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qui s'était sauvé en se cachant sous les corps de son père et de son frère aîné qu'on venait d'assassiner à ses yeux.

Pour le vidame et Montgomery, quand ils ouïrent le bruit de la ville, ils voulurent passer la rivière avec ceux qui les avaient suivis dans le faubourg Saint-Germain pour voir ce que c'était; chose étrange, ils apercurent le roi qui les tirait par les fenêtres du Louvre; ils se sauvèrent en diligence (2143).

«Le massacre dura plusieurs jours (2144); les deux ou trois premiers jours furent d'une effroyable violence; dès la première nuit, le roi fit venir le roi de Navarre avec le prince de Condé pour leur commander à tous deux d'abjurer leur hérésie; le cardinal de Bourbon et quelques ecclésiastiques, travaillèrent à les instruire.

« Le roi de Navarre résista peu; le prince de Condé répondit d'abord avec fermeté qu'on ne devait pas le forcer dans sa conscience, et qu'il ne pouvait se persuader que le roi pût manquer à la foi donnée; mais il changea de langage quand il vit le roi en personne lui dire en jurant, et d'un ton terrible ces trois mots: Messe, mort ou Bastille pour toute la vie. Le cardinal de Bourbon reçut, quelques jours après, l'abjuration de ces deux princes, et on les obligea d'écrire au Pape. Le dessein de la cour était de rejeter toute la haine du massacre sur ceux de Guise; mais le duc n'était pas résolu à s'en charger, ni à laisser un si beau prétexte de le perdre dans un autre temps.

«Il parla si haut que la reine-mère n'osa pousser ce dessein, quoiqu'elle y fût entrée d'abord. Elle fut la première à dire au roi que la dissimulation allait allumer une guerre plus dangereuse que les précédentes; que le maréchal de Montmorency avait juré de venger l'amiral; que tous ces huguenots se joindraient à lui; que le duc de Guise, soutenu du duc de Montpensier et des catholiques, armerait aussitôt pour

On

(2143) Bien que le caractère devenu cruel de Charles IX rende cette noire action très-probable, et malgré le dire de Bossuet qui, s'adressant dans son ouvrage à un enfant royal, aurait pu être porté à pallier les fautes de l'un des ancêtres de ce jeune prince, M. l'abbé Rohrbacher veut disculper Charles IX de ce crime ajouté à tant d'autres. suppose dans bien des livres, dit-il, (tom. XXIV, 659) que Charles IX, placé à une des fenêtres du Louvre, tirait avec une carabine sur les calvinistes qui essayaient, en traversant la rivière, de se sauver au faubourg Saint-Germain, mais ce fait ne repose que sur l'autorité en soi très-légère de BranLome, qui n'était point à Paris, et qui encore ne le rapporte que comme un oui-dire. L'historien de Thou n'en dit rien, et sans doute il n'y a pas dans son silence quelque intention de ménager Charles IK, qu'il appelle un enragé. M Rohrbacher a pour lui l'opinion du chevalier Artaud (L'Italie, in-8°, 1835, pag. 263, note) et quelques autres; mais cela ne nous empêche pas de nous demander si Fon peut supposer que Bossuet ait inventé ce fait, on qu'il l'ait répété d'après des autorités peu sûres: nous ne le croyons pas. Bossuet, dans sa situation, cût été trop intéressé à ménager Charles IX s'il l'avait pu, et dès l'instant qu'il constate ce fait, on peut croire, ce nous semble, qu'il s'était assuré de

se défendre; que le seul moyen qu'eût le roi d'arrêter tous ces desseins de vengeance, c'était de se déclarer; que les prétextes ne manqueraient pas; el qu'après tout une exécution si hardie ferait trembler les plus assurés, au lieu que dissimuler plus longtemps une chose claire, paraîtrait un effet de crainte.

