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l'Eglise. D'après leur rapport, il le réprouva et en interdit la lecture au clergé et aux fidèles de son diocèse. La condamnation s'appuyait sur les considérants :

« 1° Que le livre a été publié sans l'Imprimatur exigé par les lois de l'Eglise; 2o Qu'il est de nature à troubler la foi des Fidèles sur les dogmes fondamentaux de l'enseignement catholique, notamment sur l'autorité des Ecritures et de la Tradition, sur la divinité de Jésus-Christ, sur sa science infaillible, sur la Rédemption opérée par sa mort, sur sa Résurrection, sur l'Eucharistie, sur l'institution divine du souverain Pontificat et de l'Episcopat. >>

Le nonce s'était chargé de recruter des adhésions épiscopales à cette condamnation. Il n'eut pas grand succès. Sept prélats seulement, à savoir le cardinal d'Autun, l'archevêque de Cambrai, les évêques de Perpignan, d'Angers, de Bayeux, de Belley et de Nancy, promulguèrent dans leurs diocèses la prohibition portée par le cardinal Richard (1). L'évêque de Châlons se contenta de défendre oralement la lecture du livre dans ses séminaires. L'évêque de Quimper (2) prit part indirectement à l'affaire en félicitant un jésuite (3), le P. Bouvier, qui réfuta M. Loisy. Dans l'ordonnance par laquelle il adhérait à l'acte du cardinal de Paris, l'évêque d'Angers prohiba la Question biblique et le cardinal de Paris fit également sienne cette sentence dans son archidiocèse (4).

(1) Ces documents épiscopaux sont reproduits dans l'Appendice d'Autour d'un petit livre.

(2) Mgr Dubillard.

(3) Lettre publiée dans la Vérité Française, 15 avril 1903.

(4) J'ai reproduit ces documents dans Mes difficultés avec mon évêque.

Les théologiens n'avaient point attendu les condamnations pour dénoncer l'hérésie « Loisyste(1) ». La campagne orthodoxe fut commencée et menée avec une vigueur remarquable par M. l'abbé Gayraud (2). L'intervention des évêques excita encore les réfutateurs, et rendit circonspects les défenseurs. Le premier résultat de ces polémiques et de ces anathèmes fut d'épuiser promptement le livre fameux. Les derniers exemplaires atteignirent un prix élevé. On se mit à traduire l'ouvrage en anglais et en allemand (3).

Une question se posait. L'auteur se rétracterait-il ou bien sortirait-il de l'Eglise ? Les journaux apprirent bientôt qu'il suspendait le tirage d'une seconde édition qui était sous presse. On sut également qu'il avait écrit à l'archevêque de Paris, le 2 février :

« Il va de soi que je condamne et réprouve toutes les erreurs qu'on a pu déduire de mon livre, en se plaçant, pour l'interpréter, à un point de vue tout différent de celui où j'avais dù me mettre et m'étais mis pour le composer. »

Les uns interprétèrent cette formule comme une « rétrac

(1) J'ignore quel fut l'inventeur de cet adjectif et de son substantif, le loisysme». Les deux termes semblent entrés dans la langue théologique. On les trouve dans des documents officiels, par exemple les Conférences diocésaines de l'archevêché de Rennes, publiées par le cardinal Labouré, pour l'année 1905.

(2) Univers, 1, 3, 4, 9, 10, 15 janvier 1903.

(3) The Gospel and the Church, translated by Christopher Home (London, Isbister); Evangelium und Kirche übersetzt von Joh. Grière-Becker (München, Kirchheim). M. Harnack rendit compte du livre dans la Theologische Literaturzeitung, 23 janv. 1904; M. H. Holtzmann dans la Deutsche Literaturzeitung, 4 juin 1904.

tation insuffisante », les autres comme une « rétractation excessive »> (1). Plus tard, M. Loisy expliqua lui-même que << sa lettre au cardinal Richard n'était pas un désaveu de ses opinions d'historien, mais un acte de déférence respectueuse en conformité avec la discipline ecclésiastique ». Il ajouta qu'il avait voulu relever discrètement la méprise où étaient tombés tous ceux qui avaient voulu prendre la description historique de l'Evangile pour une série d'objections contre le dogme catholique (2) », mais « qu'il n'y avait pas, et ne pouvait pas y avoir de rétractation (3) ». Le fait est qu'à ce moment là même, et que le reste de l'année, il continua de publier dans la Revue d'histoire et littérature religieuses et dans la Revue critique des articles qui s'inspiraient des mêmes principes que le livre condamné, et qui ruinaient tout autant la théologie traditionnelle.

