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anéantir, son intercession nous sauver. Sûrs de vaincre, nous appuyant sur sa seule parole, nous bravons tout travail, mépris, affliction, misère et mort, car nous avons en Lui la parole révélée de Dieu et elle ne ment jamais.

Tel est mon sentiment sur cette question. Le Verbe est devenu tout, pour nous autres de l'Eglise évangélique, par l'œuvre de Luther et, en bon théologien qu'il est, Delitzsch ne devait pas oublier que notre grand Luther nous a enseigné à chanter et croire « Vous devez laisser subsister le Verbe ! ».

Il va de soi, à mon sens, que l'Ancien Testament contient un grand nombre de fragments qui ne sont que de nature historique purement humaine et non la « parole révélée de Dieu ».

Ils ne sont que de simples récits historiques de faits de toute sorte qui se sont accomplis dans la vie du peuple d'Israël, dans l'ordre politique, religieux, moral et spirituel. Ainsi, par exemple, l'acte par lequel la législation d'Israël lui fut donnée sur le Sinaï ne peut être considéré que symboliquement comme inspiré de Dieu, car Moïse ne fit peut-être que renouveler des lois plus anciennement connues, tirant leur origine, cela est possible, du Livre de la Loi d'Hammurabi, pour les amalgamer avec le système de lois faible et inconstant de son peuple et le consolider.

L'historien peut ici, par le sens et le texte, retrouver peutêtre une filiation avec les lois d'Hammurabi, l'ami d'Abraham, qui pourrait être logiquement exacte; mais cela ne saurait aucunement infirmer le fait que Dieu a inspiré Moïse et que, par cela même, il s'est révélé au peuple d'Israël.

C'est pourquoi mon sentiment est que notre bon professeur doit plutôt éviter désormais de faire entrer et de traiter la religion comme telle dans les conférences qu'il donne en notre compagnie, mais qu'il peut y exposer tranquillement le rôle que la religion, les mœurs des Babyloniens et autres peuples jouent dans l'ancien Testament.

Quant à moi, je tire de ce qui précède les conclusions suivantes :

a) Je crois en un seul Dieu.

b) Nous autres hommes avons besoin, pour le connaître, d'une représentation, et nos enfants plus encore.

c) Cette représentation a été jusqu'à présent l'Ancien Testament tel qu'il nous a été transmis par la tradition.

Celui-ci peut, dans sa forme, se modifier profondément, par suite de recherches, de fouilles ; mais cela n'a pas d'importance. Le nimbe du peuple élu y perd de son éclat, mais cela n'a pas davantage d'importance.

L'essence même, son contenu essentiel reste le même: Dieu et ses actes. Jamais la religion n'a été un événement scientifique; elle fut uniquement ce qui déborda du cœur et de l'être même de l'homme par suite de ses relations avec Dieu.

Avec une cordiale reconnaissance et tous mes compliments, toujours votre sincère ami,

P.-S.

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GUILLAUME I. R.

Vous pouvez faire de ces lignes l'usage le plus large afin que quiconque le voudra puisse les lire.

La permission, ou plutôt l'ordre, que l'empereur donnait de faire de sa lettre « l'usage le plus large » fut immédiatement accompli. On la traduisit dans toutes les langues. Les grands journaux la reproduisirent intégralement. La plupart des feuilles religieuses ou impies la commentèrent. Guillaume II s'était révélé diplomate, stratégiste, amiral, peintre, sculpteur, sociologue, musicien, comédien. Un fleuron manquait à sa couronne intellectuelle: celui de théologien. Il venait de se le décerner devant tout l'univers.

Si son amour-propre était satisfait, la cause religieuse

qu'il prétendait défendre n'avait pas autant à se féliciter. L'esprit positif du XXe siècle ne vit guère qu'une étrangeté dans son intervention (1).

En n'inscrivant dans sa liste de grands hommes, censés inspirés, pas un seul des génies de la race latine ni de la religion catholique, l'illustre théologien prussien ne se montrait-il pas aussi sectaire que les plus bornés de ses congénères ? Pourquoi ne reconnaissait-il pas quelque inspiration à ce pape dont il recherchait l'alliance et à la religion musulmane dont il s'était constitué le défenseur politique? L'affirmation que son grand-père était inspiré fit dire à des mécréants qu'il ne l'était que du prince de Bismarck. En soutenant que Dieu se révèle encore de nos jours à diverses personnes, il semblait se prendre luimême pour un sujet des faveurs célestes et laissait craindre qu'il fût seulement illuminé. L'esprit véritablement chrétien, tout comme l'esprit rationaliste, se refuse à voir la trace d'un mouvement supérieur dans les tueries que l'on ordonne, fussent-elles de Chinois (2), ou dans celles que

(1) Naturellement il y eut des exceptions. Un journaliste, M. Jean de Bonnefon, qui s'est fait une spécialité des questions religieuses, disait :

<< Guillaume II vient d'écrire une des plus belles pages qui soient sorties d'un cerveau moderne... Le philosophe ne cesse pas un instant d'être imperator, et le chrétien ne quitte pas une seconde le langage du penseur... Ces augustes paroles passent au-dessus des confessions religieuses. Elles sont chrétiennes, de ce christianisme qui a fait vivre les sociétés depuis près de deux mille ans ». L'Eclair, 25 février 1903.

