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douille; c'était sans doute pour les porter plus facilement en route. C. A. H. ESPRIT (spiritus, souffle). Ce mot semble d'abord avoir désigné la condition et le signe même de la vie, l'air, la respiration; plus tard, il signifia la vie même, le principe vivant qui anime le corps; on conçut ensuite ce principe isolé du corps; on lui donna conscience, connaissance, volonté, en un mot on en fit un esprit. Réuni au corps, l'esprit s'appelle proprement ame(voy.). Cependant on distingue quelquefois entre l'âme et l'esprit, l'àme s'entendant plutôt de l'activité appétitive, sensible ou inférieure, et l'esprit de l'activité intellectuelle, rationnelle et supérieure. Nous ne nous arrêterons point à cette distinction, attendu que le principe qui sent est le principe qui connaît.

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qui parle*. L'esprit ou l'âme, son activité, sa pénétration, sa vivacité, son caractère, se peint dans l'homme physique, particulièrement dans la physionomie, dans le regard, dans l'attitude de tout le corps, dans les mouvements, dans la parole, dans les goûts, les habitudes, et surtout dans les ouvrages qui demandent quelque réflexion. Ce sont là autant de signes des| tinés à traduire l'âme au dehors, à la rendre visible. Mais ici encore il faut se donner de garde de prendre la lettre pour l'esprit; les apparences sont quelquefois trompeuses.

Le mot esprit a aussi en français un sens particulier assez difficile à caractériser (voy. BEL- ESPRIT): c'est dans ce sens que l'on dit d'une personne qu'elle a de l'esprit.Cette tournure intellectuelle, On peut distinguer les esprits en quatre qui paraît portée à un plus haut degré grandes classes: ceux qui sont au-dessous chez le Français que chez aucun autre de l'homme, celui de l'homme, les esprits peuple, a quelque chose d'essentiellement intermédiaires entre l'homme et Dieu, et léger, de scintillant et surtout de piquant. enfin Dieu lui-même. Pour ce qui est des Cet esprit, sans être opposé à l'étendue esprits inférieurs, de l'âme des bêtes (car et à la profondeur, paraît au premier nous ne savons s'il y a des esprits purs abord peu compatible avec ces deux cainférieurs à l'âme humaine), voy. AME.ractères de la force intellectuelle, préciQuant aux esprits purs ou éthérés qui | sément parce qu'il les dédaigne et sempourraient tenir le milieu entre l'homme et Dieu, nous renvoyons au mot DÉMONOLOGIE, et pour l'esprit divin, au mot DIEU. Le mot esprit a une foule de significations dérivées des précédentes. C'est ainsi qu'il signifie, dans l'art de la prononciation de certaines lettres en grec (esprit doux, esprit rude), une modification particulière de l'organe vocal; les aspirations qu'on retrouve dans toutes les autres langues ont une dénomination analogue. C'est ainsi que l'on distingue dans le sens des paroles l'esprit de la lettre, l'esprit étant ce qu'il y a de véritablement pensé et d'intentionnellement exprimé, la chose cachée sous la lettre, tandis que celle-ci en est comme le corps, le signe; mais un signe trompeur, si l'on ne veut pas entrer dans la pensée de celui

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ble s'efforcer de les faire oublier. L'es-
prit n'a pas non plus la marche compas-
sée de la méthode et de la science il
n'en veut point, il en a une espèce d'hor-
reur; il ne veut pas marcher, ni surtout
marcher longtemps et en ligne directe : il
veut seulement sauter, se reposer quand
il lui plaît, prendre le côté de la pensée
qu'il préfère sans s'obliger à le suivre.
Le but de la science n'est point celui de
l'esprit : l'une veut connaître, l'autre veut
s'amuser et surtout amuser, car on ne
fait pas de l'esprit tout seul et pour soi.
L'esprit est donc un tour de caractère
éminemment social; car tandis que l'hom-
me d'esprit recherche le monde pour y
faire briller sa pensée, on le recherche
avec non moins d'empressement pour
jouir de ce feu d'artifice intellectuel essen-
tiellement
propre à distraire, et d'autant
plus propre à nous amuser que notre va-
nité y trouve son compte sans qu'elle
coure le risque du ridicule. En effet, l'es-
prit des autres est comme une étincelle

(*) Car la lettre tue, mais l'esprit donne la vie (2 Cor. III, 6).

S.

tient qu'il en embrasse les opinions, qu'il en défend les principes, qu'il en épouse même les préjugés.

