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Cette motion fut applaudie et ajournée. La proclamation de M. de Lally, amendée, et mille fois sous amendée, fut enfin adoptée. Plaçons ici quelques réflexions de M. Mirabeau sur les évènemens des jours précédens; il les regarde, lui-même, comme la morale publique, à tirer des castatrophes qui avoient affligé Paris.

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(1) Que l'on compare le nombre des innocens sacrifiés par les méprises et les sanguinaires maximes des tribunaux, les vengeances ministérielles exercées sourdement dans le donjon de Vincennes, dans les cachots de la bastille, qu'on les compare avec les soudaines et impétueuses vengeances de la multitude, et qu'après on décide de quel côté se trouve la barbarie! Au moment où cet enfer créé par la tyrannie pour le tourment de ses victimes, s'est ouvert aux yeux de la capitale; au moment où tous les citoyens ont été admis à descendre dans ces lugubres souterreins, à pé ser les fers de leurs amis, de leurs défenseurs ; au moment où les feuilles de ces archives

(1) Extrait de la dix-neuvième lettre de M. Mira beau à ses commettans, page 5 et suiv.

d'iniquité sont tombées dans toutes les mains certes, il faut que le peuple soit essentiellement bon, pour que cette révélation des attrocités des ministres ne l'ait pas rendu aussi cruel qu'eux-mêmes, et n'ait pas fait verser plus de sang... La colère du peuple... Ah! si la colère du peuple est terrible, c'est le sangfroid du despotisme, qui est atroce; ses cruautés systématiques font plus de malheureux en un jour, que les insurrections populaires n'im molent de victimes pendant des années ».

Voyez combien de causes avoient préparé les matériaux de cette explosion! Tous les dénis de justice, toutes les insultes tous les scandales des ministres chéris, exilés; lerebut du mépris public inauguré à la tête de ceux qui le remplacent; le sanctuaire des loix profané; l'assemblée nationale compromise et menacée; des troupes étrangères, de l'artillerie; la capitale au moment d'être assiégée ou envahie; les apprêts d'une guerre civile ; que dis-je ? d'une horrible boucherie où tous les amis du peuple, connus ou soupçonnés, devoient tomber, surpris, désarmés, sous le glaive des soldats, et, pour tout dire en un mot deux cents ans d'oppression publique et particulière, politique et fiscale, féodale et judiciaire, couronnés par

la plus horrible conjuration, dont les fastes du monde garderont à jamais la mémoire. ... Voilà ce qui a provoqué le peuple.... il a puni un petit nombre de ceux que le cri public lui désignoit comme l'auteur de ses ma ux mais qu'on nous dise s'il n'eût pas coulé plus de sang dans le triomphe de nos ennemis, ou avant que la victoire fût décidée. On craint souvent le peuple en raison du mal qu'on lui a fait; on est forcé de l'enchaîner, parce qu'on l'opprime, et ses persécuteurs le calomnient pour calmer leurs remords ; ceux qui s'étoient arrangés pour ne redouter aucun tribunal > tremblent devant le sien il existe trop de coupables, pour qu'il ne reste pas beaucoup de terreurs ».

» Si les scènes qui ont eu lieu à Paris s'étoient passées à Constantinople, les hommes les plus timorés diroient : le peuple s'est fait justice. La mesure étoit au comble, la punition d'un visir deviendra la leçon des autres. Cet évènement, loin de nous paroître extraordinaire, exciteroit à peine notre attention».

» Nous ferions un volume si nous voulions démontrer par des exemples, què dans ces momens de rigueur, les gouvernemens ne font que moissonner les fruits de leurs propres

iniquités. On méprise le peuple et l'on veut qu'il soit toujours doux, toujours impassible! non; c'est une instruction qu'il faut tirer de ces tristes évènemens; l'injustice des autres, classes envers le peuple lui fait trouver la justice dans sa barbarie même ».

» Nous ne craindrions pas de blesser utilement la délicatesse de la sensibilité en exposant les circonstances douloureuses, les tourmens dont la mort de ces tristes victimes a été accompagnée. Mais ces cruautés sont loin 'd'atteindre aux solemnelles férocités que des corps de justice exercent sur des malheureux que les vices des gouvernemens conduisent au crime. Félicitons-nous que le peuple n'ait pás appris tous ces raffinemens de la barbarie, et qu'il ait laissé à des compagnies savantes l'honneur de ces abominables inventions ».

» Après ces réflexions que nous avons cru nécessaires dans un moment où l'humanité même égare la réflexion, nous nous hâtons de dire que toute l'assemblée nationale a bien senti que la continuation de cette formidable dictature exposoit la liberté publique autant que les complots de ses ennemis. La société seroit bientôt dissoute si la multitude, s'acoutumant au sang et au désordre, se mettoit au

dessus des magistrats et bravoit l'autorité des loix: au lieu de courir à la liberté, le peuple se jetteroit bientôt dans l'abyme de la servitude; car trop souvent le danger rallie à la domination absolue, et dans le sein de l'anar-' chie un despote même paroît un sauveur ».

» Telle est la révolution singulière, tels sont les faits consignés pour nos annales, dont' ma narration tardive, mais sûre, embrasse l'ensemble et manifeste les principaux ressorts. Tant de changemens extraordinaires, la capitale passant du despotisme à la liberté, de la plus affreuse terreur à l'état le plus tranquille, la milice bourgeoise retablie, la bastille prise d'assaut, une conspiration avortée, des conseillers pervers, dissipés, une puissante faction obligée de fuir, les ministres exilés clandestinement, rappellés avec éclat, leurs succes seurs prévenant leur ignominie par une prompte démission, le roi qu'ils avoient trompé nous rendant sa confiance et nous redemandant la nôtre, venant se montrer à son peuple pour recueillir la voix publique et nous assurer qu'il est à nous tous ces évènemens prodigieux en eux-mêmes, et presque incroyables par leur rapidité, ne demeureront pas stériles et leurs effets sont incalculables. Qu'on ne

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