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Assurément, le Liégeois interviewé, racontant à un étranger l'énorme bourde des subsides gouvernementaux enlevés à la faculté technique libérale de Liége pour aller à sa consœur catholique de Louvain, et celle non moins forte des recalés allant à Louvain pour cueillir leur diplôme, est seul, en Belgique, à ignorer que Louvain possède une université libre qui ne reçoit de subsides ni de l'État, ni de la Province, ni de la ville; tandis que l'Université de Liége est une création gouvernementale.

L'encombrement des locaux de la Faculté technique de Liége tient du reste à une circonstance spéciale: la fermeture d'écoles techniques russes, qui a fait affluer les étudiants en Belgique ; situation temporaire sans doute et qui ne peut entraîner un État soucieux des deniers publics à élever à grands frais des bâtiments nouveaux, alors que l'objet de leur construction peut disparaître du jour au lendemain. M. le professeur Hubert a fait connaître à l'auteur lui-même l'invasion anormale de l'Ecole des mines de Liége par plus de 700 Slaves.

Verviers, son industrie intense et la Gileppe occupent ensuite le narrateur qui revient par Liége vers le centre du pays : Louvain marque notre première étape en pays brabançon. C'est ici la forteresse de l'épiscopat belge: la fameuse université qui, au xvr° siècle, passait pour la première d'Europe, comptant quarante-trois collèges et plus de quatre mille « escholiers », a bien évolué...

» Jadis, nul n'était admis à une fonction publique dans les Pays-Bas autrichiens, sans avoir conquis ses grades à Louvain ; par réaction politique le gouvernement français supprima l'université; le gouvernement hollandais la rétablit; depuis 1834, elle a cessé de nouveau d'être reconnue et elle est devenue une université libre, subventionnée par l'Église belge. Aussi sa population actuelle d'un millier d'étudiants est-elle presque exclusivement constituée de futurs ecclésiastiques cloitrés dans d'innombrables séminaires; collège du pape Adrien, du Saint-Esprit, des Joséphites, de Saint-Thomas d'Aquin, etc.

» Depuis la période brillante où Louvain comptait 150 000 habitants vivant de l'industrie drapière, la ville a bien déchu. Morte la cité, amoindrie l'université qui s'est humblement refugiée dans ce qui reste de l'ancienne Halle-aux-Draps, et qui ne compte plus aujourd'hui que par ce qu'elle donne asile aux sciences spéculatives et à la rigide théologie...

» A peine descendu de wagon, la sensation qu'il pénètre dans une ville défunte étreint le voyageur. Tout y porte l'empreinte

ecclésiastique. Par les rues mornes glissent deux à deux les profils austères de béguines noires à coiffe blanche, ou de capucins en robe brune; on passe à tout moment devant des boutiques de libraires, éditeurs d'œuvres pies; au moins aussi nombreux sont les cabinets de lecture. On se rend à l'Université par un défilé de ruelles sombres; à l'entrée un gamin secoue une aumònière; sous les voùtes sévères, des prètres font les cent pas, entourés d'élèves graves comme de futurs théologiens on les devine ardents à disputer sur les redoutables mystères de l'audelà; on marche avec précaution, on parle de même. Au rectorat où je parviens enfin, j'apprends que c'est jour d'examen et je suis autorisé à assister à la discussion d'une thèse..

» Cette salle d'examen glaciale et nue, c'est la vieille Sorbonne théosophique, fidèlement reconstituée en un vivant anachronisme. Louvain est une ville figée; il faut m'en détacher de peur que le froid ne me gagne..... »

Deux hypothèses sont possibles en présence de cette description fantaisiste: M. Izart a été à Louvain et s'y est laissé berner ou il n'y a pas été.

Quoi qu'il en soit, rectifions en peu de mots; nous dirons plus loin ce qu'est l'Université de Louvain.

Elle compte 2500 étudiants dont la très grande majorité ne se destine nullement à l'état ecclésiastique: il y avait en 19091910 notamment 363 étudiants aux Écoles spéciales d'ingénieurs.

Le collège du Pape Adrien est une maison de famille, où un certain nombre d'étudiants trouvent le vivre et le couvert. Il n'y a parmi eux, aucun étudiant ecclésiastique.

Le collège des Joséphites est une institution dirigée par des religieux où on donne l'enseignement moyen; il n'a rien à voir avec l'Université, etc.

Louvain serait une ville morte, déchue, figée.

L'industrie métallurgique seule occupe à Louvain 3500 ouvriers. Il y a 16 brasseries qui emploient 275 ouvriers. Il faut y ajouter 6 malteries, 3 minoteries considérables, 6 usines de produits chimiques et engrais, 4 huileries ou savonneries, 1 fabrique de conserves de légumes qui exporte ses produits dans le monde entier. Au total, on peut attribuer à la ville de Louvain une population ouvrière de six mille personnes, au moins soit le septième environ de sa population. Pour une ville figée, ce n'est pas trop mal.

Que dire des rues mornes où glissent des béguines et des moines, des éditeurs d'oeuvres pies, des ruelles sombres donnant

accès à l'Université, de l'autorisation d'assister aux Halles à la discussion d'une thèse publique ? Décidement M. Izart n'a pas vu Louvain.