Mais esprit ne s'emploie pas seulement par rapport aux individus, il sert aussi à désigner collectivement les dispositions intellectuelles ou morales d'une nation ou d'une époque. Nous en donnerons deux exemples: le premier, ce sont les termes esprit national et esprit public dont il sera traité aux mots PATRIOTISME, NATION et OPINION PUBLIQUE; le second est celui qui fait l'objet de ce qui suit. S.

qui allume le nôtre, ou qui nous donne |
du moins l'avantage d'apprécier celui que
nous voyons briller, ce qui n'est possible
qu'à la condition d'en avoir un peu soi-
même. C'est par la vivacité de l'imagina-
tion, la fraicheur du souvenir, les rap-
prochements inattendus, les contrastes
heureux et piquants que l'esprit se fait
remarquer. Il faut pour cela une certaine
étendue, et surtout une certaine péné-
tration, connue plus particulièrement
sous le nom de sagacité. Ainsi l'esprit
peut être étendu et pénétrant; mais s'il
n'est que cela, il ne mérite plus ce nom.
L'étendue et la pénétration ne sont donc
pas la chose principale: il faut surtout
qu'il soit frivole et aisé. Les saillies qui
sentent le travail perdent leur sel, et par
conséquent leur prix, leur agrément : ce
ne sont pas des saillies; il leur manque la
spontanéité, la rapidité et l'éblouissant
de l'éclair. Il faudrait infiniment d'art
pour faire de l'esprit à force de réflexion;
il en faudrait presque autant que pour
faire de l'esprit sans en avoir. Aussi l'es-
prit qu'on fait (voy. bon MoT, CALEM-
BOURG) déplait-il souverainement: c'est
le pédantisme de la société.

L'esprit qu'on veut avoir gâte celui qu'on a.
On fait le faiseur d'esprit avec autant de
soin pour le moins qu'on met d'empresse-
ment à rechercher l'homme d'esprit. On
distingue du reste plusieurs sortes d'es-
prits suivant le trait dominant: ainsi il y a
l'esprit éclatant, l'esprit piquant, l'esprit
fleuri, jovial, etc. (voy. BEL-ESPRIT,
ESPRIT FORT, etc. )
Jh T.

ESPRIT DU TEMPS. Chaque siècle a sa physionomie spéciale qui se révèle à la fois dans les actes et dans les écrits de l'époque: c'est ce qu'on peut appeler l'esprit du temps. Pour n'en chercher d'exemples que dans notre histoire, les croyances superstitieuses, les légendes dévotes furent l'esprit des premiers temps de la monarchie; plus tard, ce fut la manie des croisades; puis, dans le moyen-âge, la chevalerie et les productions qu'elle inspira. Dans le xviR siècle, avec les guerres de religion arrivèrent les discussions théologiques; au XVII, les esprits se tournèrent principalement vers la littérature, et la piété même dut avoir l'éloquence pour compagne. Une autre spécialité du grand siècle, ce fut l'adulation générale pour le grand roi; adulation qu'on trouvera pourtant excusable en songeant qu'elle tenait à une admiration sincère, que la monarchie était encore un objet de culte, et que Louis XIV ne se trouvait pas le seul, à beaucoup près, qui pensât de bonne foi que l'État c'était

lui.

gieux. Par une réaction naturelle, la licence des mœurs et l'épicuréisme devinrent l'esprit du temps au commencement du siècle suivant.

Le mot esprit, outre l'acception spé- On sait assez que, dans les dernières ciale et primitive qu'on vient d'expliquer, années de ce siècle, l'hypocrisie et le biest employé encore de différentes ma-gotisme vinrent remplacer l'esprit relinières. Il est quelquefois synonyme d'humeur ou de caractère, comme dans ces locutions: il a l'esprit souple, c'est un esprit remuant. D'autres fois, il se prend pour la disposition, l'aptitude, qu'on a à quelque chose, et dans ce sens on attribue à une personne l'esprit des affaires, l'esprit de chicane, l'esprit de parti (voy. PARTIS POLITIQUES). L'esprit de corps, ainsi qu'on l'a vu au mot CORPS, est la disposition d'un membre d'une corporation qui s'identifie tellement à la compaguie ou corporation à laquelle il appar

Encyclop. d. G. d. Monde. Tome X.

Vers 1750, l'esprit philosophique, l'esprit d'examen, surgit à son tour; mais ses graves productions n'empêchèrent pas que la littérature ne restât en grande partie frivole. Elle eut ses modes, comme la toilette : tantôt ce furent les portraits, puis les synonymes, ensuite les bouts-rimés, les histoires de folles, etc. Par une bizarre inconsé

quence, ce siècle si peu croyant fut | prits furent justement réprouvés : ceux,

aussi, sous quelques rapports, d'une excessive crédulité. Les Saint-Germain, les Mesmer, les Cagliostro et d'autres charlatans habiles y trouvèrent de nombreux adeptes.

