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Sa Sainteté Pie XI

et le

cinquantenaire de la Société scientifique de Bruxelles

La Société scientifique célébra le cinquantenaire de sa fondation, les lundi 12 et mardi 13 avril. Les lecteurs de la REVUE trouveront plus loin le texte des trois conférences faites à cette occasion. Le compte rendu des fêtes paraîtra dans le Volunie Jubilaire des ANNALES, où seront reproduites les adresses de félicitations élogieuses remises à la Société par de nombreuses institutions scientifiques. Nous ne résistons pas au désir de présenter ici la traduction française de la lettre envoyée par le Souverain Pontife.

A nos chers Fils, les membres de la Société scientifique

Chers Fils,

de Bruxelles,

PIE XI, PAPE.

Salut et bénédiction apostolique.

Naguère les catholiques étaient accusés par les ennemis de notre foi, bien injustement, d'ignorance des choses de la nature, comme si la religion même les empêchait de s'appliquer aux disciplines physiques. Ce fut donc assurément une entreprise des plus louables que de constituer, voilà cinquante ans, à Bruxelles, la Société scientifique. Son but IVe SÉRIE. T. IX.

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était de confirmer par le fait cet enseignement du Concile du Vatican : « Jamais, il ne peut exister de désaccord entre la foi et la raison ». Et en effet l'Association ne tarda pas à être florissante ; de nombreux savants, constitués dans les ordres sacrés, ou laïques, non seulement parmi les Belges, mais aussi d'autres pays, surtout de la France, lui donnèrent volontiers leur adhésion. Et ainsi vous entreprîtes l'édition de ces deux publications, la RevUE DES QUESTIONS SCIENTIFIQUES, et les ANNALES DE LA SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE de Bruxelles, dont la dernière contient les travaux dont vous vous occupez habituellement dans vos réunions annuelles. L'œuvre considérable de vos intelligents labeurs s'offre à nos yeux dans une ample collection de volumes où vous étudiez les mathématiques, les sciences naturelles, physiques, médicales et économiques, avec sagesse et pénétration, et suivant la méthode appropriée à chacune de ces branches. Aussi, les non-catholiques eux-mêmes ont dû reconnaître votre science et vos découvertes, ceux qui se livrent à l'étude sérieuse et complète de ces disciplines ne peuvent plus ignorer vos écrits. Chers Fils, vous avez donc bien mérité de l'Église et de la société civile; et puisque vous célébrez ces jours-ci le cinquantenaire de la fondation de cette Association, animez-vous par la pensée d'un aussi heureux évén ment, pour continuer avec une ardeur nouvelle à poursuivre votre très noble dessein. Quant à Nous, vous félicitant chaudement, Nous implorons pour vous dans Nos prières le secours de la sagesse de Dieu. Pour vous concilier cette grâce divine et vous donner un témoignage de Notre particulière bienveillance, Nous vous accordons, Nos Chers Fils, avec une très grande affection dans le Seigneur, la bénédiction apostolique.

Donné à Rome, près de St-Pierre, le sept avril 1926, de Notre pontificat la cinquième année.

(Signé)

PIUS PP. XI.

Que faut-il penser de la Terre?

Sire, Excellence, Messeigneurs, Mesdames,

Messieurs (1),

Je vous convie à une méditation de quelques instants sur le problème de la Terre. Que faut-il penser de la Terre ? Que faut-il penser de cet étrange navire qui nous porte, nous autres hommes, qui nous emporte avec lui dans son voyage à travers l'espace? de ce navire sur lequel nous sommes nés, sur lequel nous mourrons et qui, lorsque nous serons morts, continuera de promener notre poussière obscure parmi l'éclatante poussière des nébuleuses et des soleils ? Il m'a semblé qu'une telle méditation n'était point indigne de figurer au programme de nos fêtes, et que les savants de toute discipline réunis aujourd'hui pour célébrer les noces d'or de la Société scientifique de Bruxelles accepteraient volontiers de réfléchir, une heure durant, à l'énigme colossale qui se dresse devant le géologue, devant l'astronome, devant le physicien, et même devant le métaphysicien, quand ils songent à la Terre, à son rôle dans l'Univers, à sa constitution intime, à son origine, à son long passé, à son avenir si incertain.

