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énoncé tant d'autres choses toutes simples, il répondit en scandant ses paroles avec une assurance tranquille : « Absolument aucune ! » Tout l'homme est dans cette dénégation primesautière, dont la portée, à pareil moment, dépassait de si loin ce qu'il croyait dire. Sans le savoir, en pensant se défendre d'une faiblesse, il avait livré le secret de la longue vie sur laquelle, à l'instant suprême, il pouvait jeter un si confiant regard.

P. PEETERS, S. J.

66

LA

LOGISTIQUE

de Gilles-François de Gottignies

de la Compagnie de Jésus

C'est la lecture de la correspondance inédite de Théodore Moretus avec Gilles-François de Gottignies qui appela pour la première fois mon attention un peu sérieuse sur ce dernier. Cette correspondance, inconnue en Belgique, se conserve dans un manuscrit de l'Université de Prague (1), qui m'a été envoyé en prêt, avec beaucoup d'obligeance, au Musée Plantin, à Anvers. J'en remercie vivement le Conservateur de la Bibliothèque tchéco-slave. Je fus vite convaincu que Gottignies était un vrai mathématicien. Quetelet le nomme (2), mais en dit somme toute peu de chose. D'autre part, la Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, des Pères De Backer et Sommervogel (3), m'apprenait que Gottignies

(1) Voir le Catalogus Codicum Manuscriptorum Latinorum, qui in C. Bibliotheca publica atque Universitatis Pragensis asservaníur. Auctore Josepho Truhlar ejusdem Bibliothecae conservatore. Pars I. Pragae. Sumptibus Regiae Societatis Scientiarum. Typis Drii Ed. Gregr. filiique. Apud Fr. Kivnar Bibliopolam. 1905. No 1045-1046. VI, B 12 a.

Ce manuscrit est un fort in-folio. A la description sommaire qu'en donne Truhlar j'ajouterai qu'il n'est pas folioté, ce qui rend les références difficiles. Mais, comme les lettres de Gottignies sont toutes autographes, on les distingue aisément de l'écriture de Moretus, ce qui permet de les retrouver sans trop de peine. Les minutes des réponses se trouvent d'ordinaire à peu près en regard. (2) Histoire des Sciences Mathématiques et Physiques chez les Belges. Bruxelles, Hayez, 1864, pp. 233-234.

(3) Tome III. Bruxelles, Schepens; Paris, Picard, 1892. Au mot « Moretus ».

avait beaucoup écrit dans les domaines divers des sciences exactes. Après quelques recherches, je dus constater que ses ouvrages, tous publiés en Italie, font pour la plupart défaut dans les dépôts publics belges. Je parvins cependant à découvrir un exemplaire des principaux travaux de Gottignies, sur la Logistique, et je me suis décidé à limiter à la Logistique le sujet de cette étude. Mais, avant d'en aborder l'examen, esquissons ce que nous savons de la vie de l'auteur.

I

Gilles-François de Gottignies naquit à Bruxelles, le 10 mai 1630 (1). Fils d'Augustin de Gottignies, Secrétaire du Conseil Privé, et de Marguerite Vereycken, il était de bonne maison.

Son père lui fit donner une éducation soignée. Après lui avoir fait suivre un cours complet d'humanités au Collège des Jésuites de sa ville natale, il envoya GillesFrançois au Collège du Faucon de l'Université de Louvain. Le jeune homme y écouta pendant vingt et un mois les leçons de philosophie des professeurs Van Werpen et De Locuer, respectivement premier et second Régent de cet établissement. Mais De Locuer, étant venu à mourir, fut remplacé par le professeur De Gein.

Augustin de Gottignies était un magistrat d'esprit cultivé et de jugement sûr, comme il est aisé de s'en convaincre, pour peu qu'on se soit familiarisé avec les archives du Conseil Privé relatives à cette époque. Il s'était probablement rendu compte des dispositions peu ordinaires que son fils montrait pour les sciences exactes. Aussi, après l'avoir confié pendant près de deux

(1) Je tire ce renseignement, et tous ceux qui sont antérieurs à l'entrée de Gottignies dans la Compagnie, d'une auto-biographie qui se trouve dans l'Album Novitiorum de l'ancienne province Flandre-Belgique de la Compagnie de Jésus qui se conserve au Noviciat de Tronchiennes.

ans aux bons soins des professeurs du Collège du Faucon, lui fit-il suivre durant trois années encore le cours de mathématiques qui se donnait au Collège des Jésuites de Louvain. Gilles-François y rencontra un maître éminent auquel il voua jusqu'à la fin de sa carrière, comme ses ouvrages en font foi, une admiration reconnaissante : c'était André Tacquet (1). Qu'on veuille bien le remarquer, ce fut grâce à l'initiative intelligente et à la perspicacité paternelles, qu'avant son entrée dans la Compagnie de Jésus, Gilles-François eut au cours de plusieurs années l'occasion de s'adonner à l'étude exclusive des mathématiques.

