mais encore aux enfans du Dieu, lesquels ne sont pas sans défauts. Il y a parmi eux des faibles qu'il faut supporter, des ignorans qu'il faut instruire, des égarés qu'il faut ramener ; enfin il faut savoir remettre et pardonner, si la charité, qui est le lien de la perfection, doit avoir lieu. Sans cela, il n'y aura même dans les communions chrétiennes, que divisions, soupçons, outrages, vengeance, et en un mot un démembrement total du corps mistique de Jésus-Christ, qui est son église. Ainsi notre qualité de chrétiens et de disciples de Jésus, notre devoir de frères et de membres du corps de Christ, nous engage à pardonner, non seulement à nos amis, mais encore à nos ennemis. C'est là une production de la vraie charité qui est répandue par le Saint-Esprit dans le cœur. De là vient que cet esprit nous dit si souvent par la bouche de ses apôtres : Soyez bons les uns envers les autres, pleins de compassion, vous pardonnant mutuellement, comme Dieu vous a pardonné par Christ. Soyez comme ses élus de Dieu, saints et bien-aimés, revétus des entrailles de miséricorde, vous supportant les uns les autres, et vous pardonnant mutuellement. Si l'un a quelque sujet de plainte contre l'autre ; comme Christ vous a pardonné, vous aussi faites-en de même. Eph. IV, 32. Col.

Un second bien que la miséricorde fait au prochain, c'est de lui donner, donnez, dit le Sauveur, et il vous sera donné. Les hommes ont indispensablement besoin du secours mutuel les uns des autres. Il y en a qui sont en état d'aider, et d'autres qui ont besoin de leur assistance. Il y en a qui sont pourvus de bien temporels ou spirituels, et d'autres qui en sont destitués. La miséricorde s'emploie à partager les biens qu'elle a reçus avec

ceux qui ont besoin. Il y a une distribution des biens temporels, et une dispensation des biens spiritucis. Dé partir des biens temporels aux nécessitenx, c'est une suite nécessaire de la miséricorde. Une âme miséricordieuse ne néglige point ce devoir, quand elle a les moyens de donner: Si quelqu'un a des biens de ce monde, dit St.-Jean, et qu'il voie son frère en avoir faute, et qui lui ferme ses entrailles; comment la charité de Dieu demeure-t-elle en lui? 1. Jean. 11, 17. Et si un de vos frères, ou une de vos sœurs, manque du vétement, ou de la nourritnre, et que quelqu'un entre vous lui dise : Allez en paix, chauffez-vous et vous rassasiez sans leur donner les choses nécessaires pour se vêtir et pour se nourrir, à quoi cela leur servira-t-il? Jacq. 11, 15.

Il est vrai que l'aumône n'est pas toujours un acte de miséricorde et de charité chrétienne; on peut être chiaritable sans donner, quand on manque de moyens ; mais on peut aussi donner sans être charitable. Plusieurs ne font des aumônes que par ostentation, par coutume, par bienséance, souvent même à regret et par contrainte. Ces sortes d'aumônes ne sont pas des fruits de la miséricorde; aussi voit-on que chez plusieurs, l'aumône est accompagnée de reproches de paroles aigres, et d'autres circonstances qui font voir la source corrompue d'où elle vient. Un chrétien ne doit pas négliger les devoirs de la bienfaisance, mais il faut qu'il s'en acquitte avec un es prit de charité et de miséricorde envers le prochain. Saint Paul nous montre les dispositions avec lesquelles nous devons faire du bien à autrui; dans le VIII et Ix chapitre de la seconde épître aux Corinthiens, où il dit que Dieu aime celui qui donne gaiement que celui qui : sème peu, recueillera peu, et celui qui sème abondam

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ment, moissonnera abondamment que chacun doit agir selon qu'il se l'est proposé dans son cœur, non point à regret, ni par contrainte, mais volontairement.