Et Bruxelles? C'est, d'après notre voyageur, une cité d'épicuriens Ville grasse, réjouie... toujours en fête bannière au vent... truculente capitale du bon boire et du bien manger... La ville haute, toute neuve est extrêmement laide... oh! ce « modern style », quel supplice quand on parcourt les rues de Bruxelles ! »

M. Izard n'a pas visité Bruxelles, ses faubourgs et ses environs en architecte.

Il y a là dans un rayon de quelques kilomètres un nombre énorme de constructions de tous styles; il lui eût été si facile d'en faire une sommaire étude. Elle lui eût fourni des indications bien intéressantes sur le travail de nos jeunes architectes et décorateurs et l'eût fixé sur ce fait social, qui s'est singulièrement affirmé chez nous en ces derniers temps: notre ambition d'avoir notre maison à nous, coquette à l'extérieur, riante, commode et familiale en dedans. En ville, nous préférons à l'appartement d'étage, la liberté entière dans notre domaine urbain. Nous aimons les champs et les bois, le grand air, le repos sain après le rude travail, les arbres et les fleurs autour d'une retraite saisonnière gagnée par notre effort; et ce n'est pas un des résultats les moins curieux de la prospérité de ce dernier quart de siècle, que la multiplicité de ces villas semées dans les charmants vallons qui entourent la capitale, comme dans les dunes du littoral. Il y en a ailleurs encore et quand M. Izart reviendra chez nous, nous l'engageons à faire en bateau le trajet de Dinant à Namur : il sera stupéfait du nombre de maisons de campagne étagées sur les bords si pittoresques de la Meuse.

Tout cela n'est-il pas le fruit du travail belge et ne méritait-il pas d'être signalé ?

M. Izard a préféré insister sur une chose qui manque à la Belgique l'instruction obligatoire ». A l'en croire, nous aurions 40 p. c. d'illettrés en Flandres, 20 p. c. en Wallonie et 32 p. c. pour tout le pays; c'est trop, dit-il. Beaucoup trop, en effet, et il eût été intéressant de connaitre la source d'où ces chiffres sont sortis. Ce n'est certainement pas de la statistique officielle, tirée des recensements décennaux publiés par l'Annuaire statistique de Belgique. M. Siret en a extrait les éléments du tableau suivant :

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Les colonnes 4 et 5 montrent les progrès réalisés dans les
Flandres de 1890 à 1900.

Si nous prenons les provinces où la proportion des lettrés est
la plus forte, nous voyons que le taux d'accroissement, au lieu
d'augmenter, diminue. On tend évidemment pour les provinces
de Brabant, de Liége, du Luxembourg et de Namur vers une
situation d'équilibre; tandis que le progrès se marque de plus
en plus dans les autres provinces.

Nous n'avons que les chiffres publiés après les recensements
décennaux, ceux de 1910 ne le sont donc pas encore, mais en
admettant pour toutes les provinces un progrès au cours de la
période 1900-1910 égal à celui de la période décennale précé-
dente, ce qui est assurément inférieur à la probabilité pour les
Flandres et Anvers où la progression continuera certes de croitre,
nous trouvons les chiffres inscrits dans la colonne 6.

Si nous passons au royaume entier, en prenant les lettrés,
déduction faite des enfants de moins de huit ans, nous arrivons
aux chiffres suivants :

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Et en raisonnant comme ci-dessus, nous aurions pour 1910 86,80 p. c. Ce dernier chiffre est certainement un minimum (2). Il est bien inutile de porter atteinte à la liberté du père de famille pour obtenir une diminution du nombre d'illettrés les tableaux ci-dessus démontrent que cela ira tout seul, et plus vite encore si au lieu d'une contrainte pratiquement inefficace, on a recours à des encouragements de forme variée (3).

M. Izard parle dans le même chapitre de l'enseignement professionnel, des hautes études commerciales et techniques, de l'École de Brasserie de Gand, etc. Il faut noter le soin qu'il met à ne pas mentionner les instituts d'enseignement professionnel et supérieur créés par les religieux ou les catholiques, tels l'École supérieure de Commerce et de finance, Institut Saint-Ignace, à Anvers, l'École Commerciale et consulaire de Mons, l'Institut Commercial de Melle, l'École des Arts et Métiers, à Bruxelles et à Liége; les Écoles de Brasserie et d'Agronomie de Louvain; les admirables Écoles Saint-Luc de Gand, Bruxelles, Liége, etc., etc.

Le livre que nous analysons traite de l'enseignement au premier degré, et des écoles supérieures; pourquoi est-il muet au sujet de l'enseignement moyen ? Serait-ce pour éviter de devoir faire l'éloge de ces superbes collèges libres qui sont l'orgueil des catholiques?

Le chapitre X de la Belgique au Travail traite de quelques particularités concernant le railway: l'intensité du trafic, les

(1) Voir Annuaire statistique de la Belgique. Tome XXXIX, page 75. Bruxelles, 1909. — Établ. gén. d'imprimerie.

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(2) Voici d'autres chiffres qui confirment cette conclusion:

En 1908, des jeunes gens appelés au tirage au sort, 91,54 p. c. savaient lire et écrire. Au 15 novembre 1908, des enfants de 6 à 14 ans, 1 107 610 fréquentaient l'école sur 1 160582; soit un déchet de 52 972 dans lesquels sont comptés: 1o les anormaux (6621); 2° ceux qui sont instruits chez eux; 3o ceux qui ayant 6 ou 7 ans à cette époque (1908) ne devaient commencer que plus tard à fréquenter l'école ; 4o ceux qui, ayant à cette époque 13 ou 14 ans, avaient cessé d'aller en classe.

(3) Consultez sur cette question et les problèmes économiques et sociaux en Belgique, le Manuel social. La législation et les œuvres, par A. Vermeersch et Müller, S. J. Louvain, Uytspruyst, Paris, F. Alcan, 1909, 3me édition. Cet ouvrage a obtenu le prix quinquennal des sciences sociales (5me période, 1902-1906).

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