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sur lui, et la νόησις divine se trouve dépouillée du νοῦς πράκτικος et du vous morýtinos : « L'être parfait n'a pas besoin d'action, p, car il est lui-même la fin; l'action suppose toujours dualité (1). » Dieu donc se suffit à lui-même et reste enseveli dans sa solitude; c'est à son insu, presque malgré lui, qu'il organise la nature, dont il est une sorte de providence sans le savoir. Il n'est point interdit de penser que cette façon de simplifier à outrance, et par là d'étriquer et même de fausser le problème de Dieu, relève chez Aristote d'une erreur de méthode et n'est pas le fruit de la doctrine de l'Acte et de la Puissance. Au nom mème de cette doctrine, et de ses principes les mieux établis, le Stagirite se devait d'établir en Dieu la raison suprême de l'univers, non seulement de l'ordre qui y règne, mais encore du mouvement qui l'anime, de l'existence et de l'action de tous les êtres qui s'y trouvent. Et c'est dans les rapports de cet univers avec Dieu qu'il eût pu, qu'il eût dû rechercher les vrais et les seuls fondements possibles d'une théologie positive.

Lorsqu'on entreprend la lecture de l'œuvre immense d'Aristote, on éprouve facilement l'impression que doit ressentir un étranger mis pour la première fois en présence d'un monument gigantesque des temps passés, une impression d'écrasement et de désarroi. Pour arriver à quelque compréhension esthétique de ce monument, il importe surtout de dégager la formule architecturale qui s'y répète à l'infini, - telle l'ogive dans une cathédrale du moyen âge. Simple et même très simple formule, l'ogive se retrouve partout, au dehors et au dedans, dans le portail et les tours, dans le choeur, les nefs et les absides, dans les autels, les verrières, la chaire, les meubles et jusque dans les plus insignifiantes boiseries. Sans elle, ni l'ensemble ni les détails n'ont de sens; en elle tout retrouve unité et intelligibilité, partant vérité et beauté. L'ogive, la formule architecturale de l'Aristotélisme est le

(1) De Cælo, II, x11, 4.

schème simple et fondamental de l'acte et de la puissance : il s'en faut pénétrer jusqu'à l'obsession, sous peine de ne rien entendre ni à la métaphysique et aux théories de la substance, des causes, de la nature, ni à la physique, aux doctrines du mouvement, du continu, de l'infini, ni au IIept puxts, ni aux Avaλuttxá, ni enfin au moindre traité scientifique du Stagirite. Si cette étude a pu provoquer, ou renouveler, cette bienfaisante et lumineuse obsession chez quelque ami d'Aristote, en dépit des défaillances qu'elle n'a pu manquer d'avoir dans le détail, elle a fait preuve d'utilité; à tout le moins a-t-elle atteint son but.

Abbé BAUDIN,

Professeur au collège Saint-Pierre-Fourier, à Lunéville.

SUR UNE CONCEPTION NOUVELLE

DE LA LOI POSITIVE

A PROPOS D'UN LIVRE RÉCENT (1)

Une question toujours actuelle pour les jurisconsultes est celle que saint Thomas a posée dans les objections des articles du Traité des lois relatifs aux lois humaines. Les actes humains que la loi cherche à régir sont des actes individuels variables à l'infini. Comment les atteindre avec des lois forcément générales ? (Summ. theol., Ia II", q. xcvi, a. 1, obj. 2.) N'est-ce pas d'avance livrer la justice à l'incertitude? (Ibid., obj. 3.) Devant cette impossibilité, ne vaut-il pas mieux «< concéder » l'examen de chaque cas particulier à l'arbitre d'un « sage»? (Ibid. q. xcv, a. 1, obj. 3.) Une justice vivante, le díxatov uyuyov d'Aristote, s'adapterait mieux que la loi à la diversité des cas. (Ibid., obj. 2.) Car qu'est-ce qu'une règle qui ne peut régler la réalité ?

Ce sont là quelques-unes des difficultés soulevées dans le remarquable ouvrage que nous signalons. M. Saleilles a lucidement exposé dans la préface la genèse de la pensée de l'auteur. La voici en substance. L'interprétation juridique du code civil a suivi durant notre siècle deux méthodes. La première s'est proposé, par la jurisprudence et la doctrine, de tirer simplement les conclusions logiques qu'aurait acceptées le législateur, auteur de la loi. Cette méthode était fondée sur une conception de la loi issue du Contrat social. L'accord étant consommé par les contractants, il devenait intangible. Cette conception n'est pas admissible. Pratique peut-être dans le temps que l'on était encore sous l'influence immédiate des conditions sociales qui ont inspiré le Code civil, elle ne l'est plus, alors que des droits, des institutions, des besoins nou