Car le problème n'est pas unique; et c'est tout un

(1) Conférence faite à Bruxelles, à l'assemblée générale solennelle du Cinquantenaire de la Société scientifique, le mardi 13 avril, en présence de Sa Majesté le Roi du Nonce, Apostolique, de l'Évêque de Namur et de Mgr Legraive, vicaire capitulaire de Malines.

faisceau de problèmes. Dans la Création infiniment mystérieuse, la Terre reste une entité presque inconnue, et même incompréhensible. Celui qui comprendrait la Terre et qui saurait son vrai rôle dans l'économie générale du monde pourrait se vanter d'avoir pénétré fort loin dans les secrets de Dieu. Je n'ai pas la prétention de vous révéler des faits nouveaux, ni de vous apporter des explications nouvelles. Je veux seulement essayer de faire passer devant vos yeux l'Enigme elle-même. Cette vision suffira peut-être à vous donner le frisson de l'Inconnaissable, la sensation, où il y a de la terreur et de l'ivresse, la sensation que nous éprouvons quand on nous a conduits sur l'extrême bord d'un abîme. Nous nous sentons bien impuissants à y descendre et à le sonder; il nous fascine cependant par sa profondeur même et par la congruence qui relie les unes aux autres toutes les Immensités : l'immensité de notre ignorance à l'immensité de notre désir de connaître l'immensité de l'Univers à l'immensité, bien autrement insondable, de l'esprit humain et du cœur humain.

Les Anciens plaçaient la Terre au centre du monde. Cette manière de voir simpliste se retrouve, tacite ou formulée, chez la plupart des hommes dépourvus de culture; on la retrouve aussi chez beaucoup de mystiques, qui ne peuvent pas admettre qu'un globe aussi béni, aussi sanctifié, soit une planète comme les autres. Écoutez à ce sujet un mystique contemporain, notre grand Léon Bloy, qui fut, parmi nous, un homme du Moyen Age : « Antérieurement au crétinisme scientifique Bloy n'avait ni la peur des mots, ni le respect des hommes de science, les enfants savaient que le Sépulcre du Sauveur est le centre de l'Univers, le pivot et le cœur des mondes. La Terre peut tourner autant qu'on voudra autour du Soleil. J'y consens; mais à condition que cet astre, qui n'est pas informé de nos lois astronomiques, poursuive tranquillement sa révolution autour de ce

point imperceptible et que les milliards de systèmes qui forment la roue de la Voie lactée continuent le mouvement. Les cieux inimaginables n'ont pas d'autre emploi que de marquer la place d'une vieille pierre où Jésus a dormi trois jours. »

:

Les savants modernes se font de la Terre une idée bien différente elle n'est, pour eux, que l'une des planètes du système solaire et non l'une des plus grosses; et le système solaire lui-même n'est que l'un des systèmes, au nombre total de plus d'un milliard, qui forment ce que Léon Bloy appelle si joliment « la roue de la Voie lactée », et que nous nommons la galaxie. Dans le système solaire, la Terre, aux yeux de la plupart des astronomes, ne semble jouir d'aucun privilège important; et quant au Soleil, autour duquel la Terre tourne, il n'est qu'une étoile comme une autre, plus petite que bien d'autres, emportée comme les autres dans un mouvement mal connu, dans un de ces mouvements internes de la galaxie qui changent peu à peu les distances relatives des astres et dont les lois et les vitesses échapperont toujours à nos calculs et à nos mesures.

Entre ces deux conceptions astronomiques extrêmes : Terre, centre du monde, centre autour duquel le monde entier se meut et tourne; Terre, astre quelconque parmi les astres innombrables qui s'agitent dans la galaxie; entre ces deux conceptions, ni l'observation directe, ni les calculs de la mécanique céleste ne permettent de choisir. Il faudrait, pour que nous pussions choisir, il faudrait que nous eussions un point fixe, un point en repos absolu, sur la Terre ou hors de la Terre. Mais si ce point existe quelque part dans le monde, nous sommes bien incapables de le reconnaître et de le situer. Les hypothèses cosmogoniques auxquelles nous adhérons sont simplement celles qui nous paraissent le plus commodes, suivant le mot d'Henri Poincaré; et, presque toujours, ce qu'il appelait commodité est affaire d'éducation ou d'habitude.

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