α

VII. Il n'en fallait pas davantage pour un prince qui aimait à se faire craindre, qui appréhendait moins la baine que le mépris. Après qu'on eut résolu dans le conseil ce qu' FALLAIT DIRE au parlement, le roi y alla le troisième jour du massacre, accompagné de la reine sa mère, de ses frères, des princes du sang et de toute sa cour. Là il déclarà que l'amiral et d'autres scélérats comme lui avaient conjuré sa perte, celle de la reine sa mère, de ses frères et même du roi de Navarre, pour donner la couronne au jeune prince de Condé ; qu'ils le devaient ensuite tuer lui-même, afin que, ne restant plus personne de la famille royale, ils pussent partager le royaume; que celle conjuration avait été découverte sur le point qu'elle allait éclater, et qu'il n'y avait point trouvé d'autre remède que le massacre de ceux qui troublaient l'Etat depuis si longtemps, et par tant de guerres sanglantes sous la conduite de l'amiral; qu'ainsi il déclarait que la chose s'était faite par son ordre, afin que personne n'en doutât, ajoutant qu'il n'en voulait point à la religioù huguenote, mais qu'il voulait au contraire que les édits fussent observés plus que jamais.

« Le premier président loua en public la sagesse du roi, qui avait pu cacher un si grand dessein et le couvrir le mieux qu'il pût; mais en particulier il remontra fortement an roi que si celle conspiration était véritable, il fallait commencer par en faire convaincre les auteurs, pour ensuite les punir par les formes, et non pas mettre les armes, comme on avait fait, entre les mains de furieux. ni

sa véracité et qu'il n'a obéi ici qu'à la vérité historique. Quoi qu'il en soit, nous ne tenons pas autrement à notre sentiment. Mais nous n'avons fait cette remarque que parce que nous pensons qu'il vaut toujours mieux, quand il y a lieu, avouer les fautes d'un prince, même catholique, plutôt que d'autoriser les ennemis de l'Eglise à nous accuser injustement de vouloir à toute force justitier tout dans un intérêt de parti.

(2144) M. l'abbé Rohrbacher conteste encore ce fait (ibid.), malgré l'assertion de Bossuet. Voici ce qu'il dit On suppose souvent que le massacre de Paris dura trois jours; le huguenot La Popelinière nous apprend qu'il cessa dans la journée même (La Popel. liv. xxix, pag. 67). » Nous n'ignorons pas que M. Rohrbacher peut avoir encore ici des autorités; mais il est certain aussi que plusieurs historiens affirment le contraire. Quand on les balance entre eux, il n'est guère possible d'ètre de l'avis de l'auteur de l'Histoire universelle de l'Eglise. Et puis, nous dirons encore ce que nous venons de remarquer dans la note précédente; c'est qu'on ne peut guère croire qu'un écrivain tel que Bossuet ait écrit ce qu'on vient de lire sans s'être assuré de la vérité et sans s'être appuyé sur de graves témoignages.

faire un si grand carnage, où se trouvaient enveloppés indifféremment les innocents et les coupables (2145).

Le roi commanda qu'on fit cesser le massacre; mais il ne fut pas possible d'arrêter tout à coup un peuple acharné. Son ardeur se ralentit peu à peu comme celle d'un grand embrasement, et il y eut encore beaucoup de meurtres quatre ou cinq jours après la défense. I périt durant sept jours plus de six mille personnes, parmi lesquelles il y eut cinq ou six cents gentilshommes qui se laissèrent égorger comme auraient fait des animaux sans courage, tant ils furent étonnés et interdits par une violence si étrange et si imprévue; il n'y eut que le seul Guerchi qui mourut l'épée à la main. De six à sept cents maisons qu'on pilla dans le désordre, il n'y en eut qu'une seule qui fit de la résistance.

VIII. «Pour confirmer le bruit qu'on voulait répandre de la conjuration de l'amiral, on lui fit faire son procès. La reine-mère fit chercher parmi ses papiers quelque chose qui diminuat l'horreur qu'un tel meurtre devait causer dans les pays étrangers. On n'y trouva que des mémoires pour la guerre de Flandre, et des avis qu'il donnait au roi pour le bon gouvernement de son Etat. I l'avertissait, entre autres choses, de ne point donner trop de crédit ou de trop puissants apanages à ses frères, et d'empêcher de tout son pouvoir que les Anglais n'acquissent dans les Pays-Bas révoltés un pouvoir qui deviendrait fatal à la France.