(1) FRANÇOIS GÉNY, professeur de Droit civil à l'Université de Dijon. Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif. Essai critique, précédé d'une préface de M. RAYMOND SALEILLES, professeur de Droit civil à l'Université de Paris (un vol. gr. in-8°. XI-606 pages; Paris, oct. 1899. Chevalier-Maresq. 10 francs).

veaux ont surgi. Aussi ce n'est que par une fiction que la jurisprudence actuelle se donne le rôle d'interpréter la volonté stricte du législateur de 1804. Cette volonté ne porte en réalité que sur un domaine de faits concrets, très étroit et très limité. De là, l'équivoque de la méthode syllogistique et dogmatique. Aussi dans ces derniers temps a-t-on vu se constituer « une méthode plus souple et plus nuancée, plus rapprochée de la vie » (p. vi), une « méthode rationnelle et non plus seulement raisonnante » (p. vi), «une méthode de vie organique ou d'évolution historique, méthode externe et non plus interne comme la première, dont le propre fut de vivifier les codes - au lieu de la substance qu'ils empruntaient à leur propre fonds par l'afflux de tous les éléments de vie successive qui leur venaient du dehors. Loin de se replier sur eux-mêmes, ils s'ouvraient au monde extérieur, non pour se laisser envahir ou dominer par lui, mais pour s'y adapter et le dominer, l'encadrer dans leur propre discipline et traduire en monnaie juridique, ayant la frappe qui leur est propre, toutes les relations nouvelles issues du développement de la vie » (p. vii). La loi écrite continue de rester le cadre mais on ne prétend plus' que le droit soit une création du législateur; l'influence organique de la coutume, les données de la science sociale, la doctrine, sont autant d'appoints extérieurs qui servent à la jurisprudence à solliciter le texte, à en assouplir la formule, à en dégager les principes inconnus, à fondre le tout <«< dans une harmonie d'ensemble dont la logique crée la certitude en même temps qu'elle défie l'arbitraire » (p. vi`.

Un pas restait à faire dans cette voie c'était de laisser au domaine de la loi uniquement ce qui vient d'elle, et reconnaître à côté d'elle d'autres sources parallèles, la coutume, la tradition doctrinale et scientifique, qui ainsi, directement et sans recourir à aucune fiction, créeraient « du Droit déjà bon pour la circulation et pour la sanction judiciaire » (p. 1x). Telle est la signification du présent ouvrage.

Il comprend trois parties exposé analytique de la méthode traditionnelle ou logique d'interprétation juridique (pp. 15-52); critique négative de cette méthode (pp. 53-175); esquisse d'un plan de reconstitution de la méthode et d'une théorie des sources (pp. 175-579). Il nous est impossible d'entrer dans le détail de ce travail immense dont la parfaite clarté, obtenue par le plus intelli

gent déploiement de divisions, à la fois commodes et tirées de la nature du sujet, n'a d'égale que l'érudition vraiment déconcertante de la documentation.

C'est dans la Conclusion (pp. 580-592), que nous trouverons résumées les thèses originales de l'auteur. Elle comprend deux sections la première a rapport à la légitimité de la méthode à laquelle il s'arrête; la seconde à sa fécondité pour la réforme du droit dans le sens social. Laissant de côté cette deuxième section d'ordre plus pratique, nous nous attacherons à la première qui renferme la pensée maîtresse.

« Cette pensée maîtresse, je crois pouvoir l'énoncer ainsi : Même sous sa forme positive, le Droit nous apparaît comme un ensemble de règles issues de la nature des choses et devant être dégagées au moyen d'une interprétation plus ou moins libre des éléments sociaux, qu'il a pour objet d'ordonner en vue du bien commun. Directement inspiré par la justice et l'utilité générale, son essence le place donc fort au-dessus des sources formelles, qui n'en sont que des révélations empiriques, destinées à diriger les jugements humains de façon plus précise, mais, en soi, toujours incomplète et imparfaite » (p. 580).

De cette proposition découlent des corollaires :

1o La loi écrite ne peut être tenue pour autre chose qu'une information, très limitée, du Droit, résultant d'un ensemble d'injonctions consacrées par un organe supérieur, à l'effet d'établir sans conteste quelques règles indispensables ou susceptibles d'une formule nette.

2o La décision légale tombe sous le coup du jugement rationnel: on peut la critiquer notamment en vue d'une réforme future.

3o La question de résistance aux lois qui heurtent un droit essentiel est réservée, comme demandant, pour contre-balancer le germe d'anarchie que recèle l'affirmative, des conditions spéciales de rectitude de jugement et de respect de l'autorité dans la multitude.

4o La loi écrite sera complétée et précisée par la coutume. 5o A défaut de la coutume, le jurisconsulte n'aura d'autre ressource que de scruter directement les éléments sociaux dont il doit fixer la règle, et de déterminer lui-même les lois de leur har

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