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ALBERT DE LAPPARENT

ET SA CARRIÈRE SCIENTIFIQUE

La vieille Université de France aime à voir la jeunesse entrer en lice: elle ouvre à ses lauréats la carrière toute grande et leur montre, au loin, l'avenir plein de promesses. Pendant de longues années, Alma Mater organisa un « concours général » entre les meilleurs, et son cœur maternel se remplissait de joie et d'orgueil quand un de ses enfants savait à plusieurs reprises, et d'une main sûre, cueillir la palme du vainqueur: il était pour la grande famille un objet d'espérances. Elle pouvait tout espérer et tout attendre de cet élève du Lycée Bonaparte, lauréat du concours général de 1857 (Mathématiques élémentaires), lauréat du concours général de 1858 (Mathematiques spéciales), entré premier à l'École polytechnique, sorti premier de cette École et en cette qualité lauréat à 20 ans du prix Laplace de l'Académie des sciences, sorti premier de l'Ecole des mines en 1864, toujours et jusqu'à la fin de ses études en tête de tous ses camarades, d'Albert de Lapparent.

Albert de Lapparent naquit à Bourges, le 30 décembre 1839, d'une famille de vieille race française.

(1) La REVUE DES QUEST. SCIENT., en annonçant la mort d'Albert de Lapparent, a déjà rappelé les titres de son collaborateur à la reconnaissance publique (REVUE DES QUEST. SCIENT, no de juillet 1908). La présente notice est principalement consacrée à l'analyse de son œuvre scientifique.

Son père, Félix-Remy de Lapparent avait appartenu à l'arme du génie, comme chef de bataillon; son grand-père, Emmanuel de Lapparent, avait servi comme officier d'artillerie, puis était entré au Conseil d'État, et était devenu préfet du Cher; son arrière grand-père était Charles Cochon de Lapparent, député suppléant du Tiers-État du Poitou, préfet de la Vienne en l'an X, et auteur d'une description géographique de ce département. II. de Lapparent, directeur du Service des constructions navales, était son grandoncle; et il était neveu, par sa mère, de II. Planchat, directeur du Service des ponts et chaussées. Il conservait surtout de sa naissance ce grand et légitime orgueil d'appartenir à une dynastic polytechnicienne, étant, comme il se plaisait à le rappeler, polytechnicien de 1858, fils de polytechnicien de 1828, petit-fils d'un polytechnicien de la première promotion, celle de 1791. Son grand-père, ayant joui d'une longévité exceptionnelle (il mourut en 1870), avait vu entrer à l'École polytechnique deux fils et deux petits-fils, inaugurant ainsi « un genre de noblesse, pour lequel les quartiers se comptent à la fois par le savoir acquis et par les services rendus au pays ». Par sa naissance, Albert de Lapparent était ainsi prédestiné à combattre pour la noble devise de son Ecole : « Pour la patrie, les sciences et la gloire »; par ses succès personnels, il semblait désigné, dès sa jeunesse, aux plus hautes situations de son pays.

Son premier pas, au sortir de l'École, fut vers le Tyrol, où il partit, sac au dos, étudier la constitution géologique de cette vallée de Fassa, qui, depuis Léopold de Buch, fixait l'attention des géologues. Elle avait arrêté Studer : « Nicht ohne Scheu, écrivait-il, wage ich es über diese berühmte, von Naturforschern des ersten Ranges vielfach besuchte Stelle Einiges beizufügen ». De Lapparent en choisissant ce massif

célèbre de Monzoni, comme but de son voyage d'instruction d'élève ingénieur de troisième année, faisait à la fois la preuve de beaucoup d'audace pour un débutant, et de beaucoup de flair pour un géologue.

Tout d'abord, il eut l'occasion de préciser, plus étroitement qu'on ne l'avait encore fait, les caractères de la roche granitoïde du Monzoni, qui lui parut mériter le nom nouveau de Monzonite. Il entrevit que cette roche granitoïde avait pu dériver du même magma que les mélaphyres. Il s'appliqua également à définir les circonstances du contact de la roche éruptive avec le calcaire triasique, reconnut l'existence de filons de la Monzonite dans le calcaire, et fixa la nature du métamorphisme exercé sur ce dernier. Contrairement aux vues ultraplutoniennes de de Richthofen, l'action des phénomènes chimiques de la voie humide lui apparut absolument prépondérante, se traduisant, dans la zone du contact, par le développement de divers silicates où les éléments de la Monzonite et ceux de la roche encaissante sont associés.

