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Au point de vue technique, la plus importante des exigences actuelles c'est une profondeur considérable, ce qui est la conséquence des transformations dans l'architecture navale dont on nous a plusieurs fois parlé; on veut aujourd'hui que les navires (et il y a des navires qui ont dix mètres de tirant d'eau) puissent entrer dans les grands ports à toute heure de la marée; on veut tout au moins qu'ils ne soient pas obligés d'attendre trop longtemps dans les avant-ports. La deuxième exigence au point de vue technique, c'est que les ports aient un outillage convenable; il faut qu'on y trouve en quantité suffisante grues, bigues, pontons, cabestans; il faut qu'il y ait une quantité notable de voies ferrées aboutissant aux quais et qu'il y ait sur ces quais des hangars, des entrepôts, des magasins.

Les exigences d'ordre technique ne sont pas les seules; on nous a montré aussi qu'un port doit être un organisme au point de vue industriel et commercial. C'est à ce point de vue surtout que les différentes fonctions des ports sont étroitement liées à l'essor économique des pays auxquels ils appartiennent. On nous a montré que leur développement est influencé au plus haut point par l'activité économique des contrées qu'ils desservent, comme aussi par la nature de leurs forces productrices. L'un des faits sur lesquels on a justement insisté, c'est que l'industrie de tous les grands pays civilisés s'outille de plus en plus en vue de l'expansion extérieure, et non plus seulement en vue de la consommation intérieure. Les pays où cette orientation est plus accentuée, comme l'Allemagne, l'Angleterre, la Belgique, la Hollande, peuvent entreprendre plus aisément de grands travaux pour l'amélioration de leurs ports avec la pensée que ces travaux seront rémunérateurs. La France, j'ai dù le constater même en parlant de Marseille, du Havre et de Rouen, est dans une situation moins favorable. La population s'y accrois

sant peu, la vie industrielle y est moins intense, le pays peut plus aisément se replier sur lui-même et s'occuper de sa consommation intérieure. Et puis la France n'a pas de fret lourd à exporter, et il faut du fret lourd pour mettre dans les flancs des énormes navires qu'on construit aujourd'hui. La question du fret au point de vue de la fonction économique des ports est une question capitale c'est à la houille et au fer que la GrandeBretagne a dû, pendant la plus grande partie du XIXe siècle, son merveilleux développement. La GrandeBretagne avait du fret en abondance, c'est elle qui fournissait le monde de combustibles, de fonte, de fer, de machines, d'instruments de toutes sortes. Et c'est en voulant faire comme elle que l'Allemagne a pris au point de vue maritime tant d'importance.

En parlant de la fonction commerciale des ports, vos rapporteurs ont mis en évidence un fait très important, ce fait qu'un port doit être un organe de suture entre les voies ferrées et les voies maritimes. On a particulièrement insisté sur l'utilité de la bonne disposition des installations. Qu'il s'agisse de la manipulation des marchandises ou du transbordement des voyageurs (car il y a aussi un fret humain), il faut que cela se fasse avec rapidité; plus que jamais le temps est de l'argent, « time is money ».

La question de rapidité joue un rôle d'autant plus important que ces grands navires de plus de deux cents mètres de long représentent un énorme capital, nécessitent des dépenses journalières trop élevées pour qu'ils puissent rester longtemps inactifs : leur raison d'être, c'est le mouvement; leur rémunération, c'est le fret.

Je dois me borner, Messieurs, à ces brèves considérations, mais je suis sûr d'être l'interprète de vos sentiments en remerciant une dernière fois les rapporteurs qui nous ont permis d'entreprendre une si fructueuse enquête.

En mettant ce beau sujet « la fonction économique

des ports » à l'ordre du jour de ses travaux, la Société scientifique n'a pas entendu exagérer la portée de son enquête.

Tous ici nous sommes de ceux qui pensent qu'on ne doit pas juger le degré de civilisation d'un pays uniquement d'après l'intensité de sa vie économique, l'accroissement de ses exportations et de ses importations; une civilisation trop utilitaire peut même offrir de graves dangers. Mais l'expérience prouve aussi que les qualités les plus hautes, les aspirations les plus idéales ont besoin en quelque sorte d'un point d'appui matériel. Les grandes nations ne peuvent laisser de côté les problèmes qni touchent à la vie maritime sans s'exposer à déchoir.

