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existantes les formes directrices de son développement postérieur; et cette conviction — écrit M. Harnack tient ce libre théologien « fortement lié à l'Église catholique »>.

M. Harnack m'explique sa pensée :

- «Il est visible que M. Loisy ne comprend pas le protestantisme, les formes libres du christianisme. Cet homme en passe d'hérésie a une sorte d'aversion pour l'esprit « hérétique». Sa conception de la religion reste catholique, inséparable de l'idée de tradition et de communauté. Car le vrai christianisme, pour lui, ce n'est pas la doctrine de l'Evangile, qui n'est qu'un germe: c'est le développement, l'épanouissement de l'Esprit du Christ dans son Eglise. Selon lui, donc, la doctrine évangélique n'est pas le critérium de la foi: on ne peut pas se servir de l'Evangile pour critiquer le développement des idées ou des institutions catholiques; car le catholicisme est la forme plus achevée de la religion évangélique. Une idée de confiance absolue dans l'Eglise catholique a donc guidé l'abbé Loisy. Précisément parce qu'il a foi en l'Eglise catholique, parce qu'en elle il voit la religion vivante par excellence, il a été, quant à l'Evangile, plus hardi, d'un scepticisme plus indifférent (von einem gleichmütigeren Skeptizismus) que ne saurait l'être aucun protestant. La liberté de sa critique de l'histoire évangélique a été contrebalancée, et secondée, par son attachement à l'Eglise catholique.

» Mais cette conception du catholicisme en est une forme sublimisée. L'Eglise ne pense pas comme l'abbé Loisy. L'Eglise catholique est liée au Credo et persiste à le voir, tout entier, dans l'Evangile. Et cependant si le Christ avait commencé par le Credo, le christianisme aurait-il vécu ?...

» Un protestant peut penser ce qu'il veut continue M. Harnack on ne l'exclut pas du protestantisme. Il n'y a pas d'autorité pour cette besogne de police. Tout se passe en famille. Moi-même j'ai été attaqué, j'ai riposté. Je demeure protestant

sans aucun engagement contre ma pensée. Tout au plus le critique trop peu orthodoxe risque-t-il de ne pouvoir être pasteur ou d'être forcé à se démettre de cette charge; mais il n'est pas chassé de la communion protestante. Pour nous, il suffit de de vouloir être chrétien, de se sentir chrétien pour l'être. De terribles crises d'âme nous sont épargnées.

-

>> Si je pouvais donner un conseil aux chefs de l'Eglise catho lique conclut en souriant M. Harnack je les engagerais à fonder une section hors rang pour les catholiques intelligents... En fait, cette section a toujours existé. Il y a toujours eu, parmi les plus nobles représentants du catholicisme, des protestants secrets. >>

III. Rendant compte de la quatrième édition de la Dogmengeschichte de M. Harnack, dans la Revue critique (tome I de 1906, p. 66), M. Loisy répondit ainsi à l'historien allemand :

Le très utile précis d'histoire des dogmes, de M. Harnack, paraît en quatrième édition, avec un certain nombre de retouches et d'additions. Le savant professeur honore mes écrits d'une citation dans ses prolégomènes, et il croit pouvoir résumer ainsi ma pensée : « Critique ce que tu veux, mais laisse subsister comme enseignement de l'Eglise ce que la critique a détruit; car c'est l'Eglise qui porte le développement. » Cela peut être assez piquant, mais cela pourrait prouver aussi que M. Harnack ne m'a pas très bien compris. Il faudrait s'entendre sur les destructions de la critique. M. Harnack raisonne toujours comme si l'Evangile avait si bien réalisé la perfection absolue de la religion que le christianisme n'ait pu faire ultérieurement aucune acquisition de valeur appréciable, ou plutôt qu'il ait dù fatalement déchoir. Or ce principe me parait historiquement, et philosophiquement, indéfendable. Et c'est pourquoi je ne trouve pas que la critique de la Bible puisse détruire et condamner la vie séculaire de l'Eglise.

Cette réponse a ravivé les polémiques. Hétérodoxes et catholiques romains

ont élevé de nouvelles objections au système de M. Loisy. Les divers points de vue du christianisme traditionnel et des Eglises séparées, semblent résumés dans cette note de M. le docteur Michaud (Revue internationale de théologie, avril-juin 1906, p. 385):

Il faut avouer que la réplique de M. Loisy paraît extrêmement faible, car elle revient à l'argument suivant : L'Evangile n'a pas réalisé la perfection absolue du christianisme; donc le christianisme a pu faire ensuite des acquisitions de valeur, et, de fait, ces acquisitions de valeur sont les dogmes romains et les institutions romaines, qui sont la vie séculaire de l'Eglise.

