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et dont les talents comme calculatrice ont été vantés par Lalande et par Clairaut. Celui-ci disons-le en passant s'est montré certain jour bien ingrat envers elle qui avait accepté d'effectuer les laborieux calculs que comportait l'application de sa méthode, à lui Clairaut, pour la prédiction du retour de la comète attendue en 1759. Dans le livre où il utilisait cet immense travail de Mmo Lepaute, Clairaut eut la faiblesse de n'en pas nommer l'auteur « par complaisance, nous dit Lalande, pour une femme jalouse du mérite de Mme Lepaute, et qui avait des prétentions sans aucune espèce de connaissance. Elle parvint à faire commettre cette injustice à un savant judicieux, mais faible, qu'elle avait subjugué. »

A côté de Mme Lepaute, il serait injuste de ne pas nommer quelques autres femmes qui se sont hautement distinguées dans le calcul des tables astronomiques et notamment la nièce par alliance de Lalande lui-même, Mme Lefrançais de Lalande, puis Mme du Pierry, au XVIIIe siècle, Janet Taylor, au XIX, enfin Mme Yvon Villarceau, la femme du célèbre astronome. En tête d'un de ses plus beaux mémoires, celui-ci déclare lui devoir non seulement plusieurs applications numėriques de ses formules, mais encore la vérification de leur exactitude analytique.

Cette collaboration active et dévouée des femmes au progrès de la science peut, au reste, prendre des formes variées, et même non pas seulement scientifiques au sens strict du mot. C'est ainsi, notamment, pour me borner à un illustre exemple, que Mme Lavoisier est venue en aide à son génial époux en traduisant pour lui les mémoires rédigés en anglais qu'il voulait consulter, en tenant les registres de son laboratoire, en gravant les planches de son Traité de chimie.

Par contre, on a pu, en ces dernières années, admirer l'étroite collaboration de tel éminent physicien

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et de sa femme, dont, sur le terrain de la science, les mérites se sont confondus au point que l'estime des savants ne fait pas entre eux de partage... Mais je ne dois pas oublier que, parmi les femmes de science, je me suis imposé la règle de ne nommer que celles qui ne sont plus.

Me voici amené à vous parler maintenant des femmes dont l'effort scientifique s'est affirmé sous une forme strictement personnelle.

En tête de cette théorie de savantes apparaît, dans les brumes de la légende, la figure d'Hypathie, fille du mathématicien Théon, qui vivait à Alexandrie au Ive siècle de notre ère. Après être allée suivre à Athènes l'enseignement de Plutarque le jeune et de sa fille Asclépigénie, elle revint dans sa patrie pour y professer publiquement, elle-même, les mathématiques et la philosophie.

A-t-elle réellement fait quelque découverte scientifique? A la vérité, nous n'en savons rien. Ses œuvres écrites ne sont pas parvenues jusqu'à nous. On lui attribue l'invention de quelques instruments de physique; mais cette attribution est elle-même assez problématique.

Cependant, elle a été célébrée par ses contemporains avec un tel lyrisme que nous sommes bien forcés d'admettre qu'elle a fait preuve d'une réelle supériorité. Ils ont, d'ailleurs, vanté sa beauté, son éloquence et sa sagesse non moins que ses hautes capacités scientifiques.

Un de ses disciples les plus fervents, Synésius, devenu chrétien et évêque de Ptolémaïs, disait d'elle: << Elle est sainte et chère à la divinité. »

Tant de séduction, hélas, ne devait pas la soustraire à une horrible fin. Au cours d'un soulèvement populaire provoqué par les luttes religieuses qui déchiraient

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alors Alexandrie, la malheureuse fut arrachée de son char, traînée par une foule furieuse dans la Césarée, dépouillée de ses vêtements et tuée à coups de pierres. On ne saurait flétrir avec trop d'indignation ce crime abominable. Il faut toutefois reconnaître qu'il n'a pas peu contribué à faire revivre dans la mémoire des hommes la figure de la mathématicienne d'Alexandrie.

Mais, pour trouver des femmes ayant apporté une contribution appréciable à l'édification de la science telle que nous l'envisageons aujourd'hui, il nous faut

arriver au XVIIIe siècle.

Là, nous sommes tout d'abord arrêtés par l'intéressante figure d'Émilie de Breteuil, marquise du Châtelet, qui vécut de 1706 à 1749, et fut non moins célèbre comme savante que comme amie de Voltaire, ce Voltaire dont s'il faut croire Mme de Graffigny elle avait tourné la tête « avec de la géométrie » ; moyen de séduction assez peu banal, il faut en con

venir.