Dans la dernière partie du xvi11® siècle, les idées de réforme sociale, d'améliorations politiques, de liberté civile et religieuse, firent à leur tour fermenter tous les esprits.

Fièvre d'indépendance, ardeur belliqueuse et passion de la gloire, vif intérêt pour les débats politiques, enfin besoin de légalité et de calme, telles ont été, depuis 1789, les successives transformations de l'esprit du temps. Aujourd'hui, rassasié d'illusions de tout genre, blasé sur toutes les gloires de toute nature, il n'apprécie guère que le positif: l'industrie et le progrès sont ses nouvelles et moins poétiques divinités. Sera-t-il plus constant pour elles? L'avenir nous l'apprendra. M. O.

Enfin le mot esprit est encore employé, en littérature, dans un sens analogue à celui qu'on lui donne en chimie (voy. plus loin), en sorte qu'il devient synonyme d'essence. Nous devons nous arrêter un instant sur cette acception.

ESPRIT D'UN OUVRAGE. Ce genre de littérature facile fut en assez grande faveur dans le dernier siècle. Il est juste de reconnaître que ces sortes de compilations, quand le goût y a présidé, ne sont pas sans utilité ni sans agrément. Il est des auteurs qui, tout en traçant d'excellentes pages, se sont nui à eux-mêmes par leur prolixité; d'autres qui, dans des productions écrites spécialement pour telle époque ou telle circonstance, ont su consigner des observations ou jeter des traits qui méritaient d'y survivre. Recueillir, rapprocher ces fragments, c'est rendre service à la fois aux lettres et à ces écrivains.

d'abord, où l'on prétendait nous donner l'esprit de livres tout-à-fait dépourvus de ce mérite; ceux aussi, tels que l'Esprit de Mɔntaigne, l'Esprit de l'Esprit des lois, où l'abréviation s'attaquait à un génie trop nerveux, à un ouvrage trop plein de choses pour se prêter à une semblable opération.

Quelques-unes de ces compilations ont encore obtenu assez de succès au commencement du siècle actuel. Nous citerons entre autres l'Esprit de l'Encyclopédie, extrait de la volumineuse collection due à Diderot et à d'Alembert, qui, fait avec goût et judicieusement, pouvait suffire à une nombreuse classe de lecteurs. Les encyclopédies (voy.) elles-mêmes peuvent être envisagées comme destinées à offrir aux hommes qui, sans prétendre au titre de savants, recherchent l'instruction, l'esprit de la science ou l'esprit des bibliothèques.

La publication de ces abrégés est devenue beaucoup plus rare de nos jours. A quelle époque, cependant, seraient-ils plus utiles que dans celle où la prodigieuse multiplication des livres effraie les plus intrépides lecteurs? Mais, d'un autre côté, il faut, comme nous l'avons dit, pour extraire une œuvre littéraire, qu'elle puisse fournir au moins une certaine quantité d'esprit, et que l'hommage qui leur est rendu par leur titre ne risque pas d'être regardé comme une sottise ou comme une ironie. M. O.

ESPRIT (SAINT-). C'est, suivant la dogmatique chrétienne, la troisième personne de la très sainte Trinité, consubstantielle au Père et au Fils, qui procède de l'un et de l'autre, et qui, adoré avec le Père et le Fils, est, comme dit Bossuet, l'amour de l'un et de l'autre, et leur éternelle union. C'est cet Esprit qui fait les prophètes et qui est en eux pour leur découvrir les conseils de Dieu et les secrets de l'avenir; Esprit dont il est écrit: le Seigneur m'a envoyé et son Esprit (Isaie, XLVIII, 16), qui est distingué du Seigneur et qui est aussi le Seigneur

C'est à ce titre que, malgré les critiques partiales ou peu fondées de Voltaire, furent bien accueillis du public les divers ouvrages de cette nature ayant pour titres: Esprit de l'abbé Desfontai-même, puisqu'il envoie les prophètes et nes, de Marivaux,de La Mothe-le-Vayer, et quelques autres.

En revanche, deux sortes de ces es

qu'il leur découvre les choses futures. Cet Esprit, qui parle aux prophètes et qui parle par les prophètes, est uni au

Père et au Fils, et intervient avec eux dans la consécration du nouvel homme (Dis2€ cours sur l'histoire universelle, partie, chap. VI).

