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On tourmentoit auprès du père Brébeuf un autre missionnaire nommé le père Lallemant, et qui ne faisoit que d'entrer dans la carrière évangélique. La douleur lui arrachoit quelquefois des cris involontaires; il demandoit de la force au vieil apôtre, qui, ne pouvant plus parler, lui faisoit de douces inclinations de tête, et sourioit avec ses lèvres mutilées pour encourager le jeune martyr les fumées des deux buchers montoient ensemble vers le ciel, et affligeoient et réjouissoient les anges. On fit un collier de haches ardentes au père Brébeuf; on lui coupa des lambeaux de chair que l'on dévora à ses yeux, en lui disant que la chair des François étoit excellente'; puis, continuant ces railleries : « Tu nous assurois tout à l'heure, crioient les Barbares, que plus on souffre sur la terre, plus on est heureux dans le ciel; c'est par amitié pour toi que nous nous étudions à augmenter tes souffrances'. >>

Lorsqu'on portoit dans Paris des cours de prêtres au bout des piques, on chantoit: Ah! il n'est point de fête quand le cœur n'en est pas.

Enfin, après avoir souffert plusieurs autres tourments que nous n'oserions transcrire, le père Brébeuf rendit l'esprit, et son ame s'envola au séjour de celui qui guérit toutes les plaies de ses serviteurs.

C'étoit en 1649 que ces choses se passoient en Canada, c'est-à-dire au moment de la plus grande prospérité de la France, et pendant les fêtes de

1. Hist. de la Nouv-.France, pag. 293 et 294.

2. Idem, pag. 294.

Louis XIV tout triomphoit alors, le missionnaire et le soldat.

Ceux pour qui un prêtre est un objet de haine et de risée se réjouiront de ces tourments des confesseurs de la foi. Les sages, avec un esprit de prudence et de modération, diront qu'après tout les missionnaires étoient des victimes de leur fanatisme; ils demanderont, avec une pitié superbe, ce que ces moines alloient faire dans les déserts de l'Amérique? A la vérité, nous convenons qu'ils n'alloient pas, sur un plan de savants, tenter de grandes découvertes philosophiques; ils obéissoient seulement à ce Maître qui leur avoit dit : «< Allez et enseignez, Docete omnes gentes; et sur la foi de ce commandement, avec une simplicité extrême, ils quittoient les délices de la patrie pour aller, au prix de leur sang, révéler à un Barbare qu'ils n'avoient jamais vu... - Quoi? Rien, selon le monde, presque rien : L'existence de Dieu et l'immortalité de l'ame: DOCETE OMNES GENTES!

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CHAPITRE IX.

FIN DES MISSIONS.

Ainsi nous avons indiqué les voies que suivoient les différentes missions: voies de simplicité, voies de science, voies de législation, voies d'héroïsme. Il nous semble que c'étoit un juste sujet d'orgueil pour

l'Europe, et surtout pour la France, qui fournissoit le plus grand nombre de missionnaires, de voir tous les ans sortir de son sein des hommes qui alloient faire éclater les miracles des arts, des lois, de l'humanité et du courage, dans les quatre parties de la terre. De là provenoit la haute idée que les étrangers se formoient de notre nation et du Dieu qu'on y adoroit. Les peuples les plus éloignés vouloient entrer en liaison avec nous; l'ambassadeur du Sauvage de l'Occident rencontroit à notre cour l'ambassadeur des nations de l'Aurore. Nous ne nous piquons pas du don de prophétie; mais on se peut tenir assuré, et l'expérience le prouvera, que jamais des savants, dépêchés aux pays lointains, avec les instruments et les plans d'une académie, ne feront ce qu'un pauvre moine, parti à pied de son couvent, exécutoit seul avec son chapelet et son bréviaire.

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Il n'y a pas un beau souvenir, pas une belle institution dans les siècles modernes, que le christianisme ne réclame. Les seuls temps poétiques de notre histoire, les temps chevaleresques, lui appartiennent encore la vraie religion a le singulier mérite d'avoir créé parmi nous l'âge de la féerie et des enchantements.

M. de Sainte-Palaye semble vouloir séparer la chevalerie militaire de la chevalerie religieuse, et tout invite au contraire à les confondre. Il ne croit pas qu'on puisse faire remonter l'institution de la première au-delà du onzième siècle'; or, c'est précisé'ment l'époque des croisades qui donna naissance

1. Mém. sur l'anc. chev., tom. 1, 11o part., pag. 66.

aux hospitaliers, aux templiers et à l'ordre teutonique'. La loi formelle par laquelle la chevalerie militaire s'engageoit à défendre la foi, la ressemblance de ses cérémonies avec celles des sacrements de l'Église, ses jeûnes, ses ablutions, ses confessions, ses prières, ses engagements monastiques, montrent suffisamment que tous les chevaliers avoient la même origine religieuse. Enfin, le vœu de célibat, qui paroît établir une différence essentielle entre des héros chastes et des guerriers qui ne parlent que d'amour, n'est pas une chose qui doive arrêter; car ce vœu n'étoit pas général dans les ordres militaires chrétiens les chevaliers de Saint-Jacques-de-l'Épée, en Espagne, pouvoient se marier, et dans l'ordre de Malte on n'est obligé de renoncer au lien conjugal qu'en passant aux dignités de l'ordre, ou en entrant en jouissance de ses bénéfices.

D'après l'abbé Giustiniani, ou sur le témoignage plus certain, mais moins agréable, du frère Hélyot, on trouve trente ordres religieux militaires: neuf sous la règle de saint Basile, quatorze sous celle de saint Augustin, et sept attachés à l'institut de saint Benoît. Nous ne parlerons que des principaux, à savoir: les hospitaliers ou chevaliers de Malte en Orient, les Teutoniques à l'Occident et au Nord, et les chevaliers de Calatrave (en y comprenant ceux d'Al

1. HÉN., Histoire de France, tom. 1, pag. 167; FLEURY, Hist. ecclés., tom. XIV, pag. 387; tom. xv, pag, 604; HELYOT, Hist. des Ordres relig., tom. III, pag. 74, 143.

2. SAINTE-PALAYE, loc. cit., et la note 11.

3. FLEURY, Hist, ecclés., t. XV, liv, LXXI, p. 406, édit. 1719, in-4°.

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