit cette heureuse délivrance de sa ville natale, opprimée jusque-là, par un parti fanatique, dans la plus sainte de ses libertés, la liberté religieuse. Nul doute qu'elle n'ait tressailli d'un doux et profond enthousiasme en assistant à ce nouvel embrassement de l'Église et de sa patrie; et si,

1 August., Ep. 48. Labbe, Conc., tom. II, cap. CXXXVI.

comme quelques-uns l'ont cru, ce grand moment fut aussi celui de son baptême et de sa première communion, il dut y avoir là dans son âme une de ces émotions élevées et puissantes qui creusent à la vie un lit d'où elle ne sort plus.

Cependant avec l'âge se développaient en sainte Monique les dons naturels. Son esprit, qui était juste, élevé, pénétrant, a reçu les éloges les plus délicats et les moins suspects de celui qui était le plus capable d'en juger, et qui assurément n'eût pas voulu exalter même sa mère aux dépens de la vérité. Saint Augustin affirme à plusieurs reprises que l'esprit de sainte Monique touchait au génie. Nous la verrons plus tard prendre la parole sur les plus hautes questions de philosophie et de religion, et saint Augustin et ses amis feront cercle autour d'elle, « croyant, dit celui-ci, entendre quelque grand homme au milieu de nous. » Ce profond et rare esprit de sainte Monique commençait déjà à se laisser entrevoir; elle avait une soif insatiable d'apprendre; toute petite, elle quittait les jeux de ses compagnes pour suivre, attentive, les conversations des grandes personnes, surtout quand c'étaient des personnes instruites et sérieuses. On la voyait en particulier passer des heures entières aux pieds de son aïeule, femme vénérable par son âge et sa foi, contemporaine des martyrs, dont les récits émouvants enthousiasmaient la pieuse jeune fille 1.

1 Inerat quoque in ea quædam insatiabilis adiscendi cupiditas... Et propterea jugiter satagebat aliquid perclarum aut audire aut

A ces dons de l'intelligence, que Dieu lui avait donnés pour qu'elle eût sur Augustin tous les genres d'influence, Monique joignait des dons meilleurs encore une douceur inépuisable avec une rare fermeté; une paix que rien n'altérait jamais; son caractère était à la fois constant et hardi; son cœur porté à la tendresse, et cependant plein d'énergie dans l'amour et dans l'action. Bref, c'était une de ces riches natures comme on en voit quelquefois, où se rencontrent les plus rares harmonies avec d'étonnants contrastes.

Quant aux dons extérieurs, dont on s'enquiert involontairement, même quand il s'agit d'une sainte, il est plus difficile de satisfaire complétement sur ce point la légitime curiosité de nos lecteurs. Il semble cependant que sa taille ait été assez élevée, et son visage d'une grande beauté. Du moins, vers l'âge de dix-huit à vingt ans, la foi, la piété, la modestie, l'amour de Dieu et des hommes y jetaient un tel éclat, que l'auteur d'un des plus vieux monuments relatifs à l'histoire de sainte Monique se déclare impuissant à le peindre, et cela se conçoit. Il faut dire de la beauté des saints ce que la sainte Écriture dit de leur paix Exsuperat omnem sensum. C'est une beauté d'un ordre à part, et qui est au-dessus de toute idée. La beauté des justes, dit le Psalmiste,

adiscere. Et idcirco quam maxime aviam suam christianissimam, pro modulo suæ capacitatis, sequebatur, eidemque adhærebat. (De plurimis claris mulieribus, a Fr. Jacobo Philippo Bergomensi, Ordinis Heremitarum Divi Augustini. 1 vol. in-folio, 1493, caract. gothiques.)

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