Telle a toujours été la doctrine catholique, dès l'origine du christianisme, sur le Saint-Esprit. Il est dit dans le Nouveau-Testament (saint Luc, I, 35): « Le Saint-Esprit surviendra en elle (Marie), et ce qui naîtra d'elle sera le Très-Saint, le fils de Dieu.» Dans un autre passage (saint Jean, XIV, 26) Jésus-Christ promet à ses apôtres de leur envoyer le SaintEsprit, l'Esprit consolateur qui procède du Père et qui leur enseignera toute vérité. Enfin Jésus dit à ses apôtres (saint Matthieu, XXVIII, 19): « Allez, enseignez toutes les nations, baptisez-les au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.» Tous les premiers disciples de l'Évangile reconnaissent et enseignent la divinité du Saint-Esprit. L'église de Smyrne, saint Justin martyr, saint Irénée de Lyon, Théophile d'Antioche, Clément Romain, Clément d'Alexandrie, Denis pape, Tertullien, Origène, Eusèbe de Césarée, Africain, Athénogène, saint Grégoire thaumaturge, Firmilien de Césarée, Mélece d'Antioche (nommés dans le chapitre 29 du Livre du Saint-Esprit), ont rendu les honneurs divins à la troisième personne de la très sainte Trinité. Saint Basile parle de la doxologie, comme attestant la divinité du Saint-Esprit, et déclare qu'il n'en connait pas la naissance dans l'Église*. Il aurait pu parler aussi de cette foule de cérémonies qui confirment cette croyance de l'Église, et qui nous viennent egalement des apôtres ou de leurs suc

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Aussi, lorsqu'on porta les premières atteintes au dogme de la très sainte Trinité, le concile de Nicée déclara-t-il dans son symbole: Nous croyons au Saint-Esprit. Dans la suite, quand les Macédoniens se furent prononcés contre la divinité du Saint-Esprit, le concile de Constantinople déclara solennellement: Yus croyons au Saint-Esprit, Seigneur et vivifiant, qui procède du Père, qui

Quam qui ab initio præscripserunt, tradideruique posteris, usu semper simul cum tempore pregrediente, ipsam longâ consuetudine in ecelesi is indicaverunt.

est adoré et glorifié avec le Père et le Fils, qui a parté par les prophètes; nous croyons en une seule Église, sainte, catholique et apostolique; nous confessons un baptême pour la rémission des péchés. Cet article de la foi catholique, qui avait précédé le concile de Constantinople, n'a cessé d'être professé par ceux qui en conservaient fidèlement le dépôt.

En 447,les églises d'Espagne ajoutèrent au symbole de Constantinople ces deux mots: et du Fils filioque), après ceux-ci: Qui procède du Père, parce qu'ils renferment l'enseignement du chap. XV, v. 26, de saint Jean: Lorsque le Consolateur, l'Esprit de vérité, qui procède du Père, et que je vous enverrai de la part de mon Père, sera venu, il rendra témoignage de moi, confirmé par beaucoup d'autres passages des livres saints. Les églises des Gaules adoptèrent cette addition et furent suivies de plusieurs autres, excepté toutefois de l'église de Rome.

Cette question fut agitée la première fois au concile de Gentilly, tenu en 767, et ensuite au concile d'Aix-la-Chapelle, en 809. Photius et Michel Cérularius, patriarches de Constantinople, reprochèrent vivement cette addition à l'Église latine, le premier en 866, et le second en 1043. Toutes les fois qu'il a été question de réunir l'Église grecque à l'Église latine, les Orientaux ont soutenu que les Occidentaux n'avaient pu légitimement faire une addition au symbole d'un concile général sans y être autorisés par la décision d'un concile général.

A cela l'Église catholique a une réponse bien simple: c'est que, si la foi est celle de l'Écriture et de la tradition, il faut la professer, et l'Église ne peut s'y refuser. Reste à savoir si la foi de l'Église romaine est fondée sur l'Écriture et la tradition; c'est le point de fait. Les Grecs, quand il s'est agi de leurs intérêts, ont consenti à chanter, avec les Occidentaux, l'addition du symbole, sans peut-être en adopter la croyance, comme au concile de Latran, 1215, et au concile de Lyon, 1274. Au concile de Florence, 1439, la plupart des prélats grecs et l'empereur signèrent la profession de foi des Latins. Mais l'histoire nous apprend que les signataires furent mal re

çus en Grèce, et obligés presque tous de révoquer leur signature.-Voir Sylvestre Sgyropulo, Vera historia unionis non veræ inter Græcos et Latinos, sive concilii Florentini, La Haye, grec et lat., 1660, 1 vol. in-fol., et quelques ouvrages de Léon Allacci, comme De occidentalis atque orientalis Ecclesiæ perpetua consensione libri tres, Cologne, 1648, in-4°; Jo. Henr. Hottingerus fraudis et imposturæ manifesté convictus, Rome, 1661, in-8°.