L'illustre écrivain, vous le savez, se piquait de n'être étranger à aucune des branches d'activité de la pensée humaine; il se mit même, un beau jour, en tête de rivaliser sur le terrain de la science, avec la marquise. Mais ses essais en će genre ne sauraient rien ajouter à sa gloire et ne lui ont rapporté que cette boutade de Clairaut : « Laissez les sciences à ceux qui ne peuvent pas être poètes. »

Sur ce terrain, Mme du Châtelet a eu, par rapport à lui, un avantage marqué sans pourtant s'élever jusqu'au rang de telles autres savantes dont je vous entretiendrai par la suite.

Douée d'une prompte et vive intelligence, elle avait su tirer fort bon parti des leçons de Maupertuis et de Clairaut, mais on ne peut guère dire que ses travaux fassent la preuve d'une réelle originalité. Celle de ses œuvres qui la recommande le plus à l'estime de la

postérité est sa traduction des Principes de Newton, traduction libre, d'ailleurs, et non servile, adaptation plutôt, intelligemment faite, et qui peut compter pour une œuvre de science.

Liée comme elle l'était avec Voltaire et occupant à un si haut point le monde de sa personnalité, il n'est pas étonnant que Mme du Châtelet ait été très diversement jugée par ses contemporains dont certains lui attribuent un véritable génie, alors que d'autres ne voient en elle que le simple reflet des hommes distingués dont elle avait su s'entourer. La vérité est bien probablement entre les deux opinions.

Il n'est pas jusqu'à son physique, loué par les uns, qui n'ait fait les frais de la malignité des autres. Ecoutez plutôt cette bonne langue de Mme de Graffigny:

<< C'était un colosse en toutes proportions; c'était une merveille de force ainsi qu'un prodige de gaucherie; elle avait des pieds terribles et des mains formidables; elle avait la peau comme une râpe à muscade; enfin la belle Émilie n'était qu'un vilain cent-suisse. »

Les images que nous connaisons de la marquise, même en faisant la part de la flatterie de l'artiste, nous incitent du reste à croire que ce portrait se distingue plutôt par sa méchanceté que par son exactitude. A supposer même que les traits d'Emilie eussent pu n'être pas d'une grande beauté, ils devaient s'éclairer de la flamme intérieure qui animait cette belle intelligence et - Mme de Graffigny aura beau dire nous ne nous figurerons jamais la grande amie de Voltaire avec la figure d'un épais troupier de la garde

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suisse.

Combien différente de la brillante marquise nous apparaît la douce et simple Marie Agnesi !

Née en 1718, à Milan, d'un père noble qui, mariẻ trois fois, avait eu vingt-trois enfants, Marie Agnesi avait, dès son plus jeune âge, fait montre des dons les

plus brillants de l'esprit. Très fier de cette enfant si précoce, et ayant lui-même le goût des sciences, son père ne se fit pas faute de mettre en relief les talents de Marie, alors qu'elle-même, douée de la plus parfaite modestie, n'aurait eu garde de s'en prévaloir, ainsi qu'elle en a fourni la preuve par la suite.

Le président de Brosses, qui eut l'occasion de la voir à Milan, alors qu'elle n'avait encore que dix-huit ans, nous a, dans une de ses lettres, laissé de cette entrevue un récit des plus piquants.

Introduit dans un bel et grand appartement » où la jeune Agnesi siégeait, à côté d'une de ses petites sœurs, au milieu d'une trentaine de personnes « de toutes les nations de l'Europe », de Brosses fut, à son tour, invité à disserter avec la jeune fille sur un sujet quelconque de philosophie ou de mathématiques, mais en latin afin d' « être compris de tout le monde ». En ce temps-là, le besoin de l'esperanto ne se faisait pas encore sentir.

« J'ai été fort stupéfait, dit-il, de voir qu'il me fallait haranguer impromptu et parler dans une langue dont j'ai si peu usage. Cependant, vaille que vaille, je lui ai fait un beau compliment ;... » Et il entreprit la jeune savante sur diverses questions empruntées à la philosophie et à l'optique; un autre assistant disserta avec elle sur les propriétés de certaines courbes géométriques. Et le narrateur fut émerveillé de ses réponses. « Elle a, dit-il, parlé comme un ange..... »

L'œuvre capitale de Marie Agnesi est la publication, en 1748, de ses Institutions analytiques qui ont contribué à donner définitivement la forme didactique aux principes de l'analyse infinitésimale, alors presque encore dans l'enfance. Le rapporteur chargé de présenter le livre à l'Académie des sciences de Paris put dire « Nous le regardons comme le traité le plus complet et le mieux fait qu'on ait en ce genre ». .

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