La cour affecta de communiquer ces mémoires au duc d'Alençon et à la reine d'Angleterre; on représentait à l'un et à l'autre la manière dont les traitait un homme qu'ils estimaient tant. La réponse fut honorable pour l'amiral; ils dirent qu'ils pouvaient peut-être se plaindre de lui, mais que le roi du moins s'en devait louer et que des avis si solides et si désintéressés ne

(2145) Ainsi voilà le président de Thou qui ne craint pas de souiller d'abord sa robe rouge et qui rend au roi des actions de gràces: Qui ne sait dissimuler, dit-il, ne sait pas régner! Maxime effrayante, faiblesse coupable! que M. Villemain attribue à l'horreur des temps, où même de semblables caractères ne pouvaient rester purs, mais que nous regarderons comme une apostasie de la conscience! Aussi bien, M. Villemain lui-même constate-t-il que le chancelier de L'Hópital en eut l'àme profondément allligée. Chaque jour, dit-il, lui annonçait de nouveaux malheurs et de nouvelles hontes pour le royaume. Quelques-uns de ses amis étaient morts, d'autres avilis. Combien, lorsqu'il apprit dans sa retraite, que le premier président de Thou lui-même avait fait l'apologie des meurtriers, et commencé des procédures contre les victimes, ne dut-il pas regretter au milieu de tant de maux, cette dégradation des plus nobles caractères, et ce derHier triomphe du crime qui consiste à souiller jusqu'à la vertu?» (Vie de l'Hôpital, Mélanges historiques et littéraires, 3 vol. in-8°, 1827, tom. II, pag. 104.)

Malgré cette lâcheté du président de Thou, il faut cependant reconnaitre que, dans le particulier, il usa du moins du droit de remontrance, faible débris, dit M. Villemain (id. ibid., pag. 18), ou plu

pouvaient venir que d'un fidèle serviteur. « Ainsi, tout ce qu'on employait pour décrier l'amiral ne servait qu'à illustrer sa mémoire; elle fut pourtant condamnée par un arrêt solennel, qui eût pu être juste dans un autre temps et pour un autre sujet; mais rien ne parut plus vain, ni plus mal fondé que la conjuration dont on l'accusait alors. On ne laissa pas d'exécuter l'arrêt dans la Grève, en présence du roi et de la reine, et au défaut de son corps que le peuple avait déchiré, on décapita son fantôme, qui fut ensuite traîné sur une claie à Montfaucon. C'est le lieu où l'on expose les corps des voleurs des grands chemins et des scélérats. Le vidame et Montgomery furent cffigiés en même temps, mais le supplice de quelques autres que l'on condamina avec eux fut effectif.

« Pour imprimer davantage la conspiration dans les esprits, on rendit à Dieu des actions de grâces publiques sur la prétendue découverte. Ces grimaces n'imposèrent à personne, et l'action qu'on venait de faire fut d'autant plus détestée par les gens de bien qu'on ne put trouver un prétexte qui eût la moindre apparence. L'horreur en augmentait tous les jours par les nouvelles qu'on recevait des provinces; car encore qu'on eût publié la déclaration que le roi avait faite au parlement et des défenses d'inquiéter les huguenots, comme les ordres expédiés pour les massacres avaient couru par toute la France, ils firent d'étranges effets à Rouen, à Lyon et à Toulouse. Les conseillers du parlement de cette dernière ville furent pendus en robe rouge; 25 à 30,000 hommes furent égorgés en divers endroits, et on voyait les rivières traîner avec les corps morts l'horreur et l'infection dans tous les pays qu'elles arrosaient. Le roi désavoua tout, comme fait contre ses ordres; il y eut des provinces exemptes de carnage, et ce furent principalement celles dont les gouverneurs

