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pardon des offenses formant tout le christianisme, et étant spécialement recommandés dans le sacerdoce, l'action de ce caractère sacré sur les mœurs doit participer de ces vertus. L'histoire nous offre sans cesse le prêtre priant pour le malheureux, demandant grace pour le coupable ou intercédant pour l'innocent. Le droit d'asile dans les églises, tout abusif qu'il pouvoit être, est néanmoins une grande preuve de la tolérance que l'esprit religieux avoit introduite dans la justice criminelle. Les Dominicains furent animés par cette pitié évangélique lorsqu'ils dénoncèrent avec tant de force les cruautés des Espagnols dans le Nouveau-Monde. Enfin, comme notre code a été formé dans des temps de barbarie, le prêtre étant le seul homme qui eût alors quelques lettres, il ne pouvoit porter dans les lois qu'une influence heureuse et des lumières qui manquoient au reste des citoyens.

On trouve un bel exemple de l'esprit de justice que le christianisme tendoit à introduire dans nos tribunaux. Saint Ambroise observe que si, en matière criminelle, les évêques sont obligés par leur caractère d'implorer la clémence du magistrat, ils ne doivent jamais intervenir dans les causes civiles qui ne sont pas portées à leur propre juridiction : « Car, dit-il, vous ne pouvez solliciter pour une des parties sans nuire à l'autre, et vous rendre peut-être coupable d'une grande injustice'. »> Admirable esprit de la religion!

. AMBROS., de Offic., lib. 11, cap. III.

La modération de saint Chrysostome n'est pas moins remarquable: « Dieu, dit ce grand saint, a permis à un homme de renvoyer sa femme pour cause d'adultère, mais non pas pour cause d'idolátrie'.» Selon le droit romain, les infâmes ne pouvoient être juges. Saint Ambroise et saint Grégoire poussent encore plus loin cette belle loi, car ils ne veulent pas que ceux qui ont commis de grandes fautes demeurent juges, de peur qu'ils ne se condamnent eux-mêmes en condamnant les autres'.

En matière criminelle, le prélat se récusoit, parce que la religion a horreur du sang. Saint Augustin obtint par ses prières la vie des Circumcellions, convaincus d'avoir assassiné des prêtres catholiques. Le concile de Sardique fait même une loi aux évêques d'interposer leur médiation dans les sentences d'exil et de bannissement3. Ainsi, le malheureux devoit à cette charité chrétienne non seulement la vie, mais, ce qui est bien plus précieux encore, la douceur de respirer son air natal.

Ces autres dispositions de notre jurisprudence criminelle sont tirées du droit canonique: « 1° On ne doit point condamner un absent, qui peut avoir des moyens légitimes de défense. 2° L'accusateur et le juge ne peuvent servir de témoins. 3° Les grands criminels ne peuvent être accusateurs'. 4° En quelque dignité qu'une personne soit constituée, sa

1. In cap., Isaï. 3.

2. HERICOURT, Lois ecclés., pag. 760, quest. vIII.

3. Conc. Sard., can. XVII.

Get admirable canon n'étoit pas suivi dans nos lois.

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seule déposition ne peut suffire pour condamner un

accusé'.»

On peut voir dans Héricourt la suite de ces lois qui confirment ce que nous avons avancé, savoir, que nous devons les meilleures dispositions de notre code civil et criminel au droit canonique. Ce droit est en général beaucoup plus doux que nos lois, et nous avons repoussé sur plusieurs points son indulgence chrétienne. Par exemple, le septième concile de Carthage décide que quand il y a plusieurs chefs d'accusation, si l'accusateur ne peut prouver le premier chef, il ne doit point être admis à la preuve des autres; nos coutumes en ont ordonné au

trement.

Cette grande obligation que notre système civil doit aux règlements du christianisme est une chose très grave, très peu observée, et pourtant très digne

de l'être',

le

Enfin les juridictions seigneuriales, sous la féodalité, furent de nécessité moins vexatoires dans la dépendance des abbayes et des prélatures que sous le ressort d'un comte ou d'un baron. Le seigneur ecclésiastique étoit tenu à de certaines vertus que guerrier ne se croyoit pas obligé de pratiquer. Les abbés cessèrent promptement de marcher à l'armée, ,et leur vassaux devinrent de paisibles laboureurs. Saint Benoît d'Aniane, réformateur des Bénédictins en France, recevoit les terres qu'on lui offroit, mais

1. HÉR., loc. cit. et seq.

2. Montesquieu et le docteur Robertson en ont dit quelques mots,

il ne vouloit point accepter les serfs; il leur rendoit sur-le-champ la liberté': cet exemple de magnanimité, au milieu du dixième siècle, est bien frappant; et c'est un moine qui l'a donné!

CHAPITRE XI.

POLITIQUE ET GOUVERNEMENT.

La coutume qui accordoit le premier rang au clergé dans les assemblées des nations modernes tenoit au grand principe religieux que l'antiquité entière regardoit comme le fondement de l'existence politique. « Je ne sais, dit Cicéron, si anéantir la piété envers les dieux, ce ne seroit point aussi anéantir la bonne foi, la société du genre humain, et la plus excellente des vertus, la justice':» Haud scio an, pietate adversus deos sublata, fides etiam, et societas humani generis, et una excellentissima virtus, justitia, tollatur.

Puisqu'on avoit cru jusqu'à nos jours que la religion est la base de la société civile, ne faisons pas un crime à nos pères d'avoir pensé comme Platon, Aristote, Cicéron, Plutarque, et d'avoir mis l'autel et ses ministres au degré le plus éminent de l'ordre social.

1. HÉLYOT.

2. De Nat. Deor., 1, 11.

Mais si personne ne nous conteste sur ce point l'influence de l'Église dans le corps politique, on soutiendra peut-être que cette influence a été funeste au bonheur public et à la liberté. Nous ne ferons qu'une réflexion sur ce vaste et profond sujet : remontons un instant aux principes généraux, d'où il faut toujours partir quand on veut atteindre à quelque vérité.

La nature, au moral et au physique, semble n'employer qu'un seul moyen de création; c'est de mêler, pour produire, la force à la douceur. Son énergie paroît résider dans la loi générale des contrastes. Si elle joint la violence à la violence, ou la foiblesse à la foiblesse, loin de former quelque chose, elle dépar excès ou par défaut. Toutes les législations de l'antiquité offrent ce système d'opposition qui enfante le corps politique.

truit

Cette vérité une fois reconnue, il faut chercher les points d'opposition: il nous semble que les deux principaux résident, l'un dans les mœurs du peuple, l'autre dans les institutions à donner à ce peuple. S'il est d'un caractère timide et foible, que sa constitution soit hardie et robuste; s'il est fier, impétueux, inconstant, que son gouvernement soit doux, modéré, invariable. Ainsi la théocratie ne fut pas bonne aux Egyptiens; elle les asservit sans leur donner les vertus qui leur manquoient : c'étoit une nation pacifique, il lui falloit des institutions militaires.

L'influence sacerdotale, au contraire, produisit à Rome des effets admirables : cette reine du monde dut sa grandeur à Numa, qui sut placer la religion

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