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CXLII

13 juillet.

Ainsi c'est fait, comme le télégraphe vous l'a appris. C'est fait et bien fait. Encore que l'ouvrage doive recevoir quelques retouches de forme, on peut dire qu'il est maintenant terminé. Que ceux qui veulent mourir gallicans sans perdre tout à fait officiellement le titre de catholiques se hâtent. Ils n'ont plus qu'une minute. Dans quelques jours il sera de foi que le Pontife romain, docteur et pasteur de l'Église de Jésus-Christ, est infaillible, que ses décrets sont irréformables, que nul ne se sépare de lui sans se séparer du Christ. Tel est le « dogme nouveau, » et il suffit de l'énoncer pour voir qu'il ne contient rien de nouveau. Seulement il faut le croire.

Lundi dernier, 11 de ce mois, jour du premier vote, où furent écartées les contestations gallicanes, était la fète de saint Pie ler, pape et martyr du second siècle. Dans l'évangile de cette fête, Notre-Seigneur propose la parabole de l'homme qui veut bàtir une tour, et qui, faute d'avoir supputé sa dépense, s'expose à ne pouvoir continuer son édifice après en

avoir jeté les fondements. Pie IX n'a point supputé la dépense, et néanmoins il n'a pas été cet homme téméraire. Il a compté avec la vérité, il a compté. sur Dieu, Dien lui a donné le temps et la constance. Les événements ont été dociles; les volontés contraires ou seront soumises ou seront vaincues et voilà que la tour est bâtie, bâtie pour l'éternité.

D'autres calculs avaient été faits. L'erreur aussi voulait batir sa tour, achever sa Babel commencée et la rendre inébranlable. C'est de ce côté que les mesures savantes étaient prises, les appuis humains assurés. Quelle belle politique! comme on s'est bien servi des princes, des diplomates, des journaux! Quelles habiles correspondances, quelle ample confection de brochures, quelles caresses de toutes les bassesses de l'esprit humain dans les bassesses de toutes les langues! Mais, vains efforts!

Du moins, ces efforts ont été persévérants. Il faut rendre cette justice à certains hommes, dont le temps viendra de dire les noms; ils ont persévéré! Depuis huit mois, ils ne se sont pas oubliés un moment. Aucun mouvement de bonne foi, pas une tentation d'humilité ne les a surpris. Tous les sophismes dont ils se sont servis au commencement leur servent encore. Ils continuent de dire qu'ils sont la vertu, la science, la lumière; ils le disent de plus en plus, sans se soucier de la conscience humaine, qui les croit de moins en moins.

Je n'ai pas lu sans une sorte d'admiration une correspondance de la Gazette de France sur la clôture de la discussion. Cela est d'une impudence naïve qui ne laisse pas d'embarrasser. Le correspondant de la Gazette paraît tout à fait convaincu qu'il restait encore beaucoup de choses à dire, parce qu'il restait encore beaucoup d'orateurs à parler. « Comment! <« soixante-dix orateurs sont inscrits, il y a tant à << dire sur la question, et l'on n'imagine pas d'autre << moyen d'en finir que de renoncer à s'éclairer les <«< uns les autres. » Remarquez qu'ils ne cessent pas de crier en même temps qu'on ne s'entend pas et qu'on ne peut s'entendre, et que la salle a été faite exprès pour qu'on ne s'entendit point. Mais qu'est-ce que cela leur fait de se contredire? Dans le cas où la discussion aurait été prolongée hors de toute limite et même de toute décence, ils avaient un autre thème tout prêt c'était la dureté et la férocité de forcer les évèques à discuter dans cette salle où l'éloquence avorte faute d'écho, et malgré le péril de la saison. Cette raison est exploitée dans une brochure, misérable entre toutes celles qui ont paru; brochure sans nom comme ses aînées, distribuée par les mêmes laquais sans visage. L'infection des anonymes a été la vraie plaie du Concile. Elle n'est pas dangereuse, mais elle est hideuse. De nobles esprits en souffrent véritablement. Dans l'Inde, me disait un évêque missionnaire, le spectacle est éblouissant et grandiose;

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on ne peut imaginer plus de lumière, plus d'éclat, plus de pompes de la couleur... Mais nous avons le cancrelat, le hideux cancrelat, plat, cotonneux, visqueux, insolent, qui se glisse partout, qui porte partout son odeur abominable. Je retrouve ici l'éternel, l'inécrasable cancrelat : c'est l'anonyme.

Le cancrelat du jour est un fascicule rose de quelques pages, qui prétend venir de Paris, chez Dentu, et qui a été manifestement imprimé à Florence ou à Naples. Certaines fautes de typographie, spécialement italiennes, dénotent cette origine et trahissent le faussaire par l'excès même de ses précautions. Il s'en prend au Pape personnellement, il le traite de tyran de l'Eglise. C'est bien le comble de la misère intellectuelle en même temps que de l'insolence. L'on se sent mal à l'aise d'être obligé d'écouter ce faquin déclamateur qui abuse de l'avantage de n'être personne, pour se permettre ce que la Gazette elle-même n'oserait pas contresigner. On le connaîtra pourtant. Quelle honte alors, non pour lui, mais pour ceux qu'il loue, et qui n'auront pas protesté ! Comme talent, comme figure, imaginez-vous le monsieur de Sorbonne qui déclarait l'autre jour qu'il ne se soumettrait pas aux décrets de l'Église (1). Et encore

(1) M. Un tel, M. Chose ou quelque autre monsieur avait pris cette pose dans son cours, ou dans une lettre à quelqu'un, ou dans un journal, Ma s le fait est certain et il est de Sorbonne.

celui-là se fait voir. Qui nous aurait dit qu'un temps était proche où l'audace de Trissotin hérétique aurait encore une physionomie de vertu! Il y a un endroit où les évêques de l'Opposition sont comparés aux trois cents des Thermopyles, résistant à la force brutale de la majorité qui leur demande de rendre les armes, et répondant « comme Léonidas»: Viens les prendre!

Je ne suis pas très-versé dans les dictons grecs. Cependant est-ce bien Léonidas qui a répondu cela? J'ai des doutes, et je prie nos jeunes gens dont la mémoire est plus fraîche de vérifier le fait. Dans tous les cas et quand même le trait serait de Léonidas, il vous peint le cancrelat. Ce même monsieur appelle la majorité du Concile « la multitude. » Soyez assuré que ledit monsieur ne se ferait pas beaucoup prier pour dire « la vile multitude. » Et tout à l'heure un autre monsieur du parti, et au besoin le même monsieur, nous accusera de ne pas respecter la dignité des évêques ! Mais pourquoi tant parler de ces poussières? Demain l'hosanna de la foi les dispersera dans l'oubli.

P.-S. Le vote a donné 88 Non placet ou votes négatifs, et 62 votes Juxta modum ou conditionnels, appartenant la plupart à la majorité. Beaucoup de membres de la majorité auraient voulu que le chapitre de l'infaillibilité fùt d'une expression affirma

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