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elle l'est à chaque instant dans les laboratoires où l'on voit l'air liquide et l'anhydride carbonique solide.

D'autre part, sans sortir de notre monde et sans faire violence à la nature, nous rencontrons à chaque pas des vapeurs, des corps mous, sirupeux, plastiques, visqueux, où se trouvent réalisés, pour chacune des propriétés qui semblaient caractéristiques des solides ou des fluides, tous les degrés entre ceux qui correspondent à deux états jugés tantôt différents. Quelle place leur donner dans notre classification, et comment formuler, pour chacun des trois états de la matière, une définition précise qui le distingue des deux autres? Pareille distinction s'accorde mal évidemment d'une simple différence de degré entre les mêmes propriétés que se partagerait une série continue de corps intermédiaires, reliant entre eux ceux qu'il nous aurait plu de choisir comme types. Dans ce cas, en effet, le classement des corps sous trois états rappellerait la division. du spectre solaire en sept couleurs : il serait, à certains égards, moins arbitraire peut-être et pratiquement plus utile, mais il ne serait ni plus ni moins fondé sur la réalité.

Les recherches intentionnelles faites dans cette voie, et les découvertes auxquelles elles ont conduit, loin de nous fournir ces caractères distinctifs, ont, au contraire, effacé de plus en plus ceux que tour à tour on a invoqués, en même temps qu'elles ont mis de mieux en mieux en lumière la continuité réelle et l'enchainement intime de toutes les formes de la matière.

A l'époque où Boyle et Mariotte étudiaient la compression de l'air, tous les physiciens croyaient avec eux à l'existence de corps essentiellement gazeux, que l'on eût tenté en vain de faire passer à l'état liquide en les soumettant au froid le plus intense et aux plus énormes pressions. C'est une loi d'état, une loi carac

III® SÉRIE. T. XVII.

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téristique des corps gazeux, que Boyle et Mariotte ont cru découvrir et c'est bien comme loi d'état qu'elle fut acceptée par leurs contemporains. On la formule encore dans les mêmes termes, mais sous réserve des restrictions qu'elle comporte le volume d'une masse gazeuse, à une température donnée, quelle que soit son espèce chimique, est inversement proportionnel à la pression qu'elle supporte.

Le contrôle ultérieur de l'exactitude et de la généralité de cette loi, les travaux de Regnault entre autres, modifièrent singulièrement cette manière de voir; mais même après les essais heureux de Faraday sur la liquéfaction des gaz, la croyance à l'existence des gaz permanents ne fut pas abandonnée. Qu'il nous suffise de citer ici un passage très net de l'éloge de Faraday par J.-B. Dumas (1):

« Les expériences de Faraday sur la liquéfaction des gaz, écrit-il, confirment aussi l'antique classification de la matière terre, eau, air et feu, qui en représentaient les quatre qualités : solide, liquide, gaz et chaleur. Car Faraday a forcé tous les gaz connus à changer d'état, six exceptés; ce sont les moins solubles dans l'eau : l'hydrogène, l'azote et l'oxygène; l'hydrogène protocarboné, le bioxyde d'azote et l'oxyde de carbone. Ces six gaz, en outre, entrent, par eux-mêmes ou par leurs éléments, directement ou indirectement, dans la trame solide des tissus organisés et dans les liquides qu'ils emprisonnent; comme si le procédé de la vie, cherchant l'obstacle, aimait à s'exercer sur des produits particulièrement rebelles à l'assimilation.

» L'air est donc formé de deux éléments qui ont résisté à la liquéfaction et à la solidification : l'oxygène et l'azote. Or, si les deux éléments de l'air étaient liquéfiables, ils seraient solubles, et l'eau des mers

(1) Discours et éloges académiques, t. I, p. 65.

aurait dissous presque tout l'air qu'exige notre propre respiration. La vie des habitants de l'onde y aurait gagné, peut-être, mais celle des êtres qui peuplent la surface de la Terre en serait devenue impossible. Mais rassurons-nous, l'air a été soumis par Faraday à la pression de cinquante atmosphères, c'est-à-dire à celle d'une colonne d'eau six ou sept fois égale à la hauteur du Panthéon, en même temps qu'il était refroidi à 100° au-dessous de zéro; d'autres expérimentateurs ont doublé cette pression jusqu'ici, personne n'a vu l'air liquide. »

On sait qu'Andrews a expliqué l'insuccès de Faraday et indiqué le moyen de le prévenir un refroidissement convenable, différent mais déterminé pour chaque gaz, joint à une pression qui n'a rien d'excessif, suffit à les liquefier tous et même à les solidifier. Dès lors, les relations intimes de l'état gazeux et de l'état liquide et leur continuité, n'ont cessé d'être mises de mieux en mieux en lumière; elles ne font plus aujourd'hui de doute pour personne.

