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de consoler le cœur du Fils de Dieu à l'agonie. Le martyr regardait avec tendresse son frère martyr défaillant au pied de l'autel; et celui-ci, voyant la candeur et l'âme angélique de ce jeune prêtre qui tombait si tranquille au début de la carrière, l'offrait et s'offrait lui-même comme prix de la commune victoire que le Crucifié voulait pour eux et qu'à leur tour ils voulaient pour lui.

La messe dite, le célébrant se coucha auprès de son compagnon, et ils attendirent la mort. Elle ne tarda point. Dans la nuit le jeune prêtre expirait. Son dernier soupir effleura les lèvres de son frère, qui ne put qu'avec effort étendre la main sur sa tète en signe de dernière bénédiction et de dernier adieu.

Quelques passants se trouvèrent là quand vint le jour. Ils virent le cadavre et le mourant côte à côte. Ils en portèrent la nouvelle au village, et ces cœurs durs, comprenant ce qui s'était passé, s'amollirent enfin, ou plutôt le mort avait vaincu, et Dieu déclarait sa victoire. Ils vinrent donc, apportant de l'eau fraîche et des aliments. Le missionnaire survivant, toujours incapable de se mouvoir, sentit enfin une main serrer sa main. Ce n'étaient plus les mêmes hommes. Au pied de l'autel, ils creusèrent une fosse, ils y descendirent le victorieux et beau cadavre; et, ensuite, portant dans leurs bras le malade, ils le soutinrent sur le bord de cette fosse, pour qu'il pût la hénir. Ils firent plus. A sa prière ils coupèrent un

grand arbre et en firent une croix qu'ils plantèrent sur cette tombe déjà féconde. Ainsi la croix apparut et prit possession de ce nouveau domaine.

Je

Il y a là, maintenant, une ville, une église et des milliers de catholiques aussi dociles à la voix de leur évêque que chers à son cœur ; et leur évêque est ce missionnaire d'abord si cruellement repoussé. vais là aussi souvent que je le peux, me disait-il en achevant son récit. Je parviens à retenir mes larmes, et mon cœur est plein d'allégresse dans l'admiration des choses de Dieu. Mais quand j'ai voulu parler au peuple du pied de cette croix, je n'ai jamais pu tirer de ma poitrine que des mots sans suite et des sons inarticulés.

C'est ainsi que la croix se la croix se plante et prend racine, ainsi qu'une Église germe et sort de terre, ainsi qu'une contrée livrée aux ténèbres de la sauvagerie et aux barbaries plus terribles de la civilisation devient un diocèse. Ainsi entrent les bonnes mœurs, les mœurs pures, les mœurs pieuses, les écoles, les hôpitaux, les études qui élèvent l'âme et font la force, la gloire et le charme de la civilisation, et tels sont les hommes qui entreprennent ces choses et qui les mènent à fin. Et quand ces hommes me disent que le monde a besoin de l'infaillibilité de Pierre, je les crois; et fussent-ils seuls à le dire, je les croirais.

C

10 mai.

Je reviens à cette néfaste brochure. Vous en écrivant hier, tout de suite après avoir lu, j'ai peut-être frappé trop durement sur l'auteur. Il le mérite bien, il mérite tout; mais ce n'est pas une raison pour manquer de toute miséricorde. Je ne révère et n'aime rien autant que le prêtre ; rien n'est, à mes yeux, plus grand, plus auguste. Il est le gardien de la vérité et de la justice, le distributeur du pardon, c'est-à-dire de la vie; et ce guérisseur des misères humaines, qui distribue la vie en distribuant le pardon, est encore le grand observateur des lois, et par là encore il nous garde la vie. Je connais par une longue étude les vertus et les beautés de l'âme sacerdotale. J'y ai vu incomparablement plus qu'ailleurs la passion combattue,dominée, habituellement vaincue, l'amour du vrai, la noble et très-sainte horreur du mensonge, la défiance de soi-même, la clémence, en un mot,la pratique de l'Évangile, si nécessaire pour le bien prêcher; et je sais à quel point il importe que nous honorions le prêtre, qui est le grand bienfait de Dieu

pour chaque individu et pour la société entière. Mais je sais aussi et je sens combien il importe au prêtre et à nous que le prêtre lui-même s'honore scrupuleusement en toutes ses œuvres publiques, qu'il apparaisse toujours tel qu'il doit être, exact observateur au moins de toutes les prescriptions de l'honnêteté vulgaire. Un prêtre se permettant ce qu'un simple laïque devrait s'interdire, maniant dans la polémique des armes prohibées, se servant de ces armes contre l'Église, présomptueux, injuste, injurieux, falsifiant les faits pour jeter l'opprobre au Concile et au Pape, quand j'ai le malheur de voir cela, je reçois une commotion dont je ne peux pas immédiatement dominer la violence. J'éclate contre ce prêtre qui trahit son caractère et qui me trahit. Il m'est impossible de ne pas parler trop haut, comme il lui est impossible, à lui, s'il rencontre quelqu'un, de ne pas fixer son regard sur le mur,

Si donc il est encore temps, biffez ce qui vous semblerait de trop dans la lettre que vous avez reçue hier. Je ne regretterai rica. Après tout, il y a des natures mal faites, des esprits malheureux, qui sont des instruments plutôt qu'autre chose. Leur faute est moins à eux qu'à ceux qui les emploient et qui leur font exécuter à tout risque, d'une façon grossière, au-delà de leur gré, ce qu'ils ne voudraient pas faire eux-mêmes. Pour ces besognes, il n'existe pas d'hommes de choix. On prend ce qui s'offre ou ce qui

consent à obéir. Il faudrait savoir que ce qui s'offre en ces rencontres ne vaut rien, et que ce qui veut bien obéir ne devrait jamais être commandé. Et quoi! on ne s'estime pas assez malheureux déjà d'avoir besoin d'un livre anonyme contre le Pape et contre la majorité du Concile, et l'on ajoute à ce malheur celui d'accepter le concours du fanatique inférieur qui prend les notes, qui prend le masque et qui se met à l'ouvrage ! Certes, ce spectacle est à faire sortir des gonds. Mais enfin biffez. Et s'il est trop tard, je m'excuse.

Pour revenir au livre, nous avons là une première ébauche de ce que sauront faire les Paolo Sarpi de notre temps, et c'est ce qui nous permet d'apprécier à sa juste valeur le Sarpi du temps passé. Assurément, le Servite Vénitien était plus fort, et celui-ci demeure au-dessous à plusieurs milliers de brasses; mais c'est le même esprit. Comme théologien, point de théologie : chez Sarpi elle est fausse; ici, il n'en est pas même question. Comme historien, point de véracité. Comme écrivain, l'unique talent de ramasser de vils caquets et de vaines anecdotes, la plupart forgées et déformées, et l'effronterie de les enfieller par le mensonge, de façon à diffamer également la dignité des choses et celle des hommes.

La véritable analyse morale de ce premier pamphlet contre le Concile du Vatican se trouve dans le titre que l'archevêque apostat de Spalatro, Marc

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