Les luttes commerciales ont en outre, à une époque où l'on se plaint de l'anémie des volontés, plus d'importance qu'on ne se l'imagine d'ordinaire, elles trempent les caractères, elles fortifient les volontés, elles montrent l'utilité de l'association, de l'effort commun. Il est probable que le xx siècle, qui nous réserve sans doute quelques surprises, nous fera assister à un nouvel effort de l'homme pour mettre en valeur les régions du monde qui, par des causes diverses, sont encore en retard; pour civiliser, transformer peut-être, en s'aidant des magnifiques découvertes de la science contemporaine, des régions jadis regardées comme inutilisables. C'est un devoir pour les peuples les plus avancés en civilisation de ne pas se dérober devant la tâche qui s'impose à l'humanité. La Belgique qui s'adapte si énergiquement à l'évolution contemporaine, ne faillira pas à la mission qu'elle s'est donnée. Elle ne manquera pas de recueillir bientôt la récompense de ses efforts, et de conquérir la place à laquelle les qualités de ses habitants et ses ressources naturelles lui permettent de prétendre.

G. BLONDEL.

L'ADMINISTRATION DES PORTS

La réorganisation administrative du port de Londres, les projets de M. Millerand et les voeux réitérés des Chambres de commerce françaises en faveur de l'autonomie des ports nous invitent à compléter la série des monographies relatives à la fonction économique des ports par une vue d'ensemble des systèmes d'administration en vigueur dans les principaux pays. Les avantages de la position géographique ou les facilités d'accès ne suffisent pas, en effet, pour assurer la prospérité des centres commerciaux et maritimes; partout, l'œuvre de la nature doit être corrigée, améliorée, complétée et l'ampleur de ces travaux, leur prompt achèvement, leur utilisation dépendent dans une très large mesure du régime qui préside à l'administration et à l'exploitation des ports.

En France, leur centralisation aux mains de l'État date du premier Empire et de la Restauration. Pendant environ soixante ans, jusqu'au vote de la loi du 14 décembre 1875, ce fut lui qui s'engageait à ordonner et à exécuter scul tous les travaux publics maritimes. Mais quand, par suite du développement de la marine à vapeur et de l'augmentation du tonnage des navires, s'imposa la construction et l'agrandissement des chenaux d'accès, des bassins, des quais et des cales sèches, le budget se trouva incapable de supporter cet accroissement de charges nouvelles : trop nombreux étaient

les ports où des travaux coûteux étaient réclamés. Aussi la collaboration financière des « intéressés », villes et Chambres de commerce, sous forme d'avances remboursables, fut-elle acceptée. Inauguré en 1875, ce système fut dès 1879 abandonné pour celui des subventions c'était la conséquence de l'adoption du plan Freycinet qui entraînait un demi-milliard de dépenses dans les ports. Depuis cette date, les travaux exécutés par l'État sont payés en partie à l'aide de fonds de concours fournis par les départements, les villes et les Chambres de commerce, qui pour se couvrir de ces dépenses, lèvent avec son autorisation diverses taxes de péage sur les navires fréquentant le port. Il est passé en usage que les intéressés paient au minimum la moitié (1) des sommes prévues dans les devis et qu'ils prennent à leur charge tous les dépassements de crédit; c'est donc généralement 60 ou même 70% de la dépense qui leur incombe. L'État qui n'en supporte plus que la petite moitié ou le tiers continue cependant à garder seul l'administration des ports (2).

Ce sont les Chambres de commerce qui établissent l'outillage public, grues, hangars et entrepôts, et qui

(1) Ainsi, par exemple, dans la construction du canal de Marseille au Rhône, l'intervention de l'État atteint juste la moitié de la dépense; l'autre moitié, soit 35 500 000 fr., sera versée au Trésor par la Chambre de commerce de Marseille (22 166 668 fr.), le département des Bouches-du-Rhône (6 666 666 fr.) et la ville de Marseille (6 666 666 fr.). — En 1890, la Chambre de commerce de Dunkerque assume la presque totalité (4 500 000 sur 4 900 000 fr.) des frais d'élargissement du chenal. En 1903, la même Chambre, avec le concours de la ville de Dunkerque, vote une participation de plus de 8 millions aux dépenses prévues pour l'agrandissement du port; défalcation faite des millions absorbés par les travaux militaires du déplacement des fortifications, cette contribution locale atteint les 68% du total.

(2) Il n'existe en France que deux installations maritimes appartenant à des sociétés privées les docks de la Joliette, propriété de la Société des docks et entrepôts de Marseille, et les appontements de Pauillac établis en eau profonde à 50 kilomètres en aval de Bordeaux et destinés à recevoir les navires que leur tirant d'eau empêche de remonter la Gironde.

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