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fice furent destitués, les juridictions démembrées, des conseils supérieurs mis à la place des parlements. La vénalité des charges fut abolie, la justice déclarée gratuite, à la grande joie des philosophes dupes d'un mot par lequel on colorait un acte accompli dans le seul intérêt du despotisme; enfin un système judiciaire consacré par trois cents ans d'existence disparut entièrement. Près du quart d'un volume a été employé à retracer cette grande révolution sociale, à peindre les sentiments qu'elle rencontra non-seulement en Normandie, mais encore dans la France entière et chez les diverses classes. C'est encore un de ces endroits si fréquents dans l'ouvrage de M. Floquet, qui font l'histoire du royaume en faisant l'histoire d'une province, qui reproduisent l'esprit d'un siècle et d'un gouvernement, en rapportant les idées et les travaux d'une compagnie.

Après des résistances si âpres, une sympathie si constante pour les classes inférieures, tant de persécutions essayées pour en défendre les intérêts, on s'attend à voir les magistrats normands montrer en 1787, sinon de la faveur pour les nouvelles idées, au moins cet esprit de concessions, qui est le fruit de l'expérience; il n'en fut pas ainsi. En luttant contre les abus de l'autorité royale, la cour de Rouen, comme toute la magistrature, était restée inflexiblement attachée aux vieux principes, aux vieilles choses. Elle n'avait pas échappé non plus à cette frivolité qui aveugla, d'une manière si funeste, les hautes classes de l'ancien régime. Après la chute de Maupéou, lorsque le terme de l'exil fut annoncé aux conseillers de Rouen, beaucoup de ces personnages, que l'on se représentait voués à de graves études, furent trouvés dans leurs châteaux jouant la

comédie. C'était un triste prélude à la grande époque qui se préparait; leur conduite, une fois réinstallés, répondit à ce début. Une inévitable révolution s'accomplissait dans les esprits, le monarque même y accédait, et les magistrats normands auraient voulu rester immobiles dans le mouvement général. S'ils se montraient sur quelques points moins inflexibles que les membres des autres cours, ils n'en voulaient pas moins conserver, à toute force, l'ensemble d'un édifice dont le maintien, on doit le dire, n'était plus possible; et toutes les mesures de réforme radicale proposées par l'État leur inspiraient un invincible éloignement. Ils furent assez imprudents pour laisser cette répugnance fatale gouverner jusqu'au bout leur conduite, pendant le court et tragique règne de Louis XVI. Elle dicta leur opposition au rétablissement des assemblées provinciales, à la réforme judiciaire de 88, à tant d'autres mesures commandées par les conjonctures. Cependant la révolution marchait toujours; le parlement de Normandie se trouva de jour en jour moins en rapport avec l'ensemble des choses, avec la disposition des esprits; de populaire qu'il était, il devint suspect, puis odieux. Bientôt la convocation des états-généraux attira toute l'attention, toute la confiance des Normands. Les parlementaires abandonnés à la fois par le peuple et par le trône se virent dans l'État aussi impuissants qu'inutiles: et quand il plut à l'assemblée nationale de les anéantir, cette suppression s'accomplit à Rouen, comme dans les autres grandes villes, sans trouble, sans résistance. Quelques regrets silencieux, voilà tout ce qu'excita la chute d'un ordre si longtemps entouré de vénération; regrets mérités, malgré les graves erreurs commises par les parlements, car, dit avec raison M. Floquet, en résumant la destinée des

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corps dont il s'est fait le premier l'historien : « Dans ces compagnies composées d'hommes, comment pour>> raient étonner des défauts humains? C'est par l'ensemble » de leur conduite que tout Français équitable les vou» dra juger. Or, contenir d'une part la royauté toujours prête à envahir, de l'autre les peuples trop enclins à s'émouvoir, c'est de quoi avaient charge ces grands

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» corps de magistrature; et qu'en somme ils aient manqué à cette haute mission, qui le pourra dire? »

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H. GOMONT.

A MM. les directeurs de la REVUE ÉTRANGÈRE ET FRANÇAISE. .

MESSIEURS,

Vous avez bien voulu accueillir une réclamation que j'avais cru devoir faire au sujet d'une brochure publiée par M. Moreau Christophe sur la réforme des prisons.

Je suis aujourd'hui dans le cas de recourir de nouveau à vous pour le même objet, et je me flatte de trouver encore chez vous la même complaisance.

M. Moreau vient de publier la traduction d'une brochure hollandaise écrite par M. Suringer sur la Réclusion individuelle, et il l'a fait suivre d'une nouvelle brochure intitulée: Résumé de la question pénitentiaire.

C'est sur cette dernière brochure que je crois devoir présenter quelques observations, avec le calme et la modération toutefois dont M. Moreau a cru devoir se dispenser.

Renouvelant une discussion plusieurs fois reprise déjà au sujet des différents projets de réforme pénitentiaire, M. Moreau proclame hautement le triomphe complet du système dont il se dit l'inventeur, qu'il appelle, à différentes reprises, le système français, et que nous croyons pouvoir, avec beaucoup d'autres et avec les partisans mêmes de M. Moreau, continuer à appeler le système de Philadelphie, tel que nous l'a exposé M. Demetz dans son rapport.