tôt imparfait supplement des antiques libertés du royaume! » On aura, sans doute, remarqué toutes les circonstances de cette séance parlementaire ; circonstances qui nous font connaitre les véritables auteurs du crime de la Saint-Barthélemy. Un roi, et un roi tel que Charles IX, est obligé d'aller devant le parlement (il est vrai, encore faible représentation du pays) pour rendre compte des motifs de sa conduite dans cette horrible tuerie. Il y débite une leçon convenue, arrêtée d'avance dans son conseil; il veut persuader que ce ne fut point par haine contre la religion protestante qu'il agit de la sorte, mais par raison d'Etat, pour prévenir un complot contre sa personne et contre la famille royale. Et, malgré ses spécieux prétextes, il reçoit une forte remontrance, basée sur les plus simples notions de la droiture et de la justice! Ainsi, Charles IX se justifiant au parlement, le parlement faisant sentir au roi qu'il eût dû, dans tous les cas, procéder légalement et non par le lache assassinat, tout cela nous apprend que le roi n'était pas tout à fait irresponsable, et que ce fut bien ici un crime émané de la cour, un crime accompli par ses or dres. Mais la fin du récit de Bossuet achève de nous convaincre que la cour, aidée des siens, est seule responsable de ce! assassinat organisé.

étaient amis de la maison de Montmorency. « Un allié de cette maison sauva la Provence; Garde et Saint-Hérem, attachés à cette maison, empêchèrent le désordre. Alençon et Bayonne furent délivrés par les soins de Matignan et du vicomte d'Orthez, leurs gouverneurs. Les bons ordres que donna Chabot en Bourgogne furent cause qu'il n'y périt qu'un seul homme; tous ces gouverneurs répondirent qu'ils ne croyaient point que le roi commandât tant de meurtres, et qu'ils attendraient de nouveaux ordres.

« Les nouvelles du massacre, portées dans les pays étrangers, causèrent de l'horreur presque partout; la haine de l'hérésie ·les fil recevoir agréablement à Rome (2146); on se réjouit aussi en Espagne, parce qu'elles y firent cesser l'appréhension qu'on y avait de la guerre de France. Aussitôt qu'elles furent venues dans les Pays-Bas, le prince d'Orange perdit courage et n'osa plus entreprendre de faire lever au duc d'Albe le siége de Mons ainsi cette place fut bientôt rendue, et le duc d'Albe reprit toutes les places que le prince d'Orange avait.

«En France les huguenots ne savaient à quoi se résoudre; ils ne songèrent d'abord qu'à prendre la fuite étonnés de la perte de leurs chefs et d'un si grand nombre de leurs compagnons, la plupart quittaient leurs maisons, et même un grand nombre alla à la messe, et si le roi eût eu une armée prête, ils ne se seraient jamais relevés; mais il les crut abattus, et d'ailleurs il répugnait à lever des troupes, de peur d'augmenter la gloire de son frère, qui les devait commander comme lieutenant général; ainsi il laissa reprendre cœur aux huguenots. Nimes Montauban et les autres villes où ils étaient les plus forts, principalement La Rochelle, se mirent en état de défense, et reçurent tous ceux de leur religion, qui, ne voyant plus de salut que dans la guerre, résolurent à la faire plus déterminément que jamais (2147).... »

IX. Tel est le récit calme et froid que fait Bossuet de cette sanglante et lugubre journée. On voit déjà combien le clergé y fut étranger (2148), et l'on ne peut douter, d'après cette relation, que ce fut surtout ici une affaire politique, excitée, envenimée sans doute par le fanatisme religieux, mais dont le catholicisme, la religion vraie, son! complétement innocents. Oui, cette horrible action ne peut retomber que sur la politique,

(2146) Il est à regretter que Bossuet ne se soit pas expliqué plus nettement ici. Sa phrase ferait entendre que toutes les nouvelles furent bien con-nues à Rome; or il est bien certain qu'on n'en connaissait qu'une partie, et que c'est parce qu'on y avait donné le change sur ce qui s'était passé à Paris, qu'on fit des réjouissances publiques dans la Ville éternelle. Nous examinons ce point important au n° XIII de cet article.