La comparaison des solides et des liquides a été l'objet de travaux non moins importants, inaugurés par une expérience célèbre de Tresca et magistralement continués par une série de belles découvertes dues surtout à M. W. Spring (1).

Tresca, en 1864, montra le premier qu'on pouvait faire apparaître, dans les corps solides sous pression, certaines propriétés regardées jusque-là comme caractéristiques de l'état liquide. Il comprima, au moyen d'une presse hydraulique, des lames métalliques diverses superposées dans un cylindre dont le fond

(1) Voir, dans les Rapports présentés au Congrès international de Physique (Paris, 1900): W. Spring, Propriétés des solides sous pression, diffusion de la matière solide, mouvements internes de la matière solide, t. I, p. 402.

était percé d'un orifice. Il vit que le parallélisme des lames ne se maintenait pas, mais que celles-ci s'écoulaient par l'orifice, sous forme de tubes emboîtés l'un dans l'autre.

Les corps solides ne forment donc pas un groupe particulier que caractériserait une rigidité rebelle à la fluidité et assurant la conservation de leur forme. Ils ne diffèrent des liquides, à ce point de vue, que par un frottement intérieur plus grand. « Une pression qui s'exerce sur un point quelconque d'un solide, écrit Tresca, se transmet également dans toute la masse et provoque un écoulement là où il y a le moins de résistance. » — « Les lois de l'Hydrostatique et de l'Hydrodynamique, conclut M. W. Spring, sont applicables aux solides sous forte pression.

D'autre part, nous en verrons la preuve dans une expérience de M. Schwedoff, on trouve, dans les liquides, des vestiges de cette rigidité qui semblait, à première vue, l'apanage des solides, et l'on constate que la fluidité des liquides n'est autre chose qu'une rigidité amoindrie.

On a fait appel à une autre propriété pour définir les solides. On a dit qu'ils n'ont qu'une élasticité limitée, à l'encontre des liquides dont l'élasticité serait illimitée.

De fait, quand on comprime un liquide, son volume diminue et, dès que l'effort extérieur auquel on l'avait soumis cesse d'agir, il reprend toujours et très exactement son volume primitif : son élasticité de pression est parfaite.

L'élasticité a, au contraire, une limite dans les solides soumis à la traction, à la torsion ou à la flexion: un effort trop grand entraîne ici une déformation permanente. On en avait conclu, et on a cru longtemps, que le corps solide admettrait aussi une diminution permanente de volume si on le soumettait à une

pression suffisante. Les travaux de M. Spring ont montré qu'il n'en est rien.

Ils comblaient une lacune manifeste. Pour comparer l'élasticité du solide à celle du liquide, il faut évidemment placer le solide et le liquide dans des conditions identiques, les soumettre à des efforts de même genre. Or on comprime les liquides en vase clos; il faut donc. comprimer aussi les solides en une enceinte fermée, de manière à réaliser, dans les deux cas, une pression hydrostatique, égale en tous sens. On constate alors que la diminution de volume provoquée par cette pression n'est pas permanente le solide revient à son volume primitif dès que l'effort subi, quel qu'il ait été, cesse d'agir; pour les solides, comme pour les fluides, il n'y a pas de limite à l'élasticité dans la diminution du volume (1).

Les solides, comme les liquides, ont donc une élasticité de pression parfaite. La limite n'apparaît que dans le cas de déplacements relatifs latéraux des particules de la matière solide, dus à la traction, à la torsion et à la flexion.

Or ici encore l'analogie se maintient les mêmes propriétés se retrouvent, à des degrés différents, dans les solides et dans les liquides. - Serait-il donc possible d'étirer un liquide, de le tordre, d'étudier la manière dont il réagit à pareil effort et de lui découvrir cette fois une élasticité limitée ?

Nous n'avons pas à nous étendre ici sur l'élasticite limitée de traction des liquides, manifestée dans un grand nombre d'expériences. M. G. Van der Mens

(1) Les expériences de M. Spring ont montré toutefois qu'à côté des solides, parfaitement élastiques, il y en a que la compression peut condenser d'une manière permanente. Ce sont ceux qui présentent plusieurs états allotropiques caractérisés surtout par une différence notable de densité. Mais ce n'est point là, à proprement parler, le résultat d'un défaut d'élasticité ; c'est celui d'une transformation intime du corps, et nous verrons plus loin que pareille transformation existe aussi dans les liquides.

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