La miséricorde et la charité s'exercent surtout par la communication des biens spirituels, quand on en a été enrichi. Saint-Paul dit aux romains, qu'il souhaite de les voir pour leur faire part de quelques dons spirituels; et en déclarant qu'il avait part à l'évangile de Christ, qui est la puissance de Dieu en salut à tout croyant, il ajoute que cet Evangile lui avait été confié pour en faire part tant aux juifs qu'aux Grecs. Rom. 1, 11. Ces biens spirituels que nous devons départir au prochain, sont la parole de Dieu, la reconnaissance de la grâce et de l'amour de Dieu en Jésus-Christ notre Sauveur commun. Quand ses biens là ont été répandus dans le cœur par le Saint-Esprit, alors on en peut et on en doit faire part aux autres, en instruisant les ignorans, en redressant ceux qui s'égarent, en consolant les affligés et en faisant luire la lumière devant les hommes, afin que tous soient édifiés. Supposez qu'un enfant de Dieu n'ait, ni les facultés, ni les occasions de le faire; au moins peut-il toujours prier pour les autres. Mais n'oubliez jamais que la communication de ces biens doit provenir d'un fond de miséricorde qu'on a pour le prochain. Car comme la miséricorde sans ces productions n'est pas réelle; de même les effets extérieurs ne sont que des apparences trompeuses, s'ils ne découlent du fond de la vraie charité. Il est donc absolument nécessaire qu'avant toutes choses nous soyons animés par le Saint-Esprit de la vraie charité.

Une miséricorde qui découle de cette source, et qui produit de tels effets, ne manque pas de donner d'excel·

lentes espérances. Jésus-Christ, qui sera un jour juge de toutes choses, assure que ceux qui se seront ainsi comportés envers le prochain, Dieu en usera de même envers eux. Ceux qui n'auront point jugé ni condamné par haine, par aigreur et par orgueil, ne seront point jugés ni condamnés. Ceux qui auront remis et donné, il leur sera aussi remis et donné abondamment; et même la mesure dont Dieu les récompensera, sera une mesure comblée, entassée et surabondante; car la miséricorde triomphe de la condamnation. Au contraire il y aura condamnation sans miséricorde sur ceux qui n'auront point usé de miséricorde. Jacq. 11, 13.

D'un autre côté les méchans, qui auront exercé leur malignité dans de petites choses, dans les légères afflictions qu'ils auront fait souffrir aux fidèles, seront punis par une mesure comblée de la colère et des rigoureux jugemens de Dieu. Il sera dit alors de la Babylone spirituelle et de ses enfans, rendez lui au centuple le mal qu'elle vous a fait : malheur à ceux qui, dans ce temps de vengeance et de rétribution, ne pourront espérer aucune miséricorde; mais bienheureux sont les miséricordieux; car miséricorde leur sera faite.

Que le Seigneur Jésus veuille par sa grâce répandre dans vos cœurs son amour et sa charité : qu'il détruise et arrache toute racine d'aigreur et d'amertume qui pourrait se trouver en vous : qu'il vous purifie, et vous mette dans des dispositions de miséricorde et de charité qui vous fassent reconnaître un jour devant lui comme des enfans du Père céleste, auxquels miséricorde sera faite éternellement. Amen.

XLIII. SERMON.

LES INVITATIONS

ET LES PRODUCTIONS DE LA GRACE.

Comme Jésus était sur le bord du lac de Génézaret, il était pressé par la foule, qui se jetait sur lui, pour entendre la parole de Dieu. Et ayant vu deux barques au bord du lac, dont les pécheurs étaient descendus, et lavaient leurs filets, il monta dans l'une de ces barques, qui était à Simon : et il le pria de s'éloigner un peu du rivage, et s'étant assis il enseignait le peuple, de dessus la barque. Et quand il eut cessé de parler, il dit à Simon; avancez en pleine eau, et jetez vos filets pour pécher. Simon lui répondit; Maître, nous avons travaillé toute le nuit, sans rien prendre; toute fois sur ta parole je jeterui le filet. Ce qu'ayant fait, ils prirent une si grande quantité de poissons, que leur filet se rompait, etc. Saint-Luc v

1, 11.