(2147) Bossuet, Histoire de France, Charles IX, OEuvres complètes, édit. ubi supra, tom. V, pag.

5.7-374.

(2148) Un poëte moderne, Chenier, à la suite de

ou sur le fanatisme, c'est-à-dire sur des gens comprenant mal la religion et se couvrant indignement de son manteau pour commettre des crimes toujours désavoués, condamnés par elle!

Un protestant de nos jours, Cobbett, a bien pu justifier, selon le système protestant, la Saint-Barthélemy, comme une représaille trop méritée par les calvinistes, comme une vengeance dont ils ne peuvent se plaindre. Ce n'est pas nous, catholiques, qui devons adopter et approuver une pareille apologie. Mais ce témoignage, tout antichrétien qu'il soit, n'est pas sans valeur, puisqu'il sert du moins à disculper l'Eglise, et nous l'opposerons à ceux de nos frères égarés qui s'obstinent à la faire responsable de ce crime, au lieu de reconnaître les torts de leurs coreligionnaires, comme nous catholiques, nous devons désavouer la conduite des nôtres dans ces conjonctures. Voici donc ce que dit le protestant Cobbett (2149):

« A l'occasion d'un mariage entre la sœur du roi et le jeune roi de Navarre (depuis le fameux Henri IV), Coligny qui, depuis la mort de Condé, était devennu le chef de la secte (des calvinistes) se rendit à Paris sur l'invitation du roi, avec une compagnie de ses partisans, pour assister à la cérémonie. Il y avait deux ou trois jours qu'il était arrivé, lorsque quelqu'un lui tira dans la rue un coup de mousqueton qui le blessa en deux ou trois endroits, mais non dangereusement; ses partisans en accusèrent le jeune duc de Guise, mais on n'a jamais donné une preuve qui pût soutenir cette assertion. lis se rassemblèrent autour de leur chef, et menacèrent de le venger, comme cela était très-naturel. La cour s'appuya sur cette raison pour sa justification, et elle résolut de prévenir le coup. En effet, le dimanche 24 août 1572, le jour de la fête de saint Barthélemy, ce dessein fut mis à exécution.

« On eut beaucoup de difficultés à obtenir le consentement du jeune prince, mais à la fin il fut gagné par les représentations et les prières de sa mère, du duc d'Anjou, son frère, et du duc de Guise. Les ordres terribles sont envoyés, le signal est donné au mo ment convenu; le duc de Guise accourt vers la maison de Coligny, suivi d'une troupe des siens; il enfonce les portes et fait jeter par la fenêtre le corps mort de son ennemi dans la rue. Le peuple de Paris, qui haissait à mort les protestants, qui ne pouvait pas avoir oublié que Coligny avait

Voltaire dans sa Henriade, nous représente le cardinal de Lorraine bénissant les poignards destinés au massacre de la Saint-Barthélemy. Or, il est certain que dans ce temps-là même, ce cardinal se trouvait à Rome, où il était allé en conclave. L'histoire ne parle que d'un seul ecclésiastique mêlé au massaere il se nommait Jean Rouillard, chanoine de Notre-Dame, et fut tué dans son lit comme huguenot. (Saint-Victor, Tableau de Paris, tom. III, pag. 190, note.) Voilà toute la part qu'y eurent le clergé el la religion. Voy, encore le n° Xil de cet article. (2149) William Cobbett, Histoire de la Réforme, liv. x, pag. 182-185; Paris, 1824,

