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ment elles se sont opérées ? Ont-ils observe par quel enchaînement funeste de circonstances les esprits les plus sages sont jetés hors de toutes les limites de la modération, et par quelle impulsion terrible un peuple énivré se précipite vers des excès dont la première idée l'eût fait frémir? Ont-ils lu dans le cœur de notre bon roi ? Connoissent - ils avec quelle horreur il regarderoit ceux qui auroient allumé les flammes d'une sédition, d'une révolte peut-être, je le dis en frémissant, mais je dois le dire), ceux qui l'exposeroient à verser le sang de son peuple, ceux qui seroient la cause première des rigeurs, des violences, des supplices dont une foule de malheureux seroient la victime.

Mais, Messieurs, le tems presse; je me reproche chaque moment que mon discours pourroit ravir à vos sages délibérations; et j'espère que ces considérations, plutôt indiquées que présentées, mais dont l'évidence me paroît irrésistible, suffiront pour fonder la motion que j'ai l'honneur de vous proposer.

» Qu'il soit fait au roi une très-humble adresse, pour peindre à Sa Majesté les vives allarmes qu'inspire à l'assemblée nationale de son royaume, l'abus qu'on s'est permis depuis

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quelque tems du nom d'un bon roi pour faire approcher de la capitale et de cette ville de Versailles, un train d'artillerie et des corps nombreux de troupes, tant étrangères que na tionales, dont plusieurs se sont déjà cantonnées dans les villages voisins, et pour la for mation annoncée de divers camps aux environs de ces deux villes ».

» Qu'il soit représenté au roi, non seulement combien ces mesures sont opposées aux intentions bienfaisantes de Sa Majesté pour le soulagement de ses peuples dans cette malheu reuse circonstance de cherté et de disette des grains, mais encore combien elles sont contraires à la liberté et à l'honneur de l'assemblée nationale, propres à altérer entre le roi et ses peuplés cette confiance qui fait la gloire et la sûreté du monarque, qui seule peut assurer le repos et la tranquillité du royaume, procurer enfin à la nation les fruits inestimables qu'elle attend des travaux et du zèle de cette assemblée ».

» Que Sa Majesté soit suppliée très-respectueusement de rassurer ses fidèles sujets, en donnant les ordres nécessaires pour la cessation immédiate de ces mesures également inutiles dangereuses et allarmantes, et pour le

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renvoi des troupes et du train d'artillerie aux lieux d'où on les a tirés ».

» Et attendu qu'il peut être convenable, en suite des inquiétudes et de l'effroi que ces mesures ont jeté dans le cœur des peuples, de pourvoir provisionnellement au maintien du calme et de la tranquillité; Sa Majesté sera suppliée d'ordonner que dans les deux villes de Paris et de Versailles, il soit incessamment levé des gardes bourgeoises, qui, sous les ordres du roi, suffiront pleinement à remplir ce but, sans augmenter autour de deux villes travaillées des calamités de la disette, le nombres des consommateurs ».

Les signes les moins équivoques d'approbation se manifestèrent par les vifs applaudis semens de toute l'assemblée.

» La motion fut vivement appuyée par MM. de la Fayette, l'abbé Sieyes, Chapelier, etc. Ce dernier orateur rappella qu'une semblable réclamation avoit été faite avec succès aux états de Bretagne, et qu'elle étoit partie de la noblesse.

M. MIRABEAU.

» Je n'ai jamais douté que la noblesse ne se jetât entre nous et les bayonnettes ? ce n'est

pas elle que je redoute; je les connois, les conseillers perfides de ces attentats à la liberté publique; et je jure l'honneur et la patrie de les dénoncer un jour ».

M. de Biazzat appuyant la motion, demanda enamendement, qu'on en supprimât ce qui étoit relatif à la création des gardes nationales.

La motion et l'amendement furent adoptés à une très-grande majorité (1).

M. de Mirabeau fut unanimement invité à se charger de la rédaction de l'adresse.

Séance du 9.

M. Mirabeau présenta le projet d'adresse à présenter au roi.

Le voici, tel qu'il fut lu, admiré, applaudi, adopté.

(1) On convint qu'il ne seroit pas dit un mot dans l'adresse des gardes bourgeoises. Mais il faut observer que, ce qu'en avoit dit l'orateur dans son discours, ne produisit pas moins son effet. Le lendemain Paris et Versailles étoient armés. Peu de jours après tout le royaume le fût.

A DRESSE

SIRE,

A U ROI

«Vous avez invité l'assemblée nationale a vous témoigner sa confiance; c'étoit aller audevant du plus cher de ses vœux. »

en

» Nous venons déposer dans le sein de votre Majesté les plus vives allarmes; si nous en étions l'objet, si nous avions la foiblesse de craindre pour nous-mêmes, votre bonté daigneroit encore nous rassurer, et même nous blâmant d'avoir douté de vos intentions, vous accueilleriez nos inquiétudes; vous en dissiperiez la cause; vous ne laisseriez point d'incertitude sur la position de l'assemblée nationale. »

<< Mais, Sire, nous n'implorons point votre protection, ce seroit offenser votre justice; nous avons conçu des craintes, et, nous l'osons dire, elles tiennent au patriotisme le plus pur, à l'intérêt de nos commettans, à la tranquillité publique, au bonheur du monarque chéri, qui, en nous applanissant la route de la félicité, mérite bien d'y marcher lui-même sans obs tacle. »

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