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attiré le respect et la vénération de ces peuples; on se souviendra que le disciple de Luther et de Calvin est venu entendre le prélat romain exilé prêcher, dans quelque retraite obscure, l'amour de l'humanité et le pardon des offenses; on se souviendra enfin que tant de nouveaux Cypriens, persécutés pour leur religion, que tant de courageux Chrysostomes se sont dépouillés du titre qui faisoit leurs combats et leur gloire, sur un simple mot du chef de l'Église heureux de sacrifier avec leur prospérité première l'éclat de douze ans de malheur à la paix de leur troupeau.

Quant au clergé inférieur, c'étoit à lui qu'on étoit redevable de ce reste de bonnes moeurs que l'on trouvoit encore dans les villes et dans les campagnes. Le paysan sans religion est une bête féroce; il n'a aucun frein d'éducation ni de respect humain : une vie pénible a aigri son caractère; la propriété lui a enlevé l'innocence du Sauvage; il est timide, grossier, défiant, avare, ingrat surtout. Mais, par un miracle frappant, cet homme, naturellement pervers, devient excellent dans les mains de la religion. Autant il étoit lâche, autant il est brave; son penchant à trahir se change en une fidélité à toute épreuve, son ingratitude en un dévouement sans bornes, sa défiance en une confiance absolue. Comparez ces paysans impies, profanant les églises, dévastant les propriétés, brûlant à petit feu les femmes, les enfants et les prêtres; comparez-les aux Vendéens défendant le culte de leurs pères, et seuls libres quand la France étoit abattue sous le joug de la terreur; comparez-les, et

voyez la différence que la religion peut mettre entre les hommes.

On a pu reprocher aux curés des préjugés d'état ou d'ignorance; mais, après tout, la simplicité du cœur, la sainteté de la vie, la pauvreté évangélique, la charité de Jésus-Christ, en faisoient un des ordres les plus respectables de la nation. On en a vu plusieurs qui sembloient moins des hommes que des esprits bienfaisants descendus sur la terre pour soulager les misérables. Souvent ils se refusèrent le pain pour nourrir le nécessiteux, et se dépouillèrent de leurs habits pour en couvrir l'indigent. Qui oseroit reprocher à de tels hommes quelque sévérité d'opinion? Qui de nous, superbes philanthropes, voudroit, durant les rigueurs de l'hiver, être réveillé au milieu de la nuit, pour aller administrer, au loin, dans les campagnes, le moribond expirant sur la paille? Qui de nous voudroit avoir sans cesse le cœur brisé du spectacle d'une misère qu'on ne peut secourir, se voir environné d'une famille dont les joues hâves et les yeux creux annoncent l'ardeur de la faim et de tous les besoins? Consentirions-nous à suivre les curés de Paris, ces anges d'humanité, dans le séjour du crime et de la douleur, pour consoler le vice sous les formes les plus dégoûtantes, pour verser l'espérance dans un cœur désespéré? Qui de nous enfin voudroit se séquestrer du monde des heureux pour vivre éternellement parmi les souffrances, et ne recevoir en mourant pour tant de bienfaits que l'ingratitude du pauvre et la calomnie du riche?

CHAPITRE III.

CLERGÉ RÉGULIER.

ORIGINE DE LA VIE MONASTIQUE.

S'il est vrai, comme on pourroit le croire, qu'une chose soit poétiquement belle en raison de l'antiquité de son origine, il faut convenir que la vie monastique a quelques droits à notre admiration. Elle remonte aux premiers âges du monde. Le prophète Élie, fuyant la corruption d'Israël, se retira le long du Jourdain, où il vécut d'herbes et de racines, avec quelques disciples. Sans avoir besoin de fouiller plus avant dans l'histoire, cette source des ordres religieux nous semble assez merveilleuse. Que n'eussent point dit les poëtes de la Grèce, s'ils avoient trouvé pour fondateur des colléges sacrés un homme ravi au ciel dans un char de feu, et qui doit reparoître sur la terre au jour de la consommation des siècles?

De là, la vie monastique, par un héritage admirable, descend, à travers les prophètes et saint JeanBaptiste, jusqu'à Jésus-Christ, qui se dérobait sou vent au monde pour aller prier sur les montagnes.

Bientôt les Thérapeutes', embrassant les perfections de la retraite, offrirent, près du lac Moeris en Égypte, les premiers modèles des monastères chrétiens. Enfin, sous Paul, Antoine et Pacôme, paroissent ces saints de la Thébaïde, qui remplirent le Carmel et le Liban des chefs-d'œuvre de la pénitence. Une voix de gloire et de merveille s'éleva du fond des plus affreuses solitudes. Des musiques divines se mêloient au bruit des cascades et des sources; les séraphins visitoient l'anachorète du rocher, ou enlevoient son ame brillante sur les nues; les lions servoient de messagers au solitaire, et les corbeaux lui apportoient la manne céleste. Les cités jalouses virent tomber . leur réputation antique : ce fut le temps de la renommée du désert.

Marchant ainsi d'enchantement en enchantement dans l'établissement de la vie religieuse, nous trouvons une seconde sorte d'origines que nous appelons locales, c'est-à-dire certaines fondations d'ordres et de couvents: ces origines ne sont ni moins curieuses ni moins agréables que les premières. Aux portes mêmes de Jérusalem on voit un monastère bâti sur l'emplacement de la maison de Pilate; au mont Sinaï, le couvent de la Transfiguration marque le lieu où Jéhovah dicta ses lois aux Hébreux, et plus loin

1. Voltaire se moque d'Eusèbe, qui prend, dit-il, les Thérapeutes pour des moines chrétiens. Eusèbe étoit plus près de ces moines que Voltaire, et certainement plus versé que lui dans les antiquités chrétiennes. Monfaucon, Fleury, Héricourt, Hélyot, et une foule d'autres savants, se sont rangés à l'opinion de l'évêque de Césarée.

s'élève un autre couvent sur la montagne où JésusChrist disparut de la terre.

Et que de choses admirables l'Occident ne nous montre-t-il pas à son tour dans les fondations des communautés, monuments de nos antiquités gauloises, lieux consacrés par d'intéressantes aventures ou par desactes d'humanité! L'histoire, les passions du cœur, la bienfaisance, se disputent l'origine de nos monastères. Dans cette gorge des Pyrénées, voilà l'hôpital de Roncevaux, que Charlemagne bâtit à l'endroit même où la fleur des chevaliers, Roland, termina ses hauts faits un asile de paix et de secours marque dignement le tombeau du preux qui défendit l'orphelin et mourut pour sa patrie. Aux plaines de Bovines, devant ce petit temple du Seigneur, j'apprends à mépriser les arcs de triomphe des Marius et des Césars; je contemple avec orgueil ce couvent qui vit un roi françois proposer la couronne au plus digne. Mais aimez-vous les souvenirs d'un autre sorte? Une femme d'Albion, surprise par un sommeil mystérieux, croit voir en songe la lune se pencher vers elle; bientôt il lui naît une fille chaste et triste comme le flambeau des nuits, et qui, fondant un monastère, devient l'astre charmant de la solitude.

On nous accuserait de chercher à surprendre l'oreille par de doux sons si nous rappelions ces couvents d'Aqua-Bella, de Bel-Monte, de Vallombreuse, ou celui de la Colombe, ainsi nommé à cause de son fondateur, colombe céleste qui vivoit dans les bois. La Trappe et le Paraclet gardoient le nom et le souvenir de Comminges et d'Héloïse. De

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