livré Dieppe et le Havre aux Anglais,,que, tandis que ce peuple, de tout temps ennemi de la France, était ramené par Coligny et ses protestants, ce même traître avait, avec sa secte, assassiné lâchement le feu duc de Guise, ce vaillant seigneur qui avait chassé les Anglais de leur dernière retraile, et qui, au moment où il perdit la vie, pensait à les chasser aussi du Havre où ils avaient été introduits par Coligny et les siens; le peuple de Paris, dis-je ne pouvait s'empêcher de se rappeler toutes ces choses, et de tels souvenirs lui inspiraient une haine implacable contre Coligny et sa secte. D'ailleurs on eût trouvé avec peine un seul habitant de Paris dont les parents n'eussent péri ou n'eussent souffert d'une manière quelconque dans les pillages et dans les massacres de ces infâmes calvinistes dont un de leurs dogmes leur enseignait que les bonnes ceu vres étaient inutiles, et que leurs mauvaises actions, quelque infames et quelque sanglantes qu'elles fussent, ne les empêcheraient point d'être sauvés.

« Ces protestants, car on les appelait ainsi, ne ressemblaient pas plus aux protestants de nos jours, qu'une guêpe ne ressemble à une abeille. Ce nom était alors et bien justement synonyme de bandits, c'est-à-dire voleur el meurtrier, et ceux qui le portaient étaient pour la France un fléau plus terrible que la guerre avec l'étranger, la peste et la famine réunies; parce qu'ils furent toujours prêts à devenir l'instrument actif du premier rebelle ambitieux.

<< Si nous examinons ces choses avec altention, et si nous nous rappelons que le peuple, toujours disposé à passer dans ses soupçons les bornes de la raison, entendit répéter de tous côtés le cri de trahison, devons-nous être surpris de le voir tomber sur les partisans de Coligny et n'épargner aucun de ceux de cette secte qui s'offrirent à ses coups? Si nous considérons ce meurtre sous ce rapport, et surtout si nous remarquons que c'est le fils du duc de Guise, asSassiné par Coligny, qui entraîna les autres, n'est-ce pas mentir à la vérité, et d'une manière monstrueuse, que d'attribuer ce massacre aux principes de la religion catholique? Nous pourrions avec autant de justice attribuer l'acte de Bellinghand (qui envoya chercher son livre de prière quand il fut arrivé à Newgate) aux principes de l'Eglise d'Angleterre. C'est ce que personne n'a jamais eu la bassesse ni l'impudence de faire; mais pourquoi donc y a-t-il des hommes qui porient la bassesse et l'impudence jusqu'à attribuer ce massacre aux principes de la religion catholique? »

X. Voilà comment s'exprime en termes violents et injurieux le protestant William

(2150) M. Edonard Dumond, Compte rendu des Archives curieuses de l'Histoire de France, depuis Louis XI jusqu'à Louis XVIII, ou Collection de pieces historiques, etc., publiées d'après les textes conservés à la Bibliothèque royale, 1856, etc. (Université catholique, tom. III, pag. 556, col. 2.)

(2151) Nous n'avons pas à nous préoccuper de

Colbett, sur le massacre de la Saint-Barthélemy; c'est-à-dire, selon lui, que les calvinistes, mauvais sujets, ont bien mérité ces actes de représailles, et que bien que des catholiques aient exercé ces actes, ils ne sauraient être attribués aux principes de la religion catholique.

Nous acceptons ce dernier aveu, mais nous repoussons de toutes les forces de notre me la première partie de cette argumen.ation.