L'archevêché de Paris ne croyait pas d'ailleurs que M. Loisy se fût rétracté, et il le disait aux polémistes qui allaient s'y renseigner (4). Il espérait que M. Loisy com

(1) La Civiltà cattolica appelle cette lettre « une vraie plaisanterie et même une raillerie », 6 février 1904, p. 280. Le Journal de Genève (J.-E. Roberty, 15 novembre 1903) remarque : « C'est un peu, semble-t-il, comme si l'abbé avait dit: Vous ne savez pas vous servir de l'arme que je vous donne pour défendre l'Eglise ; c'est une arme, et, entre vos mains inexpérimentées, elle risque de vous blesser. Mais si vous vous y preniez comme je m'y prends, vous ne tarderiez pas à en connaître l'excellence. >>

(2) Autour, p. IX.

(3) Autour, p. VII. « Ou M. Loisy a des raisons de ne plus croire à l'autorité divine de l'Eglise et alors il ne pouvait pas y avoir rétractation, mais il n'est plus catholique; ou M. Loisy a eu et pense avoir encore de solides raisons de croire à l'Eglise, et alors il peut y avoir rétractation. » Benoît Emonet, dans les Etudes, 20 mars 1904, p. 742.

(4) Dans la Zeitschrift für katholische Theologie (XXVII, 1903, p.320) le P.

prendrait qu'il devait s'abstenir de toute œuvre de vulgarisation, puisque du moins on ne le forçait pas à cesser toutes ses publications. De fait, on n'avait censuré que l'Evangile et l'Eglise, mais on s'était gardé de blâmer les Etudes évangéliques, pourtant plus redoutables, puisqu'elles donnaient les preuves des thèses que le premier livre ne faisait qu'exposer (1).

L'archevêque de Paris ne pouvait d'ailleurs demander de rétractation formelle. Il avait condamné le livre comme inopportun, comme étant « de nature à troubler la foi des fidèles sur les dogmes fondamentaux », et non point comme conduisant logiquement à les nier. Et en effet la grosse question, le thème principal des discussions était de savoir ce qu'avait voulu dire exactement M. Loisy, quelle était la portée de son livre, et jusqu'à quel point sa thèse était compatible avec l'enseignement catholique. Beaucoup de gens très cultivés n'arrivaient pas à le com prendre.

Un ancien élève de l'Ecole Normale, agrégé et professeur honoraire de philosophie à la Faculté de Grenoble, M. Claude-Charles Charaux, consulta son ancien condisciple le cardinal Perraud.

Léopold Fonck, S. J., dit à propos de ces incidents : « L'auteur se soumit, il est vrai, à la sentence de ses supérieurs ecclésiastiques, « quant aux erreurs qu'on aurait pu tirer de mon livre » : mais il ajoutait dans une lettre postérieurement envoyée au cardinal, comme nous l'apprenons d'une source autorisée de Paris, l'explication suivante: « De ce qui est dans le livre même, je ne retire pas un point ». Le texte de cette lettre postérieure est imaginaire.

(1) Les Etudes évangéliques ne soulevèrent que très peu de contradictions. Les orthodoxes jugèrent qu'il valait mieux les ignorer. La principale protestation qui s'éleva contre elles fut celle du chanoine Davin. ( Vérité, 2 fév. 1903).

« Sans doute, répondit l'évêque (1), dans ces pages signées par un prêtre, on ne se heurte pas à des négations formelles des vérités fondamentales sur lesquelles repose l'économie de la foi chrétienne. La méthode employée dans ce livre est, si je puis m'exprimer de la sorte, essentiellement fuyante et nuageuse. Presque à chaque page, on se demande si l'auteur a voulu dire telle chose ou le contraire; s'il entend répondre aux objections du Professeur protestant dont il analyse les conférences sur « l'Essence du christianisme (2), » ou bien s'il se les approprie, tout en essayant soit de les atténuer, soit de les accommoder tant bien que mal aux enseignements traditionnels de la théologie catholique.

comme

C'est par là que ce livre me parait très dangereux, et, l'a si justement dit le vénérable archevêque de Paris, « de nature à troubler gravement la foi des fidèles ».

Quand celle-ci est attaquée directement, elle se met en défense et se trouve, par là mème, provoquée à se couvrir des pièces de l'armure spirituelle si minutieusement décrite par saint Paul, au chapitre sixième de son Epitre aux Ephésiens.

Il n'en va pas de même de ces propositions vagues, insidieuses, presque à double sens, qui, accompagnées de « peut-être >> et de points d'interrogation, se glissent imperceptiblement dans l'esprit et y apportent avec elles, sinon le doute réfléchi et consenti, du moins l'hésitation et une sorte de vertige.

Oserai-je dire, en me servant d'une comparaison récemment employée dans un article consacré au livre de M. Loisy (3), que les flottements » de l'auteur de l'Evangile et l'Eglise produisent

(1) Semaine Religiease d'Autun, 7 février 1903. Lettre datée du 2. (a) Le Docteur Harnack.

(3) M. Sėdilot, curé de Sainte-Elisabeth de Paris. Univers du 13 janvier. Sur les polémiques de M. Sédilot, cf. Univers, 8 déc. 1902; 4 et 11 janv. 1903.

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