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des avions et avec l'observation directe, on arrivait, grâce aux admirables cartes du service géographique de l'armée, à déterminer l'emplacement d'une batterie à environ dix mètres près;

la télégraphie sans fil a fait pendant la guerre d'énormes progrès pratiques.

IV. UTILISATION EN TEMPS DE PAIX DES FABRICATIONS DE GUERRE

On peut se demander ce que deviendront les nombreuses installations réalisées rapidement et avec d'énormes dépenses pour la chimie de guerre. C'est un problème qui est à l'étude et qui n'est pas encore complètement résolu.

L'un des produits les plus importants des nouvelles fabrications est la cyanamide obtenue en vue de faire de l'acide azotique. On est en droit de supposer que la cyanamide survivra à la guerre et sera utilisée par l'agriculture, qui commence déjà à l'employer. En effet, la cyanamide, qui dans le sol humide se change peu à peu en ammoniaque, est un véritable engrais azoté à forte teneur en azote : elle en renferme 18 à 20 %, tandis que l'azotate de soude naturel du Chili n'en renferme que 15 ou 16%. Son prix est, dit-on, moins élevé. Déjà avant la guerre ou fabriquait de la cyanamide en Belgique. Sa production, très étudiée aujourd'hui, grâce précisément aux besoins de la guerre, est un des moyens de résoudre le problème capital de la fixation de l'azote atmosphérique.

L'acide sulfurique reprendra l'une de ses applications principales, la fabrication des superphosphates, si importante pour l'agriculture qui a beaucoup manqué d'engrais pendant ces dernières années. Mais le

développement donné à la fabrication de l'acide sulfurique très concentré (oleum), par le procédé dit de contact, paraît devoir survivre à la guerre. S'il exige la présence du platine, il dispense de l'installation encombrante des chambres de plomb et il évite la concentration dispendieuse de l'acide à la densité de 53° Baumé obtenu dans les chambres.

Le chlore, fabriqué par l'électrolyse du chlorure de sodium, pourra être utilisé, non seulement pour faire du chlorure de chaux, mais pour faire du chlorure de carbone, de plus en plus employé comme dissolvant.

Pour les stocks restants des corps aggressifs, on a cherché déjà beaucoup d'emplois. Citons seulement l'utilisation de la chloropicrine, proposée par M. Piutti et par M. Gabriel Bertrand pour détruire les rats qui infestent les navires, ainsi que divers organismes produisant des maladies pour les végétaux.

Quant aux stocks d'ypérite, je ne vois guère autre chose à en faire que de la détruire, par exemple en la traitant par le chlorure de chaux.

Pour la poudre proprement dite, le stock est énorme (environ 60 000 tonnes), d'autant plus que, vers la fin de la guerre, les Américains avaient fait les plus grands efforts pour en fabriquer et que leurs bateaux en avaient déversé des milliers de tonnes dans les régions de Bordeaux et de Paimbeuf.

Pour conserver et loger tous ces stocks, on a installé des parcs spéciaux dans des régions peu habitées, celles des départements de la Creuse et des Landes. Pour diminuer les risques, on en conserve une grande partie par immersion dans l'eau. M. André Lefèvre a suggéré l'idée d'utiliser le froid produit gratuitement par les glaciers de nos montagnes, par exemple dans les lacs des Pyrénées où la température de l'eau reste à 4o ou 5o; en effet, si petites que soient les chances de décomposition de la poudre, elles sont beaucoup moindres à de très basses températures.

Les chimistes ont pu d'ailleurs utiliser pour des recherches personnelles, en vue d'accroître nos connaissances scientifiques, certains stocks de corps aggressifs qu'on leur a laissés, parce qu'ils les avaient étudiés pendant la guerre. M. Moureu a eu à sa disposition cent kilogrammes d'acroléine et a déterminé les conditions de sa stabilisation. M. Simon a eu une grande quantité de chlorosulfate d'éthyle et a fait déjà plusieurs publications à ce sujet.