Or, si telle est la pensée fondamentale de M. Loisy, il est clair qu'elle est erronée : 1° parce que la révélation du Christ a été faite une fois pour toutes, et que nul n'a le droit d'y ajouter aucun dogme; 2o parce que les dogmes et les institutions qui constituent le système romain sont contraires à l'Evangile, à la révélation du Christ, et qu'on ne saurait dès lors les taxer d'acquisitions de valeur ; 3° parce que les erreurs, les falsifications et les superstitions enseignées et pratiquées par la papauté ne sauraient être appelées « la vie séculaire de l'Eglise ». La papauté n'est pas l'Eglise. L'Eglise romaine non plus n'est pas I'Eglise. M. Loisy fausse donc la valeur de la révélation chrétienne en la réduisant à une sorte d'a b c religieux que Rome serait chargée de compléter; il fausse la notion de l'Eglise chrétienne qu'il réduit injurieusement à l'Église romaine; enfin il fausse les évolutions de l'église romaine, en essayant de les représenter comme un perfectionnement de l'Evangile, tandis qu'elles n'en sont que la contrefaçon et la corruption.

IV. Lettre de M. l'abbé Loisy à M. Bailey Saunders, correspondant du Times, qui lui avait offert l'expression de sa sympathie. Cette lettre fut publiée dans le Times et dans le Matin, le 30 avril 1904. Voyez ci-dessus p. 157 et 195.

Monsieur,

Bellevue, 8 janvier 1904.

Il m'est assez difficile d'apprécier maintenant soit la juste

portée, soit les conséquences probables de la condamnation qui vient d'atteindre mes ouvrages. La forme de cette condamnation est insolite. Au lieu d'un jugement sur mes écrits ou mes opinions, la Congrégation du Saint-Office a émis un arrêt d'insertion au catalogue de l'Index, sans spécifier les motifs de cette décision. Elle dit seulement que le cardinal secrétaire d'Etat sera chargé de donner, sur ce sujet, des explications au cardinalarchevêque de Paris. Vous avez pu voir comment le jeune cardinal Merry del Val s'est acquitté de cette mission. Il reprend les considérants allégués par le cardinal Richard dans l'interdiction de mes articles sur la Religion d'Israël, en octobre 1900, et dans la censure de l'Evangile et l'Eglise, en janvier 1903. La lettre de Mgr Merry del Val nous renseigne officiellement sur les intentions du Saint-Office, mais elle n'est pas un jugement officiel de cette Congrégation. Des décrets du Saint-Office et de l'Index, commentés par le cardinal secrétaire d'Etat, il résulte que l'on a voulu couvrir de l'autorité pontificale les mesures antérieurement prises contre mon enseignement et contre mes écrits par le cardinal Richard et d'autres prélats français. On dénonce mes opinions et mes livres comme dangereux, et Mgr Merry del Val parle même des erreurs dont mes livres « regorgent ». Le monde catholique, le clergé français surtout sont invités à se défier de mes doctrines, et, pour les en préserver, on leur défend de lire mes livres voilà, me semble-t-il, ce que signifient les documents romains que le cardinal Richard a communiqués aux curés de son diocèse et à moi-même, le 31 décembre dernier.

Je n'ai pas à discuter en ce moment l'opportunité d'une telle monition. J'ai dit assez clairement dans mes deux petits livres ce que je pense touchant le rôle enseignant de l'Eglise et les inconvénients que peut présenter ce que je me suis permis d'appeler le régime intellectuel du catholicisme, pour que vous deviniez sans peine comment je pourrais parler de la censure, si

c'était un autre qui fût censuré. J'estime que je dois témoigner du respect pour cet acte d'une autorité que je crois nécessaire au maintien de la vérité chrétienne dans le monde. Mais ce respect ne fait pas tort à celui que je dois à la vérité même. Catholique j'étais, catholique je reste ; critique j'étais, critique je reste. Avec la meilleure volonté du monde, je ne puis lire la Bible sans que mon expérience d'historien me la montre sous un jour assez différent de ce qu'elle paraît à la plupart des théologiens. Quand je lis, dans le quatrième Evangile : « Au commencement était le Verbe », je comprends, avant d'aller plus loin, que ce livre est autre chose qu'une simple histoire de Jésus-Christ. Je sais fort bien que mes opinions sont imparfaites, pleines de lacunes et même d'erreurs je les corrige moi-même tous les jours. Mais, je ne puis les corriger dans l'ordre de l'histoire que par le progrès de mes recherches. La tradition de l'Eglise me vient en aide pour interpréter religieusement l'histoire; elle ne peut changer devant mon esprit les conditions réelles des témoignages concernant le passé de la religion et la vie de Jésus. Je n'ai pas interrompu mes travaux critiques sur les Evangiles, et je n'ai pas l'intention de les interrompre. Mon commentaire de Jean est publié. J'achève maintenant mon commentaire des Synoptiques. La censure dont mes écrits ont été frappés ne gênera pas et je ne crois pas même que, dans la pensée de ses auteurs, elle soit destinée à entraver mon activité scientifique.

Tant de bruit s'est fait mal à propos autour de mes dernières publications, des contresens si extraordinaires ont été commis à leur occasion, l'on a si bien réussi à créer le scandale des ignorants, que la mesure de haute police dont les Congrégations romaines ont assume la responsabilité n'est que trop aisée à expliquer. Ceux qui ont cru l'Eglise en péril la croient mainte nant sauvée. Ne leur envions pas cette consolation. Au fond, rien n'est changé dans la situation du catholicisme; il n'y a que cinq livres de plus au catalogue de l'Index. Ce qui peut se trouver

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