Certes, dirons-nous avec un auteur catholique qui nous paraît avoir bien apprécié ce lamentable drame, « certes, si les représailles, si la loi du talion étaient permises aux catholiques, si l'on n'avait pas appris au contraire de l'Eglise seule que de telles vengeances sont des crimes, qui jamais aurait eu de plus légitimes et de plus terribles représailles à exercer que les catholiques sous Charles IX? Outre que le calvinisme était une conspiration permanente, on oublie, ou l'on affecte un peu trop d'ignorer la tentative d'Amboise (Voy. l'article AMBOISE [Conjuration d'] au tome I), le complot général de Monceaux ou de Meaux, 1567, le soulèvement subit de 1569, et les affreuses boucheries qui s'ensuivirent, les deux Michelades, c'est-à-dire les deux massacres nocturnes exécutés par les calvinistes à Nîmes, où l'on montre encore aujourd'hui avec complaisance le puits de l'évêché qui fut comblé la première fois de deux cents catholiques. mutilés avec rage; on oublie en même temps les massacres de la Roche-Abeille, de Navarreins, le Gave ensanglanté par la tuerie d'Orthez, une foule de gentilshommes poignardés à Pau, le 24 août 1569, contre la foi des traités, sans compter tous les pillages, les meurtres et les cruautés de détail. Quoi d'étonnant qu'une population irritée par tant de provocations sanglantes, ait perdu patience et soit devenue cruelle à son tour? Quand on lit la délivrance des. Mèdes par le massacre général des Scythes, leurs envahisseurs, celui de cent mille Romains par l'ordre de Mithridate, les Vêpres siciliennes où périrent tant de Français, cela est horrible, et pourtant un sentiment naturel d'indignation contre l'agression et la tyrannie, se mêle malgré nous au premiermouvement d'une trop juste pitié (2150). »

Mais, quoi qu'il en soit, il est certain que les représailles ne sont jamais permises. Nul ne doit se faire justice à soi-même, ce sont là les plus simples notions de la morale éternelle. Aussi, dans cette triste affaire de la. Saint-Barthélemy, serous-nous plus justes. et plus vrais que William Cobbeti, en déclarant que c'est surtout pour nous, catholiques, un devoir de blâiner, de détester ce grand forfait, prémédité ou non (2151), mais cette question. D'ailleurs les historiens sont, à cet égard, fort partagés : les uns disent qu'il y eut préméditation, les autres sont d'un sentiment contraire. Parmi ces derniers, il faut compter Mézerai qui l'appelle un crime italien. Mérimée dans la Chronique du temps de Charles 1X (Paris, 1829), nie qu'il y ait eu trame. Sismondi fui-même, très-con

par celle raison que nous seuls aussi en avons le droit. Car, ajoute avec raison l'écrivain que nous venons de citer, « comme il s'agit ici de conclure, en nous exécutant nous-mêmes, nous ne trabirons pas pour cela notre cause et nous ne prétendons pas laisser l'avantage à nos ennemis. Nous devions leur pardonner, nous ne l'avons pas fait; nous devions en même temps nous défendre, mais plus loyalement qu'ils ne nous attaquaient, nous ne l'avons pas fait alors; nous avons été coupables de les avoir imités, mais voilà tout! Notre cause n'en a pas été et n'en sera pas éternellement moins juste. C'était celle de la vérité, de la propriété; c'était, quoi qu'on veuille dire, celle de la civilisation, que les guerres religieuses en France et en Allemagne ont retardée d'un siècle et détournée du droit chemin (2152)...»

On voit donc en quoi nous différons de l'historien protestant; ne pouvant admettre sa théorie des représailles, ce qu'il dit pour justifier les principes catholiques a pour nous toute la force d'un aveu, d'un témoignage qui a d'autant plus de valeur qu'il emane d'une plume non catholique. William Colbett ajoute :

«Le massacre surpassa de beaucoup à Paris les désirs de la cour, et l'on dépêcha aussitôt des ordres dans les grandes villes de province pour prévenir des scènes sembla

traire aux catholiques, le nie aussi. M. César Cantu (Hist. univ., tom. XV, p. 222) penche pour la négative. M. Rohrbacher (tom. XXIV, pag. 655) dit : Le plus probable nous parait oui et non; oui, quant à une pensée vague et intermittente; non, quant à un plan suivi et combiné. › Si nous avions à émettre une opinion sur ceci, nous dirions, qu'après avoir tout lu, il nous est impossible de ne pas croire à une préméditation. Mais, encore une fois, tout cela importe peu à notre objet (voy. n° XI). (2152) M. Edouard Dumont, id. ibid. loc. cit. (2153) William Cobbett, loc. cit. C'est le dernier chiffre auquel arrive le Martyrologe des huguenots, imprimé en 1582. Le but de ce Martyrologe etait de recueillir les noms et de conserver la ménoire de tous ceux qui avaient péri pour la cause du pur évangile de Calvin; sans aucun doute, l'auNombre des calvinistes qui ont péri à la Saint-Barthélemy, A Paris, en bloc, 10,000. A Meaux,