(2) « Vous êtes, ô Allemands, le peuple élu. Le Seigneur m'a dit : « Va, << choisis-toi des hommes, et combats contre les Amalécites »... Pas de quartier! Pas de prisonniers! Maniez vos armes de telle sorte que, pendant mille ans, pas un Chinois ne se permette plus de regarder de travers un Allemand ». Discours de Guillaume II aux troupes envoyées en Chine, le 27 juillet 1900. E. SCHROEDER, Ein Tagebuch Kaiser Wilhelms II, p. 357.

l'on tolère, fussent-elles de Levantins. L'idée de Dieu a grandi depuis les rois serviteurs de Yahvé et vicaires d'Assur.

Tout en défendant les conceptions traditionnelles, Guillaume II était obligé de prendre des positions qui montraient combien la tradition était battue et forcée de reculer devant la critique. Il faisait commencer la révélation religieuse avec Abraham, laissant dans une ombre discrète les mythes de l'Eden et de Noé. Quant à la révélation du Sinaï, il déclarait prudemment n'y voir qu'un symbole.

Enfin l'empereur déclarait trop ouvertement, pour plaire aux orthodoxes, qu'il permettait aux savants, aux initiés, de tirer toutes les conclusions de leurs travaux, mais qu'il n'entendait pas qu'on pût les dire au peuple.

Bref, l'intervention du théologien couronné, qui devait être accoutumé à ménager les hommes, sombra sur le même écueil que celle des théologiens ordinaires, qui ne vivent qu'avec les livres. En repoussant bruyamment des théories qu'il jugeait dangereuses, il leur donnait du retentissement et, comme sa réfutation n'était pas suffisante, il les accréditait.

L'écho le plus sonore qu'éveilla la lettre fut une profession de foi du plus illustre historien religieux d'Allemagne: Adolf Harnack. Il nia la révélation « extérieure >> et la divinité de Jésus-Christ.

« Il n'y a pas, dit-il (1), de révélation par des choses... Ce sont

(1) Traduction publiée dans Le Protestant, 1 mars 1903; texte dans Preussische Jahrbücher, mars 1903 (pp. 584-589).

des personnes, avant tout, les grands hommes qui sont les révélateurs de Dieu à l'humanité. En tant que, aux yeux de la science, c'est dans leur forte originalité que réside le mystère des grands hommes, on a rétabli là une formule de concorde entre la foi et la science. C'est par un acte d'expérience interne, que la science ne peut ni créer, ni interdire, que nous reconnaissons dans ces personnalités des révélations de Dieu...

« La pensée ne saurait être satisfaite par la conception de deux révélations parallèles; et la lettre de l'empereur, elle-même, trahit cette préoccupation, puisqu'elle a rangé Abraham dans les deux séries. Etant donné que la religion, la force morale et la connaissance sont en rapport étroit, il ne saurait pas être question de deux révélations, mais d'une seule, dont les organes si délicats peuvent différer en grandeur et en espèce, vocation et rôle. Si Jésus-Christ ne perd rien de son caractère unique et de son originalité, quand on le place sur la ligne de Moise, Esaie et des Psalmistes, il n'est pas davantage compromis si on le range dans la même série que Socrate, Platon et les autres sages cités par l'empereur. En dernière analyse, l'histoire ne peut avoir qu'un objet d'étude : l'humanité que Dieu a tirée et affranchie du niveau de l'état de nature, de l'erreur et du péché pour l'élever à la dignité d'enfant de Dieu dont le peuple d'Israël représente le type spécifique dans l'antique.

« L'église chrétienne a pour devoir de rejeter toute appréciation de Jésus-Christ qui effacerait toute distinction entre lui et les autres maîtres. Lui-même, ses disciples et l'histoire du monde se sont exprimés si clairement à ce sujet qu'un doute n'est pas possible. Lui-même nous parle encore dans les Evangiles aussi nettement que jadis à ses disciples.

<< Mais ce qui est contestable, c'est la justesse de la formule rigide : « la divinité du Christ ». Jésus ne l'a jamais employée, mais s'est lui-même appliqué d'autres termes; il est très douteux qu'elle soit jamais venue sur les lèvres de ses disciples:

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