Ces recherches étaient remarquables pour leur époque. De Lapparent pour son coup d'essai, se rangeait en bonne place dans la petite galerie, bien connue des géologues, de l'auberge du Nace d'Oro, où au côté de sections géologiques les plus instructives que l'on connaisse d'après Marcel Bertrand au point de vue de l'analyse des phénomènes éruptifs voisinent sur les murs, des portraits, des autographes de géologues du monde entier venus à Predazzo déchiffrer l'énigme, et où chaque année les jeunes savants, descendus de toutes les latitudes, le marteau à la main, fètent la mémoire des maîtres disparus.

Elie de Beaumont, lui aussi, avait levé sa coupe au Nace d'Oro, et le souvenir qu'il avait gardé de la difficile vallée dut contribuer à diriger de Lapparent, son élève, dans le choix de ce premier voyage géologique.

On peut même se demander si Élie de Beaumont n'avait pas eu quelque arrière-pensée, en mettant ainsi de suite à l'épreuve, en face des problèmes géologiques les plus ardus, le jeune ingénieur sur qui de si brillants succès d'école avaient attiré son attention, en éveillant ses espérances. Ce qui est certain, c'est que, dès son retour du Tyrol, il était jugé. Il avait donné sa mesure à Élie de Beaumont, et le maître l'attachait, d'une façon officielle, au service central de la carte géologique, dont il était directeur.

C'est à ce titre que de Lapparent fut chargé de collaborer au relevé géologique détaillé des feuilles de Beauvais, Rouen, Neufchâtel, Laon, Cambrai, Yvetot, Avranches. Les qualités de patience, d'observation continue, d'attention concentrée, qu'exige ce genre de recherches n'étaient pas celles qui dominaient en lui, et il faut bien reconnaître que les tracés qui lui sont dus ne se distinguent, de ceux des autres collaborateurs du service géologique, ni par leur exactitude, ni par l'originalité des vues développées. De Lapparent faisant des levés sur le terrain n'était pas dans la voie qui lui convenait; sans doute, il multipliait les marches sur les sentiers en lacets, mais son esprit allait trop vite pour ses jambes. Cependant il donna des soins tout particuliers à la description physique de la vallée anticlinale du Bray, publiée en 1879, à titre de spécimen type des Mémoires pour servir à l'explication de la carte géologique détaillée de la France. Dans cette œuvre, il chercha à pousser aussi loin que possible l'analyse de la topographie du Bray, montrant l'influence de la stratigraphie sur les formes du terrain; son étude géométrique du bombement atteignit même par sa précision une réelle originalité, car il put, dans ce pays de pâturages, où le sous-sol se montrait si rarement à découvert, représenter sur des planches, en courbes de niveau, la base de la craie

glauconieuse et la surface supérieure de l'argile bleue portlandienne. La détermination si délicate de l'âge du soulèvement du Bray, qu'il aborda à diverses reprises, le confirma dans cette idée que les mouvements de l'écorce terrestre sont de longue haleine et peuvent se poursuivre à travers plusieurs périodes successives. Mais l'observation la plus intéressante à laquelle il ait été conduit, au cours de ses levers pour le service de la carte de France, est celle qui concerne les lambeaux de sable éocène dans le Vermandois et le Cambrésis. Il avait été frappé de ce que parfois, au milieu de ces plaines monotones, toutes de craie et de limon, on se trouve en présence d'une carrière de sable blanc, entourée de craie de tous côtés, et présentant néanmoins tous les caractères des sables landéniens, bien que ce sable occupe un niveau très inférieur à celui du Landénien qui couronne les hauteurs. Ces dépôts de sable n'étaient pas inconnus; mais personne n'avait songé à en suspecter l'allure et on admettait qu'ils avaient dû se former tels quels de Lapparent fit la preuve que ces gisements résultaient d'effondrements par suite desquels une couverture autrefois continue de dépôts éocènes horizontaux s'était, par places, abimée dans des poches de la craie sous-jacente, poches créées sans nul doute par l'élargissement de fissures préexistantes. De cette manière, quelques amas se sont trouvés préservés, par leur chute, de la destruction qui atteignait presque partout le reste de l'étage.

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Le service de la carte avait, pendant des années, attaché de Lapparent à l'étude des formations crétacées du Nord du Bassin de Paris, et ainsi il s'était trouvé naturellement désigné au choix du Gouvernement, quand il fallut un rapporteur pour le projet, soumis lors de l'Exposition universelle de 1867, d'un tunnel sous-marin entre la France et l'Angleterre. C'est à ce

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