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circonstances: elles obligent quelquefois à modifier le principe général pour des motifs d'intérêt public. Peu d'autres que les enfans d'émigrés profiteront de la seconde disposition de l'article. Peut-être serait-il plus prudent de ne les admettre à devenir Français que suivant le mode établi pour les étrangers: ce ne serait pas les soumettre à des conditions onéreuses et difficiles; et l'on donnerait au gouvernement la facilité de repousser ceux d'entre eux dont la présence lui paraîtrait dangereuse.

M. BOULAY dit que la disposition qu'on attaque est due à la faveur de l'origine, et qu'elle sera d'un usage plus fréquent qu'on ne le suppose. Elle est juste; car le fils ne doit pas porter la peine d'une abdication à laquelle il n'a pas con

couru.

Cependant, si l'on craint que les enfans des émigrés n'en abusent, on pourrait ne leur laisser remplir les formalités prescrites pour devenir Français, que lorsqu'ils y auraient été admis par le gouvernement.

LE CONSUL CAMBACÉRÈS dit que peut-être la possibilité de l'abdication de la part d'un Français ne devrait pas être présumée par les lois. Celui qui abdique, et sa postérité, ne se présentent certainement pas sous un aspect bien favorable. Si les enfans de celui qui a abdiqué veulent s'associer aux destinées de la France, qu'ils remplissent les conditions sous lesquelles la Constitution accorde cette faveur aux étrangers. Voilà pour l'avenir.

Pour le présent, comment repousser les enfans des émigrés s'ils viennent armés de l'article qu'on propose? Il importe de ne jamais mettre la loi civile en opposition avec les considérations politiques.

M. TRONCHET dit qu'il faut sortir des circonstances, et se reporter à ce qui doit être dans tous les temps. L'expatriation n'est pas en soi un délit ; c'est l'usage d'une faculté naturelle qu'on ne peut contester à l'homme. On quitte souvent sa patrie par des motifs innocens; le plus souvent on s'y dé

termine pour l'intérêt de sa fortune. Au surplus, l'abdication ne résulte ni du mariage qu'on contracte chez l'étranger, ni du domicile qu'on y établit, mais seulement des actes qui supposent qu'on s'est incorporé à la nation chez laquelle on s'est retiré mais jamais l'abdication n'a effacé la faveur de l'origine. Toujours les enfans de l'abdiquant ont pu venir reprendre la qualité de Français; ils étaient même reçus à partager, avec les enfans que l'abdiquant avait laissés en France, les successions qui s'ouvraient à leur profit. Ils tenaient ce droit de la faveur de leur origine, et ils en jouissaient indépendamment des traités faits avec la nation chez laquelle ils étaient nés. Cependant on ne leur en permettait l'exercice que lorsqu'ils se soumettaient à demeurer en France, et qu'ils satisfaisaient à cette soumission.

M. LACUÉE pense qu'il est difficile de ne pas se rendre aux raisons présentées par M. Berlier; qu'on parviendrait peutêtre à concilier toutes les opinions, en disant que le fils du Français qui aura abdiqué sa patrie pourra être admis par le gouvernement français à faire sa déclaration qu'il veut se fixer en France.

M. DEFERMON demande que la disposition qu'on discute soit renvoyée au titre des Étrangers.

M. BOULAY observe qu'au contraire il s'agit de distinguer de l'étranger l'enfant né depuis l'abdication de son père.

M. BERLIER dit que tout se réduit à ne l'admettre qu'autant que le gouvernement jugera convenable de lui donner, en quelque sorte, des lettres de naturalité. Il ajoute que M. Tronchet s'est plus appuyé sur l'histoire que sur les principes; qu'il n'a pas examiné si l'intérêt de l'Etat exige qu'on laisse au gouvernement le pouvoir d'admettre ou de repousser les individus dont il s'agit.

Le Premier ConSUL demande ce qu'est aujourd'hui le fils d'un émigré né depuis l'émigration, et s'il succède.

M. BERLIER répond qu'il est étranger.

LE CONSUL CAMBACÉRÈS dit que le fils qui a suivi son père

dans son émigration n'est réputé émigré que lorsqu'il ne rentre pas avant l'âge de puberté; que le fils né dans l'étranger depuis l'émigration n'est point Français, parce qu'il sort d'un père frappé de mort civile, et qui dès-lors n'a pu lui transmettre une qualité que lui-même n'avait plus. Il est d'ailleurs de principe que le fils suit la condition de son père. Cet individu ne recueille pas du chef de son père la succession à laquelle celui-ci eût été appelé s'il eût conservé la vie civile; c'est la République qui succède, comme représentant le père émigré.

Cependant, si la disposition était adoptée, le fils de l'émigré reviendrait de son chef à la succession, en faisant valoir le principe que les délais ne courent pas contre les mi

neurs.

LE PREMIER CONSUL dit que, pour décider la question qu'on agite, il convient de se fixer d'abord sur le point de savoir si l'enfant né d'un émigré depuis son émigration doit être considéré comme le fils d'un Français qui a abdiqué sa patrie, ou comme le fils d'un individu mort civilement; car, dans le dernier cas, la disposition qu'on discute ne s'appliquerait pas aux enfans des émigrés.