Le public saura apprécier l'exactitude de cette assertion, et nous n'ajouterons rien à ce que nous avons dit ailleurs à cette occasion.

M. Moreau Christophe s'exagérant notre opposition, quoique nous soyons déjà bien près de nous rencontrer, et revenant à des arguments abandonnés depuis longtemps, donne un cours si libre à son indignation qu'il y a lieu d'en être aussi surpris qu'affligé, dans l'intérêt même du succès de la réforme que nous désirons tous.

A la page 90 de sa brochure il déclare que notre opposition repose uniquement sur le mensonge et la mauvaise foi, que nous mentons en tout point; et cette grave accusation de mensonge se trouve en peu de lignes répétée plusieurs fois; il ajoute qu'il faudrait pourtant en finir avec ces faussetės; enfin il dit que ceux qui ont le malheur de ne pas partager entièrement ses idées, ne soutiennent leur opinion que par une ignorance et un esprit de parti qui les porte à affirmer ce que les faits et la science démentent chaque jour.

Nous laissons au public le soin de juger si ces expressions sont reçues entre gens qui veulent discuter poliment et avec calme dans l'intérêt du bien, et surtout si elles sont conformes à cette urbanité française si justement renommée.

Nous n'entendons pas engager ici une polémique, ni répondre sur le ton qui a été pris à notre égard.

Nous déclarons, au contraire, que nous croyons M. Moreau rempli des meilleures intentions, et entraîné uniquement, par sa trop grande vivacité, à ne pas mesurer suffisamment ses expressions.

Nous ne lui ferons pas l'injure qu'il croit pouvoir faire aux autres ; nous ne l'accuserons pas de défendre son opinion avec trop d'amour-propre; nous ne l'adjurerons même pas de reconnaître que, loin de persister dans de précédentes opinions, nous n'avons jamais hésité à nous rapprocher des siennes autant que cela nous a été moralement possible. Mais nous croyons pouvoir lui dire que des injures ne sont pas des raisons, et que nous ne lui reconnaissons nullement le droit d'être insolent envers des personnnes qui peuvent, comme lui, fort bien se tromper, mais qui, au moins, sont inspirées, comme lui aussi sans doute, par les meilleures intentions. Nous ajouterons que ses procédés sont plus nuisibles qu'utiles à la cause qu'il défend d'ailleurs avec un talent incontestable.

Nous dirons de plus qu'en parlant de notre pays avec un air de mépris (la pauvre Sardaigne), il s'est exprimé d'une manière qui n'est ni polie ni fondée, puisque, s'il avait lu attentivement ce que · nous avons écrit à ce sujet, et les observations que nous lui avons

adressées, il se serait convaincu que l'on n'a reculé dans ce pays devant aucun des essais les plus dispendieux.

M. Moreau affirme qu'on a renoncé en Italie à priver les détenus de l'exercice du culte. Nous le nions positivement. Aux deux congrès de Florence et de Padoue, l'on n'a traité que la question d'hygiène. On n'a aucunement parlé de cette modification importante du système de Philadelphie.

Aucun auteur italien ne s'est dissimulé la gravité de l'obstacle que ce système présente. M. Sarrigiani, se demandant s'il serait possible de lever les difficultés, s'est trouvé, malgré ses efforts, arrêté par l'importance des dépenses. A Rome, un juge compétent, monsignor Morcelini, dans un mémoire spécial, a déclaré que la privation du culte serait toujours un obstacle insurmontable dans les pays catholiques à l'adoption du système de Philadelphie. Au reste, la réaction que M. Moreau voit tout à coup surgir en faveur de son opinion n'est pas aussi prononcée qu'il l'affirme. A Florence rien n'a été décidé; des voix énergiques ont signalé les effets pernicieux de la solitude sur la santé des individus. A Padoue rien non plus n'a été jugé d'une manière définitive; seulement, sur l'assurance donnée par plusieurs partisans du système de Philadelphie que, dans l'exécution, ce système pourrait être adouci, on a émis un vote préparatoire qui lui est favorable, tout en déclarant que la question serait reprise et discutée de nouveau à Milan et à Lucques.

Nous ajouterons que si M. Moreau avait publié notre lettre en entier, cette circonstance se fût trouvée encore mieux établie. En effet, nous croyons y avoir dit que la commission de Milan était chargée de proposer, dans son rapport au congrès de Lucques, un système qui emprunterait aux deux systèmes d'Auburn et de Philadelphie ce que chacun d'eux a de bon, et remédierait en même temps à leurs inconvénients.

Quoique notre lettre ait été publiée sans notre consentement et pas en entier, nous croyons cependant pouvoir nous en honorer, puisqu'elle prouve notre bonne foi, notre impartialité et un procédé bien différent de celui dont on a usé envers nous. Quant au triomphe qu'on dit avoir obtenu sur nous à Padoue, et qu'on prétend obtenir encore à Milan et à Lucques, nous répondrons (notre mémoire sur les débats qui ont eu lieu à Florence et à Padoue, mémoire qui sera distribué au congrès de Lucques, et que nous aurons soins d'adresser à M. Moreau, prouvera du reste) que la vic

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