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optiques, à propos de la terminologie de la polarisation, qui a été transportée sans modification de la théorie de l'émission à la théorie ondulatoire, il remarque encore: « Ces vocables sonnent étrangement aux oreilles de nos étudiants, trop rarement instruits de l'évolution historique des théories physiques, et jettent parfois le trouble dans leurs idées ». Les siens, du moins, ne connurent jamais cette inquiétude. Une des caractéristiques principales — un des charmes principaux de son cours était l'historique très précis et souvent combien pittoresque, par lequel étaient introduites toutes les questions de quelque importance.

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Profondes et suggestives toujours, ces fortes leçons étaient, en effet, présentées sous une forme des plus originales; traversées de réflexions savoureuses, de termes de terroir, d'anecdotes piquantes contées avec une verve éblouissante et appuyées d'une mimique incroyablement vivante, à laquelle prenaient part des yeux étrangement expressifs, des traits extrêmement mobiles et une surprenante souplesse de gestes et d'attitudes. Ce don extraordinaire communiquait à son enseignement, sans rien lui enlever de sa solidité, un charme inimitable que subissaient même les élèves les plus médiocres. Il est difficile d'imaginer qu'on puisse réaliser plus pleinement ce rare prodige de rendre séduisantes les matières les plus ingrates.

Mais pour se livrer ainsi, il lui fallait le temps de s'habituer à son auditoire. Il avait besoin de se sentir en famille. Quand il lui arrivait de faire une conférence publique, sa parole, toujours précise, claire et élégante, se dépouillait de sa spontanéité prime-sautière pour revêtir une forme volontairement austère. Un fond de timidité insurmontable paralysait alors son exubérance naturelle, et il fuyait comme une odieuse corvée ces

(1) REVUE DES QUESTIONS SCIENTIFIQUES, janvier 1909.

leçons d'apparat qui, dans leur sobre et limpide sévérité, étaient pourtant un régal de choix pour ses auditeurs.

La Société scientifique eut la bonne fortune de * l'entendre deux fois dans sa jeunesse en 1880 sur La Matière radiante, et en 1884 sur Les Illuminations crépusculaires. Ces deux conférences ont été imprimées dans la REVUE DES QUESTIONS SCIENTIFIQUES, la première sous le nouveau titre Les Mouvements moléculaires. Une troisième et dernière fois, en 1897, il se laissa persuader de vaincre ses répugnances pour exposer à sa communauté de Louvain, renforcée de quelques amis appartenant à l'Université ou à la profession médicale, la récente découverte des rayons X.

Que ceux de nos lecteurs qui n'ont pas entendu le P. Thirion dans ses cours veuillent bien nous excuser d'avoir insisté sur cet aspect de son prestigieux talent qu'il ne leur fut jamais donné d'apprécier; ceux qui ont eu ce bonheur ne nous pardonneraient pas de l'avoir laissé dans l'ombre. Dans leur souvenir le P. Thirion restera toujours, avant tout, l'incomparable professeur.

L'écrivain était de la même trempe supérieure. On peut regretter seulement que, comme le conférencier, il voilât toujours la face la plus attirante de sa person · nalité, je veux dire son merveilleux enjouement, qui n'était malheureusement pas de mise dans le genre auquel sa plume fut vouée sans partage. Mais quel admirable talent d'exposition! C'est une joie, sous sa conduite, d'explorer les enchaînements les plus subtils d'une théorie ou le jeu le plus délicat d'un dispositif d'expérience avec lui tout semble simple, clair, ordonné; chaque chose prend sa place comme spontanément et se détache nettement en son plan dans le dessin général; on comprend et on voit. L'ordre des

IIIe SÉRIE. T. XXVII.

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idées est disposé avec tant d'art qu'il semble tout naturel et comme imposé par la force des choses; pas de détour inattendu qui déconcerte, pas de coin d'ombre qui trouble l'harmonie du clair édifice. On peut appliquer sans exagération à son talent d'écrivain ce qu'il dit lui-même dans un de ses articles du talent de conférencier de Tyndall : « Il excellait à leur donner (aux idées) une forme si saisissable, si simple, si facile dans son exposition, et si richement parée de tous les charmes d'une parole aisée et brillante, que ses auditeurs les moins préparés à le suivre, ravis, étonnés, flattés peut-être de pouvoir l'entendre, lui savaient grẻ de s'être mis à leur portée et d'avoir réfléchi sur leurs intelligences quelques-uns des rayons qui éclairent les plus hauts sommets de la science ».

Avec un sens littéraire inné très juste, le P. Thirion avait aussi beaucoup de lecture. Son style possède une élégance sobre; on y sent une maîtrise de la langue qui eût suffi à lui faire une réputation, s'il avait écrit pour ce qu'on appelle le grand public. C'est de belle et claire prose française, d'allure aisée et de tournure classique.

