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QUELQUES NOTES

SUR DES

PEINTRES LORRAINS

DES XV XVI ET XVII SIÈCLES,

PAR M. HENRI LEPAGE,

PRÉSIDENT De la société.

I.

« Peu de pays,» a dit un écrivain moderne qui ne saurait étre accusé de partialité; « peu de pays ont été doués d'un › génie des arts aussi vrai et aussi fécond que la Lorraine. » La France s'enorgueillit depuis longtemps des noms illus» tres dont cette belle province a enrichi sa couronne ; mais, › en réalité, quand la charmante pléïade des artistes lorrains › se produisit et se développa, ce fut sous l'influence des ducs › de la cour de Nancy..... Et ces Lorrains, peintres, sculpteurs, graveurs, architectes, sont innombrables, et, seule>ment pour les énumérer, plusieurs pages seraient néces› saires (1).

D

(1) Recherches sur la vie et les ouvrages de quelques peintres provinciaux de l'ancienne France, par M. Ph. de Chennevières-Pointel..

J'éprouve, je l'avoue, un vif sentiment d'orgueil à reproduire ces lignes, expression de la vérité, juste hommage rendu à notre pays : oui, nos princes se montrèrent toujours les protecteurs aussi généreux qu'éclairés des arts; oui, les artistes lorrains forment une phalange innombrable, et plusieurs pages ne suffiraient pas pour enregistrer leurs noms, si l'on considère surtout que ceux dont l'Histoire a parlé, sont moins nombreux peut-être que ceux sur lesquels elle a gardé le silence.

Il ne saurait plus y avoir aujourd'hui de doute à cet égard, en présence des découvertes qui ont été récemment faites, et dont je me propose de consigner ici quelques résultats.

Malgré les peines que s'est données l'auteur de la Bibliothèque lorraine pour élever un monument à la gloire de sa patrie, en signalant tous les hommes marquants qui y sont nés, son livre, quelque volumineux qu'il soit, contient des lacunes considérables; non point, et j'ai hâte de le dire, que Je savant Bénédictin ait péché par indifférence ou ait reculé devant des recherches arides; mais simplement parce qu'il n'a pas eu le bonheur de trouver la source où il fallait puiser.

Cette source, aussi abondande que précieuse, elle était près de lui cependant, dans ce Trésor des Chartes de Lorraine où il a fait tant et de si utiles investigations; elle était là, mais cachée sous la poussière de vieux registres de comptes qui ne semblaient pas dignes d'être compulsés.

D'autres, plus heureux que Dom Calmet, ont cherché derrière cette poussière, et y ont trouvé des richesses jusqu'alors inconnues renseignements sur les arts, sur l'industrie, sur les événements contemporains, sur la vie intime du prince, une foule de détails enfin qui sont destinés à jeter un nouveau jour sur notre histoire.

Le travail qu'on va lire est uniquement un extrait de ces

registres, la reproduction de notes que j'ai essayé de rattacher le mieux possible les unes aux autres, la mise en lumière, si je puis m'exprimer ainsi, d'une multitude de faits dont il sera facile de tirer des conséquences, et qui pourront aider à bien comprendre, à bien tracer, si on le voulait, la physionomie artistique de chaque siècle ou de chacune des périodes formées par les règnes de nos différents ducs.

Les documents de la nature de ceux que je publie, ont une importance et une valeur qu'il n'est pas besoin de faire remarquer ils portent avec eux tous les caractères de l'authenticité, et sont comme autant d'articles de foi qu'on peut adopter sans crainte de tomber dans l'erreur.

Aussi a-t-on vu plusieurs écrivains préférer se borner à réunir, par ordre chronologique, des extraits de comptes, plutôt que de raconter, sous une forme brillante, la vie d'un hommé ou d'un monument (1). Ce genre est aride sans doute et peu propre à captiver le lecteur; mais il a, pour ceux qu¡ cherchent sérieusement à s'instruire, le grand avantage de leur présenter des faits positifs, des dates certaines, de leur révéler enfin une multitude de particularités intéressantes qui ne sauraient trouver place dans une composition littéraire.

Je m'occuperai, dans ce premier travail (2), des peintres et des peintres-verriers lorrains des XV, XVIe et XVIIe siècles. Je devrais dire de la fin du XVe siècle seulement, car nous

(1) Je citerai, notamment, le travail de M. de Laborde sur l'église de Gisors, inséré dans les Annales archéologiques, année 1849; et les Archives de l'art français, qui ne sont, à proprement parler, qu'un recueil de documents sur les artistes français de toutes les époques.

(2) Je me propose de consacrer des notices analogues à celle-ci, aux musiciens, aux architectes, aux graveurs, à tous les Lorrains, enfin, qui se sont consacrés à l'étude des arts.

ne possédons presque point de renseignements antérieurs à cette époque; les archives des anciennes maisons religieuses ont, en grande partie, disparu, et il faut désespérer de pouvoir jamais apprendre les noms des artistes dont les tableaux ou les sculptures décoraient les églises des vieux monastères de nos contrées.

Il est probable aussi que les palais de nos ducs, que les chapelles fondées par eux, étaient ornés, aussi bien que les églises des abbayes, de peintures à fresque et de vitraux coloriés dus à des peintres nés dans le pays (1); il est probable que plusieurs de ces ducs, et, entr'autres, René d'Anjou (2), malgré le peu de temps qu'il habita le Barrois et la Lorraine, ne furent pas sans attacher des artistes à leur personne et sans encourager leurs travaux.

Mais on en est réduit à de simples suppositions: c'est seulement aux dernières années du règne de René II qu'on peut faire remonter le mouvement artistique qui devait, sous les successeurs de ce prince, placer la Lorraine au premier rang parmi les petits Etats de l'Europe. Lorsque le vainqueur de Charles-le-Téméraire put se reposer sur le trône qu'il avait si péniblement conquis, il s'empressa de faire jouir ses sujets

(1) Suger dit que des travaux avaient été faits à la basilique de SaintDenis (V. D. Bouquet, t. 12, p. 96, 97, 99, 101) per plures aurifabres lotharingos. » Il parle aussi des peintres-verriers ; mais il est probable que Suger a voulu désigner les artistes de la Basse-Lorraine et du pays de Liége plutôt que ceux de la Lorraine actuelle.

(2) On sait que ce prince s'adonna lui-même à la peinture et au dessin, dont il avait, dit-on, reçu des leçons des frères Hubert et Jean Van Eyk (plus connu sous le nom de Jean de Bruges). Le grand oncle maternel de René Ier, le cardinal Louis de Bar, s'était plu à répandre sa munificence sur les artistes de son temps, qu'il attirait auprès de lui, soit dans la capitale du Barrois, soit à Paris, où il faisait souvent son séjour. (Histoire de René d'Anjou, par M. de Villeneuve.)

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