Le traducteur français de l'Histoire de l'Église, par L. Mosheim, s'exprime avec une grande amertume sur la conduite des Grecs au synode de Gentilly en 767: « Les Grecs, dit-il, blâmèrent hautement les Latins d'avoir corrompu par une interpolation manifeste un sym-bole qui servait de règle de doctrine à l'Église universelle, et traitèrent leur conduite d'impudente et de sacrilége. Ce fut ainsi que la dispute changea d'objet et passa de la matière aux mots interpolés. | Elle fut poussée dans le siècle suivant avec beaucoup de violence; ce qui attisa les dissensions qui annonçaient déjà un schisme entre les églises d'Orient et d'Occident (VIIIe siècle, part. 2, chap. 3). Voy. TRINITÉ, ARIANISME, SOCINIA

NISME, etc.

е

J. L.

ORDRE DU SAINT-ESPRIT, voy. SAINTESPRIT.

ESPRIT FORT. Dans nos langues modernes, les mots ne conservent pas toujours leur signification primitive: telle expression a été, en premier lieu, un éloge, qui, avec le temps, devient une critique ou une ironie. On en pourrait citer de nombreux exemples, parmi lesquels celui qui est relatif au terme faisant le sujet de cet article ne serait pas le moins remarquable.

Avant le siècle où vécurent Montaigne et Charron, les théologiens et les sectaires avaient jadis osé discuter sur les matières religieuses, les uns pour chercher à expliquer d'inexplicables mystères ou pour joindre au récit des livres saints leurs extravagants commentaires, les autres pour interpréter ces ouvrages sacrés dans l'intérêt de leurs nouvelles doctrines. Mais nul n'avait été assez hardi pour élever un drapeau hostile à toutes

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les croyances, pour chercher à ébranler
leurs fondements. Cette audacieuse en-
treprise ne fut point non plus tentée ou-
vertement par les deux hommes qu'on
vient de citer : ils n'attaquèrent point de
front la position si forte qu'occupaient à
cette époque les dogmes et les idées re-
ils cherchèrent à la tourner adroi-
çues;
tement, le premier, en rajeunissant les
systèmes et les principes de la philoso-
phie ancienne, le second, en vantant aux
esprits fatigués des querelles théologi-
ques les douceurs de l'oreiller du doute
et la sagesse du scepticisme. C'en était
bien assez déjà pour que l'on s'étonnât
de leur témérité. On les nomma donc
esprits forts, et ce fut, sinon un hom-

mage
de la multitude croyante, du moins
une constatation de l'impression que fai-
sait sur elle cette opposition aux idées
générales, cette protestation de deux
écrivains contre la société entière.

Plus tard, Bayle et La Mothe-leVayer s'avancèrent, à la suite de Montaigne et de Charron, dans cette route encore peu frayée, et le même nom leur fut donné par le public, sans qu'on y attachât aucun sens dérisoire.

Mais ce nom, appliqué seulement jusque-là à un petit nombre d'hommes de talent, tenta bientôt l'amour - propre vulgaire d'autres hommes, sans mérite, mais non sans prétentions, de même qu'il sembla à des jeunes gens sans principes un moyen d'ennoblir leurs vices et leurs débauches. Ils se proclamèrent donc eux-mêmes esprits forts, et, dès lors, ce qui avait été une distinction ne fut plus qu'un ridicule. La verve frondeuse de La Bruyère acheva d'imprimer ce stigmate aux esprits forts dans le chapitre où s'occupa d'eux ce grand moraliste. Convenons d'ailleurs qu'ils n'avaient pas beau jeu dans un siècle où la religion comptait des défenseurs tels que les Bossuet, les Fénélon, les Bourdaloue, etc.

Aussi le titre fut-il tellement décrié que, depuis ce temps, nul ne voulut se le donner, ou accepter ce qui n'eût plus été qu'un sobriquet. Même lorsqu'ils reparurent en nombre sous le règne suivant, les nouveaux esprits forts se gardèrent bien d'adopter ce nom déconsidéré: philosophes ou penseurs, tel fut

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