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Les châteaux et les abbayes regorgeaient de provisions de toute espèce, pendant que les chaumières manquaient du nécessaire. Des pauvres du Maconnais ayant pris des fruits et des légumes dans les jardins de leurs seigneurs, furent pendus. Le comité municipal de Lyon fit marcher contre les paysans qui demandaient la diminution des droits féodaux, une colonne de gardes nationaux qui en tua quatre-vingts et en fit traîner soixante en prison. Le grand-prévôt du Dauphiné parcourait les campagnes avec le procureur du roi et la troupe de ligne, jugeait les paysans sur son passage et les faisait exécuter séance tenante. A Terrier, à Sénozan, etc., les nobles pourchassaient les mendiants à coups de fusil. Dans beaucoup de provinces, ils supposèrent de faux édits du roi, de nature à allumer la guerre civile, pour faire regretter l'ancien régime'. Exploitant l'esprit de crédulité qui domine en temps de troubles, ils prolongeaient la terreur. Aussi vit-on plusieurs fois, pendant la révolution, le peuple attendre des brigands ou des ennemis imaginaires.

XI. Dans ces conjonctures, le comte de Lally-Tollendal proposa (20 juillet) une proclamation au peuple, pour l'inviter au calme, et au respect du gouvernement, parce qu'il n'existait plus aucun danger, et pour le prévenir que quiconque enfreindrait la paix et la fidélité due au souverain serait traité comme re

1 Histoire de la Révolution par deux Amis de la liberté, t. II.

belle. Gleizen, Buzot et Robespierre blâmèrent le motionnaire de ce qu'il appliquait le nom de rebelles aux citoyens courageux qui avaient sauvé la patrie et exposé leur vie pour défendre leurs représentants. « Ne serait-il point téméraire, disaient-ils, de produire une fausse sécurité, dans un temps où il faut toute la vigilance de la nation pour maintenir ses droits? N'y a-t-il pas de la précipitation à faire croire qu'il n'y aura plus désormais de prétextes aux troubles, parce que les ennemis de l'État, étonnés de leur faiblesse et de la force de l'Assemblée nationale, ne méditent que dans le silence de nouveaux moyens de vengeance? »

La motion fut repoussée, mais Lally-Tollendal profita du meurtre de Foulon et de Berthier pour la reproduire. Elle passa le même jour, avec promesse d'instituer un tribunal chargé de rechercher et de punir tous les coupables d'attentats contre la nation.

La menace d'un châtiment n'arrêta pas les intrigues et les trahisons. Le baron de Castelnau, résident de France à Genève, ayant déchiré une lettre qu'il portait au moment où on l'arrêtait sur le pont Royal, fut conduit au district. On trouva sur lui quatre autres lettres, dont une du comte d'Artois, de qui il était l'agent secret. Ces papiers furent envoyés au président de l'Assemblée nationale, qui refusa de les ouvrir. Le marquis Gouy d'Arcy, en ayant été informé, proposa que toutes les lettres saisies sur les conspirateurs fussent décachetées et communiquées à l'Assem

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blée. Robespierre appuya cette motion, qui fut combattue par Mirabeau, Camus et Chapelier comme immorale, et rejetée à une grande majorité.

Le 27 juillet, on découvrit un complot tendant à livrer aux Anglais le port de Brest. Gouy d'Arcy saisit cette occasion pour reproduire sa motion; mais l'Assemblée persista dans sa première résolution. Adrien Duport proposa alors de calmer l'inquiétude universelle, tout en respectant le secret des lettres, en créant, au sein de l'Assemblée, un comité permanent de recherches et d'informations, chargé de dénoncer les manœuvres tendant à compromettre la sûreté publique. Des orateurs s'y opposèrent par le motif que ce serait établir le despotisme en concentrant tous les pouvoirs dans les mains de l'Assemblée. Néanmoins, ce comité fut créé immédiatement, composé de douze membres élus tous les mois, et chargé de la haute police de l'État.

Cette institution avait pour objet d'empêcher à la fois le retour des attentats de l'aristocratie et le massacre des conspirateurs. On lui apporta une foule de documents, et il découvrit mille trames ourdies par des fonctionnaires ou des princes, malgré leur serment de fidélité à la Constitution. On aurait pu justement arrêter et punir un plus grand nombre de personnes; mais l'Assemblée nationale usa d'indulgence. Elle se contenta trop souvent de déjouer les projets criminels; aussi les coupables enhardis bravè

rent les lois et fomentèrent d'incessants complots, qui amenèrent enfin la guerre civile avec la guerre étrangère et la terreur.

XII. Parmi les trois cents électeurs de Paris qui s'étaient emparés de l'administration, plusieurs procureurs tarés, spéculateurs avides et malhonnêtes, libellistes mercenaires, ne vivaient que des abus de l'ancien régime et le regrettaient. La précipitation des élections leur avait donné la facilité de tromper le peuple par des dehors de patriotisme dont ils se servirent pour établir leur fortune sur les débris de la fortune publique. Bien qu'ils dussent se retirer avec le retour du calme, ils continuèrent à exercer leurs fonctions. Les districts firent afficher contre eux des arrêtés énergiques, et envoyèrent chacun (25 juillet) deux députés à l'hôtel de ville pour administrer provisoirement, et pour préparer un plan de municipalité. Ceux-ci prirent le nom de représentants de la commune, proclamèrent de nouveau Bailly maire et Lafayette commandant-général de la garde bourgeoise, qu'on appela depuis garde nationale; mais au lieu de renvoyer les électeurs, ils les invitèrent à rester

avec eux.

La conduite des représentants fut pire encore que celle des électeurs. Après s'être servi du peuple contre la cour, ils s'allièrent avec la cour pour opprimer le peuple, et l'aidèrent bientôt à jeter un voile sur les attentats de juillet. Necker avait été rappelé de

Bâle par le roi et par une lettre pressante de l'Assemblée nationale. Son passage à travers la France fut un véritable triomphe. On traîna sa voiture; les femmes se mirent à genoux sur son passage et remercièrent Dieu de le leur avoir rendu. Ainsi tout un peuple prodiguait les témoignages de sa reconnaissance à l'homme qui avait fui lâchement, au premier ordre de son maître et sans faire connaître les complots ourdis sous ses yeux. Nul ne fit cette réflexion, soit que la victoire eût aveuglé les masses, soit qu'il suffise trop souvent au peuple qu'un ministre fasse de l'opposition pour devenir l'objet de sa reconnais

sance.

A Versailles, la cour accueille Necker avec empressement. Il part ensuite pour Paris, qui le reçoit avec enthousiasme. S'étant rendu à l'hôtel de ville dans la salle où siégent les représentants de la commune, il répond à un compliment de Bailly par les paroles suivantes convenues d'avance avec le roi : « Plus de » jugements, plus de proscriptions, plus de scènes » sanglantes; généreux Français, respectez, même » dans vos moments de crise et de calamité, ce carac»tère de bonté, de justice et de douceur qui distin» gue votre nation. » Puis le ministre demande et obtient la liberté de Bezenval que l'on avait arrêté dans sa fuite. Dans la chambre des électeurs il fait encore un discours touchant sur une amnistie générale. Plusieurs députés de la noblesse y répondent en

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