Vers la fin de sa carrière néanmoins, on y saisit parfois quelques traces de fatigue. La phrase est moins ferme, le mouvement moins alerte, l'invention moins riche en figures et en comparaisons. Cependant la clarté de la pensée reste inaltérée, et on ne se tromperait pas beaucoup en attribuant les défaillances du style, dans la plupart des cas, à la précipitation de la composition quand le pauvre Secrétaire avait, au dernier moment, à « boucher un trou» dans la livraison qui allait paraître.

Presque tous les travaux du P. Thirion ont été destinés à la REVUE DES QUESTIONS SCIENTIFIQUES. Disons d'abord quelques mots de ceux qu'il a publiés ailleurs. Nous avons déjà cité ceux des PRÉCIS HISTORIQUES. Ce

sont des œuvres de jeunesse déjà pleines de promesses. Il en est une autre, et des plus considérables, qui porte la marque de la maîtrise de son âge mûr. Ce sont ses Leçons d'arithmétique à l'usage des cours scientifiques et des Écoles Normales, parues chez Ad. Wesmael-Charlier à Namur en 1897, en même temps qu'un Résumé des Leçons d'arithmétique à l'usage des cours moyens et des classes d'humanités, et suivies en 1901 des Solutions des exercices proposés dans le Résumé des Leçons d'arithmétique, avec notes et exercices complémentaires. Comme rigueur de raisonnement, comme précision de langage, comme limpidité d'exposition, on ne saurait rien imaginer de plus parfait; au dire des meilleurs juges, ce traité est, avec celui de l'abbé Gelin, ce qu'on a jamais publié de mieux sur la matière dans notre pays.

Il faut bien avouer cependant que son succès dans la pratique n'a pas répondu entièrement à son mérite. Il y a à cela deux raisons. D'abord, la modestie de l'auteur lui inspirait un éloignement extrême de tout ce qui sent la réclame, si bien qu'il n'a pas même su se résoudre à prendre les mesures les plus usuelles pour s'assurer des comptes rendus. A notre connaissance, aucune revue de mathématiques, même celles dont la direction lui était le plus accueillante, n'a analysé son livre. Ce n'est que par hasard et sous forme d'allusion ou de comparaison qu'on en rencontre parfois la mention et l'éloge.

En second lieu, dans ses Leçons, le P. Thirion songeait avant tout, le titre ne le dissimule pas, à des jeunes gens déjà avancés dans leurs études, et il avait en vue de remplacer des auteurs qui laissaient par trop à désirer du côté de la rigueur scientifique. Or, le même défaut se faisait sentir aussi dans les auteurs des classes inférieures des humanités. Le premier projet du P. Thirion avait été d'écrire à leur intention un

manuel spécial, et s'il y avait un homme capable de mener pareille entreprise à bonne fin, c'était certainement lui. Malheureusement, il se laissa persuader qu'il était préférable ou suffisant d'extraire textuellement des Leçons les parties qui convenaient à l'enseignement élémentaire. De là le Résumé. Cette solution hybride ne satisfit personne, et aboutit en somme à sacrifier les besoins des élèves les plus jeunes.

11 y a peut-être une troisième raison. C'est que les maîtres appelés à baser leur enseignement sur ce nouveau manuel n'y étaient pas suffisamment préparés. Trop enclins peut-être, pour leur compte, à se contenter du langage imprécis et du raisonnement sans consistance de leurs vieux auteurs, ils furent sans doute un peu déroutés par les exigences de la nouvelle méthode, trop peu armés pour y préparer graduellement leurs jeunes disciples. Là encore un texte rédigé uniquement pour eux eût rendu de précieux services. Ne reculant jamais lui-même devant un travail intense de préparation et d'adaptation, l'éminent professeur qu'était le P. Thirion n'a peut-être pas assez songé, en souscrivant à une autre combinaison, que tous les professeurs n'ont pas toujours le talent ou le temps nécessaire pour soutenir pareil effort. Bref, entre les mains d'un corps professoral d'élite le Résumé eût fait - et a fait merveille. Confié à un personnel ordinaire, on pouvait se demander s'il ne mettait pas ses ressources intellectuelles et morales à une trop forte épreuve.

Voici une page de la préface des Leçons d'arithmétique d'après laquelle on peut se faire une idée de ce que le P. Thirion attend de son interprète. « L'ordre suivi dans le groupement des matières et la façon de les présenter sont ceux qui ont paru concilier le mieux les exigences d'un exposé logique rigoureux avec les nécessités de l'enseignement élémentaire. Ils

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