M. TRONCHET dit que le Code civil n'ayant rien de commun avec les lois de circonstance portées contre les émigrés, ce sera dans ces lois et non dans le Code civil qu'on cherchera toujours la solution des questions relatives aux enfans des émigrés.

LE PREMIER CONSUL lit l'art. 15 du projet, lequel est ainsi conçu : « Les condamnations prononcées par les tribunaux français à la peine de mort ou aux peines afflictives qui s'é« tendent à toute la durée de la vie, seront les seules qui « emporteront la mort civile. »

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Il dit que l'article, après avoir énoncé les condamnations qui emporteront la mort civile, sans y comprendre l'émigration, ajoute que ce seront les seules qui opéreront cet effet: ainsi, pour qu'il ne demeure pas d'incertitude, et pour ce

pendant maintenir des dispositions qui intéressent les propriétés d'un grand nombre de Français, il est nécessaire d'ajouter à l'art. 15: et les condamnations prononcées par des lois extraordinaires, emporteront, etc.

M. ROEDERER dit que les lois sur les émigrés ne les frappent pas de mort civile; qu'elles se bornent à prononcer un bannissement perpétuel, et à punir l'infraction du ban.

LE CONSUL CAMBACÉRÈS dit que la loi du 3 octobre 1792 ayant banni à perpétuité les émigrés qui ne seraient pas rentrés dans les délais qu'elle détermine, c'est une erreur de croire qu'ils ne sont pas morts civilement. D'ailleurs, l'article 1er de la loi du 28 mars 1793 l'a textuellement décidé.

LE PREMIER CONSUL met en délibération si les émigrés doivent être considérés comme morts civilement.

LE CONSEIL Consulté est d'avis que les émigrés sont morts civilement.

LE PREMIER CONSUL dit que, d'après le principe qui vient d'être reconnu, l'article 3 ne présente plus de difficultés.

M. ROEDERER dit qu'il reste à décider si le fils de l'émigré jouira des droits de successibilité accordés aux étrangers.

LE PREMIER CONSUL dit que l'émigré étant mort civilement, la loi ne peut reconnaître pour ses enfans que ceux qui existaient au moment de son émigration.

M. REGNAUD (de Saint-Jean-d'Angely) demande que ce principe soit énoncé dans la loi, parce que, dans l'usage, on tient pour valable le mariage contracté par l'émigré depuis son émigration, et les enfans qui en naissent sont regardés comme légitimes.

LE PREMIER CONSUL dit que cet usage est né de ce qu'il n'existe pas encore de moyens de distinguer les vrais émigrés de ceux qui ont été mal à propos inscrits sur les listes. L'inscription sur la liste actuelle n'étant pas définitive, puisqu'elle peut être effacée par une radiation, on ne peut empêcher de se marier ceux qui ne sont qu'inscrits; et il en sera ainsi jus

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qu'à ce qu'on ait séparé les vrais et les faux émigrés, en ne laissant sur la liste que les premiers.

M. TRONCHET pense que la rédaction proposée par le Consul Cambacérés ferait cesser toute équivoque.

LE PREMIER CONSUL dit que l'article, dégagé de l'équivoque qui l'aurait fait appliquer aux émigrés, est indispensable. La nation française, nation grande et industrieuse, est répandue partout, elle se répandra encore davantage par la suite. Mais les Français, autres que les émigrés, ne vivent chez l'étranger que pour pousser leur fortune : les actes par lesquels ils paraissent se rattacher à un autre gouvernement ne sont faits que pour obtenir une protection nécessaire à leurs projets. Il est dans leur intention de rentrer en France quand leur fortune sera achevée; faudra-t-il les repousser? Se fussent-ils même affiliés à des ordres de chevalerie, il serait injuste de les confondre avec les émigrés qui ont été prendre les armes contre leur patrie.

M. BERLIER dit des raisons de comles Français que que merce ou de fortune conduisent chez l'étranger n'abdiquent pas leur patrie.

LE PREMIER CONSUL ajoute à ce qu'il vient de dire que, s'il arrivait un jour qu'une contrée envahie par l'ennemi lui fût cédée par un traité, on ne pourrait, avec justice, dire à ceux de ses habitans qui viendraient s'établir sur le territoire de la République qu'ils ont perdu leur qualité de Français, parce qu'ils n'ont pas abandonné leur ancien pays au moment même qu'il a été cédé; parce que même ils ont prêté serment au nouveau souverain. La nécessité de conserver leur fortune, de la recueillir et de la transporter en France, les a obligés de différer leur transmigration.

LE CONSUL CAMBACÉRÈS propose la rédaction suivante: « Tout individu né en pays étranger, d'un Français qui au« rait abdiqué sa patrie, pourra toujours recouvrer la qualité e de Français, en faisant la déclaration qu'il entend fixer son domicile en France. »

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