Enfin les avions, dont on avait construit d'énormes quantités, seront certainement utilisés pour les trajets aériens, sans compter ceux qui sont réservés pour la défense militaire.

RÉFLEXIONS GÉNÉRALES

Tout cet ensemble d'applications si diverses des sciences expérimentales à l'art militaire, improvisées en grande partie pendant ces dernières années, a nécessité des dépenses formidables dont les pays alliés souffrent encore lourdement, surtout la France. C'est que, comme on le dit, « l'argent est le nerf de la guerre ». Il l'est aussi des recherches scientifiques. Leurs applications à la chimie de guerre ont démontré aux pays alliés la nécessité, pour le temps de paix, d'augmenter considérablement les ressources matérielles dont doivent disposer les savants pour les recherches originales. De là la protection accordée par les gouvernements aux associations scientifiques internationales dont l'organisation a été réglée en principe à Bruxelles.

Mais l'argent ne sert à rien sans les forces morales. Toute cette chimie de guerre a été l'œuvre de savants, d'industriels, d'ouvriers qui y ont mis toute leur énergie. On ne peut en nommer quelques-uns sans faire tort aux autres. Mais on doit reconnaître la vérité de

cette pensée que m'exprimait le maréchal Joffre que, chez les alliés, pendant cette terrible guerre, tout le monde a fait son devoir.

Ces applications de la science, avec leurs effroyables résultats meurtriers, montrent que si la science est bienfaisante pour les œuvres de paix, elle est non moins féconde pour les œuvres de guerre. Nous sommes ainsi bien loin de la prétention des intellectuels qui voulaient baser la morale sur la science et qui cherchaient à faire pénétrer cette idée dans les masses populaires. La science est une arme puissante, mais une arme dont on peut se servir pour faire le mal autant que pour faire le bien.

GEORGES LEMOINE,

membre de l'Institut de France.

NOTES BIBLIOGRAPHIQUES

REVUE SCIENTIFIQUE : 12 avril 1915, 12 juin 1919.

CORRESPONDANT : 10 avril 1917.

BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ENCOURAGEMENT POUR L'INDUSTRIE NATIONALE : juin 1918, février 1919, juin 1919, juillet 1919, août 1919, janvier 1920 (synthèse de l'ammoniaque expériences de MM. Guichard, Vavon, etc.). Conférences de M. Haller, les 8 mai et 15 mai 1920, sur les poudres et matières explosives pendant la guerre.

LA REVUE: mars 1919 (industrie de l'azote).

CHIMIE ET INDUSTRIE, publication mensuelle de la SOCIÉTÉ DE LA CHIMIE INDUSTRIELLE : décembre 1919; Colonel Vinet, la guerre des gaz ; avril 1920: M. Lheune, le service des poudres pendant la guerre.

COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES: 14 avril 1919, 19 mai 1919, 7 juillet 1919; 1er décembre 1919 et 19 janvier 1920 (M. Claude synthèse de l'ammoniaque).

REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES: 15 avril 1919, 30 janvier 1910, 30 avril 1920.

RAPPORT GÉNÉRAL SUR L'INDUSTRIE FRANÇAISE (1919), publication du Ministère du Commerce : 3 volumes.

LE MONDE ILLUSTRÉ: 27 décembre 1919.

SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE : conférence de M. Pascal, le 30 avril 1920, sur la synthèse de l'acide azotique en partant de l'ammoniaque. REVUE SCIENTIFIQUE : 12 juin 1920 (M. Moureu : les gaz de combat).

Industries chimiques en Allemagne pendant la guerre REVUE SCIENTIFIQUE, 19 juin 1915; BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ENCOURAGEMENT POUR L'INDUSTRIE NATIONALE, juin 1918; MONITEUR SCIENTIFIQUE: juillet-août 1919.

Applications de la physique pendant la guerre, 1914-1918, par M. Vigneron (Masson, éditeur).

La météorologie aux armées : REVUE SCIENTIFIQUE, 12 juillet 1919.

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