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SECONDE PARTIE

DE LA NATURALISATION CHEZ LES ROMAINS, OU DES MOYENS PAR LESQUELS LES NON CIVES DEVENAIENT CITOYENS.

Nous avons parcouru dans la première partie, les diverses classes de personnes, qui ne jouissaient pas de la civitas; il y avait parmi ces non cives une différence notable dans leur condition. Les Latins étaient sans aucun doute les non cives les plus privilégiés; puis venaient les pérégrins en général, et enfin les esclaves. Cette distinction a sa base dans le droit primitif des Romains, et malgré les modifications qu'il a subies à travers les siècles, les traits caractéristiques apparaissent dans toutes les parties du droit. Les conséquences de cette distinction s'accentuent surtout au point de vue de l'acquisition de la civitas; ainsi les Latins jouissaient de certaines facilités pour y parvenir, qui n'étaient pas accordées aux autres; les pérégrins pouvaient obtenir la civitas par des concessions, collectives d'abord, personnelles ensuite; enfin pour les esclaves, il y avait un seul moyen pour arriver à la cité romaine : c'était l'affranchissement. Aussi, nous sommes conduit natu

rellement à faire dans cette seconde section, trois divisions: 1° moyens par lesquels les pérégrins parvenaient à la cité romaine; 2° facilités spéciales dont jouissaient les Latins; 3° affranchissements. Nous compléterons cette exposition rapide, en disant quelques mots sur le postliminium.

CHAPITRE 1er

DES MOYENS PAR LESQUELS LES PEREGRINI DEVENAIENT CIVES.

Dans les premiers temps, on ne connaissait pas à Rome la naturalisation, telle que nous l'entendons aujourd'hui, c'est-à-dire la concession des droits de citoyen à un individu. La loi des Douze Tables prohibait le privilége des lois personnelles : Ne privilegia irroganto. Les concessions de la cité étaient collectives; on accordait la civitas à des villes entières, ou à des peuples, comme les Albains, les Falisques, les Capénates et autres. La concession avait lieu en vertu d'une loiqui était votée dans les comices. Jusqu'à Servius Tullius, le droit de naturalisation, adlectio, se confondant avec la qualité de patricien, - car les patriciens seuls avaient le plenum ius Quiritium, les plébéiens n'avaient pas le jus honorum, émanant des comices curiates; sous la République la naturalisation était votée par les comices centuriates et ensuite par les comices tributes (1). Cette prérogative passa au sénat et aux généraux, en vertu

(1) Troisfontaines, Antiquités romaines, I, p. 175.

du pouvoir, que le peuple lui avait confié: ".... Liceat, si populus romanus permiserit, ut ab senatu, ab imperatoribus nostris civitate donentur (1), >> dit Cicéron. C'était là un moyen efficace, dont les Romains usaient largement, toutes les fois qu'ils avaient besoin de l'appui ou de l'alliance d'une ville. De sorte que certains peuples prudents, craignant cette politique dangereuse des Romains, avaient défendu expressément, dans leurs traités d'alliance, d'accorder la civitas à leurs sujets. Cicéron nous cite les Insubriens, les Helvétiens, les Japides, les Germains et quelques peuples barbares de la Gaule, dans les traités desquels il était stipulé qu'aucun de leurs sujets ne pourrait être reçu comme citoyen par les Romains (2): Ne quis eorum a nobis civis recipiatur.

C'est Marius, qui, en vertu de la loi Apuleia portée par Saturninus, put accorder la naturalisation à des individus isolés ; cette loi ordonnait au général d'établir des colonies dans les provinces conquises et l'autorisa à faire dans chacune de ces colonies trois Romains: «.... Qua lege (Apuleia) Saturninus C. Mario tulerat, ut in singulas colonias ternos cives Romanos facere posset (3). » Mais ce ne fut pas sans difficulté que s'établit cette pratique; les concessions de cité accordées par Marius furent contestées; et Antistius, habitant de Spolète, voulait faire déclarer non avenue la naturalisation de son concitoyen Matrinius, qui avait été décoré de la cité romaine.

Cependant, la bonne politique et en quelque sorte l'in

(1) Cicéron, Pro Balbo, § 10. (2) Cicéron, Pro Ba'bo, § 14. (3) Ibid., § 21.

térêt, le salut de la République romaine exigeaient le maintien de cette pratique; Cicéron, en plaidant l'af-faire de Cornélius Balbus, défend avec ardeur ce droit donné aux généraux d'honorer la bravoure dans la guerre, en accordant le titre de citoyen aux étrangers, qui s'étant mis au service de la République et l'avaient défendue avec courage. « Quis enim esset, judices, s'écrie Cicéron, qui imperatoribus nostris, in bello, in acie, in exercitu, delectum virtutis ; qui socis, qui fœderatis, in defendenda republica nostra spem præmiorum eripi vellet (1) ? » Ces étrangers, qui ont défendu Rome, au risque de leur vie, sont dignes, disait le grand orateur, d'obtenir le titre de citoyens de cette ville, pour laquelle ils se sont exposés aux dangers et aux traits de l'ennemi !

Cet exemple donné par Marius fut suivi; Crassus gratifia du titre de citoyens, deux cohortes de Camertins, et une légion d'Héraclée; Sylla accorda la même faveur à plusieurs citoyens de Gadès, et à un certain Marseillais appelé Ariston; Fabius de Sagonte fut fait citoyen par Métellus; Crassus, collègue de Pompée, gratifia du même titre Ovius de Messine, les membres de la famille Fabius de Sagonte, les habitants d'Utique et autres; Pompée usa aussi de cette faveur, en accordant la cité romaine à plusieurs étrangers qui s'étaient distingués dans la guerre contre Sertorius, en défendant la cause romaine, entre autres Cornelius Balbus.

C'est à propos de celui-ci que Cicéron prononça son éloquent plaidoyer sur la naturalisation, qui est pour

(1) Cicéron, Pro Balbo, § 21.

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nous une source très-abondante en renseignements sur cette matière. Une loi Gellia-Cornelia, portée en 682 avec l'autorisation du sénat par L. Gellius et Cn. Cornelius, permettait à Pompée d'accorder avec l'avis de son conseil consilii sententia la cité romaine à ceux qu'il jugeait dignes d'être décorés de ce titre dans la province d'Espagne. En vertu de cette loi, et d'après la recommandation de César et de Cornelius Lentulus, Pompée accorda la cité romaine à Balbus né à Cadix (Gadès). Il paraît que Lucius Cornelius Balbus était un brave général, qui avait mérité ce titre en versant son sang; aussi, Cicéron exalte, avec un talent qui lui est habituel, la valeur militaire de Balbus. Il avait déjà servi en Espagne sous 0. Metellus et sous C. Memmius. Quand Pompée vint en Espagne et fit de Memmius son questeur, Balbus continua à le servir dans la guerre contre Sertorius. En Afrique, il assista aux batailles sanglantes de Turia et de Sucron, et montra un courage digne d'un illustre général : virtus digna summo imperatore, dit Cicéron. C'est pour le récompenser de ces actes de dévouement qu'on le fit citoyen romain. Mais un autre habitant de Gadès, dont le nom est inconnu, lui contesta ce droit, et c'est en cette circonstance que Cicéron, en 689, plaida pour Balbus; son discours est un modèle d'éloquence et plein de théories juridiques.

D'après le témoignage de Cicéron, le courage militaire n'était pas le seul mérite qui attirait aux étrangers la faveur de devenir citoyens romains. On accordait aussi le titre de citoyen aux étrangers, qui se distinguaient par les talents de l'esprit et par l'élo

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