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éloquence, il attaqua le droit du lieutenant civil, en l'honorant, et en le comblant d'éloges; M. Camus parla aussi avec une grande force. M. le lieutenant civil laissa entrevoir plusieurs fois qu'il ne pouvait présider que comme lieutenant civil. Ce principe lui fut contesté; on lui intima plusieurs fois qu'il ne présiderait que par le choix de l'assemblée; enfin, pressé de s'expliquer définitivement, il déclara que, quelque flatté qu'il fût du choix que l'assemblée avait fait de sa personne, il ne pouvait regarder l'élection que comme un second titre ajouté à celui que lui donnait sa charge; mais que si l'assemblée entendait qu'il ne présidât qu'en vertu de cette élection, et si elle ne laissait pas aux autres officiers du Châtelet remplir leurs offices, sauf à elle telles protestations que bon lui semblerait, il allait se retirer.

La matière mise en délibération, la très-grande pluralité fut d'avis que l'assemblée ne pouvait avoir d'autres officiers que ceux qu'elle aurait élus librement. M. le procureur du roi requit la retraite des officiers du Châtelet, qui se sont en effet retirés ayant M. le lieutenant civil à leur tête. J'eus quelque peine de cette séparation : je regardais sa vertu comme tutélaire, et j'eus regret qu'elle nous abandonnât. Cependant, s'il était resté dans l'assemblée, il aurait été le premier député, et ma destinée le voulait autrement.

Il faut observer que M. le lieutenant civil était en effet appelé à la présidence par le règlement du

roi. Cette circonstance fut remarquée par le bureau chargé de vérifier nos pouvoirs à l'Assemblée nationale. Mais en même temps il ne jugea pas que ce fût une irrégularité, et l'Assemblée adopta cette décision (1).

On procéda sur-le-champ à la nomination; les cinq plus anciens d'âge furent placés au bureau pour recevoir et vérifier le scrutin. Je me regardais comme bien inconnu dans cette assemblée où je ne connaissais guère moi-même que huit à dix personnes. Quelques-unes prétendirent que je serais président : j'en aurais eu une véritable frayeur, si j'avais pensé que cette opinion de l'amitié pût avoir un juste fondement : j'ignorais entièrement les formes et les règles de ces assemblées, assez nouvelles alors pour tout le monde, et je n'avais pas assez de présomption pour me croire capable de conduire les autres. Le scrutin fait et vérifié j'eus quarante voix pour être président, et M. Target fut choisi à une grande pluralité. Je fus nommé secrétaire, emploi qui me convenait beaucoup mieux, quoique je ne fusse pas au fait de la forme des procès-verbaux à rédiger. Mais je me fis instruire. M. Target prêta serment à la nation et à l'assemblée. Je prêtai le même serment entre ses mains, et cet acte, signé de tous les présens et de nous, fut le premier acte du procès-verbal.

On sentit la nécessité d'avoir un second président

(1) Procès-verbal de l'Assemblée nationale, 14 juin 1789.

et un second secrétaire, en cas d'absence des premiers. On convint de choisir ceux qui avaient réuni le plus de voix après ceux qui avaient eu la pluralité; et ce furent MM. Camus et Guillotin..

On posa aussitôt et l'on mit en délibération trois questions importantes: 1°. Si l'on devait faire retirer les nobles qui pouvaient se trouver dans l'assemblée. On a observé qu'il fallait distinguer les différentes sources de la noblesse nouvelle, et ne pas confondre avec ceux qui l'avaient acquise à prix d'argent, ni les négocians à qui elle a été accordée pour prix de services rendus à l'État dans le commerce, ni les officiers de ville qui la tiennent de la municipalité ; les uns et les autres, encore attachés au commerce, n'ayant pour ainsi dire qu'une noblesse commencée, peuvent être toujours considérés comme appartenant au tiers-état : il fut décidé qu'ils resteraient dans l'assemblée.

2o. Si l'on ferait quelque réduction au nombre des membres qui la composaient, tant parce que ce nombre excédait celui de trois cents, qui avait été prescrit par le règlement du 24 janvier, que parce qu'il y avait inégalité dans les nominations des différens districts, dont les uns s'étaient tenus à la lettre du règlement, et dont les autres, dans le dessein d'en suivre l'esprit, avaient nommé un plus grand nombre d'électeurs en proportion du nombre des votans, pour ne pas risquer que la totalité de ces électeurs se trouvant au-dessous de trois cents, la représentation du tiers à l'assemblée

générale ne fût pas complète. En effet, le district de Saint-Roch avait vingt électeurs ou suppléans, et celui des Théatins n'avait qu'un électeur sans suppléant (1). Il a été répondu d'abord que cette réduction ne pouvait devenir nécessaire et indispensable que dans le cas où, les trois ordres se réunissant pour opérer ensemble, elle serait réclamée

par le clergé et par la noblesse; ensuite on a montré que cette réduction était infiniment difficile et presque impossible à exécuter. Par quelle proportion serait-elle réglée ? Si l'on prenait sa mesure sur les districts qui ont envoyé le moins d'électeurs, la représentation des habitans de Paris deviendrait trop faible; si l'on s'écartait de cette mesure, la seule qui fût donnée par la nature des choses, on tomberait dans l'arbitraire. L'assemblée, décidée par ces considérations, a arrêté que pour cette fois elle resterait constituée comme elle l'était à ce moment, et que tous les électeurs et les suppléans seraient conservés.

3o. Enfin on a demandé à l'assemblée si elle avait intention de s'unir au clergé et à la noblesse pour la rédaction des cahiers et pour la nomination des députés. On a dit d'une part que la chose la plus importante était que chaque ordre prît ses députés dans son sein, en les nommant librement à part, et que, quant à la rédaction des cahiers, il n'y avait point d'inconvénient à ce qu'elle fût com

(1) Procès-verbal des électeurs, tome III, pag. 369 et 371.

mune, pourvu que les deux autres ordres souscrivissent au paiement égal des impôts et à l'admission du tiers aux charges de la magistrature, aux emplois militaires et aux dignités ecclésiastiques. On a ajouté que l'injonction faite aux électeurs, et dans presque tous les cahiers, de demander qu'on votât par tête, nécessitait la réunion des ordres. On a ajouté une considération, c'est que la réunion consommée à Paris aurait un grand poids pour la réunion totale aux états-généraux. De l'autre part, on a observé que, quant à la nomination des députés, nous connaissions mieux que personne les sujets de notre ordre, que seuls nous ferions de meilleurs choix, et qu'en nous réunissant aux deux autres ordres nous risquerions de compromettre l'intérêt de nos commettans; qu'il était convenable de rester attachés à la masse presque entière du tiers-état du royaume qui avait fait des cahiers séparés. On a dit que le tiers avait des demandes à faire, des réformes à proposer, qui pouvaient intéresser l'ordre du clergé ou celui de la noblesse, et sur lesquelles demandes ou réformes il fallait que son vœu fût libre; que l'on pouvait être uni par les mêmes sentimens, quoique séparé dans des chambres différentes; enfin on a ajouté que la réunion des trois ordres nécessiterait la réduction des membres de plusieurs de ces ordres pour les amener à la proportion établie le règlement du 24 janvier; que la discussion des cahiers et toutes les opérations subsidiaires deviendraient infiniment plus longues. En conséquence,

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