225

bles. Ce massacre cependant fut répété dans plusieurs endroits; mais quoique quelques écrivains protestants aient fait monter le nombre des personnes tuées dans cette occasion à cent mille, un compte publié en 1582, et établi d'après les comptes recueillis par les ministres dans les différentes villes, ne fait monter ce nombre, pour toute la France, qu'à sept cent quatre-vingt-six personnes. Le docteur Lingard dit à ce sujet avec sa sincérité ordinaire : « Si nous dou blons ce nombre nous ne nous éloignerons pas beaucoup de la vérité. Les écrivains protestants firent d'abord monter ce nombre à cent mille, plus tard, il tomba à soixante-dix mille, ensuite à trente mille, puis à vingt mille, à quinze mille, et enfin à dix mille; mais toujours en nombres ronds. L'un d'eux, dans un moment d'indiscrétion, voulut avoir des ministres eux-mêmes les noms des personnes qui y avaient péri; et ce fut alors que leur nombre ne se trouva pas dépasser sept cent quatre-vingt-six (2153). » Certes, c'est toujours de trop!

XI. La plupart des auteurs qui ont écrit sur la Saint-Barthélemy s'attachent à mon trer que cet assassinat royal ne fut point prémédité, et que Charles IX n'ordonna pas des massacres semblables dans les provinces (2154); toutes ces questions nous paraissent inutiles dans ce travail (2155): ce

teur a dû y mettre tous ses soins; il a dû recevoir de toutes parts des documents, et le zèle des uns et la vanité des autres, tous les intérêts communs et particuliers ont dû se réunir pour lui fournir les matériaux les plus nombreux et les plus exacts. Il avait lui-même le plus grand intérêt à ne rien omeltre, et on peut lui supposer quelque propension à exagérer plutôt qu'à rester au-dessous du vrai. On remarque donc que, parlant en général du nombre des victimes par toute France, il le porte à trente mille; entrant ensuite dans un plus grand détail, il en trouve quinze mille cent soixante-huit; entin, quand il les désigne par leurs noms, il en nomme sept cent quatre-ving.-six. Voici le tableau tout entier, tel que le donne Saint-Victor (dans son Tableau historique de Paris, tom. III, pag. 201 et 202):

extrait du Martyrologe des huguenots, imprimé en 1582. En détail, 468. Nommément, 152

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Que ce dernier chiffre soit au-dessous de la réalité, dit l'Encyclopédie du XIXe siècle (tom. IV, pag. 692), c'est chose indubitable; mais aussi le premier ne peut pas être tenu pour exact. La vérité est entre les deux. En somme, dit cet ouvrage, il n'est pas facile de déterminer le nombre des victimes; aucun historien n'est d'accord.

(2154). Entre autres, M. Andeley, compte rendu de l'Histoire de la Saint-Barthélemy, par M. Audin, 4 vol. in-8° 1844, apud Université catholique, tom

D'après les noms,

30

37

156

23

10

144

8

7

212

00

7

786.

XII, pag. 196 et suiv.; M. Alfred de Falioux, la Saint-Barthélemy et le XVIIIe siècle, dans le Correspondant, année 1843, 11′ livraison; - M. l'abbe Drioux, dans sa brochure intitulée : Nouvelles calomnies du protestantisme réfutées par les écrivains protestants, etc., in-8°, 1845, etc., etc.

(2155) D'ailleurs, nous laissons sur ces points divers les lecteurs tirer les conséquences qu'ils voudront du récit de Bossuet rapporté par nous.

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