Les leçons de Tacquet furent pour la formation intellectuelle de Gilles-François un bienfait de la Providence. Le maître imprima sur l'esprit de son élève sa forte marque personnelle. Quand bien même on ne connaîtrait pas cette influence par des documents positifs, la comparaison des travaux de Gottignies sur la Logistique, avec l'Arithmétique Théorique et Pratique (2) de Tacquet, la ferait deviner. Le Jésuite anversois observe en effet que pour justifier les règles des opérations numériques

(1) Voir sur Tacquet ma notice : Le Jésuite mathématicien anversois André Tacquet (1612-1660). COMPAS D'OR, t. III, Anvers, Hielenaler ; La Haye, Martinus Nijhoff, 1925, pp. 63-87.

(2) Arithmeticae Theoria et Praxis Auctore Andrea Tacquet, Antverpiensi E Societate Iesu, Matheseos Professore. Lovanii, Apud Cyp. Coenestenium. M.DC.LVI. Édition rarissime, importante au point de vue documentaire. J'en connais un exemplaire au Petit Séminaire de Saint-Trond; je lui ai consacré une note: Sur un exemplaire de la première édition de l'Arithmeticae Theoria et Praxis d'André Tacquet (Lovanii, Cyp. Coenestenius, 1656). ANN. DE LA SOC. SCIENT., t. XLVII, Louvain, Ceuterick, 1927. Série A, 1re part., pp. 39-42.

Arithmeticae, etc. (comme ci-dessus). Editio secunda correctior. Antverpiae. Apud Iacobvm Mevrsivm. Anno M.DC.LXV. (Bibl. Roy., Univ. de Gand ; Coll. de la Cie de Jésus à Louvain. J'en possède un exemplaire.)

Sur l'arithmétique de Tacquet, voir ma note: André Tacquet S. J. et son traité d' « Arithmétique théorique et pratique », Isis, t. IX, Bruxelles, Weissenbruch, 1927, pp. 66-82.

IV• SÉRIE. T. XIII.

15

élémentaires, les arithméticiens, ses prédécesseurs, se sont tous contentés jusque là d'en donner des exemples. Or, dit-il, judicieusement, un simple exeniple n'est pas une preuve. Il va donc tâcher de faire mieux en nous donnant le plus ancien traité d'arithmétique raisonnée qui soit aujourd'hui connu. Cette tentative, je le veux bien, ne fut pas du premier coup à l'abri de tout reproche ; mais en s'y essayant, d'ailleurs avec un succès réel, Tacquet fut naturellement conduit, par la généralité des raisonnements, à y remplacer les chiffres par des lettres. Kaestner relève déjà ce fait dans sa Geschichte der Mathematik (1). On verra plus loin l'impression stimulante que cette substitution fit sur l'esprit de Gottignies et le parti heureux qu'il en sut tirer.

Le 5 novembre 1653, Gilles-François se présentait à Anvers, au P. Jean-Baptiste Engelgrave, provincial de la province flandro-belge de la Compagnie de Jésus, et lui demandait d'être admis dans son Ordre. L'offre fut acceptée sans difficulté et, dès le 20 du même mois, le jeune homme franchissait la porte du noviciat de Malines. La maison était alors gouvernée par le P. François De Cleyn.

Le noviciat achevé, Gottignies resta peu d'années en Belgique. Envoyé en Italie, il ne la quitta plus jusqu'à la fin de ses jours. Après y avoir parcouru le cycle des études de la théologie, les supérieurs de la Compagnie le firent monter, dès 1662, dans cette chaire de mathématiques du Collège Romain sur laquelle Christophe Clavius et Christophe Grienberger avaient jeté tant d'éclat. Il y resta pendant un quart de siècle, comme il nous l'apprend lui-même à la fin de la Préface de sa Logistica universalis (2).

(1) Tome III, Goettingen, Johann Georg Rosenbusch, 1799, pp. 448-449.

(2) J'en donnerai plus loin le titre complet et les détails bibliographiques relatifs à cet ouvrage.

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